b) Si les éditeurs français parviennent à mettre en place leur plateforme de commercialisation : soit un effet d'aubaine, soit un faible impact

Cela montre le caractère indispensable de la mise en place rapide d'un ou plusieurs sites, contrôlés par l'ensemble des éditeurs ou par les pouvoirs publics, permettant aux lecteurs d'accéder d'un coup à l'ensemble de l'offre.

Cependant, même dans ce cas de figure, on peut s'interroger sur l'intérêt de la TVA à taux réduit.

En effet, là encore deux situations sont possibles.

Dans un premier cas de figure, la concurrence oblige les éditeurs français à réduire considérablement le prix de leurs livres numériques, qui pourrait être divisé par deux par rapport à celui des livres papier. L'écart de taxation par livre vendu devient alors tellement faible qu'on peut se demander s'il a un impact quelconque sur les ventes 73 ( * ) .

Dans un deuxième cas de figure, la concurrence par les prix est plus faible et un livre numérique est vendu à environ 80 % du prix du livre papier. Les éditeurs pourraient le vendre nettement moins cher, mais ils profitent de la baisse des coûts permise par le numérique pour augmenter leur résultat d'exploitation. Le passage au taux réduit se traduit alors par un fort effet d'aubaine , les bénéficiaires ne diminuant que faiblement leurs prix TTC, comme dans le cas de l'extension en 2009 du taux réduit à la TVA dans la restauration.

La mesure bénéficierait certes à la « chaîne du livre », qui est fragile. Cependant, dans la mesure où ce sont les éditeurs qui fixent le prix du livre, ce sont eux qui capteraient le supplément de revenus correspondant, et non les libraires, qui en sont pourtant l'élément le plus vulnérable.

c) Une mesure peu coûteuse

Si cette mesure serait donc probablement peu utile, elle aurait un faible impact sur les finances publiques. En effet, de deux choses l'une. Si les éditeurs continuent de commercialiser les livres numériques à un prix élevé, le marché ne se développera pas. S'ils diminuent considérablement leurs prix, la TVA s'appliquera à une assiette unitaire plus faible. Le coût devrait donc être nettement inférieur à celui du taux réduit donc bénéficie actuellement le livre papier (de l'ordre de 500 millions d'euros par an), surtout si une part importante des ventes est effectuée par des libraires numériques implantés et imposés hors de France.

Enfin, on rappelle que l'article 11 de la loi n° 2009-135 du 9 février 2009 de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012 prévoit une règle de « gage » des créations ou extensions de niches fiscales. Concrètement, l'extension du taux réduit de TVA au livre numérique devrait donc être gagée par la suppression ou la réduction d'une autre niche fiscale, dans la loi de finances concernée si cette extension est faite par une loi de finances, par la prochaine loi de finances dans le cas contraire. Un tel « gage » reste bien entendu à déterminer.

* 73 On peut prendre l'exemple d'un livre papier coûtant 10 euros hors taxes, dont 3 euros pour l'auteur et l'éditeur et 1 euro pour les coûts spécifiques au numérique, et qui pourrait donc être vendu 4 euros sous forme numérique. La TVA est égale dans le cas du livre papier à 10*0,055=0,55 euro, et dans celui du livre numérique à 4*0,196= 0,78 euro. L'écart est donc de 0,23 euro. La mesure ne réduirait le coût du livre numérique que de 4*0,196-4*0,055=0,56 euro.

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