• LE PARTAGE DES DÉCISIONS ENTRE L'ADMINISTRATION ET LA COFACE

Il convient de décrire brièvement ici le fonctionnement des structures de décision et le système des délégations permettant aux services de la Coface d'instruire des dossiers sans en référer préalablement à l'administration.

1- Les structures collégiales de décision dans lesquelles l'administration est représentée

Un organe d'instruction exceptionnel : le comité d'études des affaires importantes

Pour assurer l'instruction des dossiers les plus importants, un comité d'étude des affaires importantes (CEAI) a été mise en place. Ce comité, présidé par le sous-directeur du « développement International des Entreprises » (ou Devinter) de la direction générale du Trésor et de la politique économique (DGTPE) 7 ( * ) , est composé du chef du bureau assurance-crédit qui agit en qualité de Secrétaire général, des représentants des bureaux géographiques de la DGTPE (Asiam/Euramo) et éventuellement, d'experts techniques concernés par les affaires inscrites à l'ordre du jour, du directeur du moyen terme, de son adjoint ou d'un responsable de sous-direction de la DMT. Le CEAI examine les affaires les plus importantes en vue d'élaborer une orientation de décision préalablement à la présentation de l'affaire en commission des garanties. Relèvent du CEAI :

1) les opérations en instruction d'un montant en part rapatriable :

- supérieur à 80 millions d'euros sur les pays des catégories 8 ( * ) 1 et 2 ;

- supérieur à 60 millions d'euros sur les pays des catégories 3, 4 et 5 ;

- supérieur à 40 millions d'euros sur les pays des catégories 6 et 7.

2) les opérations en instruction présentant, même si elles ne respectent pas les critères ci-dessus, une difficulté spécifique à la demande, soit de la DGTPE, soit de la Coface.

D'après les informations recueillies par la Cour, douze affaires par an environ sont traitées dans le cadre de la procédure CEAI.

Composition et rôle de la commission des garanties

Les membres issus de l'administration et l'« équilibre des pouvoirs » au sein de la commission

La commission des garanties est présidée par le chef du bureau assurance-crédit de la DGTPE relevant de la sous-direction Devinter. Elle est composée des représentants des bureaux géographiques de la DGTPE concernés par les affaires inscrites à l'ordre du jour, d'un représentant de la direction du Budget (DB), d'un représentant de la direction générale des entreprises (DGE), et parfois d'un représentant du ministère de l'écologie, du développement et de l'aménagement durable (MEDAD), ou d'un représentant du ministère des Affaires étrangères, selon la nature des dossiers à examiner.

Deux modifications sont intervenues dans le fonctionnement de la commission des garanties au cours de la période examinée par la Cour et ont eu une répercussion sur l'équilibre interne de cette instance.

La première modification est liée à la mise en place en novembre 2004 de la DGTPE. Jusqu'alors, un représentant de la direction du Trésor et un représentant de la DREE participaient aux réunions de la commission des garanties. Le représentant de la direction du Trésor pouvait interrompre le processus d'examen et de validation d'un dossier en décidant de saisir le ministre à ce sujet. Cette réserve avait alors un effet bloquant ou suspensif sur la prise de décision. La situation est aujourd'hui différente puisque le président de la commission des garanties est le chef du bureau assurance-crédit de la DGTPE, sous-direction Devinter (ex-DREE). Le ministre des Finances lui donne délégation pour signer les comptes-rendus de la commission des garanties.

Une deuxième modification indirecte résulte de la division du ministère des Finances intervenue en juin 2007 : la direction du Budget qui est représentée au sein de la commission des garanties, dépend du ministère du Budget, des comptes publics et de la fonction publique, tandis que la DGTPE dépend du ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi. Le président de la commission (provenant de la DGTPE) peut décider de faire remonter un dossier au ministre des Finances pour des sujets sensibles, afin de recueillir son avis, même si juridiquement, celui-ci n'est pas obligatoire.

Lors de l'audition organisée par la Cour le 27 juin 2007 et ayant réuni les représentants de la Coface et ceux des tutelles, le représentant de la DGTPE a indiqué que dans la période récente, un à deux dossiers par mois sont en moyenne envoyés au ministre de l'économie pour arbitrage. Les dossiers concernés peuvent, selon les cas, être adressés au cabinet du ministre pour arbitrage en amont du passage en commission des garanties, ou bien après cette réunion.

