TRAVAUX DE LA COMMISSION - AUDITION POUR SUITE À DONNER DES REPRÉSENTANTS DE LA COFACE ET DES REPRÉSENTANTS DU MINISTÈRE DE L'ÉCONOMIE, DE L'INDUSTRIE ET DE L'EMPLOI

Présidence de Monsieur Jean Arthuis, président

Séance du mardi 18 novembre 2008

Ordre du jour

Audition des représentants de la COFACE) et des représentants du ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi, pour suite à donner à l'enquête de la Cour des comptes sur les procédures publiques gérées par la Compagnie française d'assurance pour le commerce extérieur (COFACE), transmise en application de l'article 58-2° de la LOLF.

COMPTE RENDU INTEGRAL

M. Jean ARTHUIS, président . - Mes chers collègues, nous reprenons nos travaux. Madame et Messieurs les magistrats de la Cour des comptes, Messieurs les directeurs, Mesdames et Messieurs, mes chers collègues, nous allons procéder à une nouvelle audition de suivi d'une enquête réalisée par la Cour des comptes, en application de l'article 58, deuxième alinéa, de la loi organique sur les lois de finances.

Cette audition concerne les procédures publiques gérées par la COFACE. Je vous rappelle que l'audition est ouverte à nos collègues membres de la commission des affaires économiques et de la commission des affaires étrangères, ainsi qu'à la presse et au public. Nous devons cette enquête à l'initiative de notre collègue Michel Charasse, rapporteur spécial de la mission « Aide publique au développement ». Nous la devons aussi à notre ancien collègue Paul Girod, ici présent. C'est Jean-Pierre Fourcade qui a repris les attributions de Paul Girod en qualité de rapporteur spécial de la mission « Engagements financiers de l'Etat ». La demande d'enquête adressée à la Cour des comptes portait l'intitulé suivant, que je me permets de vous rappeler : « La COFACE : transparence, coût et efficacité des procédures publiques de garantie et gestion et comptabilisation des créances d'aide publique au développement portées par cet organisme ».

Cette demande était motivée par deux éléments. D'une part, parmi les réserves qu'elle avait formulées lors de la certification des comptes de l'Etat pour 2006, la Cour des comptes avait relevé que le compte « Etat » de la COFACE, qui retrace les opérations effectuées avec la garantie de l'Etat et qui présentait, fin 2006, un total de bilan de 14,8 milliards d'euros, n'était pas intégré dans les comptes de l'Etat. Pourtant, l'Etat exerce un contrôle effectif sur la gestion des procédures en cause, et il effectue chaque année, au profit du budget général, un prélèvement sur le solde du compte. Ainsi, 2,9 milliards d'euros ont été prélevés en 2007. Dans une situation inchangée, la réserve de la Cour des comptes a d'ailleurs été réitérée lors de la certification des comptes de l'Etat pour 2007. D'autre part, en matière d'aide publique au développement, les explications fournies dans la documentation budgétaire sont apparues insuffisantes au regard du poids croissant des créances portées par la COFACE.

Nous allons voir ce qu'il en est plus précisément. A cette fin, nous recevons, pour la Cour des comptes, le Président Jean-Loup Arnaud, ainsi que Monsieur Jean-Yves Marquet et Mesdames Stéphanie Oltra, Valérie Altbaum et Christine Baillon. La COFACE est représentée par son directeur général, Monsieur Jérôme Cazes, et par Monsieur Marc Murcia, directeur du moyen terme. Madame la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi est représentée par le directeur adjoint de son cabinet, Monsieur Emmanuel Glimet. Enfin, sont présents Monsieur Xavier Musca, directeur général du Trésor et de la politique économique, et Monsieur Philippe Josse, directeur du budget.

Afin de préserver une possibilité effective de dialogue et de débat, je demande aux intervenants d'être aussi brefs que possible dans leur propos liminaire, et qu'ils se limitent donc aux observations principales. La parole sera successivement donnée aux rapporteurs spéciaux, d'abord Jean-Pierre Fourcade puis Michel Charasse, aux magistrats de la Cour des comptes, ensuite à Messieurs Cazes et Murcia pour la COFACE et, enfin, à Messieurs Musca et Josse pour leurs observations respectives. Chaque commissaire qui le souhaitera, bien sûr, pourra alors poser ses questions. Je rappelle aux membres de la commission des finances que nous aurons, à l'issue du débat, à prendre une décision sur la publication de l'enquête de la Cour des comptes au sein d'un rapport d'information. La parole, pour commencer, est donc à Jean-Pierre Fourcade.

M. Jean-Pierre FOURCADE, rapporteur spécial de la mission « Engagements financiers de l'Etat » . - Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, la COFACE agit, comme chacun le sait, d'une part, pour son propre compte dans le cadre d'opérations de marché et, d'autre part, pour le compte de l'Etat. Comme vous l'avez indiqué, Monsieur le Président, le compte retraçant les procédures publiques de la COFACE présentait à la fin 2006, d'après le rapport de la Cour des comptes, un total de bilan de près de 15 milliards d'euros. C'est un montant à peu près trois fois supérieur à celui des opérations propres que fait la COFACE. L'assurance-crédit, l'assurance-prospection et la garantie de change constituent les plus importantes de ces procédures publiques. La COFACE inscrit les demandes de garantie, et la décision d'accorder la garantie est prise soit par l'autorité administrative après l'avis contraignant de la commission des garanties, soit par la COFACE elle-même pour des dossiers dont les montants sont limités et en fonction du niveau de risque des pays. La délégation que la COFACE met en place représente 80 % des affaires en volume mais seulement 20 % en valeur. Par ailleurs, la COFACE gère les accords conclus dans le cadre du club de Paris, mais c'est mon éminent collègue, Monsieur Charasse, qui traitera de ce sujet.

Quelles sont les observations que nous retirons de l'examen attentif du rapport de la Cour des comptes et des réponses à nos questions, telles que Paul Girod les avait lancées avant de nous quitter ? Le premier sujet, c'est la transparence et plus largement l'organisation de la COFACE. L'enquête de la Cour des comptes permet de porter un jugement globalement favorable, avec une petite nuance, qui me fait sourire compte tenu de mon passé, qui est le fait que la Cour des comptes estime que, dans la nouvelle organisation générale des pouvoirs et de leur incidence sur la COFACE, le poids de la direction du budget a diminué par rapport à celui de la direction du Trésor et de la politique économique, habituée aux querelles de boutiques et au cloisonnement administratif - je m'en tiendrai à cette nuance.

Ce qui est plus important, c'est l'efficacité des procédures publiques gérées par la COFACE. Le rapport montre qu'il est un peu difficile de procéder à une évaluation systématique avec les flux d'exportation enregistrés. D'abord, on ne peut étudier de manière précise que l'assurance-prospection, qui exerce un important effet de levier. La COFACE nous dit que pour un euro dépensé dans le cadre de l'assurance prospection, on trouve un peu plus tard 19 euros de chiffre d'affaires à l'exportation. Ce rapport 1/19 est tout à fait intéressant, encore faut-il pouvoir le démontrer précisément.

La COFACE s'appuie sur l'avis des missions économiques à l'étranger. La Cour des comptes a constaté, et je l'ai constaté en visitant quelques postes à l'étranger, que, souvent, les missions n'apportent pas de réponse dans les délais impartis, surtout les grosses missions, à Moscou, à Pékin ou ailleurs, et les services de la COFACE admettent que ce silence vaut approbation implicite du dossier. Il est clair qu'il faudra faire une observation au ministère des affaires étrangères et au ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi pour voir si l'on ne peut pas améliorer un peu la réponse des missions sur ces sujets importants.

L'assurance-crédit représente 90 % de l'activité de la COFACE mais un peu plus de 100 % de son résultat, puisque les autres procédures, l'assurance-prospection et les garanties de change, sont déficitaires. Donc tout le bénéfice de la COFACE provient de l'assurance-crédit. A partir d'un examen très précis des dossiers, la Cour des comptes a relevé quelques insuffisances. En effet, certains dossiers sont acceptés malgré les réserves des administrations de tutelle, et parfois en l'absence de comptes consolidés ou ayant été audités. Mais il s'agit en général de très grosses affaires. Je pense notamment à tout ce qui est consacré à EADS dans ses opérations financières. Par conséquent, je crois qu'il n'y a pas beaucoup de cas - la Cour des comptes nous le dira - où la COFACE passe outre les observations des administrations, toujours frileuses comme on le sait.

En ce qui concerne la garantie de change, l'enquête de la Cour des comptes souligne - et ça, c'est un petit peu plus ennuyeux - que les risques sont concentrés sur un nombre très restreint de polices et que les risques opérationnels, évidemment, dans l'Etat actuel de la turbulence financière des marchés mondiaux, s'accroît. C'est surtout sur le plan des coûts que la garantie de change a appelé l'attention. En effet, sur la période 2002-2006, le résultat financier de la procédure a été négatif (- 12 millions d'euros au total), mais il y a une bonne année, qui est l'année 2006, où le résultat était positif (- 1,5 million d'euros). On pense que, dans le contexte actuel, pour 2007, il y aura une perte et que la perte s'élèvera à un peu plus de 2 millions d'euros (2,2 ou 2,3 millions). Se pose donc la question de la réduction des coûts relatifs à la garantie de change. La Cour des comptes, dans ses propositions, évoque la possibilité d'un transfert de cette activité à un autre opérateur. C'est une question de fond et je souhaiterais, Monsieur le Président, que la direction du Trésor et la COFACE nous donnent leur sentiment à cet égard. De toute manière, l'Etat sera obligé de compenser les risques de la garantie de change, quel que soit l'opérateur.

