E. PR NIGEL YOCCOZ, UNIVERSITÉ DE TROMSØ, PRÉSIDENT DU CONSEIL SCIENTIFIQUE DE L'IPEV

Merci. Monseigneur, Monsieur le Sénateur, Monsieur le préfet, chers collègues, travaillant sur les écosystèmes terrestres dans l'Arctique, nous avons deux inconvénients. Nous n'avons pas une espèce emblématique comme l'ours polaire. Souvent, quand on parle de l'Arctique, on prend l'ours polaire comme exemple. Alors, je dirais que les espèces comme le caribou ou le renne suivant le continent sur lequel nous travaillons sont sûrement plus importantes pour les gens dans l'Arctique. Aussi par rapport à l'année polaire internationale, en 1957-58, il n'y a pas eu d'effort de fait côté écosystème. Nous n'avons pas de recul souvent supérieur à dix ou quinze ans, ce qui limite souvent nos perspectives sur les changements que l'on voit aujourd'hui. Ensuite, cela a déjà été dit, l'Arctique est un océan entouré de continents. Ce qu'il faut voir aussi, c'est que la partie Arctique, si on la définit surtout en termes de végétation, constitue essentiellement une petite frange le long de ces continents. Sur cette figure, les différentes zones représentent ce que les gens travaillant sur la végétation arctique définissent en tant que types de végétation et elles dépendent essentiellement de la température en été. Les différentes zones en orange, en jaune et en vert représentent une différence de température au mois de juillet de l'ordre de 5 degrés. Si vous vous rappelez toutes les présentations sur les changements climatiques, les changements attendus sont au moins ou supérieurs à cette différence de 5 degrés. Si vous faites une translation de ces écosystèmes vers le nord de 5 degrés, pour l'essentiel ces écosystèmes disparaissent.

Les écosystèmes arctiques ne sont pas différents de ce que vous avez ailleurs. C'est-à-dire que vous avez d'abord des producteurs primaires, des plantes, ensuite, des herbivores comme les lemmings, les rennes ou les oies des neiges, ensuite, des prédateurs comme la chouette Harfang ou le renard polaire. Une des différences, c'est que certaines de ces espèces sont quand même relativement emblématiques même si elles ne le sont pas autant que l'ours polaire. La chouette Harfang est devenue relativement célèbre avec Harry Potter, même si le lien avec l'Arctique est relativement ténu. Mais, bien sûr, j'y reviendrai, la chouette Harfang pourrait vraiment jouer un rôle tout aussi important en tant que sentinelle des écosystèmes terrestres que l'ours polaire pour les écosystèmes marins. Ce qui différencie peut-être les écosystèmes arctiques terrestres, c'est que les lemmings qui sont un des herbivores essentiels dans ces écosystèmes ont des variations - j'y reviendrai - hélas peut-être avaient des variations cycliques, c'est-à-dire que ces populations de lemmings et il y a plusieurs espèces concernées - là, vous avez à gauche le lemming à collier qui est au Groenland, en Sibérie et au Canada ; à droite, le lemming de Norvège qui est restreint à la Scandinavie et Finlande - pullulent tous les trois, quatre ans, des fois cinq ans et ce sont des variations qui sont absolument énormes en termes de densité. Vous passez de densités qui peuvent monter d'un facteur 100 à 1 000 en l'espace de deux ou trois ans.

Ces fluctuations ont un impact sur le reste de l'écosystème. C'est pour ça qu'ils jouent un rôle clé. Il est difficile de comprendre la dynamique de ces écosystèmes si on n'a pas une bonne idée, si on ne comprend pas les fluctuations de ces petits herbivores (les lemmings). Vous avez sur cette figure à gauche en haut les fluctuations des renards polaires en Suède. Alors, ici, ce sont des individus reproducteurs parce que vous pouvez vous demander s'ils arrivent à zéro de temps en temps, d'où ressortent-ils. Là, il s'agit seulement des individus qui se reproduisent une année donnée. A gauche de la figure quand vous avez ces fluctuations assez dramatiques, c'est une période où les lemmings avaient une fluctuation cyclique et le moment où en fait les lemmings, au début des années 80 ont commencé à ne plus avoir ces fluctuations cycliques, les populations renards polaires en Suède ont lentement décliné jusque quasiment une extinction au début des années 2000. A droite, en haut, vous avez la fluctuation des nombres de chouettes Harfang se reproduisant sur l'île Bylot. Les barres indiquent le nombre de chouettes Harfang se reproduisant et vous avez la ligne noire avec les petits points, ce sont les fluctuations de lemmings. Les chouettes Harfang ne se reproduisent que les années où les lemmings sont abondants. En bas à droite, vous avez l'impact indirect sur les herbivores, ici l'oie des neiges. Ici, les choses sont un peu plus compliquées. C'est que les oies des neiges, en fait, ne se reproduisent bien que les années à lemmings et se reproduisent très mal ou un succès de reproduction très faible les années sans lemmings. Pourquoi ? Parce que les renards polaires qui sont un des prédateurs en particulier des oeufs d'oies des neiges ou les oisillons, quand il n'y a pas de lemmings, ils se rabattent sur les oies des neiges. Ce sont toujours des mauvaises années pour les autres.