En cas de divergences de vue entre le représentant de la direction du Budget et celui de la DGPTE apparues en cours d'examen en commission des garanties, la situation est plus complexe qu'auparavant : le représentant de la direction du Budget peut en effet faire remonter le cas à « son » ministre et celui de la DGTPE au sien. S'il y a nécessité d'arbitrage, celui-ci aura désormais lieu au niveau du Premier ministre, et non au niveau du ministre des Finances, comme auparavant. A ce jour cette procédure, très lourde, n'a pas été utilisée.

La direction du Budget estime dans ses réponses à la Cour qu' « il serait souhaitable qu'un accord entre les deux nouvelles entités ministérielles organise un processus de suspension de la décision de la commission des garanties et d'arbitrage conjoint au niveau des deux ministres, à charge pour les deux directions de limiter au maximum les cas d'applications ».

D'une manière générale, avant la fusion entre la DREE et la direction du Trésor, le rôle de la tutelle résultait d'un équilibre entre trois pôles prenant chacun en charge des fonctions clairement réparties : la promotion des entreprises exportatrices était assurée sous la responsabilité de la DREE ; l'évaluation de la situation financière des entreprises candidates, ainsi que les risques pays, était effectuée sous le contrôle du Trésor ; la protection des deniers publics était, classiquement, dévolue à la direction du Budget. Dans l'organisation résultant de la fusion entre la direction du Trésor et la DREE, il apparaît que la DGTPE s'intéresse en priorité à la promotion des entreprises exportatrices. La direction du Budget continue certes de jouer son rôle de protecteur des deniers publics, mais semble, dans la réalité, avoir perdu du poids dans la prise de décision.

Lors des réunions de la commission des garanties, la Coface est quant à elle représentée par le directeur du moyen terme ou son adjoint, les responsables de sous-directions des services géographiques concernés, le plus souvent accompagnés d'un représentant du service géographique qui présente les affaires aux membres de la commission.

La commission des garanties se réunit en principe tous les 15 jours. C'est le président de la commission qui, en dernier ressort, confirme ou modifie la proposition de décision à l'issue du débat. La DGTPE joue un rôle décisif sur ce point. En cas de contestation, la direction du Budget, toujours consultée dans les débats de la commission, peut émettre des réserves, voire saisir son ministre. Une fois signés, les avis de la commission des garanties deviennent des décisions qui peuvent alors être notifiées aux assurés.

Tableau n° 1 : Décisions prises par la commission des garanties (sur demandes initiales, prorogatives ou modificatives)

Année

2002

2003

2004

2005

2006

2007

Nombre de décisions

1 227

956

1 138

1 081

939

772

Source : La Coface

L'examen de certaines opérations peut être ajourné par la commission ou renvoyé en commission plénière, si la commission des garanties ne s'estime pas en mesure de statuer, compte tenu notamment de leur complexité, de leur caractère sensible au regard de la politique crédit ou du risque pays.

Composition et rôle de la commission plénière

Celle-ci est composée des mêmes membres que pour la commission des garanties « normale » mais elle est présidée par le sous-directeur du « Développement international des entreprises » (Devinter) de la DGTPE, le chef de bureau Assurance-crédit intervenant alors en qualité de Secrétaire général.

La commission plénière se réunit en principe le lundi suivant la réunion de la commission « normale » ; elle émet un avis sur les affaires pour lesquelles la commission ne s'est pas estimée en mesure d'en formuler un. Un relevé de décisions reprenant les avis de la commission (et de la commission plénière) est adressé par la Coface à la DGTPE pour signature du directeur de la DGTPE. D'après les informations données à la Cour par les services de la Coface, un nombre très réduit de dossiers fait l'objet d'un examen en commission plénière.

2- Les dossiers pour lesquels la Coface bénéficie d'une délégation

Le principe

La répartition des dossiers entre ceux qui sont traités directement par la Coface par délégation et ceux qui doivent impérativement passer en commission des garanties fait l'objet d'une « question de principe », arrêtée en commission des garanties. La dernière en date concernant l'assurance-crédit est celle du 4 novembre 2004. Elle fixe une nouvelle grille de délégations en fonction du montant de l'opération, de la durée de crédit et du niveau de risque du pays.