Le point central, c'est le compte « Etat » de la COFACE. Premièrement, la Cour des comptes a constaté un certain nombre d'insuffisances en la matière, puisque, quelles que soient les conventions en vigueur, la COFACE n'arrive jamais à produire les comptes semestriels, et elle produit des comptes annuels dix mois après la clôture de l'exercice. Dans la nouvelle convention Etat-COFACE conclue en juin 2008 mais qui intègre l'année 2007, si j'ai bien compris, il y a une astuce, dont je félicite les auteurs, qui prévoit l'intéressement financier de la COFACE au raccourcissement du délai de production de ses comptes annuels. C'est une astuce intéressante, par laquelle on stimule un peu la publication régulière des comptes par un petit avantage financier.

M. Michel CHARASSE, rapporteur spécial de la mission « Aide publique au développement » . - On donne des primes pour ce qui est normal !

M. Jean-Pierre FOURCADE, rapporteur spécial . - Exactement. De même, on apprend que le processus de refonte du système d'information et des procédures comptables de la COFACE n'est toujours pas achevé. Oserais-je dire qu'il a été entamé, Monsieur le Président, en 1999 ? Nous sommes en 2008, je trouve que, pour un système de refonte interne de systèmes d'information et de procédures, c'est un délai un peu long. Je connais d'excellentes maisons qui fabriquent des logiciels et qui, peut-être, pourraient faire l'objet d'un appel d'offres pour améliorer les choses. La convention liant l'Etat à la COFACE qui couvre la période 2007-2010, avec l'intéressement que j'évoquais, permettra, j'espère, l'amélioration des procédures comptables.

Le deuxième point, qui est à mon avis le plus intéressant, c'est que, dans le cadre des procédures publiques de la COFACE, il peut y avoir - et il y a - prélèvement au bénéfice du budget général de l'Etat sur les résultats de la COFACE. L'Etat a ainsi perçu 2,5 milliards d'euros au titre de 2006, et 2,9 milliards d'euros au titre de 2007. Pour 2008, la loi de finances promettait un prélèvement de 3 milliards d'euros. Mais, comme il y a eu un problème à la fois avec la Cour des comptes et avec Eurostat, ce prélèvement a été réduit et le prélèvement est aujourd'hui au niveau de 1,5 milliard, et on a inscrit également 1,5 milliard dans le projet de loi de finances pour 2009. Il est évident que cette intervention d'Eurostat pose question, puisque tout le monde en France s'incline devant les « oukases » d'Eurostat. Donc, je me propose, Monsieur le Président, de voir d'un peu plus près comment fonctionne Eurostat (quel est son fondement juridique, comment est prise la décision du Conseil des ministres, etc.). Cette requalification, qui a été notifiée au gouvernement français en mars 2008, a évidemment réduit l'intérêt de l'opération. Pour la préparation de la loi de finances pour 2009, le directeur du budget nous le dira, au lieu de prévoir 2,9 ou 3 milliards d'euros, il devra retenir 1,3 milliard.

Reste que - et ce sera ma conclusion -, dans le cadre des turbulences actuelles que nous connaissons et de la crise, il est clair qu'un certain nombre de contrats, en matière d'assurance-crédit et surtout de garantie de change, vont être un peu perturbés. Par conséquent, j'aimerais savoir quelles sont, à l'horizon 2009, les perspectives de la COFACE. Est-ce qu'il va y avoir rétrogradation d'un certain nombre de pays dans la liste des pays à risque ? Est-ce qu'il va y avoir des annulations de contrats ou des modifications ? Est-ce qu'au niveau des garanties de change, l'évolution, aujourd'hui, entre l'euro, le dollar, le yen, le franc suisse et la livre sterling risque d'avoir des conséquences sur les pertes de changes ? On nous annonce une perte au titre de 2008 de l'ordre de 2 millions et quelques d'euros sur la garantie de change.  Qu'est-ce qu'on prévoit pour 2009 ?

Dernière question : il ressort du rapport de la Cour des comptes, ayant examiné l'ensemble du sujet, que les coûts de fonctionnement de la COFACE, notamment dans le cadre de ses rapports avec l'Etat, sont parfois importants. La marge opérationnelle, par rapport au système bancaire, apparaît un petit peu élevée, et j'aimerais avoir quelques détails sur la composition de cette marge. Il y a un tableau très bien fait dans le rapport de la Cour des comptes, dans lequel on nous présente, en matière de garantie de change, par exemple, le total des opérations en dépenses et en recettes. On voit que la procédure est bénéficiaire au regard du jeu des primes mais qu'elle est devenue déficitaire quand on réintègre les frais de gestion, et ces frais de gestion sont tout à fait raisonnables. Donc, je voudrais voir un petit peu comment cela peut fonctionner si, au niveau des coûts de fonctionnement, nous sommes dans un système qui respecte la convention avec l'Etat et qui va dans un sens d'amélioration des structures de la COFACE. Voilà, Monsieur le Président, ce que je voulais dire sur ce rapport.

M. Jean ARTHUIS, président . - Je remercie Jean-Pierre Fourcade et je donne la parole à Michel Charasse.

M. Michel CHARASSE, rapporteur spécial . - Monsieur le Président, très rapidement, je rappellerai, après avoir salué les invités de la commission, que cette enquête a été demandée à l'initiative de Paul Girod et de moi-même : Paul Girod pour la partie principale, puisqu'il était à l'époque le rapporteur du rapport que tient aujourd'hui notre collègue Fourcade, et moi pour la toute petite partie « aide publique au développement ». Donc, je me bornerai à une seule observation sur l'aide publique au développement.

M. Jean ARTHUIS, président . - Si Monsieur Charasse le permet, je voudrais indiquer la présence d'Edmond Hervé, co-rapporteur des crédits relatifs à l'aide publique au développement. Jusqu'au renouvellement de septembre 2008, il y avait un seul rapporteur sur l'aide publique au développement. Mais nous sommes plus nombreux à la commission des finances et la matrice de la LOLF a été révisée, on a réduit le nombre des missions. C'est ainsi que nous avons maintenant des co-rapporteurs sur un certain nombre de missions, ce qui explique la présence d'Edmond Hervé, aujourd'hui, comme rapporteur spécial.

M. Michel CHARASSE, rapporteur spécial . - Monsieur le Président, je vous remercie de citer sa présence à mes côtés puisque, maintenant, nous nous partageons le rapport, mais le rapport que nous examinons, c'est le passé, si l'on peut dire, car la demande a été faite à la Cour des comptes à l'époque où nous étions, Paul Girod et moi, les deux rapporteurs spéciaux concernés.

Je me bornerai à une observation sur un seul point, qui m'a un peu surpris, du rapport de la Cour des comptes, sur la partie que j'appellerais « générale », ou « Girod/Fourcade ». Je trouve un peu étonnant - ou alors j'ai mal compris - que la Cour s'étonne que l'autorité gouvernementale garde la main sur un certain nombre de décisions. Je m'excuse, la politique économique, c'est de la politique, et c'est à l'autorité politique d'agir, sous le contrôle, bien entendu, du Parlement et du suffrage universel. C'est le rôle des administrations d'émettre des réserves et c'est le rôle des politiques de décider. Par conséquent, je ne sais pas dans quel sens la Cour des comptes a présenté cette observation, mais cela ne me choque absolument pas. C'est le travail des politiques, et je pense que les pays s'en sortent d'ailleurs beaucoup mieux quand les politiques prennent leurs responsabilités, en s'entourant, bien entendu, des avis éclairés de l'administration.

J'en viens, Monsieur le Président, au second point, qui est vraiment le petit aspect du rapport, puisque la Cour n'a pas consacré des pages entières à la partie « aide publique développement », et je me bornerai à poser une question. La qualification en APD de créances originellement commerciales est-elle légitime ? Je m'interroge. Est-ce qu'il ne s'agit pas d'une requalification a posteriori permettant notamment de gonfler les statistiques d'APD ? La Cour a-t-elle relevé des cas litigieux de créances qui seraient par exemple manifestement virtuelles, comme peut en attester le provisionnement intégral, ou témoigneraient d'une certaine liberté prise par rapport à la nomenclature de l'OCDE ? J'ajouterai pour information, et pour aller dans le sens de ce que disait Jean-Pierre Fourcade il y a un instant, que si les annulations de créances au titre de l'APD ont été de 2,05 milliards d'euros en 2006, il y a bien une chute, puisque la prévision pour 2008 est aujourd'hui de 660 millions d'euros et, pour 2009, de 771 millions d'euros. Donc, cela remonte légèrement en 2009, mais on n'est pas aux 2 milliards et quelques d'euros relevés par la Cour en 2006. Voilà, Président, ce que je souhaitais dire.

M. Jean ARTHUIS, président . - Merci. La parole est maintenant à la Cour des comptes. Je vais la donner au Président Jean-Loup Arnaud, mais je voudrais, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs les magistrats, vous remercier pour la qualité de ce rapport. Un rapport bien sûr très technique, mais nous sommes à l'heure où les parlementaires que nous sommes entendent se réapproprier les problématiques financières et, en l'occurrence, être en situation de comprendre parfaitement le contenu des comptes de la COFACE, en particulier des comptes que la COFACE tient pour le compte de l'Etat.

M. Jean-Loup ARNAUD, président de section à la Cour des comptes . - Merci beaucoup, Monsieur le Président. Je vais essayer d'être assez rapide, puisque certaines questions ont déjà été traitées par les deux rapporteurs spéciaux, et les exposés précédents. Je voudrais d'abord vous transmettre les regrets du nouveau président de la deuxième chambre, Alain Hespel, de ne pouvoir assister à cette audition. Il m'a demandé de le représenter en tant que président de la quatrième section, qui est compétente en matière de commerce extérieur, mais je voudrais aussi préciser que ce travail a été effectué en étroite collaboration avec la première chambre, ici représentée, qui est l'interlocuteur privilégié de la DGTPE et qui est responsable de la certification des comptes de l'Etat, et aussi en liaison avec la quatrième chambre pour ce qui concerne l'aide au développement. Je voudrais aussi rappeler que ce rapport a été contredit, comme tous les rapports de la Cour, et a fait l'objet d'une audition à laquelle la plupart des membres présents ont assisté ou ont été représentés.

