G. MME FRÉDÉRIQUE MARTINI, CHEF DU BUREAU DES RISQUES MÉTÉOROLOGIQUES, AU SERVICE DES RISQUES NATURELS ET HYDRAULIQUES, REPRÉSENTANT LE POINT DE CONTACT NATIONAL FRANÇAIS POUR LE GIC/SATANEM

Merci, Monsieur le sénateur.

Je vais à nouveau parler de la Méditerranée et de l'implication de la France dans la Méditerranée. Les intervenants précédents ont déjà beaucoup parlé sur la manière dont fonctionne ou devra fonctionner le centre d'alerte aux tsunamis pour la Méditerranée et l'Atlantique nord. Je voulais plutôt centrer mon propos sur la place importante de la notion de réseau dans le fonctionnement de ce centre d'alerte, compte tenu des différents acteurs que l'on trouve dans les organismes scientifiques impliqués dans le centre national à vocation régionale, comme Monsieur Tinti l'a mentionné dans son propos.

Je m'adresse à vous en tant que représentante du point de contact national pour le GIC/SATANEM. Vous connaissez le contexte de l'activité de la France dans ce cadre. Votre rapport, Monsieur Courteau, recommandait déjà une implication particulière de la France notamment sur le bassin méditerranéen. S'en est suivi le travail conduit par le Secrétariat général de la mer pour concevoir une offre française pour la constitution d'un centre national d'alerte aux tsunamis pour la Méditerranée et l'Atlantique nord à vocation régionale. Dans un historique assez récent, cette proposition de la France a pu être présentée à la cinquième réunion du GIC/SATANEM à Athènes. A l'issue de cette proposition française, les ministères de l'Intérieur et du Développement durable ont décidé de mandater le CEA pour la réalisation et le fonctionnement d'un centre national à vocation régionale pour l'Atlantique Nord-Est et la Méditerranée occidentale pour son aspect régional, mais dans son intégralité pour l'aspect national. Nous n'allons pas y revenir car nous avons beaucoup entendu dans la matinée que le CEA, en coopération avec le CNRS et le SHOM, opère ce centre dont l'objectif est en 3 étapes (je vais tâcher de distinguer ce qui relève de la responsabilité du centre national de celle du centre régional - et ce que je vais détailler découle directement des décisions et des orientations prises par le GIC/SATANEM pour distinguer les fonctions d'un centre régional de celles d'un centre national).

Précisément, le centre à vocation nationale a comme responsabilité d'alerter ou de diffuser une alerte aux autorités de sécurité civile, en l'occurrence françaises, dans les 15 minutes qui suivent la détection d'un événement sismique potentiellement tsunamigène, et ce, sur le périmètre Atlantique Nord-Est et Méditerranée pour ce qui concerne la France. C'est vraiment l'activité d'un centre national. Une des activités du centre régional pour la Méditerranée occidentale et l'Atlantique Nord-Est pour la France et le CEA, point focal, est l'information des centres d'alerte nationaux et régionaux étrangers ainsi que les points focaux désignés par ces autorités étrangères dans ce même délai de 15 minutes après la survenue d'un événement. Précisons bien que ce centre régional a le rôle d'informer et non d'alerter, il diffuse une information sur un événement potentiellement dangereux, l'alerte restant de la responsabilité nationale ; le centre régional n'a pas la responsabilité d'alerter les autres pays étrangers. Enfin, à l'issue de ces phases d'information et d'alerte, le centre régional à nouveau a la responsabilité de confirmer ou d'infirmer l'occurrence éventuelle d'un tsunami dans les 20 minutes suivantes ; ces durées ont été décidées par le GIC/SATANEM.

Je reviens sur le périmètre d'intervention. Pour la confirmation ou l'infirmation d'un tsunami, le périmètre concerné est la Méditerranée occidentale et l'Atlantique Nord-Est. Pour arriver à ces alertes/confirmations, le centre procède à l'identification des sources sismiques potentiellement tsunamigènes pour faire son analyse. Je souhaite insister sur la notion de réseau. Le centre régional d'alerte aux tsunamis sur l'Atlantique Nord-Est et Méditerranée occidentale est conçu comme composante d'un réseau de centres régionaux qui à eux tous vont couvrir le bassin concerné. C'est ainsi que la France se propose d'opérer un centre régional sur une partie du bassin, comme on l'a déjà dit à Athènes en 2008, et nous espérons bien que cette proposition sera avalisée lors de la sixième session du GIC en novembre 2009. Monsieur Tinti l'a mentionné, ainsi que François Schindelé, les autres centres régionaux qui vont avec la France se partager le périmètre sont le Portugal, la Grèce, l'Italie et la Turquie. A Istanbul en 2009, nous devrions arriver à une cartographie finalisée de ces responsabilités.

