N° 63

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2008-2009

Annexe au procès-verbal de la séance du 29 octobre 2008

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur la gestion de l' aide juridictionnelle par les caisses autonomes de règlements pécuniaires des avocats ( CARPA ) ,

Par M. Roland du LUART,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Jean Arthuis , président ; M. Yann Gaillard, Mme Nicole Bricq, MM. Jean-Jacques Jégou, Thierry Foucaud, Aymeri de Montesquiou, Joël Bourdin, François Marc, Alain Lambert , vice-présidents ; MM. Philippe Adnot, Jean-Claude Frécon, Mme Fabienne Keller, MM. Michel Sergent, François Trucy , secrétaires ; M. Philippe Marini, rapporteur général ; Mme Michèle André, MM. Bernard Angels, Bertrand Auban, Denis Badré, Mme Marie-France Beaufils, MM. Claude Belot, Pierre Bernard-Reymond, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Yvon Collin, Philippe Dallier, Serge Dassault, Jean-Pierre Demerliat, Éric Doligé, André Ferrand, Jean-Pierre Fourcade, Christian Gaudin, Adrien Gouteyron, Charles Guené, Claude Haut, Edmond Hervé, Pierre Jarlier, Yves Krattinger, Gérard Longuet, Roland du Luart, Jean-Pierre Masseret, Marc Massion, Gérard Miquel, Albéric de Montgolfier, Henri de Raincourt, François Rebsamen, Jean-Marc Todeschini, Bernard Vera.

Mesdames, Messieurs,

Depuis plusieurs années, l'aide juridictionnelle (AJ) constitue un sujet d'inquiétude partagé entre la profession d'avocat, la Chancellerie et le Parlement, en particulier au sein de votre commission des finances.

Les enjeux de la question apparaissent aisément dès lors qu'est rappelé le nombre total d'admissions prononcé en 2007 (894.409) et la prévision pour 2008 (886.000) 1 ( * ) . En 2008, le budget consacré à l'AJ représentait 4,9 % des crédits dédiés à la justice pour un montant total de 318,2 millions d'euros. En 2009, le projet annuel de performances de la mission « Justice » prévoit une enveloppe de 300 millions d'euros à laquelle devrait s'ajouter un rétablissement de crédits à hauteur de 13 millions d'euros au titre d'un meilleur recouvrement des dépenses d'AJ 2 ( * ) .

Dans son rapport d'information « L'aide juridictionnelle : réformer un système à bout de souffle » 3 ( * ) , votre rapporteur spécial rappelait en introduction la double crise de l'AJ : « une crise financière doublée d'une crise morale » . Face à un accroissement considérable du nombre des missions d'AJ depuis 1991 (+ 159,5 %) et à l'emballement des dépenses budgétaires consacrées à cette aide (+ 391,3 % entre 1991 et 2006), votre rapporteur spécial avait, en effet, souhaité poser un diagnostic sur ce dispositif, réformé par la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

La réforme suggérée s'articulait, notamment, autour des principes de transparence et de responsabilité , s'appliquant à tous les acteurs du système.

A cette occasion, il avait souligné le rôle pivot des caisses de règlements pécuniaires des avocats (CARPA) dans le processus de rétribution des avocats accomplissant des missions d'AJ.

Certaines zones d'ombre subsistaient néanmoins sur l'organisation et le fonctionnement de ces caisses amenées à manier des fonds publics. Des doutes sur l'optimisation de la gestion des crédits d'AJ transitant par les CARPA demeuraient également.

Ces éléments d'incertitude, qui pouvaient laisser planer une certaine ambiguïté dont auraient nuit tant la profession d'avocat que le ministère de la justice, appelaient une réponse de la part de votre commission. C'est dans ces conditions, et avec l'ambition d'apporter toute la clarté nécessaire à cette question, que votre commission des finances a demandé, en application des dispositions de l'article 58-2° de la loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF), à la Cour des comptes de réaliser une enquête sur la gestion de l'AJ par les CARPA.

Cette enquête a été adressée à votre commission des finances le 11 septembre 2008 .

Le travail de la Cour des comptes permet de dresser un diagnostic d'ensemble et de dégager un certain nombre de pistes de réforme , d'importance inégale mais contribuant toutes à une meilleure « fluidité » et à une fiabilité encore plus grande du système aujourd'hui existant.

I. LES CARPA AU CoeUR DE LA CHAÎNE DE L'AIDE JURIDICTIONNELLE

Les CARPA se situent au coeur même de la chaîne de l'AJ entretenant des relations non seulement, et naturellement, avec les barreaux (il peut arriver que le bâtonnier de l'ordre soit également le président de la CARPA, comme c'est par exemple le cas à Paris), mais aussi avec l'administration centrale du ministère de la justice ainsi que le bureau d'aide juridictionnelle (BAJ) et le greffe de chaque juridiction.

A. UN ORGANISME CRÉÉ À L'INTIATIVE DE L'ORDRE DES AVOCATS

L'existence législative des CARPA s'ancre dans la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques, même si leur origine remonte à 1956.

A chaque barreau correspondait ainsi, sous l'empire de la loi précitée, une CARPA. Le décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat, définit, en outre, les règles applicables notamment aux CARPA.

La création d'une CARPA au sein d'un barreau résulte d' une délibération du Conseil de l'ordre ou, lorsque la caisse est commune à plusieurs barreaux, d'une délibération conjointe des conseils de l'ordre des barreaux intéressés.

La CARPA est constituée sous la forme d'une association régie par la loi du 1 er juillet 1901 et se retrouve placée sous la responsabilité du ou des barreaux qui l'ont instituée.

Au total, la profession compte aujourd'hui 152 CARPA regroupant la totalité des 182 barreaux (174 barreaux en métropole, 5 barreaux dans les DOM ainsi qu'à Papeete et Nouméa, le barreau de Mayotte n'étant pour sa part associé à aucune CARPA).

* 1 Source : projet annuel de performances de la mission « Justice » pour 2009.

* 2 L'article 43 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 prévoit que les frais avancés au titre de l'AJ sont recouvrables contre l'adversaire du bénéficiaire de l'AJ, condamné aux dépens et qui ne bénéficie par lui-même de l'AJ. Ce dernier est tenu, sauf dispense totale ou partielle du juge, de rembourser au Trésor public, dans la proportion des dépens mis à sa charge, les sommes avancées par l'Etat au titre de l'AJ.

* 3 Sénat, rapport d'information n° 23 (2007-2008).

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