Sur les principales conclusions de ce rapport, je crois que l'essentiel a été dit, notamment par Monsieur Fourcade. Nos conclusions sont de deux ordres. D'une part, la Cour a d'abord porté un jugement globalement positif sur la gestion par la COFACE des procédures publiques qui lui sont confiées par l'Etat, principalement en termes de transparence, à travers les questions de principe arrêtées par la commission des garanties et la délégation partielle à la COFACE des décisions d'octroi des garanties d'assurance-crédit. Je voudrais, à ce sujet, apporter quand même une réponse à la surprise qui a été formulée par le sénateur Charasse. En ce qui concerne les décisions ministérielles, la Cour ne se prononce jamais sur des questions d'opportunité. Donc, il n'y a absolument aucune critique, sur ce plan, dans ce rapport ; on relève que, dans un certain nombre de cas, pour des raisons qui sont forcément des raisons d'intérêt général de l'Etat, une décision ministérielle a été prise, qui ne correspondait pas à ce qui avait été instruit. Mais on n'en porte aucun jugement, ce n'est qu'un simple constat et, donc, il n'y a aucune critique sur ce point. D'ailleurs, il ne pourrait pas y en avoir.

Par ailleurs, la Cour a relevé des insuffisances, et même beaucoup plus que des insuffisances, et a été amenée à s'interroger sur certains points et certaines problématiques. Je passerai assez vite sur celles qui ont déjà été évoquées, notamment par Monsieur Fourcade, et notamment pour l'exercice des tutelles. L'audition a fait apparaître, d'ailleurs, les raisons pour lesquelles la DGTPE et la direction du budget n'avaient pas eu toujours les mêmes positions sur certains dossiers. Je passe assez vite également sur les structures de gestion des procédures publiques et l'efficacité des outils d'aide à l'exportation : des informations utiles ont été apportées par la contradiction, et il n'y a pas de critiques majeures. En fait, les insuffisances constatées portent principalement sur le compte des procédures publiques et sur les relations financières de la COFACE avec l'Etat.

Sur le premier point, la Cour s'est interrogée sur le statut de ce compte, elle a déploré des retards dans la production de ce compte, liés aux insuffisances comptables et surtout informatiques, et elle a constaté les réserves et observations de l'expert ayant qualité de commissaire aux comptes.

Sur le second point, la Cour a été amenée, dans ses deux précédents rapports sur la certification des comptes de l'Etat, comme vous l'avez rappelé, Monsieur le Président, à formuler une réserve sur le traitement du compte des opérations de la COFACE effectuées avec la garantie de l'Etat, et la Cour a considéré que les actifs et passifs correspondants devraient être intégrés directement ou indirectement dans les comptes de l'Etat. La Cour, par ailleurs, a formulé des suggestions ou recommandations à propos de deux autres points importants et sensibles : le calcul de la rémunération de la COFACE et les modalités du prélèvement opéré par l'Etat sur la trésorerie de la COFACE.

Quant à la dernière problématique, relative à l'aide au développement, la Cour, d'une part, a constaté - c'est un point qui répond peut-être en partie aux remarques qui ont été faites - que la COFACE ne joue pas de rôle dans la détermination du montant de l'aide notifiée chaque année à l'OCDE par la France. Elle n'apporte qu'un appui technique à la DGTPE, en appliquant des critères définis par ailleurs et en enregistrant dans le compte des procédures publiques les écritures comptables qui en résultent.

D'autre part, la Cour a constaté que le montant déclaré par la France au titre de l'annulation des seules créances portées par la COFACE a augmenté de 395 % entre 2002 et 2006. Ce montant ne représente que moins du quart de l'APD totale, qui résulte principalement de deux accords de consolidation. Selon la Cour, il n'est pas impossible qu'au cours des années à venir, on observe une baisse de l'aide à ce titre, du fait de la raréfaction d'accords de consolidation majeurs.

En conclusion, je voudrais insister sur l'importance de l'impact de la situation économique, commerciale et financière internationale sur les résultats du compte des procédures publiques de la COFACE et sur la nécessité de pouvoir actualiser les données de ce rapport, qui se fonde principalement sur des investigations qui sont déjà un peu anciennes. J'en profite pour remercier les responsables de la COFACE d'avoir bien voulu nous transmettre, juste avant cette audition, quelques informations plus récentes sur la garantie de change, information que nous n'avons évidemment pas pu expertiser. Je vous remercie de votre attention.

M. Jean ARTHUIS, président . - Merci, Monsieur le Président. Peut-être que nous allons maintenant obtenir des indications sur les conséquences de la crise financière et économique qui sévit, qui ne pouvaient pas être prises en compte dans les données qui vous ont été soumises, mais il sera tout à fait intéressant d'avoir des précisions à ce sujet. La parole est maintenant aux représentants de la COFACE, et d'abord à Monsieur Jérôme Cazes, directeur général.

M. Jérôme CAZES, directeur général de la COFACE . - Merci, Monsieur le Président. Un mot, d'abord, sur les poids relatifs dans la gestion COFACE du compte « Etat » et du compte propre. Comme l'a rappelé Monsieur le rapporteur spécial Fourcade, le rapport de la Cour des comptes insiste sur un paramètre qui est le poids des bilans. Le bilan du compte « Etat » porte, comme on le sait, la trace de la crise des pays émergents des années 80 et de toutes les créances rééchelonnées dans les années 80. Il est donc assez déséquilibré. Si l'on prend des indicateurs plus proches de la gestion, c'est-à-dire par exemple les effectifs ou le chiffre d'affaires, l'activité « compte Etat » est proche de 5 % de l'activité de COFACE. Donc, en gros, aujourd'hui, COFACE, qui emploie 7.000 personnes, c'est 5 % pour le compte « Etat », 95 % pour le compte privé.

Deuxième remarque : vous avez noté, Monsieur le rapporteur spécial, que l'efficacité au regard du moyen terme était difficile à juger, ce qui était aussi une manière de noter en transparence que l'assurance-prospection est sans doute l'une des seules procédures économiques pour laquelle on puisse vraiment retracer, année après année, l'efficacité de l'argent public. Sur le moyen terme, la situation est que, du fait de l'organisation de la concurrence entre pays développés et pays émergents, par le biais des garanties publiques à l'exportation, tous les pays ont un système équivalent à COFACE. Donc, il n'y a pas vraiment, me semble-t-il, du point de vue des puissances publiques, la possibilité de se demander si l'on fait ou pas ; la vraie question que pose Monsieur le rapporteur spécial, c'est de savoir si la façon dont les Français sont organisés est plus efficace que celle des Américains, des Anglais, des Hollandais. Nous sommes pragmatiques là-dessus. Ce point n'est pas abordé dans le rapport de la Cour des comptes ; nous avons la conviction que, si une étude de ce type était faite, on verrait que le coût global du système COFACE, c'est-à-dire 60 millions d'euros, est beaucoup plus faible, à taille économique équivalente, que la plupart des systèmes comparables.

Quand il y a un tel instrument de concurrence entre pays, tout le monde fait la même chose, puisque l'efficacité globale n'est pas énorme. Mais, à la fin des fins - et cela fait 40 ans que cela dure -, il est extrêmement difficile pour un pays de dire : « Je vais cesser d'aider mes exportateurs à prendre des risques sur les pays émergents. » Donc, en tant que citoyens, on peut regretter qu'il n'y ait pas, un jour, quelqu'un qui dise d'arrêter tout cela, mais aujourd'hui, la réalité, c'est que tous les nouveaux pays, dès qu'ils acquièrent un tout petit peu de solvabilité - c'est le cas du Brésil, de la Corée, de tous les pays émergents -, mettent en place des systèmes équivalents alors que pas un seul pays, même l'Angleterre de Madame Thatcher, n'a démantelé son système d'aide aux exportateurs.

Sur la garantie de change, Monsieur le rapporteur spécial, vous avez insisté sur le coût, et le rapport de la Cour des comptes le fait aussi. Nous pensons que c'est une manière peut-être un peu biaisée de voir les choses, parce que le choix de l'Etat a été de dire : « Nous souhaitons que les garanties de change soient équilibrées. » Mais en disant cela, ils ont dit : « équilibrées techniquement », c'est-à-dire, en langage d'assurances, que les indemnités soient couvertes par la bonne gestion et les primes, mais hors frais de gestion. Donc, assez logiquement, depuis dix-neuf ans que ce système existe, on observe que c'est sans doute l'une des seules garanties publiques qui a réussi à être développée sans un euro de l'Etat. En gros, le service rendu n'a pas coûté un euro au contribuable. Il est vrai qu'une partie du coût de gestion est payée par le contribuable, mais à cet égard, premièrement, c'était prévu et, deuxièmement, cela fait, comme vous l'avez rappelé, Monsieur le rapporteur, 2 à 3 millions d'euros. Ce que vous n'avez pas rappelé mais que dit très bien le rapport de la Cour des comptes, c'est qu'en face, il y a 2 à 3 milliards d'euros de garanties. Donc, on est sur un ratio coût/efficacité de l'ordre d'un pour mille. Il nous semble que ce n'est pas une des garanties les plus dispendieuses.

Vous avez également posé un vrai problème qui est le problème du risque opérationnel. Nous lisons tous la presse et on sait, malheureusement, qu'une salle de marché, cela peut être dangereux. Ce que nous pouvons dire du côté COFACE, c'est que, premièrement, cela fait dix-neuf ans qu'on le fait et que, deuxièmement, pour répondre à une de vos questions, le mois d'octobre, qui a été un « bain de sang » pour toutes les banques sur le plan des activités de marché, n'a pas créé chez COFACE des difficultés particulières. Pourquoi ? Parce que nous sommes extrêmement encadrés sur ce que nous faisons. La Cour des comptes dit : « C'est vrai, vous êtes bien encadrés. Jusqu'ici, vous avez eu de bons résultats. Vous êtes une petite salle de marché. ». Nous, nous sommes très pragmatiques. Si, à un moment donné, la tutelle nous dit : « Comparez la solution actuelle avec une solution où les collègues de COFACE seraient embarqués dans une salle de marché plus importante », nous disons : « Pourquoi pas ? » mais ne nous disons pas que cela économisera de l'argent. Au contraire, cela coûtera plus cher, mais il est possible que cela réduise un peu le risque opérationnel.

