C. RÉFLÉCHIR ÉGALEMENT, DANS UNE OPTIQUE D'ENSEMBLE, AUX AUTRES TAXES LOCALES

Les valeurs locatives cadastrales une fois modernisées, les autres recettes fiscales locales souffrent de moins d'inconvénients que la taxe professionnelle. Cependant, la richesse des bases est là aussi très inégalement répartie sur le territoire, ce qui pose la question de la péréquation (cf. infra ).

On peut tout de même relever que la concentration des produits sur les « quatre vieilles » ne doit pas masquer l'extrême complexité et profusion des taxes locales. Un inventaire général du ministère de l'intérieur 138 ( * ) présente ainsi une liste des 51 « principaux » impôts locaux ! Certains ont été réformés depuis, mais le nombre reste important et les procédures difficiles à comprendre pour les élus et pour les contribuables.

en milliards d'euros, pour l'ensemble des collectivités et groupements

2005

Produit des « quatre vieilles »

56,9

Taxe d'enlèvement des ordures ménagères

4,3

Versement transport

5,0

Taxe pour frais de chambre d'agriculture, de commerce et d'industrie

et de chambre des métiers

1,6

Droits de mutation

7,6

Taxes liées à l'urbanisme

0,8

Taxe sur l'électricité

1,4

Taxe sur les cartes grises

1,5

Autres recettes fiscales directes et indirectes

1,0

Total de la fiscalité locale

80,1

Source : direction générale des impôts, état fiscal 1913, résumé général des rôles

En outre, les produits perçus sont extrêmement variables. Si la taxe professionnelle, les taxes foncières, la taxe d'habitation, la taxe d'enlèvement des ordures ménagères, le versement transport et les droits de mutation représentent 92 % du produit total de la fiscalité locale, directe et indirecte, le produit de certaines autres taxes est très faible, ce qui se justifie lorsqu'elles ne s'appliquent que sur une partie du territoire. Parmi ces taxes et impôts, on peut citer les redevances et taxes funéraires (11 millions d'euros en 2007), l'impôt sur les spectacles (33 millions), la taxe de ski de fond (2 millions), la taxe sur les remontées mécaniques (40 millions), la surtaxe sur les eaux minérales (19 millions), la taxe sur l'énergie hydraulique (5 millions), ou la taxe sur les rhums (5 millions).

On peut également mentionner la taxe de trottoirs ou la taxe de pavage, impôts facultatifs perçu par l'Etat au profit des communes ; le rendement de cette dernière était inférieur à 3 millions d'euros en 2001 pour l'ensemble du territoire national. Il serait intéressant en l'espèce de rapprocher le produit perçu du coût de la levée et de la perception de l'impôt.

Certaines de ces taxes locales résultent de l'histoire, mais ont perduré. Il semble souhaitable aujourd'hui de procéder à un « toilettage » de l'ensemble de la fiscalité locale , car les coûts liés à l'existence même de ces impôts sont certainement équivalents, dans certains cas, à leurs produits. Pour autant, ils ont parfois une justification locale forte (stations de ski par exemple), même si leur produit est faible au niveau national.

Par ailleurs, diverses réflexions doivent être menées concernant des ressources fiscales devenues importantes pour les collectivités.

Il en est ainsi des droits de mutation , qui regroupent d'une part les taxes additionnelles communale et départementale aux droits de mutation, d'autre part, le droit départemental d'enregistrement et la taxe départementale de publicité foncière, sur lesquels s'appliquent également une part encore affectée au budget de l'Etat. Les taux sont soit fixés par le législateur, soit plafonnés : tous les départements appliquent par exemple le taux plafond (3,6 %) du droit départemental d'enregistrement.

Le produit perçu par les collectivités et par l'Etat a connu un dynamisme important ces dernières années ; celui affecté aux budgets des collectivités territoriales est ainsi passé de 7,6 milliards en 2005 à 10,1 milliards en 2007, soit +33 % en deux années ! Calculés en pourcentage du prix des biens cédés et donc très liés aux évolutions du marché immobilier, les droits de mutation restent cependant très volatils et l'effet est presque immédiat sur les budgets locaux, car, contrairement à la taxe professionnelle, le décalage entre le calcul de la contribution, son paiement et son versement à la collectivité n'est que de quelques mois.