Je vais essayer de donner quelques perspectives sur les projets année polaire internationale. Un sur lequel j'ai été partie prenante, mais surtout dans d'autres projets qui consistent en des approches différentes au niveau du fonctionnement de l'écosystème. Je parlerai d'abord de deux projets : Greening of the Arctic et ITEX qui mettent l'accent sur ce qui se passe en bas de l'écosystème, c'est-à-dire sur les plantes. Quel est l'impact de la température par exemple sur la productivité primaire, donc, sur les plantes ? En anglais, on dit bottom-up , c'est une approche de bas en haut. On commence par les plantes en se disant qu'on pourra déduire le reste de ce qui se passe en bas. Avec mes collègues québécois Gilles Gauthier et Dominique Berteaux, nous avons plutôt mis l'accent sur une approche de haut en bas. C'est-à-dire regarder ce qui se passe au niveau des prédateurs ou des herbivores et ensuite sur les plantes. Le projet CARMA - toujours ces acronymes pour ces différents projets - qui est un projet qui porte sur les caribous (Circum Arctic Rangifer Monitoring and Assessment Network). Rangifer étant le nom latin du caribou et du renne. C'est un projet qui s'intéresse exclusivement à un niveau de ces écosystèmes. D'abord, ce projet Greening of the Arctic dirigé par Skip Walker à l'université de Fairbanks en Alaska, c'est une approche qui était pour l'essentiel une approche satellitaire. Il s'agissait de regarder ce qui se passe à grande échelle avec les satellites et en particulier, on se basait sur ce qu'on appelle le NDVI. C'est un indice qui mesure en gros l'activité photosynthétique de la végétation.

Ici, la carte de droite est un peu compliquée parce qu'ils ont aussi vraiment regardé la variabilité dans l'Arctique et cela, je pense que c'est un point qui est important que l'on oublie souvent. Les choses ne se passent pas vraiment de façon homogène. Rapidement, si vous regardez en haut à gauche qui est la partie Alaska, Sibérie de l'Est, il y a une forte augmentation de la température. Ce sont les cercles rouges pleins. Il y a une forte diminution de la glace de mer. Ce sont les cercles ouverts bleus. Vous avez aussi une augmentation du NDVI, de la productivité primaire, de la biomasse des plantes. Vous avez ces cercles verts pleins. Par contre, si vous regardez ce qui se passe dans certaines parties de la Sibérie ou plus proche d'où je travaille de la Scandinavie, vous avez une forte diminution de la glace de mer. Ça, c'est la même chose. Vous avez une augmentation de la température estivale qui est moins claire, très faible en fait dans la partie médiane de la Sibérie et dans certains endroits, en fait, une diminution de la productivité primaire. Pas une augmentation que l'on pourrait aussi attendre vu l'augmentation de la température (hétérogénéité). Sur le terrain, ce projet a aussi essayé de valider ces mesures satellites à partir de deux transects, un en Sibérie sur la péninsule de Yamal et un à cheval sur l'Alaska et le Canada.