Dernier point : la production des comptes. En lisant le rapport - j'en suis désolé, Monsieur le Président, Monsieur le rapporteur spécial et mes collègues de la Cour des comptes -, on a un peu l'impression qu'il y avait quelque chose de très simple et que COFACE, un peu butée, depuis 1999, refuse d'entendre raison en modifiant son logiciel de gestion. Je voudrais prendre une minute de votre temps pour dire quel est le problème. Le problème, c'est que les assureurs peuvent compter « bêtement » en comptabilité de gestion (ce qui rentre, ce qui sort). Ce compte-là, COFACE l'a toujours fait. C'est le seul qui est exploité, y compris d'ailleurs par le rapport de la Cour des comptes, parce que, sur des risques longs, savoir ce que l'on dépense et ce que l'on gagne est quand même la meilleure manière de comprendre ce qui se passe. Et vous avez une deuxième manière, plus sophistiquée, qui est de faire de la comptabilité d'engagement, et qui est de dire : « Quand je dépense un euro, est-ce que c'était sur un contrat souscrit cette année, il y a cinq ans, il y a dix ans ou il y a quinze ans ? » C'est intelligent mais c'est très difficile à interpréter avant une vingtaine d'années.

Comme on est sur des contrats à vingt ans, on travaille pour nos petits-enfants, cette comptabilité d'engagement sera intéressante pour nos petits-enfants. Il faut le faire, mais ne sous-estimons pas l'énorme tâche que cela représente, puisqu'on nous demande de recréer pour le passé un rattachement par année de souscription qui n'existe pas. Vous avez un énorme pot de crédits rééchelonnés plusieurs fois avec, à chaque fois, un système différent, et on nous dit : « Chaque fois qu'il y a un euro dépensé, allez retrouver à travers tous les rééchelonnements à quel crédit de départ il était rattaché pour pouvoir nous dire si c'est de l'exercice 72 ou 62. » Donc, premièrement, ne sous-estimons pas la difficulté, parce qu'on va sans doute, dès que la tutelle nous le demandera, refaire le logiciel. Mais refaire un logiciel quand vous n'avez que très peu de personnes qui savent comment il fonctionne... COFACE est le seul au monde à gérer les prêts du Trésor ; vous prenez un risque d'effet « tunnel ». Pendant que l'on fera ce logiciel, on ne pourra plus le modifier. Donc, il ne s'agit pas d'échanger une absence de risque contre un risque, mais d'échanger un risque contre un autre risque. Deuxième élément : l'avantage en termes de transparence des comptes est minime, parce que, tant que l'on n'a pas 20 ans d'historique, retracer la comptabilité par exercice d'engagement ne rapportera rien à personne.

Je passe la parole à mon collègue Marc Murcia pour dire un mot sur votre dernière question, qui était de savoir quelles sont les tendances que l'on sent aujourd'hui en matière de garantie.

M. Marc MURCIA, directeur du moyen terme à la COFACE . - Les tendances que l'on sent aujourd'hui en matière d'évolution des garanties, c'est une très forte hausse des demandes qui nous sont adressées. Pour vous donner quelques chiffres, pour la garantie de change, on a une hausse des demandes de l'ordre de 45 %. Pour le produit caution, visant le risque exportateur, on a une hausse qui est de l'ordre de 60 %. L'assurance-prospection aussi continue sur sa lancée, avec une progression de l'ordre de 15 %, mais elle est moins affectée par la crise à ce stade. Et en assurance-crédit aussi, on a de nouvelles demandes, on a de nouveaux emprunteurs que l'on n'aurait jamais imaginé voir il y a de cela quelques mois. Manifestement dans les pays émergents, un certain nombre d'emprunteurs qui se finançaient sans difficulté sur les marchés ont recours aujourd'hui au crédit export. Donc, on anticipe pour 2009 une forte hausse des demandes qui nous seront adressées.

M. Jean ARTHUIS, président . - Combien l'assurance-crédit représente-t-elle ?

M. Marc MURCIA . - Pour l'instant, c'est assez limité. On observe que les contrats que l'on a garantis dans l'année ont augmenté à peu près d'une quinzaine de pour cents. Ensuite, le problème, c'est que l'on a des demandes qui arrivent mais qui peuvent porter sur de très gros montants. Le temps que le contrat se conclue, il y a des effets de « grumeaux », un peu, mais ce que l'on anticipe, c'est une forte progression, sans doute, des montants qui seront garantis.

M. Jean-Pierre FOURCADE, rapporteur spécial . - Comment est organisée la liaison entre votre direction du moyen terme et celle qui s'occupe des garanties de change ? Comment est-ce que cela fonctionne concrètement, « pragmatiquement », comme dit le directeur général ?

M. Marc MURCIA . - « Pragmatiquement », les équipes qui analysent les risques sont dans ma direction, et à la salle des marchés, tout le back-office est dans la direction financière dont s'occupe Carine Pichon, et les échanges sont quotidiens.

M. Jérôme CAZES . - Je m'excuse, je n'avais pas présenté Madame Pichon, qui est directrice financière de COFACE. En gros, dans nos relations, on a un principe de division, c'est-à-dire que Marc Murcia et Carine Pichon, à travers le directeur général-adjoint, me rapportent. Je crois que c'est de bonne gestion d'avoir les engagements et la gestion qui ne sont pas exactement les mêmes, et le deuxième élément, c'est que la ligne hiérarchique sur la salle des marchés incorpore à la fois le directeur financier et le directeur général-adjoint, qui ont tous les deux une expérience financière et bancaire, ce qui est une manière de réduire encore, à notre sens, le risque opérationnel.

M. Jean-Pierre FOURCADE, rapporteur spécial . - Il n'y a pas de possibilité d'éléments erratiques comme dans d'autres maisons que nous avons vues ces temps-ci ?

M. Jérôme CAZES . - Je peux vous dire que l'on n'en a pas observés en dix-neuf ans. Je suis payé pour être inquiet et je sais qu'il peut toujours arriver une bizarrerie. Sur les marchés, il nous est arrivé de petits incidents. Quelqu'un croyait faire mille et il faisait un million ; il se trompait dans un ordre. Donc, dans une salle des marchés, vous n'avez pas de risque nul, quand bien même on passerait à la plus grosse salle de marchés de Paris. Vous avez vu ce qui est arrivé à la Société Générale. On peut toujours avoir des problèmes. Donc, je crois que le risque nul n'existe pas. Je crois malgré tout que, comme on fait la même chose depuis dix-neuf ans et que l'on n'a rien de sophistiqué dans ce que l'on fait, le risque est faible.

M. Jean ARTHUIS, président . - L'évaluation du contrôle interne est-elle satisfaisante ?

M. Jean-Loup ARNAUD . - Il n'a pas été observé à ce titre d'incidents majeurs.

M. Jérôme CAZES . - On est filiale de groupes bancaires. Donc, nous avons mis en place un système qui, pour certains, peut avoir l'air d'une usine à gaz mais qui constitue quand même des contrôles, qui sont bien décrits dans le rapport de la Cour des comptes : contrôle de niveau 1, hiérarchique ; contrôle de niveau 2, qui est un contrôle permanent par une autre structure que le contrôle hiérarchique ; et contrôle de niveau 3, qui est le contrôle de temps en temps par l'auditeur, de façon aléatoire. Ces trois niveaux de contrôle sont en place. On a fait une cartographie des risques, c'est-à-dire que l'on a regardé l'ensemble des procès en essayant de les pondérer de 1, 2, 3, 4 en essayant de voir quelles étaient les stratégies de minimisation, puis d'éliminer tous les risques de niveau 4, c'est-à-dire les pires. Donc, je pense que l'on a toute la traçabilité possible et que les risques sont contrôlés. Mais je ne peux absolument pas dire qu'il est impossible qu'un risque arrive.

M. Jean ARTHUIS, président . - La parole est maintenant aux représentants des ministres et des grandes directions de Bercy. D'abord, Monsieur Glimet, directeur adjoint du cabinet de Madame Lagarde.

M. Emmanuel GLIMET, directeur adjoint du cabinet de la ministre de l'économie, de l'industrie et de l'emploi . - Ce que je voudrais dire sur la COFACE, c'est que, pour le ministère, la COFACE est un outil extrêmement important à plusieurs titres. D'une part, en termes d'outil de soutien au commerce extérieur, en particulier pour les grands contrats à l'exportation, puisque, comme l'a dit Jérôme Cazes, les concurrents des entreprises françaises bénéficient de soutiens équivalents dans leur pays d'origine. Il n'y a pas de soutien effréné et de concurrence effrénée entre les pays pour ces soutiens, car il existe des règles internationales, dans l'OCDE, qui encadrent les soutiens des différents assureurs-crédit. C'est ce que l'on appelle « l'arrangement OCDE » ou le « consensus OCDE » sur les crédits export, qui permet justement de maintenir la concurrence dans des limites raisonnables.

Le deuxième point, c'est que, évidemment, c'est un enjeu financier pour le ministère extrêmement important. Vous avez vu les montants tant des contrats garantis que du résultat annuel de la COFACE. Cette évolution a tendance à s'accentuer. On voit arriver, et soumettre à l'examen des directions, des opérations de plus en plus importantes. Le renouveau du nucléaire, par exemple, amène la COFACE à garantir des opérations d'un montant de 5 à 10 milliards d'euros. Donc, cela représente, tant pour l'économie française que pour l'Etat, des risques financiers importants, pour lesquels nous nous reposons sur le professionnalisme de l'instruction de la COFACE et sur le processus décisionnel au sein de Bercy, qui est à la fois un processus collégial au sein de la commission des garanties et un processus qui repose sur le directeur général du Trésor, qui prend la décision de garantir et qui en réfère parfois en demandant des instructions au niveau ministériel.