Au total, la délégation de décision représente 80% des affaires en volume mais seulement 20% en valeur. Dans ce cas, la Coface décide seule et la DGTPE est informée périodiquement a posteriori des décisions prises en délégation (sous la forme d'un relevé de décision récapitulatif tous les quinze jours). Les 20% restant (80% en valeur) correspondent aux dossiers examinés en commission des garanties. C'est alors toujours la Coface qui instruit le dossier, mais la décision en opportunité revient, de fait, à la DGTPE.

Les dossiers qui, du fait de leurs caractéristiques, ne relèvent pas d'une délégation sont examinés en commission des garanties. Parmi ces affaires, la répartition est, d'après les informations recueillies, globalement la suivante : 20% des dossiers concernent des contrats militaires ; 30% des dossiers sont de nature « sectorielle », dont 25% concernent Airbus et 5% d'autres dossiers (navires, avions de transport régionaux, satellites) ; 50% des dossiers portent sur l'ensemble des autres secteurs.

Les seuils de délégation applicables

De 2002 à 2004, les seuils de délégation à la Coface, sans distinction par nature de procédure, étaient les suivants :

Tableau n° 2 : Seuils de délégation applicables de 2002 à 2004

Catégories de prime pays

Montant de l'opération

Durée de crédit

1 et 2

60 millions d'euros

= 7 ans

3 et 4

20 millions d'euros

= 7 ans

5 et 6

13 millions d'euros

= 5 ans

7

1,5 million d'euros

= 5 ans

Source : La Coface

De nouvelles limites ont été fixées, en durée et en montant, pour chaque catégorie de pays à partir du 4 novembre 2004 :

Tableau n° 3 : Seuils de délégation applicables depuis le 4 novembre 2004

Classification des pays

Montant en part rapatriable

Durée du crédit

Pays de catégorie 1 et 2

60 millions d'euros

7 ans

Pays de catégorie 3 et 4

20 millions d'euros

7 ans

Pays de catégorie 5 et 6

10 millions d'euros

7 ans

Pays de catégorie 7

1,5 million d'euros

7 ans

Source : La Coface

Le seuil de délégation en part rapatriable a été abaissé pour les pays de catégorie 5 et 6 et la durée de crédit assouplie et uniformément fixée à 7 ans.

Cette évolution s'est traduite par un accroissement du nombre de dossiers traités par délégation, selon une évolution jugée satisfaisante par les services de la Coface et la DGTPE.

Les décisions sur les dossiers se partagent entre l'administration et la COFACE qui agit par délégation. S'agissant des procédures publiques, la répartition du traitement des dossiers entre ceux qui peuvent être traités directement par la Coface grâce au système des délégations et ceux pour lesquels la commission des garanties doit statuer fait l'objet d'une « question de principe », elle-même arrêtée en commission des garanties. Au total, la délégation de décision représente 80% des affaires en nombre de dossiers, mais seulement 20% en valeur, s'agissant des dossiers gérés par la DMT. Dans ce cas, la Coface décide seule et la DGTPE est informée périodiquement a posteriori des décisions prises en délégation (sous la forme d'un relevé de décision récapitulatif tous les quinze jours). Les 20% de dossiers restants (80% en valeur) sont examinés en commission des garanties. La Coface instruit alors le dossier mais la décision en opportunité revient, de fait, à la DGTPE.

Avant la fusion entre la DREE et la direction du Trésor en novembre 2004, le rôle de la tutelle résultait d'un équilibre entre trois pôles prenant chacun en charge des fonctions clairement réparties : la promotion des entreprises exportatrices était assurée sous la responsabilité de la DREE ; l'évaluation de la situation financière des entreprises candidates, ainsi que les risques pays, était réalisée sous le contrôle du Trésor ; la protection des deniers publics était, classiquement, dévolue à la direction du Budget. Dans l'organisation résultant de la fusion entre la direction du Trésor et la DREE, il apparaît que la DGTPE s'intéresse en priorité à la promotion des entreprises exportatrices.

