b) Une plus grande efficience de la dépense est souhaitable

• Les possibilités offertes par les reconversions de lits hospitaliers en établissements médicosociaux

Une première opportunité à saisir est celle de la restructuration de certains établissements hospitaliers en établissements médicosociaux (s'ajoutant au processus de partition en cours des unités de soins de longue durée - USLD - entre un maintien en USLD ou une transformation en Ehpad selon l'intensité en soins fournis aux patients).

En effet, de nombreuses études montrent qu'une partie des lits occupés à l'hôpital le sont d'une manière inadéquate, notamment par des personnes âgées : une optimisation de l'offre permettrait donc tout à la fois une maîtrise des coûts et une réponse plus adaptée aux besoins.

En se fondant sur certaines études émanant de la mission « Solidarité » de la révision générale des politiques publiques (RGPP) et sur les données fournies par le ministère du travail, des relations sociales, de la famille et de la solidarité, la mission évalue à environ 30 000 le nombre de lits susceptibles d'être transférés du secteur du court séjour hospitalier aux Ehpad. Ceci se traduirait par un transfert de 200 à 300 millions d'euros de l'Ondam sanitaire vers l'Ondam médicosocial et par une économie nette d'environ un milliard d'euros pour l'assurance maladie 222 ( * ) .

La mission ne minimise pas la complexité de ce processus, d'une part en raison de la nécessité de reconvertir les personnels actuellement employés en court séjour ; ensuite, parce que les redéploiements à effectuer concernent notamment des CHU, dont les lits ne pourront pas être reconvertis in situ . Ceci signifie que certaines places devront être transférées, comme l'AP-HP a commencé à le faire en apportant des terrains aux Ehpad sous forme de baux emphytéotiques et en mettant également à disposition des personnels.

A ce stade, la mission s'interroge sur les moyens qui pourraient faciliter les évolutions nécessaires. La mise en place des agences régionales de santé, qui auront compétence sur les deux champs, sanitaire et médicosocial, sera un élément déterminant.

Au-delà, on peut également envisager de créer des outils de « fluidification », par exemple réorienter le fonds pour la modernisation des établissements de santé publics et privés (FMESPP) vers le financement des restructurations et des conversions de structures.

• Améliorer la gestion de l'Ondam médicosocial

La mission estime que les possibilités de redéploiement au sein même de l'Ondam médicosocial doivent également être explorées.

Elle a noté précédemment que l'objectif de dépenses « personnes âgées » est caractérisé, depuis l'origine, par des excédents non consommés , dont le montant atteint aujourd'hui 400 à 500 millions d'euros par an.

Une partie est aujourd'hui réutilisée en aide à l'investissement, mais la mission estime qu' une réflexion d'ensemble sur leur emploi s'impose.

• La mise en place de forfaits uniques et de contrôles renforcés

La mission prône ensuite la généralisation du forfait global et, au-delà, la mise en place de forfaits uniques couvrant l'ensemble des dépenses de soins produites par les pensionnaires accueillis en Ehpad, y compris les soins de ville qui font l'objet de contrôles jusqu'à présent insuffisants, ainsi que l'a rappelé le directeur de la Cnam, Frédéric Van Roekeghem.

La mission a toutefois pris note de la volonté affichée par l'assurance maladie d'engager une politique de contrôle spécifique des établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes, afin notamment d' éviter des risques de double facturation de certains actes qui pourraient être pris en charge une première fois dans le cadre des forfaits soins, puis une seconde fois dans le cadre du remboursement des soins de ville.

Elle souhaite plus globalement que les obligations pesant sur les directeurs d'Ehpad soient renforcées.