Un réseau international donc, et un réseau interne aussi en France au niveau des réseaux de mesures et des réseaux de transmission. Le système français s'appuie sur des réseaux de stations sismiques opérées soit par la France soit par les pays partenaires étrangers sur le bassin : cela a été bien présenté notamment par François Schindelé, je ne vais pas m'appesantir, de même que le réseau de marégraphes a été présenté par le SHOM. Je voulais mentionner à nouveau que tout cela ne peut fonctionner qu'en réseau. Il y a, toujours à l'appui du fonctionnement de ce CRATANEM, une mutualisation des moyens, tant à l'intérieur de la France par les différents organismes scientifiques qui y coopèrent que, d'une manière plus large, les pays partenaires.

Après le réseau de stations, une autre composante importante du fonctionnement du système est la transmission : c'est un travail important du développement du centre opéré par le CEA en partie qui repose sur cette transmission d'informations. Dans ce développement, certaines étapes sont encore à franchir et font le coeur du projet commencé cette année ; nous devons trouver la manière dont doit se réaliser le traitement du signal, comment doit se gérer l'élaboration et la diffusion de l'alerte, le tout en s'intégrant dans un système de réception des données et de transmission de l'information.

Je vais conclure sur le CRATANEM en vous rappelant un calendrier qui a été déjà mentionné aussi pour partie : l'objectif collectif que nous avons est de démarrer en France de manière un peu formelle, même s'il a déjà débuté, le projet en juin-juillet de cette année pour, à l'issue de 28 mois de travail, proposer un lancement pré-opérationnel du centre suivi par une phase opérationnelle 34 mois plus tard. Compte tenu d'un démarrage en juillet 2009, ce démarrage pré-opérationnel du centre aura lieu à la fin de 2011.

Je terminerai cette approche réseau en rappelant un projet déjà mentionné précédemment, le projet RATCOM, qui, en complément du CRATANEM, va permettre d'appréhender les deux types de tsunamis qui peuvent inquiéter les côtes françaises, à la fois les tsunamis de champ lointain et les tsunamis de champ proche ; en ce sens, le projet RATCOM est très complémentaire puisqu'il concerne plus précisément les tsunamis de champ proche - cela a été évoqué par Madame tout à l'heure ; sa vocation essentielle est de proposer un démonstrateur de réseau d'alerte précoce pour ces tsunamis de champ proche en ayant, de même que le CRATANEM, une composante « information montante » et une composante « alerte descendante » en cours de réflexion. Je mentionnerai juste pour mémoire les partenaires qui contribuent à ce projet ainsi que le budget global du projet et sa durée qui est de 30 mois.

Je vous remercie.

M. Roland COURTEAU

Merci beaucoup. Je salue l'arrivée du premier vice-président de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, Monsieur le professeur Jean-Claude Etienne. Je vous avais expliqué ce matin qu'il avait été retenu par quelques petits problèmes de transports.

M. Jean-Claude ETIENNE

Les TGV ne sont pas tous GV !

M. Roland COURTEAU

Je voudrais en conclusion vous remercier d'avoir participé à cette audition. Nous avons pris beaucoup de retard parce que les présentations étaient particulièrement passionnantes et les informations, très riches et variées. Peut-être aussi votre président n'a-t-il pas su être suffisamment directif. C'était tellement enrichissant et intéressant que je ne pouvais pas me permettre d'interrompre de telles présentations.

J'aurais beaucoup de questions à vous poser mais je crois que cela nous obligerait à rester encore là tout l'après-midi et je vais donc renoncer aux 4 ou 5 questions que j'envisageais de vous poser.

Mes conclusions du rapport de 2007 restent encore, pour certaines d'entre elles en tout cas, valables :

• Le système d'alerte dans le Pacifique fonctionne bien même si certaines améliorations peuvent être apportées notamment afin de mieux protéger certains petits États.

• Le système d'alerte aux tsunamis dans l'océan Indien est un modèle du genre ; je suis sûr que Monsieur Tinti ou Madame Inniss rêvent de ce réseau de marégraphes et de tsunamimètres ! Il a fait l'objet, il est vrai, d'une mobilisation internationale financière sans précédent et les résultats sont là.

• Les bassins de la Méditerranée et des Caraïbes restent les parents pauvres, malgré les annonces faites tour à tour par le représentant du ministère de l'Intérieur et par vous-même, Madame Martini. En Méditerranée, il est vrai que plusieurs pays comme la France, le Portugal, l'Italie, la Grèce et la Turquie sont en train de mettre en place des centres nationaux d'alerte mais j'ai quand même noté qu'il restait encore des problèmes importants à résoudre (réseaux de marégraphes et de tsunamimètres encore insuffisants). Quant aux Caraïbes, heureusement que les États-Unis sont présents dans la zone à travers Porto Rico ! Il va donc falloir continuer à se battre et à persuader les autorités politiques, le gouvernement et les collectivités territoriales de débloquer des crédits pour les bassins des Caraïbes et de la Méditerranée. Je sais que le GIC Caraïbes doit se réunir prochainement en Martinique - je pensais même que cela avait été fait en mars mais il a dû y avoir un retard. Je vais d'ailleurs à ce propos écrire au Président de la République et au Premier Ministre afin d'attirer leur attention sur les besoins criants en matière de marégraphes dans cette zone. Je vais également au nom de l'Office prendre contact avec mes collègues parlementaires d'Outre-mer pour les inciter eux aussi à saisir le Président de la République ainsi que le Premier Ministre.

