ANNEXE - COMMUNICATION DE LA COUR DES COMPTES À LA COMMISSION DES FINANCES DU SÉNAT SUR LA GESTION DES PROCÉDURES PUBLIQUES DE LA COFACE

COMMUNICATION À LA COMMISSION DES FINANCES, DU CONTROLE BUDGETAIRE ET DES COMPTES ECONOMIQUES DE LA NATION DU SENAT

Article 58-2° de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances

La gestion des procédures publiques de la COFACE

Par lettre en date du 10 octobre 2007, le Président de la commission des Finances du Sénat a demandé au Premier président de la Cour des Comptes, en application de l'article 58-2° de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances, la réalisation d'une enquête dont le thème était ainsi libellé :

« La COFACE : transparence, coût et efficacité des procédures publiques de garantie qui lui sont confiées, et gestion et comptabilisation des créances d'aide publique au développement portées par cet organisme »

Conformément à la demande qui lui était faite, la Cour a fait porter ses investigations sur la gestion par la Coface des procédures publiques qui lui sont confiées et son intervention en matière d'aide publique au développement. La Cour s'est particulièrement attachée à évaluer le fonctionnement des trois principales procédures publiques, à savoir l'assurance-prospection, l'assurance-crédit et la garantie des changes. Les observations de la Cour ont donné lieu à contradiction écrite et orale.

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Le présent rapport traite successivement des points suivants :

la transparence du processus de décision en matière de procédures publiques gérées par la Coface, à travers les moyens, les procédures de décision et l'organisation ;

l'efficacité des procédures gérées par la Coface et examinées par la Cour ;

le coût de ces procédures à travers :

d'une part, leur comptabilisation et le compte des procédures publiques,

d'autre part, les relations financières avec l'État,

enfin, le traitement de l'aide publique au développement.

I. LE RÔLE DE LA COFACE : UN PRESTATAIRE DE SERVICES POUR LE COMPTE ET AVEC LA GARANTIE DE L'ÉTAT

• LE CADRE DE L'INTERVENTION DE LA COFACE POUR LE COMPTE DE L'ETAT

1- La séparation entre les activités pour compte propre et les activités pour le compte de l'État

Créée en 1946, la Compagnie française d'assurance pour le commerce extérieur (Coface) a été privatisée en mai 1994. Natexis Banques populaires (désormais Natixis) est devenu actionnaire majoritaire en 2002 ; depuis 2004, il détient 100% des actions de la Coface.

Depuis sa création, la Coface agit soit pour son propre compte dans les opérations dites de marché, soit pour le compte de l'État, dont elle est l'instrument de gestion des polices à moyen terme et des risques politiques. Dans le premier cas, elle engage sa propre responsabilité financière. Dans le deuxième, elle est assureur-crédit pour le compte et avec la garantie de l'État, dans le cadre de la politique de soutien aux exportations françaises.

L'importance des activités pour le compte de l'État se mesure aux éléments financiers publiés par le groupe Coface. Le bilan consolidé du groupe, qui ne reprend pas les procédures publiques, fait apparaître un total de l'actif de 6,571 milliards d'euros au 31 décembre 2007 et 5,197 milliards d'euros au 31 décembre 2006, à comparer à 14,830 milliards d'euros pour le total de l'actif figurant au bilan du compte des procédures publiques gérées par la Coface. Le total actif figurant au bilan du compte des procédures publiques est donc à peu près trois fois supérieur à celui apparaissant au bilan consolidé de la Coface pour son compte propre.

Le cadre juridique des opérations effectuées par la Coface avec la garantie de l'État est défini par un ensemble de dispositions législatives et réglementaires codifiées dans le code des assurances. Depuis 1946, la Coface gère, pour le compte de l'État, une large gamme de garanties destinées à favoriser et soutenir les exportations françaises dans le cadre des dispositions des articles L. 432-1 à L. 432-4 du code des assurances. Il s'agit d'assurer des risques, en général non assurables par le marché privé, au bénéfice des entreprises qui prospectent les marchés à l'exportation et commercialisent des produits et services. La Coface gère également les accords conclus dans le cadre du Club de Paris pour consolider les dettes publiques contractées par les pays débiteurs 5 ( * ) .

Actuellement, les procédures les plus importantes en termes de charges de travail et de nombre de contrats à gérer pour les services de la Coface sont l'assurance-crédit (en 2006, 6257 dossiers gérés au total), l'assurance-prospection (1177 dossiers gérés en 2006) et la garantie des changes (431 dossiers gérés en 2006). Le présent rapport s'attache en particulier à évaluer la transparence, l'efficacité et le coût de ces trois procédures.