Pour répondre à votre question, il est extrêmement rare, voire rarissime, que le ministre prenne une décision sur une recommandation contraire de ses services. En général, le cas de figure classique, c'est que les décisions du ministre se prennent sur la recommandation de ses services, mais pour des affaires tellement importantes qu'il est jugé préférable que le ministre intervienne.

M. Jean-Pierre FOURCADE, rapporteur spécial . - Même en matière militaire ?

M. Emmanuel GLIMET . - Oui. Le ministre est bien sûr parfaitement libre pour juger, mais si son directeur général lui indique qu'une opération présente des risques extrêmement importants, il prend évidemment en compte cette observation. Je laisserai les directeurs compléter cette question.

M. Jean ARTHUIS, président . - Est-ce que vous avez eu à connaître de l'opportunité ou non d'intégrer dans le bilan de l'Etat - puisque depuis 2006, on présente un bilan de l'Etat - le compte des procédures publiques de la COFACE ? Est-ce que vous vous êtes posé la question de savoir si l'on devait intégrer les comptes tenus pour le compte de l'Etat au sein du bilan de la COFACE ou dans les comptes de l'Etat ?

M. Emmanuel GLIMET . - Je crois que, grâce aux travaux de la Cour des comptes, nous avons longuement examiné ce sujet. Je laisserai Xavier Musca et Philippe Josse développer la question. Comme vous le savez, le système de la COFACE est totalement sui generis . La COFACE intervient pour le compte de l'Etat. Le système du compte « Etat » à la COFACE, en soi, n'a pas de traduction ; peut-être une traduction en droit anglo-saxon - il s'agit presque d'un trust -, mais on ne trouve pas sa traduction en droit privé ou public français dans d'autres catégories. Nous avons toujours considéré qu'il n'y avait pas de nécessité d'intégrer ces comptes. Je laisserai peut-être les directeurs développer ce point plus avant.

Comme vous le savez, et comme vous l'avez souligné, la dimension européenne est importante, compte tenu de la position que prend Eurostat sur le traitement des opérations de la COFACE.

M. Jean ARTHUIS, président . - Là, il va falloir que vous nous éclairiez.

M. Emmanuel GLIMET . - Je vais peut-être laisser les directeurs compléter.

M. Michel CHARASSE, rapporteur spécial . - Est-ce que vous contestez la position d'Eurostat devant la Cour de justice ?

M. Emmanuel GLIMET . - J'ignore s'il existe des voies de recours.

M. Michel CHARASSE, rapporteur spécial . - Bien sûr. C'est une décision administrative de l'Union Européenne. Il faudra bien les faire « taper » une fois de temps en temps pour qu'ils arrêtent !

M. Jean-Pierre FOURCADE, rapporteur spécial . - De quand date la décision d'intégrer dans l'article d'équilibre du budget le prélèvement sur la trésorerie de la COFACE ? Je ne m'en souviens pas.

M. Xavier MUSCA, directeur général du Trésor et de la politique économique . - Monsieur le ministre, si vous me le permettez, vous ne vous en souvenez pas parce qu'il fut un temps où c'était un poste de dépenses et non pas un poste de recettes. Cela date peut-être d'une dizaine d'années, à partir du moment où les pays émergents ont commencé à rembourser, à partir du moment où il y a eu les annulations de dettes et où ces deux mouvements ont permis de récupérer sur le compte de la COFACE des excédents. Effectivement, dans le temps, c'était une procédure qui était coûteuse directement pour le budget de l'Etat ; elle est devenue, temporairement en tout cas, une recette.

M. Jean ARTHUIS, président . - C'est devenu une recette non fiscale pour le budget de l'Etat.

M. Xavier MUSCA. - En effet.

M. Jean ARTHUIS, président . - Avec toutes les tentations qui peuvent venir à l'esprit du directeur du budget en certaines circonstances...

M. Xavier MUSCA . - Le directeur du budget n'a jamais de tentations, il est d'une innocence totale !

M. Michel CHARASSE, rapporteur spécial . - Elles ne peuvent porter que sur ce qu'on lui laisse !

M. Jean-Pierre FOURCADE, rapporteur spécial . - Le point concernant « Eurostat » est très important.

M. Jean ARTHUIS, président . - On va maintenant entendre Monsieur Musca, directeur général du Trésor et de la politique économique.

M. Xavier MUSCA . - Je ne suis pas sûr de répondre à toutes les questions que vous avez évoquées et soulevées. Je vais essayer, peut-être en vrac, de vous donner quelques éclairages sur les sujets où je pense que je peux essayer d'apporter quelque chose au débat.

D'abord, puisque nous sommes avec le directeur du budget, au sujet du conflit picrocholin entre nos directions, je conviens qu'il ne faut pas s'y arrêter longtemps et je suis heureux de vous dire que nous sommes d'accord, Philippe Josse et moi, pour mettre en place un dispositif qui permettra une meilleure association de la direction du budget à la gouvernance de la commission des garanties, sachant au demeurant que ce qui a été décrit par la Cour des comptes n'a eu aucun impact, de mon point de vue - et ceci peut être démontré en termes de chiffres  -, ni sur le nombre d'affaires remontant au ministre, ni sur le risque pris globalement par l'Etat à travers la COFACE.

La deuxième question que vous avez évoquée tient à l'efficacité et au coût des procédures. Sur l'efficacité, je souscris à ce qui a été dit par Jérôme Cazes. On est un petit peu dans le « dilemme du prisonnier », dès lors que la plupart de ces dispositifs existent dans l'ensemble des autres pays. On pourrait imaginer un démantèlement général ; à partir du moment où ces procédures existent dans d'autres pays, le mieux est encore de « matcher » l'offre de ces pays. Et je ne crois pas que nous puissions assister aujourd'hui à un démantèlement concerté de ces dispositifs d'aide. En revanche, vous le savez, parallèlement, nous nous sommes mis d'accord au sein de l'OCDE - et nous poursuivons cet effort - pour normaliser, autant que faire se peut, les procédures d'intervention des Etats développés, afin d'être sûr que, justement, nous limitons les risques de concurrence perverse qui interviendrait par augmentation du risque de l'Etat.

Il y a là un sujet grave, lourd, qui est l'intervention de nouveaux acteurs. L'un d'entre eux est un grand pays en développement qui est désormais le sixième assureur-crédit mondial, dont on peut avoir le sentiment qu'il ne respecte pas toujours les règles du jeu en la matière, puisqu'il n'est pas membre de l'OCDE. Là, il y a une vraie question. Mais cet élément nouveau ne peut pas nous inciter à démanteler notre dispositif, il ne peut que nous inciter à multiplier les efforts diplomatiques vers ces pays émergents pour qu'ils intègrent ce nouveau cadre et par ailleurs, peut-être, de notre côté, pour l'ensemble des pays de l'OCDE, à être plus souples en attendant que la situation de ces pays soit normalisée.

Sur le coût des procédures, je crois que Jérôme Cazes a donné des indications, auxquelles je souscris largement. De notre côté, nous avons toujours essayé de rendre les conventions passées avec la COFACE les plus incitatives possibles. Vous aurez noté que, dans les deux dernières conventions, me semble-t-il, au moins, il y a des procédures qui encouragent aux gains de productivité et qui obligent la COFACE à nous rétrocéder une partie des gains de productivité qu'elle effectue. Et, naturellement, nous souhaitons maintenir de tels dispositifs. Il est clair que les dispositifs qui ont le plus d'originalité et qui sont éventuellement les plus intéressants pour aider des cas spécifiques ou pour prendre des risques spécifiques - je pense à la garantie de change ou à l'assurance-prospection - sont évidemment ceux qui, en termes de gestion, sont les plus lourds, les plus coûteux. Là, il y a effectivement un équilibre à trouver entre le coût administratif engendré et le volontarisme de notre politique.

Sur la question de la crise, puisque le point a été soulevé : ce n'est pas une question facile, et je me garderai, à ce stade, de vous indiquer quel sera l'impact de la crise sur le compte de la COFACE. Je voudrais simplement faire deux réflexions. La première, c'est que nous sommes extrêmement attentifs à l'évolution du risque pour l'ensemble des pays émergents, et chaque fois que nous constatons un accroissement du risque, la commission des garanties décide de ne plus prendre d'affaires sur les pays dont on a le sentiment qu'ils sont sur le point de connaître des défaillances ou qu'ils ont un risque élevé de défaillance. De ce point de vue, l'ensemble des capteurs que nous avons par le Fonds monétaire international, la Banque mondiale, le Club de Paris, etc., en plus des analyses propres faites par la COFACE, nous sont utiles pour essayer d'optimiser le risque.

Faut-il pour autant, face à la crise actuelle, adopter une stratégie que je qualifierais de purement budgétaire, c'est-à-dire « couper dans le risque » ? Je ne pense pas, et, pour l'instant, ce n'est pas ce que nous avons fait. Il nous semble qu'il y a une tendance plus grande des entreprises à aller vers l'assurance-crédit, et la recommandation que nous aurions tendance à donner au ministre consisterait plutôt à accompagner cet effort. Parce que nous allons connaître un très fort ralentissement, il nous semble que, dans cette période de fort ralentissement, il faudra, au contraire, que l'on utilise la garantie publique, dont on voit bien dans d'autres domaines à quel point elle est importante, pour soutenir un petit peu l'économie française. Nous avons déjà pris quelques mesures qui vont dans cette direction, il y en a d'autres sur lesquelles nous réfléchissons.

Dans les mesures que nous avons prises, j'attire votre attention sur le fait que, désormais, les crédits cofacés sont éligibles au mécanisme de la SFEF. Peut-être un mot d'explication. Lorsqu'une banque a consenti un crédit et que ce crédit a bénéficié de la garantie de la COFACE, cette banque peut apporter ce crédit en collatéral pour obtenir du refinancement. Donc, c'est une aide que nous apportons par ce biais à nos entreprises exportatrices.