De plus, cet impôt est très inégalement réparti sur le territoire , puisque son assiette dépend directement de la valeur des biens cédés. Il pourrait alors être envisagé soit une réaffectation du produit à un niveau plus large que celui du département, en compensation d'une autre ressource fiscale, soit un écrêtement permettant d'alimenter le nouveau fonds national de péréquation (cf. infra ).

Dans un contexte de montée en puissance des charges de collecte et de traitements des déchets, conjugué à une pression de plus en plus lourde sur les « quatre vieilles » taxes locales, les collectivités ont régulièrement augmenté les produits votés au titre de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères (TEOM). Au total, 53,8 millions d'habitants sont assujettis à cet impôt facultatif en 2008, pour un produit total de 5 milliards d'euros. On peut d'ailleurs noter le caractère relativement indolore de cette augmentation, puisque cette taxe est prélevée en même temps et sur la même base que la taxe foncière sur les propriétés bâties.

Pourtant, une telle utilisation de la TEOM semble arrivée à saturation et, en lien avec les réflexions générales sur la fiscalité écologique, il est maintenant important d'engager une évaluation de son assiette. Il s'agit notamment de prévoir son élargissement et des possibilités de modulation du taux ou du prélèvement sur le contribuable, notamment en fonction de critères de tri et de recyclage.

Le versement destiné aux transports en commun , dont le produit total s'élevait à 5 milliards d'euros en 2005, a également été utilisé par les collectivités ou leurs groupements comme complément de financement.

Souvent critiqué par les chefs d'entreprises, il est perçu au bénéfice des communes, des communautés urbaines et des autres EPCI compétents pour l'organisation des transports publics, lorsque la population concernée est supérieure à 10 000 habitants. Il est facultatif en dehors de la région Ile-de-France.

L'assiette du versement est constituée par les salaires versés par les entreprises qui emploient plus de neuf salariés. Le taux plafond du versement varie selon la population de la collectivité ou du groupement : en-dehors de la région Ile-de-France, il est égal à 0,55 % lorsqu'elle est comprise entre 10 000 et 100 000 habitants, à 1 % lorsqu'elle est supérieure à 100 000 habitants et il est majoré à 1,75 % pour les collectivités et groupements de plus de 100 000 habitants qui réalisent une infrastructure de transport collectif en mode routier ou guidé. En région Ile-de-France, le taux est fixé par le syndicat des transports d'Ile-de-France (Stif) et il est plafonné à 2,6 % à Paris et dans les Hauts-de-Seine, à 1,7 % en Seine-Saint-Denis et dans le Val-de-Marne et à 1,4 % dans les quatre autres départements (Essonne, Yvelines, Val d'Oise et Seine-et-Marne).

Le produit du versement transport est affecté au financement des dépenses d'investissement et de fonctionnement des transports publics urbains et des autres services de transports publics. Les employeurs procèdent eux-mêmes au versement auprès des organismes chargés du recouvrement des cotisations de sécurité sociale, qui prélèvent une retenue pour frais de gestion. Enfin, pour revenir au débat sur le rôle des collectivités dans la perception effective de l'impôt, on peut noter que le code général des collectivités territoriales permet à la commune ou à l'EPCI d'effectuer « tout contrôle nécessaire » au titre du versement transport, notamment envers les employeurs assujettis.

Une autre imposition pourrait être complétée et étendue : la taxe sur les cessions de terrains nus rendus constructibles du fait de leur classement par un plan local d'urbanisme ou un document d'urbanisme en tenant lieu dans une zone urbaine ou dans une zone à urbaniser ouverte à l'urbanisation. Cette taxe facultative a été créée, à l'initiative du Sénat, par l'article 26 de la loi du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement. Elle connaît un succès certain, puisque, à la date du 10 juillet 2008, 3 735 communes ont pris une délibération pour la mettre en place, mais ses modalités et son périmètre restent à améliorer . Elle est en tout cas une réponse à la question toujours d'actualité de l' imposition des plus-values immobilières .

Proposition de la mission

- Réexaminer l'ensemble des nombreuses taxes locales (autres que les quatre principales), dont les rendements sont parfois faibles.

* 138 Inventaire général des impôts locaux, direction générale des collectivités locales, ministère de l'intérieur, 2003.

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