2- Les opérations assurées par la Coface pour le compte de l'État

Dans le cadre de ces différentes procédures, la Coface instruit les demandes de garantie qui lui sont directement adressées. Les décisions d'octroi de la garantie sont prises par l'autorité administrative, agissant sur délégation du ministre des Finances, sur avis de la commission des garanties. Les décisions peuvent également être prises par la Coface, agissant par voie de délégation, pour des dossiers dont les montants sont limités.

La Coface, agissant comme assureur, délivre en son propre nom les contrats d'assurance, conformément à la décision qui a été prise par l'administration ou par elle-même, pour le compte de l'État.

Elle est chargée de la gestion des contrats, et notamment de l'instruction des demandes d'indemnisation. Elle perçoit les primes d'assurance et les reversements dus par les assurés, et verse les indemnités pour le compte de l'État. Les risques afférents à cette procédure sont pris en charge par l'État : l'ensemble des flux financiers relatifs à cette procédure (primes, indemnités, reversements) font l'objet, auprès de la Coface, d'un enregistrement comptable distinct. Les primes et reversements perçus par Coface sont enregistrés directement dans le compte des procédures publiques et les indemnités payées par la Coface sont imputées sur ce même compte, sans aucun passage par les comptes de cette dernière.

3- Un principe de subsidiarité

La frontière entre les assurances à l'exportation relevant de l'État et ce qui doit rester du ressort du marché est déterminée par le principe de subsidiarité. L'État ne doit intervenir que pour pallier les insuffisances du marché. Le partage entre compte propre qui relève du marché et le compte des procédures publiques, a évolué au fil du temps en fonction du développement du marché de la réassurance. A l'origine,

- le marché privé (et donc la Coface en compte propre) assurait le risque commercial à moins d'un an (court terme) ;

- l'État couvrait le risque commercial à plus d'un an (moyen et long termes) et le risque politique, quelle que soit sa durée.

A la fin des années 1990, ce partage a été modifié du fait du développement du marché privé de la réassurance des risques politiques à court terme. La Coface a progressivement repris en compte propre le risque politique à moins d'un an : sur les pays de l'Union européenne d'abord, les pays de l'OCDE ensuite, et les autres pays enfin. Aujourd'hui, seuls deux pays pour lesquels le marché de la réassurance est insuffisamment développé sont encore pris en charge par le compte des procédures publiques pour le risque politique à court terme : le Liban et Cuba. L'Iran l'était également jusqu'à une date récente. La définition du court terme a également été revue en 2004 avec le passage de un à deux ans. La ligne de partage est désormais la suivante :

- le marché privé se charge de la couverture du risque commercial et politique jusqu'à deux ans (sauf le Liban et Cuba) ;

- l'assurance-crédit publique intervient pour le risque commercial et politique au-delà de deux ans (moyen et long termes). Les contrats d'assurance-crédit publics durent 7 ans en moyenne pour une durée maximale de 15 à 20 ans.

En pratique, ces règles de partage donnent lieu à des aménagements au cas par cas. Un assuré peut être en position de choisir entre un produit public et un produit privé pour un même risque.

4- Les contraintes liées aux spécificités de l'assurance-crédit publique

Il peut arriver, dans certains cas, que l'État refuse d'assurer alors que la Coface accepte le risque en compte propre. Le marché privé n'est pas, en effet, tenu de respecter certaines contraintes inhérentes aux procédures publiques, comme la contrainte nationale ou environnementale.

La contrainte nationale correspond à l'objectif des procédures publiques qui consiste à soutenir les exportations françaises. Un des critères de décision, ainsi qu'on le verra, est non-dépassement de la « part étrangère 6 ( * ) » (plafonds variables selon le montant du contrat).

La contrainte environnementale se traduit par la recommandation OCDE sur « des approches communes concernant l'environnement et les crédits à l'exportation bénéficiant d'un soutien public » . Une étude d'impact environnemental préalable est nécessaire pour bénéficier de l'assurance publique. Deux ingénieurs à plein temps se consacrent à ces aspects au sein de la Coface pour le compte État.

Il convient également de mentionner la lutte contre la corruption qui a donné lieu à la « Convention OCDE sur la lutte contre la corruption d'agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales » en date du 17 décembre 1997. Les assurés bénéficiant des procédures publiques doivent s'engager par écrit à ne pas avoir recours à la corruption. S'il est avéré qu'ils n'ont pas respecté cet engagement, ils ne sont pas indemnisés en cas de sinistre et les primes déjà versées à la Coface ne sont pas récupérables. Ce dispositif joue, selon la direction du moyen terme (DMT), un rôle préventif important.

* 5 Voir développements consacrés à la gestion et à la comptabilisation des créances au titre de l'aide publique au développement figurant dans le présent rapport.

* 6 Proportion de composantes non-françaises dans le produit exporté.

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