De la même manière, nous avons récemment assoupli les mécanismes de caution. Pendant très longtemps, les entreprises n'étaient pas très demandeuses de garantie sur les cautions qu'elles étaient obligées de délivrer ; on constate une demande plus grande en la matière. Nous avons réagi en décidant de lever un certain nombre de contraintes, notamment des contraintes de risques. Je ne sais pas, puisque je parle en public, si je peux citer le nom de l'entreprise, mais d'ores et déjà, il y a au moins deux entreprises qui ont bénéficié de dispositifs où nous avons excédé ce qu'étaient les limites normales antérieures à la crise actuelle. Nous réfléchissons à d'autres dispositifs pour aller au-delà du plafond de garantie, pour soutenir les PME par exemple.

Donc, notre sentiment, c'est que la COFACE est en soi un mécanisme contra-cyclique. Naturellement, les risques augmentant, les entreprises vont y aller davantage. Et il faut que nous répondions à cela par l'acceptation d'une prise de risques plus grande pour soutenir l'économie française. C'est pour nous un instrument important de politique économique.

M. Jean ARTHUIS, président . - Sur ce point particulier, Monsieur le directeur général, nous comprenons bien que, pour les contrats à venir, il s'agit de ne pas se replier sur soi, ce qui aurait pour conséquence d'aggraver les effets de la crise. Néanmoins, la COFACE porte un certain nombre de créances qui pouvaient être, au 31 décembre 2007, jugées parfaitement recouvrables. Est-ce que les manifestations de la crise remettent en cause le niveau de provisionnement à un certain nombre de créances ? Ça, c'est pour le passé.

M. Xavier MUSCA . - A ce stade, non.

M. Jean-Pierre FOURCADE, rapporteur spécial . - Dans le cadre du dispositif de refinancement de l'économie, vous acceptez des crédits cofacés. Est-ce également le cas pour des PME ?

M. Xavier MUSCA . - Oui. Ce sont de bons collatéraux.

M. Jean-Pierre FOURCADE, rapporteur spécial . - C'est souhaitable dans la période actuelle.

M. Xavier MUSCA . - Dans la même rubrique, Monsieur le Président, je voulais vous indiquer que, de notre point de vue, la COFACE a un rôle de soutien à notre stratégie générale. Je vais prendre deux exemples. Concernant la question du nucléaire, il est clair que nous allons vers une augmentation des exportations de centrales nucléaires à l'étranger - c'est tout à fait souhaitable. Il y a l'exemple de l'Afrique du Sud. Il est clair que c'est un risque important, d'un montant unitaire important, qui va être concentré sur un faible nombre de pays : l'Afrique du Sud, la Chine, la Lituanie, etc. Il est vrai que c'est une augmentation du risque, et c'est une politique plus risquée. Il nous semble qu'il n'y a pas de doute à avoir, néanmoins, sur le fait que nous devons accompagner ce mouvement. Il en va de même en matière aéronautique, puisque la COFACE est sollicitée de manière croissante, et nous anticipons que la demande de garanties émanant d'EADS pour l'an prochain sera, significativement, deux fois plus importante en 2009 qu'en 2008.

M. Jean-Pierre FOURCADE, rapporteur spécial . - Vous accordez une garantie de change à 100 % pour EADS. C'est la seule entreprise qui bénéficie de ce taux.

M. Xavier MUSCA . - Voilà pour la manière dont nous concevons notre rôle. Il est clair que ceci, encore une fois, implique une prise de risque supplémentaire, mais il nous semble normal que nous le fassions.

Quelques mots, peut-être, sur les questions bilancielles que vous évoquiez. Ce sont des débats que nous avons très régulièrement avec nos amis de la Cour des comptes. Pardonnez-moi, je suis assez peu comptable ; donc, j'ai du mal à rentrer véritablement dans ce débat. J'ai tendance, comme Emmanuel Glimet, à considérer la COFACE, ainsi que les fonds d'épargne au demeurant, comme une sorte de trust : ils ont leur vie propre et leur inclusion dans le bilan de l'Etat n'est nullement une nécessité, sous réserve, naturellement, de la nécessaire transparence. Pour dire les choses autrement, à ma connaissance, les risques portés par Hermès et l'ensemble des flux financiers qui transitent par Hermès en Allemagne ne sont pas retracés dans les comptes de l'Etat allemand ; et il en va de même pour la plupart de nos autres partenaires. Je ne vois pas très bien pourquoi la France ferait exception. En revanche, il y a évidemment une question qui est totalement légitime, qui est la parfaite information du Parlement, puisque, incontestablement, il y a un risque...

M. Jean ARTHUIS, président . - C'est que nous avons constitutionnalisé l'exigence de sincérité des comptes publics. Je ne sais pas quelle traduction il faut donner à cela, mais il faut que les engagements hors bilan apparaissent comme des engagements hors bilan et qu'il n'y ait pas d'ambiguïté.

M. Michel CHARASSE, rapporteur spécial . - Tant que le décret sur la comptabilité publique n'aura pas été refondu, comme je le réclame avec insistance, on sera soumis à des interprétations variables, diverses, variées et pas toujours souhaitables. Donc je souhaite, Président, que le ministère des finances procède rapidement à la refonte du décret de 1962, parce que, pour l'instant, on reproche à la Cour des comptes de faire ceci ou cela mais la Cour des comptes n'a pas de règles, donc elle suit les règles qui lui semblent découler de la loi organique sans aucun autre texte. Monsieur le directeur général, vous n'êtes pas concerné, ni même Philippe Josse : c'est ce qui tient lieu de direction de la comptabilité publique aujourd'hui. Il faut refondre ce décret.

M. Xavier MUSCA . - Je ne reproche rien à la Cour des comptes. Ce que je veux dire par là, c'est que l'on est face à un animal, comme cela a été dit, sui generis , extrêmement ambigu. On peut décider qu'on le met dans les comptes de l'Etat, ou décider qu'on le met en dehors des comptes de l'Etat. Je ne suis pas comptable et je ne sais pas quelle est la bonne solution d'un point de vue comptable.

M. Michel CHARASSE, rapporteur spécial . - C'est celle qui ne nuit pas aux intérêts nationaux.

M. Xavier MUSCA . - C'est celle qui ne nuit pas aux intérêts nationaux. Dans cette optique-là, je suis attentif à ce que font nos partenaires et je suis attentif à l'impact que cela peut avoir sur la qualification maastrichtienne. Donc, je pense que la situation actuelle, dès lors qu'elle est transparente, ne nuit pas à la sincérité. Quant à la question du caractère maastrichtien ou non du prélèvement, je dirais la chose suivante, et nous avons souvent des débats avec Philippe Josse sur ce sujet. Premièrement, il me semble qu'il est bon qu'il y ait une règle du jeu. L'interprétation donnée par Eurostat de ces prélèvements est contestable ; son seul mérite, c'est qu'elle nous donne une règle du jeu sur l'ampleur du prélèvement maastrichtien. A titre personnel, j'ai tendance à penser que, quoi qu'il arrive - et Philippe Josse, je crois, est d'accord avec moi -, il convient de laisser sur le compte de la COFACE un matelas de sécurité pour les raisons que nous venons de dire. C'est-à-dire que nous avons face à nous des risques mal identifiés, forcément, par définition ; et plus nous prenons des gros risques sur un certain nombre de pays - j'ai parlé de l'Afrique du Sud, de la Chine -, plus il faut que nous laissions sur le compte de la COFACE un montant déterminé qui évite qu'une éventuelle défaillance d'un pays émergent ne se répercute directement sur le budget de l'Etat.

Au-delà de cela, quelle est la valeur de l'interprétation d'Eurostat ? Cette interprétation a une valeur, si j'ose dire : c'est que la Commission européenne s'appuie sur cette interprétation-là, et uniquement sur cette interprétation-là, pour donner son chiffre à elle du déficit maastrichtien. Donc, ce n'est pas un acte juridique que fait Eurostat. Ce qui se transforme ensuite en acte juridique, c'est que la commission dit : « L'Etat français compte comme il veut. Moi, je considère comme mon interprétation que le déficit maastrichtien, c'est ça. » Et c'est sur cette base-là que s'enclenchent les éventuelles procédures prévues par le pacte de stabilité. C'est ainsi que les choses évoluent.

Dernier élément - et ensuite, je laisse la parole à Philippe Josse - sur les questions d'APD. Cela a été dit, je crois, en matière de déclaration à l'APD de créances commerciales ayant fait l'objet d'annulations, nous procédons purement et simplement à l'application des règles du CAD, et nous ne nous permettons pas d'en interpréter le sens ou d'en juger de la pertinence. Il faut être vigilant face au fait que les procédures de remboursement anticipé ou d'annulation ont permis, dans un passé récent, de gonfler les résultats de la COFACE et que c'est effectivement quelque chose qui va cesser. Car une grande partie de la dette cofacée qui faisait l'objet de rééchelonnements a diminué du fait des procédures d'annulation de dettes ou encore, pour un certain nombre de pays - je pense à la Russie, à l'Algérie, à l'Angola -, des remboursements anticipés. Donc, en termes de finances publiques, ce qui est clair, c'est que les montants des prélèvements que nous pourrons effectuer dans les années à venir seront en diminution très significative par rapport aux dix dernières années. Pardon d'avoir été long, Monsieur le Président.

M. Jean ARTHUIS, président . - Merci, Monsieur le directeur général. Nous reviendrons tout à l'heure sur les considérations maastrichtiennes, si vous permettez. La parole est à Monsieur le directeur du budget.

