2. Vers l'amélioration des conditions d'attribution des aides de la collectivité aux communes ?

L'article 17 de la loi organique n° 2007-1719 du 7 décembre 2007 tendant à renforcer la stabilité des institutions et la transparence de la vie politique en Polynésie française a notamment modifié les conditions dans lesquelles la Polynésie octroie des aides aux communes. L'article 157-2 nouveau de la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 portant statut d'autonomie de la Polynésie française, prévoit une nouvelle procédure d'attribution des aides.

* Avant l'introduction de la nouvelle procédure de l'article 157-2 de la loi organique , l'assemblée de la Polynésie française votait une enveloppe globale de crédits de paiement destinés aux communes par secteur d'intervention (chapitre 903 « partenariat avec les collectivités »).

Les aides financières octroyées individuellement aux communes faisaient ensuite l'objet d'un arrêté pris en conseil des ministres.

En 2007, les communes ont reçu, toutes subventions d'investissement confondues, une aide financière de 38 millions d'euros, soit environ 30% de la participation de la Polynésie française au FIP.

Ces subventions ont concerné les domaines suivants :

- construction de bâtiments (bâtiment scolaire, salle de sport, atelier) ;

- électrification ou extension du réseau électrique ;

- réfection des routes ;

- acquisition de matériel (excavateur, citerne, tracto-pelle, véhicules, bateaux de liaison, broyeur de végétaux, bus de transport etc).

Ces subventions ont représenté entre 50 et 90 % des investissements réalisés.

Il convient de noter que la Polynésie française est aussi intervenue directement (sans octroi de subvention) pour le compte des communes dans de nombreux secteurs, notamment pour les équipements structurants.

* La mise en oeuvre de la procédure consultative de l'article 157-2 de la loi organique

Par délibération n°2008-30 /APF du 24 juin 2008, l'assemblée de la Polynésie française a modifié le règlement intérieur de l'assemblée afin d'y intégrer les modalités d'organisation et de fonctionnement de la commission de contrôle budgétaire et financier.

La commission a été mise en place par arrêté n°89 /2008/APF du 31 juillet 2008 et a organisé cinq réunions depuis sa création.

L'assemblée de la Polynésie française n'a pas encore fixé les conditions et les critères d'attribution des aides financières aux personnes morales.

* La question des marchés publics

L'article 49 du statut organique de 2004 dispose que la Polynésie française fixe les règles applicables à la commande publique des communes , de leurs groupements et de leurs établissements publics.

L'article 15 de la loi organique n° 2007-1719 du 7 décembre 2007 tendant à renforcer la stabilité des institutions et la transparence de la vie politique en Polynésie française a réécrit l'article 49 du statut afin de préciser que la collectivité fixe ces règles « dans le respect des principes de liberté d'accès, d'égalité de traitement des candidats, de transparence des procédures, d'efficacité de la commande publique et de bon emploi des deniers publics ».

M. Jacques Witkowski, alors secrétaire général du haut commissariat, indiquant à vos rapporteurs que la collectivité avait souhaité porter de 45.000 à 230.000 euros le seuil à partir duquel les obligations de publicité et de mise en concurrence doivent s'appliquer aux marchés publics des communes, a précisé que le haut commissaire s'était opposé à cette modification.

Mme Marie-Christine Lubrano, magistrat au tribunal administratif de Papeete, a souligné les risques que présenterait la fixation par la collectivité de seuils très élevés pour l'application des procédures de mise en concurrence, au moment où les communes vont devoir procéder à des équipements importants pour assumer leurs compétences.

La question foncière en Polynésie française

La situation de la Polynésie française au regard du droit foncier comporte de nombreux obstacles au développement économique et à la mise en place d'une fiscalité locale :

- défaut de cadastrage, le cadastre de Tahiti n'étant pas achevé ;

- absence de partage des terrains indivis, résultant de successions non réglées sur plusieurs générations ;

- nombreux litiges et actions d'expulsion à l'encontre des occupants sans droit ni titre, qui tentent d'acquérir la propriété par usucapion (occupation trentenaire).

Ainsi, Mme Tamatoa Bambridge et M. Philippe Neuffer relèvent que « La question foncière est aujourd'hui au coeur du débat de la société multiculturelle de Polynésie française. Le code civil s'applique officiellement dans toute la Polynésie française depuis 1945 puisqu'il n'y a plus, comme en Nouvelle-Calédonie, de distinction entre les citoyens français régis par le code napoléonien et les sujets français (statut civil particulier) régis par un code spécial. Toutefois, sur le plan foncier, l'application du code civil depuis le XIXe siècle, loin d'aboutir à une incorporation des normes traditionnelles a, au contraire, participé à la constitution d'un pluralisme culturel et juridique important. » 57 ( * )

En outre, dans certaines communes, comme Nuku Hiva (Marquises) la collectivité détient 70 % des terrains. Les élus ont expliqué à vos rapporteurs que dans le cadre du statut de 1984, l'État rétrocéda l'ensemble de son domaine au territoire, qui devait ensuite en céder 50 % aux communes afin de constituer leur domaine public. Mais le territoire ne procéda jamais à ce transfert de propriété, la disposition relative à la cession de 50 % du domaine du territoire aux communes ayant même été supprimé dans le statut de 1996.

M. Serge Samuel, procureur général près la cour d'appel de Papeete, a indiqué à vos rapporteurs que les procédures judiciaires en matière foncière pouvaient s'étendre sur 5 à 6 ans. Soulignant que l'augmentation du prix des terrains dans certaines îles favorisait l'émergence de revendications de propriété, il a précisé que la construction d'un dispensaire était suspendue à Bora Bora, le terrain communal étant revendiqué par d'anciennes familles royales.

M. Olivier Aimot, premier président de la cour d'appel de Papeete a expliqué qu'en Polynésie française, le lien coutumier avec la terre avait été supprimé en raison d'une application précoce du code civil, ce qui nourrissait aujourd'hui des contestations, alors qu'à Wallis et Futuna et en Nouvelle-Calédonie les règles antérieures avaient été adaptées.

Il a rappelé que l'article 17 de la loi n° 2004-193 du 27 février 2004 complétant le statut d'autonomie de la Polynésie française instituait à Papeete un tribunal foncier compétent pour les litiges relatifs aux actions réelles immobilières et aux actions relatives à l'indivision ou au partage portant sur des droits réels immobiliers. L'organisation et le fonctionnement de ce tribunal devaient être définis par une ordonnance qui n'a jamais été publiée .

M. Olivier Aimot a précisé que les affaires foncières représentaient actuellement la moitié du contentieux général du tribunal de première instance, avec un stock de 600 dossiers et 180 nouvelles affaires par an, et 25 % des affaires devant la cour d'appel.

Expliquant que le tribunal de première instance rendait 130 à 140 décisions en matière foncière par an, il a souligné que la loi n° 96-609 du 5 juillet 1996 portant diverses dispositions relatives à l'outre-mer avait créé une commission de conciliation obligatoire en matière foncière . Lorsque le tribunal de première instance est saisi directement, il renvoie l'affaire à la commission. Si, dans un délai de six mois à compter de sa saisine, la commission n'a pu recueillir l'accord des parties, celles-ci peuvent saisir le tribunal ou reprendre l'instance. Le tribunal de première instance est informé de l'ouverture ou du succès, même partiel, d'une procédure de conciliation.

* 57 Tamatoa Bambridge, Philippe Neuffer, Pluralisme culturel et juridique en Polynésie française : la question foncière, revue HERMES, n° 32-33, 2002, p. 307.

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