En application de l'article R. 314-169 du code de l'action sociale et des familles, un Ehpad est, en effet, tenu d'adresser chaque semestre la liste de ses résidents à la caisse primaire d'assurance maladie (Cpam) qui correspond à son lieu d'implantation. Toutefois, en pratique, ce dernier ne transmet que rarement ces informations à sa Cpam 223 ( * ) . De leur côté, les Cpam n'ont pas développé d'applicatifs qui permettent de recueillir ces données. Il n'est donc pas possible aujourd'hui de connaître de manière exhaustive les interventions des professionnels de santé dans un Ehpad et, par conséquent, de contrôler les dépenses qui y sont réalisées sur financement de l'Ondam soins de ville.

Jusqu'à présent, les Ehpad ne respectant pas les obligations définies par le code de la sécurité sociale et le code de l'action sociale et des familles, et notamment le principe de remontées d'information aux caisses, ne se voyaient appliquer aucune sanction. L'article 88 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2007 a finalement étendu aux Ehpad le dispositif des pénalités administratives introduit par la réforme de l'assurance maladie et défini par l'article L. 162-1-14 du code de la sécurité sociale. Le décret d'application n'a cependant pas été pris à ce jour.

La mission juge indispensable de réaffirmer l'obligation pesant sur les directeurs d'Ehpad et de publier le décret permettant des sanctions en cas de manquement.

• La convergence des tarifs des établissements

Une autre possibilité d'amélioration de l'efficience de la gestion réside dans la convergence des tarifs des établissements.

En effet, 20 % à 25 % des établissements hébergeant des personnes âgées dépendantes bénéficient actuellement, sur des bases exclusivement historiques, de ressources en réalité supérieures à ce qu'autoriserait l'application stricte d'une tarification fondée sur l'outil Pathos.

L'obligation qui leur serait faite de ramener progressivement, sur une durée d'environ cinq ans, leur dotation « soins » au niveau des tarifs plafonds prévus dans le cadre de la tarification Pathos ou bien d'augmenter leur service rendu en prenant en charge des résidents plus lourdement dépendants à budget constant permettrait de réaliser une économie de 350 millions d'euros.

La mission considère que cette mesure devrait s'appliquer aussi bien aux Ehpad qu'aux unités de soins de longue durée (USLD) , qui disposent du même système tarifaire. Elle est toutefois consciente que la mise en oeuvre de cette mesure requiert une très forte volonté politique .

Il conviendrait également, dans le même ordre d'idée, de revenir sur la règle qui garantit aux Ehpad issus de la partition d'USLD le maintien de leurs taux d'encadrement (règle dite du « per capita » dans les USLD partitionnées).

Cette convergence des tarifs entre les établissements médicosociaux permettrait de traiter les besoins de manière plus équitable et plus efficiente.

• La mise en place d'un référentiel de coûts des établissements

Enfin, au-delà des financements nouveaux à mobiliser pour réduire les restes à charge, la mission juge nécessaire d'établir des garde-fous, afin d'éviter que les ressources supplémentaires ne soient absorbées par les établissements, sans profiter à leurs destinataires.

En effet, à la création de l'Apa, les bénéficiaires en établissement n'ont vu leurs charges s'alléger que du quart des ressources publiques nouvellement octroyées, le reste étant « capté » par les établissements.

La mission se montre donc particulièrement attentive sur ce point , qui plus est dans un contexte où l'essentiel des nouvelles places créées le sont dans le secteur lucratif privé, qui finance ses marges grâce au tarif hébergement.

Elle estime que l'établissement de référentiels de coûts des établissements, qui n'existent pas actuellement, est une mesure indispensable. On peut également imaginer que ces référentiels puissent, par la suite, être rendus opposables , mais ceci supposerait que des mesures de contrôle de l'évolution des prix d'hébergement soient mises en place, au-delà du simple agrément à l'ASH.

* 222 En réalité, la fourchette d'économie nette pour l'assurance maladie va de 750 millions d'euros à 1,25 milliard d'euros.

* 223 Ce point a notamment été soulevé devant la mission par le directeur de la Cnam, lors de son audition, le 6 février 2008.

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