M. Philippe JOSSE, directeur du budget . - Merci, Monsieur le Président. Beaucoup de choses ont été dites, je vais donc me borner à quelques observations complémentaires. Première observation : les mécanismes dont on parle, qui sont des mécanismes par lesquels les entreprises qui exportent sont financièrement aidées, ont été assez systématiquement élargis depuis quelques années. Il y a eu plusieurs trains de mesures, en 2005, en 2006, en janvier 2008 encore. On a augmenté la quotité des crédits qui pouvaient être garantis, on a créé de nouveaux produits avec l'assurance des cautions, on a rendu éligibles pour partie les parts étrangères des contrats. L'histoire de ces mécanismes a donc été celle d'un élargissement.

Deuxième observation : pour l'avenir, est-ce qu'il faut aller plus loin ? Pourquoi pas ? Je pense qu'il appartiendra au gouvernement d'en décider. Mais ce à quoi nous sommes attentifs, c'est à ce que l'on garde un équilibre entre l'efficacité des aides à l'exportation, d'une part, et la protection des finances publiques, d'autre part. Nous souhaitons garder une certaine vigilance, sur le fait de conserver une partie de la quotité des créances qui ne soient pas garanties, de manière à éviter les effets de levier excessifs. Au fond, l'expérience récente que nous avons est celle d'une crise d'endettement fondée sur des effets de levier excessif. Donc, dans la gestion de nos propres mécanismes, sachons tirer les enseignements de cette crise, bref : préserver un équilibre entre le souci d'aider les exportations et la protection des finances publiques.

D'où ma troisième observation sur les prérogatives respectives des maisons « Trésor » et « Budget ». Je joindrai mon sourire à celui du Président Fourcade et à celui de Xavier Musca. L'essentiel dans l'instruction technique du dossier, c'est de conserver la préoccupation de ce double équilibre. On veillera à ce que tout cela reste fluide, voire s'améliore.

Ma quatrième série d'observations - c'est peut-être le point sur lequel vous m'attendez le plus - concerne les relations financières entre l'Etat et la COFACE. D'abord, quelques chiffres. Sur les aspects de stock, de bilan, il y a deux chiffres qu'il faut avoir présents à l'esprit. Il y a d'abord le chiffre de 42 milliards d'euros : c'est l'encours actuel des créances qui ont été cofacées, qui ont été garanties dans le cadre de l'assurance-crédit. Le second chiffre, c'est 15 milliards d'euros - le Président Fourcade l'a cité tout à l'heure : c'est l'encours des créances qui ont fait l'objet d'une indemnisation par l'Etat. Ça, c'est sur les aspects de stock. Sur les aspects de flux, au fond, tout cela est assez simple. Il y a des choses qui sortent de la caisse et il y a des choses qui entrent dans la caisse. Ce qui sort de la caisse, c'est très peu de choses aujourd'hui : les indemnisations, d'une part, mais elles sont très faibles - espérons que cela dure, cela risque d'être quelque chose de relativement conjoncturel -, et la rémunération de la COFACE. En nombre de dizaines de millions d'euros, ce n'est pas grand-chose. Ce qui rentre dans la caisse, pour le coup, conjoncturellement, c'est beaucoup plus : ce sont les primes versées par les assurés, les produits financiers et surtout les récupérations au titre de ces fameux 15 milliards d'euros qui ont été indemnisés par le passé. Ces récupérations, conjoncturellement, sont importantes parce que le flux des affaires a fait, en quelque sorte, que des sinistres très importants sont survenus dans les années 80 et au début des années 90 et que, maintenant, du fait de retours partiels à meilleure fortune, l'Etat récupère une partie de ce qu'il a engagé par le passé. Et tout cela débouche sur un résultat qui est que, dans la caisse, au début de l'année 2008, il y avait environ 5 milliards d'euros.

D'où une série d'observations complémentaires sur les prélèvements qu'effectue l'Etat sur la liquidité du compte. Première observation : ces prélèvements sont totalement légitimes. D'abord, il vaut mieux que l'Etat diminue sa dette plutôt que de laisser de l'argent stocké à la COFACE. De plus, quand l'Etat prélève, il ne fait, au fond, que prélever des choses qu'il a indemnisées par le passé. Deuxième point : est-ce que, pour autant, il faut tout prendre ? Je pense que la réponse est non. Je joins ma voix à celle de Xavier Musca pour dire que, premièrement, il faut une liquidité prudentielle sur ce compte, avoir une évaluation de ce qui est susceptible de sortir, en quelque sorte, de la caisse dans l'avenir, de manière à garder un matelas de sécurité. Après, il faut débattre du quantum , mais sur le principe, nous sommes d'accord. Par ailleurs, il faut le faire de manière transparente vis-à-vis du Parlement. J'insiste sur un point : dans le cadre des travaux de certification qui ont été conduits, il y a un peu plus d'un an, avec la Cour des comptes, nous avons pris l'engagement qu'il n'y ait pas de prélèvement qui ne soit pas prévu à l'état, soit des projets de loi de finances, soit des collectifs, et c'est une règle qui a été totalement respectée depuis que l'engagement a été pris, c'est-à-dire qu'il n'y a plus de prélèvement qui ne soit pas prévu dans les documents qui sont soumis au vote du Parlement.

Point supplémentaire sur la décision d'Eurostat : même si ce n'est pas une décision de justice, je ne vais pas la commenter. Tout ce que je peux dire, c'est que je suis très favorable à votre idée, Monsieur le Président, d'ausculter exactement comment se fabrique cette décision. Je suis très preneur de lire ce que vous pourrez écrire à l'issue de cette auscultation. Il nous arrive à nous aussi d'avoir des interrogations sur les cheminements qui peuvent conduire à prendre telle ou telle position doctrinale aux cas concrets. Cela a quand même produit un revirement de jurisprudence, parce que c'est bien comme cela qu'il faut l'appeler. Le revirement de jurisprudence d'Eurostat en février-mars 2008 a conduit le gouvernement français à avoir 0,1 point de PIB de déficit public supplémentaire, dû à la non-permanence des méthodes comptables.

Dernière considération sur les problèmes de certification et la réserve de la Cour des comptes. Je dirai à peu près la même chose que Xavier Musca. On est face à un instrument qui est hybride, et il faudrait faire attention à ce qu'au nom de l'interprétation de la norme comptable - on est en comptabilité générale, on est donc sur l'interprétation des normes comptables de 2004 et pas sur le décret de 1962 -, on ne soit pas conduit à modifier la nature de l'instrument et à le publiciser à l'excès, alors qu'il existe actuellement un équilibre qui, je crois, est bien décrit dans le rapport de la Cour des comptes. En revanche, ce qu'il faut, c'est bien veiller à ce que l'information soit exhaustive et soit correcte. J'ai regardé, en préparant cette audition, le compte général de l'Etat ; on a quand même une dizaine de pages, dans l'annexe, qui explicitent la nature des engagements hors bilan pris par l'Etat dans le cadre de la procédure d'assurance-crédit.

M. Jean ARTHUIS, président . - Les 42 milliards d'euros apparaissent en engagements hors bilan ?

M. Philippe JOSSE . - Non. Il y a deux niveaux.

M. Jean ARTHUIS, président . - Ils apparaissent comme des engagements hors bilan pour 42 milliards, puisque c'est une garantie qui a été donnée par l'Etat.

M. Philippe JOSSE . - Il faudrait que je vérifie. Vous me prenez en défaut, subitement ; je n'ai pas lu suffisamment attentivement les pages en question, mais elles existent. Donc, on va vérifier tout de suite. Cela paraît logique que le stock des garanties figure dans l'annexe du bilan de l'Etat.

Dernier point sur le décret de 1962, sur lequel le rapporteur spécial Charasse a bien voulu m'interroger. Je le rejoins sur le fait qu'il faut aujourd'hui mettre en chantier la révision du décret de 1962, et nous avons commencé les travaux. Donc, bien entendu, nous tiendrons la commission des finances informée. Je crois que c'est une évolution tout à fait importante pour mettre en harmonie ce que l'on appelle le décret comptable avec la LOLF.

M. Jean ARTHUIS, président . - Très bien. Je remercie Philippe Josse. Toutes ces indications sont, pour nous, extrêmement éclairantes, même si cela reste encore un peu complexe. Sur Maastricht, nous avons eu un débat récent en commission des finances pour dire que l'on était dans le domaine de « l'habillage de fenêtres », la « window dressing » , comme diraient les Anglo-Saxons. Quand on a un engagement hors bilan, on le fait apparaître comme un engagement hors bilan. On a l'impression qu'il y a une espèce de jeu subtil entre les différents Etats membres pour inclure ou ne pas inclure dans les éléments maastrichtiens. Tout cela nous paraît complètement dépassé. L'exigence que nous avons, nous, parlementaires, c'est que l'on nous présente des comptes publics qui soient marqués par la sincérité. Donc, s'il y a des engagements de 42 milliards pris par l'Etat pour garantir des créances, cela doit apparaître comme un engagement hors bilan.

J'ai compris que, dans le fonctionnement de la COFACE, on a un premier stade de garantie, engagement hors bilan, qui fait l'objet de l'encaissement d'une prime. Et puis, s'il y a sinistre, si le débiteur ne peut pas faire face à ses obligations, l'Etat se substitue au débiteur et, à ce moment là, cela devient une créance de l'Etat sur débiteur. Est-ce bien cela ?

M. Jérôme CAZES . - C'est toujours une créance parce qu'on espère un jour être remboursé.

M. Jean ARTHUIS, président . - Mais, à ce moment-là, qui assure la trésorerie ?

M. Jérôme CAZES . - C'est la COFACE. C'est ce qu'expliquait tout à l'heure Monsieur le directeur. On a eu pendant longtemps des prélèvements, et ce compte opérait des prélèvements.

M. Jean ARTHUIS, président . - Donc, la COFACE fait l'avance pour le compte de l'Etat.

M. Jérôme CAZES . - Juridiquement, on dit que c'est un animal bizarre. Mais c'est quand même quelque chose qui existe depuis 1948, il y a une cohérence interne. Les polices sont COFACE, s'il y a un contentieux au tribunal, c'est COFACE qui va au tribunal. Donc, il y a écrit COFACE à chaque endroit.