J'irai maintenant à l'opposé en termes d'échelle, le précédent projet mettant en avant l'accent sur l'approche satellitaire à très grande échelle. Un projet comme ITEX (International Tundra Experiment) regarde vraiment ce qui se passe, comme vous le voyez sur la photo ici en haut à gauche, à l'échelle en gros d'un demi-mètre carré. L'idée de ce projet qui dure depuis en fait vingt ans, que l'année polaire internationale a permis de renforcer, de relancer, c'est de regarder ce qui se passe si on met ce genre de petite chambre en plexiglas pour augmenter la température de façon locale. Très petite échelle et vraiment approche expérimentale à l'opposé de ce que faisait Greening of the Arctic. Alors, si ce projet a aussi un grand intérêt, c'est que bien sûr, il y a des contrôles. C'est une approche expérimentale où on ne fait pas que manipuler, on regarde aussi ce qui se passe quand on ne manipule pas. Et comme il y a vingt ans de recul, il permet aussi de voir sur ces zones contrôles quels ont été les changements au niveau de la végétation. Ces deux projets Greening of the Artic et le projet ITEX ont quand même, malgré l'hétérogénéité spatiale, comme conclusion majeure, c'est que l'Arctique verdit. Même s'il y a des hétérogénéités, nous observons une augmentation de la couverture de buissons. Ici, c'est une photo sur un des sites sur lequel je travaille qui est dans la partie Russie Arctique dans le Nenetskiy. Ce sont des buissons de saules. Vous avez la même chose sur Yamal. Si vous interrogez les éleveurs de rennes dans ces régions-là, ils vous diront qu'il y a trente ou quarante ans, ces buissons de saules ne faisaient pas plus de 20 ou 30 centimètres de haut. Maintenant, ils font 2 mètres de haut, soit un changement vraiment important au niveau de la structure de la végétation. Par contre, ce que l'on ne voit pas aujourd'hui, c'est une colonisation par des nouvelles plantes. Cette augmentation de la biomasse se fait essentiellement par une meilleure croissance. C'est une augmentation de la croissance d'espèces qui étaient déjà présentes. Par exemple comme ces buissons de saules qui faisaient 20 centimètres ou 30 centimètres, il y a trente ou quarante ans. Et maintenant, 1,50 mètre à 2 mètres.

Maintenant, je monte d'un niveau avec CARMA. C'est un projet vraiment d'état des lieux. Qu'est-ce qu'on sait des populations de rennes ? Le renne est le nom que l'on utilise en Eurasie et le caribou est le nom que l'on utilise en Amérique du Nord. Quel est l'état de ces populations sauvages de rennes ? Ici, ce projet se restreint aux populations sauvages et ne porte pas sur les populations semi-domestiques et en particulier, d'essayer de voir quelles sont les menaces sur ces autres populations en termes d'exploitation par exemple gazière ou pétrolière - cela devient un problème de plus en plus important dans l'Arctique - de changements climatiques évidemment, mais aussi par exemple de nouveaux parasites qui arrivent par le sud. Alors, dans ces évolutions d'effectifs, la plus dramatique - on peut m'accuser de biaiser un peu le débat puisque je prends l'évolution la plus dramatique ici - c'est une des populations de caribous la plus au Nord que l'on connaisse, celle du caribou de Peary qui est vers l'île d'Ellesmere et les îles autour. Cette population en gros est presque éteinte, elle est vraiment en voie d'extinction. Elle est passée d'environ 50 000 à maintenant de l'ordre de 1 000 individus et essentiellement à la suite d'hivers répétés avec des précipitations sous forme de pluies qui conduisent à un englacement de la végétation et à ce que ces individus ne puissent plus se nourrir. Là, il y a un problème sérieux en termes de biologie de la conservation.

Maintenant, je remonte encore un peu d'un niveau, un projet sur lequel je collabore avec des collègues du Québec : Gilles Gauthier Université de Laval et Dominique Berteaux à l'Université du Québec à Rimouski avec lesquels nous collaborons aussi avec des chercheurs russes : Artic Wolves. Ce projet n'a rien à voir avec les loups. Wolves veut dire Wildlife Observatories Linking Vulnerable EcoSystems. Un des sites central de ce projet est l'île de Bylot qui est au nord de la Terre de Baffin, mais ce qui caractérise ce projet et ce qui, je pense, le rend vraiment intéressant, c'est qu'il y a toute une série de sites, une série de sites au Canada qui sont les sites en jaune coordonnés par nos collègues du Québec et toute une série de sites en rouge en Russie et en Norvège que je coordonne. Un des résultats majeurs et qui a fait un peu les titres des médias en tout cas en Amérique du Nord, c'est d'avoir marqué des chouettes Harfang sur l'île de Bylot à l'été 2007. On savait déjà avant que ces chouettes Harfang pouvaient bouger sur de très grandes distances, mais même les gens connaissant la chouette Harfang ont quand même été étonnés de ces résultats. Là, je vous montre le retour des chouettes Harfang l'été d'après. Elles ont été marquées à l'été 2007. Là, elles reviennent de leur site d'hivernage et l'île de Bylot serait au nord de la Terre de Baffin. Celle qui est en jaune là-bas est à peu près revenue d'où elle était marquée l'année d'avant. Par contre, vous voyez qu'il y a des chouettes Harfang qui sont venues depuis Terre-Neuve ou qui pour celles qui étaient aux Etats-Unis étaient dans l'Etat du Dakota, soit une distance assez longue. En fait, celle qui était dans l'Etat du Dakota est allée jusqu'à Ellesmere. Elle ne s'est pas arrêtée vers Bylot et la raison pour laquelle très peu sont venues sur Bylot, c'est qu'il n'y avait pas de lemmings sur Bylot cette année-là. Elles se sont arrêtées pour l'essentiel sur la Terre de Baffin où il y avait une pullulation de lemmings cette année-là.