Je ne voudrais toutefois pas terminer sur une note pessimiste : toutes les interventions ont montré que toutes les personnes entendues sont particulièrement motivées et se battent pour faire avancer ce dossier. Je vous adresse donc mon soutien et, j'allais dire aussi, mes remerciements. Je voudrais vous indiquer que je reste à votre entière disposition pour vous aider si nécessaire à débloquer un certain nombre de difficultés, je le ferai avec l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques et notamment son vice-président, le professeur Etienne mais également son président, Claude Birraux et toute l'équipe des collaborateurs, notamment Sandrine, qui a apporté une aide considérable (vous avez pu remarquer combien étaient grandes ses compétences).

Mesdames et messieurs, encore une fois, merci.

M. Jean-Claude ETIENNE, premier vice-président de l'office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, sénateur de la Marne

M. Roland Courteau me glisse dans l'oreille : « Tu dis deux-trois mots ? ». Promis, les hypoglycémies se creusent et il n'est pas question - ce serait une outrecuidance - d'en dire plus de trois. Néanmoins, il y en a au moins un que je tiens à dire, c'est « merci ». Merci, bien sûr, à mon collègue, à notre collègue, M. Roland Courteau, merci à tous les membres de l'Office parlementaire qui ont fait de l'affaire tsunamis leur cause. Depuis que le rapport de M. Roland Courteau est sorti (je crois que je reprends le sentiment au moins de l'une d'entre vous, Madame Martini, d'après ce que l'on m'a dit), il y a un avant Courteau et un après Courteau. Il faut bien reconnaître qu'après la sortie du rapport de l'Office parlementaire, les choses ont été lancées, l'espoir a d'ailleurs été allumé un peu partout et on a connu après le sac, un peu de ressac (puisqu'il est question de marée !) puisqu'on a eu peur que la France, qui voulait se mettre très en pointe sur ce système, le soit un peu moins ; puis aujourd'hui, grâce à vous tous, on reprend un droit de cité et surtout une volonté d'agir, qui est des plus importantes.

Tu as dit à l'instant, Roland, combien le domaine du Pacifique était à peu près répondant en bonne résonance aux 19 questions de ton rapport, au moins à l'essentiel d'entre elles. Il reste que, si j'ai bien compris à l'instant, il ne faut pas oublier les Caraïbes et la Méditerranée, l'hexagone lui-même. A l'instant, je quitte une réunion où je disais que je venais vous retrouver pour les tsunamis. D'un côté, un biologiste, apparemment bien informé, me disait : « Les tsunamis, c'est loin, c'est loin tout cela ! » Mais à côté, il y en avait un autre, que j'ai connu quand j'ai fait mon certificat de géologie, qui a dit : « Pour moi, pas du tout, Nice, ce n'est pas si vieux. Rappelons-nous ce qui s'est passé. » S'il y a vraiment un élément qui peut sensibiliser l'hexagone à la problématique générale du tsunami, c'est bien ce que nous aurions pu connaître en plus fort sur nos côtes azuréennes - ce qui nous menace à l'évidence, pour ceux qui ont quelque connaissance de l'architecture des glissements des plaques tectoniques dans le secteur. Rien n'est loin, nous sommes sur une planète où tout est proche, même quand cela a lieu très loin, et nous sommes tous à travers le monde concernés par ce problème. Cette dimension doit être prise en compte par tous nos décideurs politiques.

Et en tout cas, je dis merci à vous tous de cette réunion de ce matin, à M. Roland Courteau pour la sensibilisation des décideurs politiques français. Je voulais vous dire que l'Office parlementaire est une caisse de résonance toute à votre disposition pour faire valoir ce message qui doit s'entendre sur l'ensemble de la planète et pas seulement dans les zones qui ont souffert - ce n'est pas parce qu'elles ont souffert qu'elles sont immunisées, il n'y a pas d'immunité dans ce domaine, bien évidemment, il y a même une vulnérabilité - mais il ne faut pas oublier les zones qui n'ont jamais souffert durant des millénaires dans l'histoire de l'humanité car ce n'est rien en temps de géologie, ce sont quelques secondes, et ce n'est pas parce qu'il y a eu des millénaires où il ne s'est rien passé que cela ne peut pas arriver demain et pas demain soir, peut-être demain matin.

En tout cas, merci à tous, merci de ce que vous venez d'apporter par votre réflexion à cette problématique qui, d'une certaine manière, à mon sens, tout au moins je le vis comme telle, revêt une portée anthropologique qui dépasse largement les seuls sites où cela a pu avoir lieu en connaissance des sites où cela pourrait avoir lieu. Merci à tous de cette matinée.

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