M. Jean ARTHUIS, président . - Et, juridiquement, c'est la COFACE qui détient la créance sur le débiteur.

M. Jérôme CAZES . - L'ensemble du système est COFACE.

M. Jean ARTHUIS, président . - Donc, tout ceci relève des engagements hors bilan.

M. Jérôme CAZES . - Totalement.

M. Jean ARTHUIS, Président . - Cependant, il y a une situation nette. Il faudrait quand même que l'on sache où l'on met votre coussin de sécurité. Soit il est la propriété de l'Etat, soit si il est celle de la COFACE.

M. Jérôme CAZES . - Il est COFACE. C'est l'Etat qui nous autorise à garder éventuellement certains montants à titre de caisse.

M. Xavier MUSCA . - Implicitement, le compte public de la COFACE est un établissement de crédit qui a la garantie de l'Etat et qui a une sorte de capital virtuel. Ce capital virtuel, c'est ce montant que l'on laisse en caisse.

M. Jean ARTHUIS, président . - Au fond, c'est une créance que l'Etat détient sur la COFACE, et c'est sur cette créance que, de temps en temps, vous appelez un peu d'argent, parce qu'après tout, cela appartient à l'Etat. On pourrait considérer que c'est une créance que vous avez provisionnée à 100 %, et c'est pour cela que vous ne la mettez pas dans votre bilan.

M. Xavier MUSCA . - Oui, si vous voulez. C'est un établissement de crédit auquel on donne notre garantie. On se fait rémunérer pour notre garantie en prélevant le résultat annuel, d'une certaine manière.

M. Philippe JOSSE . - Juste un point en complément. D'abord pour préciser que le compte général de l'Etat, dans son annexe, retrace bien la totalité de l'encours, et c'est même avec un luxe de précisions tout à fait important.

M. Jean ARTHUIS, président . - Plus les 15 milliards.

M. Philippe JOSSE . - Oui, il y a les deux approches qui apparaissent dans le compte général de l'Etat. Deuxième observation pour m'inscrire dans ce que disait Xavier Musca à l'instant : au fond, on est face à une obligation pour l'Etat de garantir la liquidité du compte globalement. En revanche, ce n'est pas l'Etat qui est appelé, sinistre par sinistre, à payer. Il paye à partir du moment où, globalement, la liquidité du compte est insuffisante, d'où le caractère effectivement très bizarre de l'animal juridique dont on parle et d'où le fait que le traitement comptable n'est pas complètement évident.

M. Jean ARTHUIS, président . - Le Président Arnaud a une observation à faire.

M. Jean-Loup ARNAUD . - Si vous le permettez, Monsieur le Président, je vais demander à Valérie Altbaum, qui a suivi cette question, de vous décrire ce que nous avons constaté dans ce jeu subtil des engagements hors bilan.

Mme Valérie ALTBAUM, expert près la Cour des comptes . - Pour revenir un moment sur ce compte, en fait, la problématique est que ce compte n'a pas de nature juridique, on ne sait pas où le mettre. Premier exercice, certification des comptes 2006 de l'Etat : ce compte était détaillé en annexe du compte général de l'Etat. En 2007, comme il y a une différence de point de vue, ce compte n'apparaît plus dans les comptes de l'Etat. Il y a un descriptif des opérations menées avec la garantie de l'Etat par la COFACE, mais ce compte a été retiré du compte général de l'Etat dans son annexe pour 2007. Effectivement, une mention a été intégrée dans les comptes consolidés Natexis, puisque COFACE est consolidé dans les comptes Natexis ou dans les comptes COFACE, mais c'est une mention littéraire, qui n'a répondu que partiellement aux attentes de la Cour. Donc, il y a une vraie différence de points de vue sur la nature juridique de ce compte.

J'aimerais juste revenir sur un point. Le traitement comptable de ce compte ne modifie en rien la nature de l'instrument, en fait. Le traitement comptable doit retracer la nature et un versement n'a pas de conséquence sur la nature. De mémoire - mais je peux me tromper -, je ne suis pas sûre que les 42 milliards soient retracés dans l'annexe.

M. Jean ARTHUIS, président . - Monsieur de Montesquiou, depuis quelques quarts d'heure déjà, souhaite intervenir.

M. Aymeri de MONTESQUIOU . - Merci, Monsieur le Président. Tout à l'heure, Monsieur Fourcade a dit que la COFACE avait un effet de levier. Archimède doit souffrir de l'état du commerce extérieur français. Là n'est pas ma question. Vous dites que la COFACE s'engage sur des contrats de centrales nucléaires. Je suis un peu surpris, parce qu'il doit y avoir un risque souverain, puisque ce sont les Etats qui prennent les engagements : soit les provinces chinoises, soit l'électricité chinoise, soit l'Etat chinois ; de même en Afrique du Sud. Donc je ne vois pas pourquoi la COFACE intervient.

M. Jérôme CAZES . - L'essentiel des risques que nous couvrons sont des risques souverains, c'est-à-dire des opérations dans des pays émergents garanties par les Etats de ces pays émergents. Certes, on a un développement d'affaires « privées », mais c'est bien à cela que servent majoritairement les crédits publics COFACE : à garantir le risque qu'un Etat souverain de pays émergent soit défaillant. Ce qui s'est passé dans les années 80, c'est la Pologne, c'est tout ce qu'a cité Monsieur Musca ; tous ces pays ont été défaillants. Un Etat ne meurt pas, ce qui fait que, tant que l'on n'a pas annulé la dette, il reste redevable de sa créance, et c'est toutes ses créances que l'on continue à porter au bilan jusqu'au moment où il paye ou au moment où l'on annule, mais on traite bien, pour l'essentiel de notre métier, de la créance souveraine.

M. Aymeri de MONTESQUIOU . - Je suppose qu'il s'agissait aussi de contrats d'armement avec l'Irak parmi les garanties non honorées.

M. Jean ARTHUIS, président . - Nous n'avons pas le temps d'aborder le détail de ces créances. Monsieur Fourcade, dernier intervenant.

M. Jean-Pierre FOURCADE, rapporteur spécial . - J'ai une question à poser au directeur du budget. Dans la loi de finances pour 2008, vous aviez prévu un prélèvement sur la trésorerie de la COFACE de l'ordre de 3 milliards d'euros. La requalification par Eurostat fait perdre 1,3 milliard, ce qui veut dire que, dans l'augmentation du déficit maastrichtien qui va résulter des comptes 2008, il y a 0,07 point qui résulte uniquement de cette décision d'Eurostat. Nous sommes bien d'accord ?

M. Philippe JOSSE . - Oui.

M. Jean-Pierre FOURCADE, rapporteur spécial . - Par conséquent, cela vaut la peine d'aller voir en fonction de quelles règles, de quels mécanismes, cette décision a été prise.

M. Xavier MUSCA . - Absolument. Si vous me le permettez, Monsieur le Ministre, ma remarque là-dessus est la suivante. Je trouve que l'existence d'un organisme européen de normalisation, qui permet de savoir ce que font l'Italie, la France, l'Allemagne, et de les juger à la même aune, est tout à fait légitime. La difficulté que nous avons, c'est à la fois les changements de jurisprudence et la procédure qui justifie le changement de jurisprudence. C'est-à-dire que nous sommes parfois mis devant le fait accompli sans avoir eu la possibilité, véritablement, d'anticiper ce changement de jurisprudence. Donc, à titre personnel, je trouve qu'il est de grand intérêt d'essayer de bien comprendre comment cela fonctionne et quelle est la nature des éléments qui permettent de tels changements. Parce que la manière dont fonctionne Eurostat, c'est qu'ils prennent des sujets les uns après les autres, ils les regardent et ils établissent une jurisprudence. Donc, une année donnée, ils n'ont pas regardé le sujet des garanties export, l'année suivante, ils examinent le sujet des garanties export ; et l'année où ils l'examinent, ils alignent tout le monde sur les garanties export, avec parfois, pour nous, notamment pour Philippe Josse, une absence de visibilité.

M. Jean ARTHUIS, président . - Si vous le voulez bien, Mesdames et Messieurs, nous allons maintenant mettre un terme à cette audition pour suite à donner, audition qui a été tout à fait intéressante. Elle nous a permis de mieux comprendre la relation qui existe entre l'Etat et la COFACE. Nous n'avons peut-être pas abouti à une idée de la traduction comptable que nous devons donner dans les comptes de l'Etat aux opérations traitées pour le compte de l'Etat par la COFACE. Je ne pense pas que l'on puisse conclure aujourd'hui. En revanche, Monsieur le rapporteur spécial, je suggère que nous mettions à profit les prochaines semaines, qui vous permettront d'investiguer dans ce sens.

M. Jean-Pierre FOURCADE . - Nous verrons cela l'année prochaine !

M. Jean ARTHUIS, président . - Peut-être que l'on traitera séparément Eurostat, parce que c'est un sujet en soi. Mais nous espérons, d'ici la publication du rapport - que je souhaite que la commission des finances nous autorise à publier - pouvoir esquisser une proposition, quant au traitement comptable, qui traduise une exigence de sincérité des comptes publics. Mais le ministère parviendra peut-être bientôt à une solution en ce sens ?

Je remercie le directeur général du Trésor et de la politique économique, le directeur du budget, le directeur général de la COFACE, le directeur des engagements de moyen terme, la directrice financière. Je remercie naturellement la Cour des comptes pour l'excellence de son rapport. Je remercie surtout Paul Girod et Michel Charasse, qui ont pris l'initiative de demander cette enquête à la Cour des comptes, en application de l'article 58-2 de la LOLF. Je remercie enfin Jean-Pierre Fourcade et Edmond Hervé, qui ont pris le relais et qui ont contribué à animer cette audition pour suite à donner.

La commission autorise-t-elle la publication de l'enquête de la Cour des comptes, ainsi que le compte-rendu de cette audition, sous la forme d'un rapport d'information ? Pas d'objection : il en est donc ainsi décidé .

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