Par ailleurs, la division du ministère des Finances depuis juin 2007 et le rattachement de la direction du Budget au ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique, ne laisse plus, en cas de désaccord entre la DGTPE et la direction du Budget que la possibilité d'un arbitrage auprès du Premier ministre qui jusqu'à présent n'a jamais été sollicité. Le poids de la direction du Budget dans les décisions en a été atténué, celui de la DGTPE renforcé.

3- Typologie des services

Les services et personnels qui travaillent exclusivement pour la gestion des procédures publiques :

Il s'agit de la direction du moyen terme (DMT) et de la direction de l'assurance-prospection (DAP).

Les services et personnels dont les tâches sont complètement séparées de cette gestion et qui sont par conséquent uniquement impliqués dans les activités pour compte propre

Il s'agit de la direction de la souscription des risques, la direction de l'Organisation Coface, la direction du contentieux, la direction des Risques Coface, la direction du suivi de clientèle et marketing et de la direction internationale et marketing Coface.

Les services et personnels qui sont partiellement mobilisés pour contribuer à cette gestion

Il s'agit, au-delà du président du Conseil, du directeur général et de la secrétaire générale, de la direction commerciale, la direction de l'audit, la direction du contrôle de gestion, la direction des systèmes d'information, la direction des ressources humaines et de l'administration, la direction de la communication, la direction des affaires juridiques et de la conformité et la direction financière.

4- Les personnels mobilisés pour la gestion des procédures publiques

Effectifs globaux

Les effectifs de Coface SA sont restés globalement stables au cours de la période examinée par la Cour, passant de 1238 agents fin 2002 à 1209 agents fin 2006, puis 1247 agents fin 2007 . Les effectifs affectés aux procédures publiques ont diminué de façon significative sur la période 2003 à 2006. Les effectifs opérationnels sont ainsi passés de 321 postes (hors court terme) en 2003, à 298 en 2006, soit une baisse de 7%.

Le recrutement d'un « potentiel d'employabilité » au sein de tous les services de la Coface

La direction des ressources humaines ne fait pas de distinction entre les personnels Coface en charge du compte propre et ceux mobilisés pour le compte des procédures publiques. Certaines personnes sont affectées à la DMT et la DAP, mais ce sont les mêmes que les autres en termes de « profil ». Il n'existe aucune différence en termes de gestion entre les deux « populations » (personnels du compte propre et ceux du compte État). D'une manière générale, la Coface recrute un potentiel susceptible d'être employé aussi bien en compte propre que pour le compte État 9 ( * ) .

Le « profil » des personnels affectés à la DMT et à la DAP

Les personnels en poste à la DMT et à la DAP constituent le vivier des agents en charge de l'application quotidienne des instructions de l'État. Les profils et les cursus universitaires de ces personnels sont restés les mêmes au cours de la période examinée. Les agents recrutés ont généralement une formation de niveau master (bac+5) ; ils ont suivi un cursus universitaire à dominante droit des affaires, finances ou commerce international, ou sont issus d'écoles de commerce et d'instituts d'études politiques.

Si le profil des agents a peu évolué, une orientation et une formation plus commerciales a été donnée aux agents de la DMT dans la période récente. Au cours de la période examinée par la Cour, de nombreuses actions de formation ont par ailleurs été menées auprès des personnels affectés à la DMT et à la DAP. On peut notamment citer les actions de formation à l'analyse financière et au développement de la relation commerciale.

* 7 La DGTPE a été créée par le décret n° 2004-1203 du 15 novembre 2004. Elle regroupe trois anciennes directions du ministère de l'Économie des finances et de l'industrie : la direction du Trésor, la direction des Relations économiques extérieures (DREE), la direction de la Prévision et de l'analyse économique.

* 8 Au sens de la typologie définie par l'OCDE qui classifie les pays en sept groupes de risque (le groupe 1 étant le moins risqué).

* 9 La procédure de recrutement associe la direction de recrutement et une direction proche, afin de recruter des profils susceptibles d'évoluer d'une fonction à l'autre. Cette procédure collégiale de recrutement concerne les cadres débutants. Au cours du processus de recrutement, les candidats rencontrent un salarié PSD (personnel supérieur de direction) d'une autre direction (où les candidats pourraient potentiellement évoluer) et ce dernier a son mot à dire dans la sélection.

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