Un autre résultat majeur qui a été vraiment une surprise pour les gens travaillant sur la chouette Harfang, c'est qu'en hiver, la chouette Harfang devient en partie marine. Personne ne s'imaginait trouver des chouettes Harfang sur la banquise en plein hiver. Là, ce sont les résultats obtenus par ces collègues québécois : Therrien, Gauthier et Bêty. 6 individus sur 9 ont passé en moyenne 43 jours, soit un mois et demi sur la banquise. Alors, on ne sait pas très bien ce qu'elles font sur la banquise. On soupçonne qu'elles se nourrissent d'eiders et d'autres oiseaux de mer. Là, clairement, c'est quelque chose qui va être exploré dans les années à venir, mais cela a été vraiment une surprise. Apparemment, les Inuits n'observaient pas tellement de chouettes Harfang sur la banquise, peut-être parce que les zones fréquentées par les chouettes Harfang ne sont pas des zones propices ou trop dangereuses pour la chasse pour les Inuits. Pour vous convaincre ensuite de l'étendue des migrations des chouettes Harfang, voilà d'autres chouettes qui, elles, ont vraiment choisi de ne pas rester autour de Bylot ou de la Terre de Baffin. Ce sont toujours les mêmes individus qui ont été marqués sur Bylot en 2007. Ce printemps, il y a juste trois semaines, un certain nombre d'individus sont maintenant en Alaska et mes collègues canadiens attendent qu'ils aillent encore un petit peu plus loin, peut-être en Sibérie. Ce qui montre vraiment que les populations de chouettes Harfang sont des populations circumpolaires. Elles utilisent vraiment l'ensemble de l'Arctique. Alors, ce projet Arctic Wolves réunissant tout un ensemble de scientifiques en Sibérie, au Canada, en Norvège et aussi au Groenland a permis d'essayer d'en savoir plus clair sur quelque chose qu'on soupçonne depuis quelques années, c'est que les cycles de lemmings sont en train de disparaître. Il y a eu quelques articles l'année dernière en particulier qui ont essayé de rassembler cette information. Dans le cadre d'une réunion que nous avons eue au Québec en février, nous avons comparé les données que nous avons au Groenland, en Norvège et au Canada et tout semble bien, je dirais, concorder. C'est-à-dire qu'aussi bien au Groenland qu'au Canada et aussi dans certaines parties de la Russie, apparemment ces cycles de lemmings sont en train de disparaître.

Le gros problème, c'est que nous avons en général une perspective historique très courte. La plupart de ces séries temporelles ont dix ans, quinze ans, vingt ans. Celle sur les lemmings a fait l'objet d'un article dans Nature qui est en bas ici, mais c'est quelque chose d'assez exceptionnel. Ce que nous avons essayé de faire, c'est de revenir en arrière en utilisant des données indirectes. Ici, par exemple, avec des collègues à Tromso, nous avons regardé les données sur les renards qui sont des prédateurs de lemmings. Nous nous sommes aperçus qu'au début du XX e siècle, fin XIX e , début du XX e siècle, les renards avaient une dynamique vraiment cyclique avec des périodes de trois, quatre ans, soit un cycle classique. Mais que dans la période chaude qui a déjà été évoquée dans les années 1920-1930, ces cycles ont soit disparu, soit ont commencé à avoir des périodes un peu aberrantes par rapport à ce qu'on connaît d'habitude des cycles de lemmings avec des périodes qui étaient soit de trois ans, soit de cinq ans. On est revenu en fait ensuite dans la période relativement froide des années 50-60 de nouveau à une dynamique cyclique. C'est un indice en tout cas de l'importance du climat pour ces fluctuations de lemmings. Un autre problème qui se pose dans l'Arctique, c'est l'invasion par des espèces du Sud et le meilleur exemple, c'est la colonisation par le renard roux de nombreuses zones de l'Arctique. On soupçonne que c'est vraiment une des causes essentielles de la diminution et de la quasi-extinction du renard polaire en Scandinavie. En bas, vous avez la dynamique dans le Nord de la Finlande, en bleu foncé du renard polaire, en rose ou rouge du renard roux. Je n'ai pas tellement de commentaires à faire là-dessus, c'est assez clair.

Ce que l'on sait aussi, c'est que ce renard roux a colonisé l'Arctique depuis à peu près 70-80 ans. là, vous avez les dates de première observation de renard roux dans l'Arctique canadien. Cette colonisation n'est pas récente, la première date de 1878 et ça va, vous voyez, jusqu'en 1962. Ce sont les premières observations de renards roux jusque quasiment l'île Ellesmere. C'est vraiment une population qui va jusque dans le Haut-Arctique. La raison de cette colonisation n'est pas climatique. Là, cela devrait être clair à partir de ce que l'on voit sur le Canada puisque cela couvre à la fois des périodes chaudes et des périodes froides. C'est clairement aussi lié à l'homme qui lui fournit par exemple de la nourriture, indirectement via des dépôts d'ordures ou ce genre de chose. Dernière observation avant de conclure, c'est quelque chose que l'on a observé dans le cadre de l'année polaire internationale ici sur la péninsule de Yamal d'interaction entre le renard roux et le renard polaire. En haut, un terrier de renard polaire avec huit renardeaux observés en juillet 2007. Quelques jours plus tard, un renard roux s'installe sur le terrier. Les renardeaux polaires et le couple de renards polaires qui étaient là avaient disparu et n'ont plus été observés dans les environs. Alors, cette colonisation par le sud a amené un de mes collègues Dominique Berteaux a parler de ce qu'on appelle du paradoxe de la biodiversité en Arctique. C'est-à-dire que nous avons un problème d'extinction d'espèces endémiques, d'espèces emblématiques de l'Arctique comme le renard polaire ou la chouette Harfang, mais nous avons en fait une augmentation de la biodiversité parce que c'est plus que compensé par une colonisation d'espèces du Sud comme le renard roux, certains campagnols et ainsi de suite. En termes de biodiversité, la biodiversité augmente, mais c'est bien sûr d'un point de vue qualitatif que le changement se passe.

Finalement, le legs de l'API, c'est d'abord la possibilité d'études comparatives à l'échelle de l'Arctique. Ça, c'est quelque chose que l'année polaire internationale, pour nous, dans l'aspect écosystème a rendu vraiment possible et a favorisé. Je pense que cela, c'est une expérience qui a été unique de ce point de vue. Nous avons vraiment mis en place les mêmes protocoles dans tout l'Arctique, de façon circumpolaire. Les principaux résultats, je l'ai dit, c'est le verdissement de l'Arctique, ensuite le changement de dynamique des lemmings et cette colonisation par les espèces du Sud. Je dirais que ce sont un peu les trois points principaux à retenir par rapport à ces projets de l'année polaire internationale. Bien sûr, cela a permis un état des lieux et je dirais que si on se projette dans l'avenir, surtout de regarder ce qui manque. Où y a-t-il des trous ? Collaboration circumpolaire, on a insisté là-dessus, c'est très important. Je pense que nous avons des débuts de collaborations avec les Russes. Mes collègues américains ont fait pareil. Je pense que cela a été quelque chose de vraiment nouveau d'arriver à développer ces collaborations de façon internationale et nous espérons vraiment que cela pourra se poursuivre. Merci.

M. le Préfet MOUCHEL-BLAISOT

Un grand merci Pr. Yoccoz pour ce très intéressant exposé et par la magie des interventions, on va maintenant revenir vers le sud, je crois. J'ai le plaisir de donner la parole maintenant à Yves Frenot, Directeur adjoint de l'IPEV, qui est aussi Vice-président du Comité de Protection de l'Environnement du Traité sur l'Antarctique. Je ne redis pas que l'on a eu le plaisir d'aller ensemble en Terre Adélie il y a quelque temps et nous avions pu constater que ce qu'on appelle la voie du Pr. Le Maho empruntée par les manchots fonctionnait bien. Elle n'était empruntée que par les manchots, en tout cas pendant la période où nous y étions. Yves, tu as la parole en te remerciant d'être aussi discipliné que les autres orateurs, ce dont je ne doute pas, ce qui permettra de laisser ensuite bien sûr un temps suffisant pour le débat avec la salle avant la clôture officielle.

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