II. LES PROBLÉMATIQUES SOULEVÉES PAR LE RÉGIME DE L'AUTO-ENTREPRENEUR

A. LES POINTS DE FRICTION AVEC LES RÉGIMES DE DROIT COMMUN

Le régime de l'auto-entrepreneur a suscité des « points de friction » avec plusieurs régimes de droit commun.

Le régime micro-fiscal et micro-social de l'auto-entrepreneur, étant simple et fondé sur le chiffre d'affaires effectif alors que le régime classique des travailleurs indépendants demeure complexe et relativement insensible à la conjoncture, produit, par nature, des effets de seuil et de distorsion de concurrence par rapport au droit commun.

Par ailleurs, une nouvelle catégorie de ressortissants du réseau consulaire des artisans a fait son apparition, créant une distinction entre membres cotisants et membres exemptés temporairement. Les auto-entrepreneurs ont vocation, à terme, à quitter le régime simplifié pour entrer dans le régime de droit commun, mais l'effet de seuil induit par leur statut peut laisser craindre que ne succède à la dissimulation du travail, à laquelle le régime a pour objet de remédier, celle du chiffre d'affaires afin de demeurer dans ce régime spécifique.

Enfin, plusieurs séries de problèmes ont été identifiées :

- un problème de déclaration : s'il n'y a pas de chiffre d'affaires, il n'y a pas de déclaration, ce qui complique l'exercice du contrôle. L' absence d'obligation de déclarer un chiffre d'affaires, même nul, empêche les organismes de sécurité sociale d'assurer un contrôle fiable sur la réalité de l'activité des auto-entrepreneurs 6 ( * ) . C'est pourquoi il serait opportun d'imposer la déclaration y compris lorsque qu'il n'y a pas de chiffre d'affaires ;

- un problème de contrôle : il suppose que les Urssaf sachent s'y adapter, dans le cadre de leurs missions ;

- un effet de substitution par rapport au régime classique des travailleurs indépendants 7 ( * ) . Le régime de l'auto-entrepreneur se caractérise par le bénéfice du régime du micro-social : le montant des cotisations sociales est calculé en appliquant au chiffre d'affaires, mensuel ou trimestriel, un taux global de cotisations, qui varie en fonction de l'activité exercée. Si le chiffre d'affaires est nul, l'entrepreneur ne paie pas de cotisations sociales minimales. Cette situation constitue une différence importante avec le régime de droit commun des travailleurs indépendants , qui, lors de leurs deux premières années d'activité acquittent leurs cotisations sociales sur une base forfaitaire indépendamment de leur revenu.

Les auto-entrepreneurs bénéficient d'un forfait social relativement attractif, tant en termes d'effort contributif que de prestations versées, notamment en matière de retraite. Selon les informations communiquées par l'Acoss, les taux apparents de cotisation des artisans, commerçants et professions libérales sont plus élevés que les taux de cotisations des auto-entrepreneurs . Le tableau ci-dessous décrit cette situation :

Comparatif des taux apparents de cotisation des artisans, commerçants et professions libérales

Taux de cotisation (en % de revenus professionnels)

Régime Auto-entrepreneur

Régime classique des travailleurs indépendants

Ecart

Artisans

41,6 %

49,6 %

8 points

Commerçants

41,4 %

48,1 %

6,7 points

Professions libérales

27,7 %

32,3 %

4,6 points

Source : Acoss

Toutefois, cet avantage concurrentiel du statut de l'auto-entrepreneur doit être relativisé dans la pratique. Le conseil de l'ordre des experts comptables a présenté des simulations dans lesquelles « il ne ressort pas de distorsion de concurrence entre le statut d'auto-entrepreneur et les autres statuts » 8 ( * ) . Par ailleurs, cette différence peut être conçue comme une « prime » très raisonnable à la création d'activité.


* 6 De plus, le système d'information de recouvrement ne permet pas d'indiquer si l'activité des auto-entrepreneurs est une activité exercée à titre principale ou accessoire.

* 7 Le régime fiscal et social de l'auto-entrepreneur est simple alors que le régime classique des travailleurs indépendants est complexe et relativement insensible à la conjoncture (par exemple, le mode de calcul des cotisations des travailleurs indépendants s'appuie sur le dernier revenu annuel connu, soit en année N-2, alors que le régime du micro-social s'appuie sur le chiffre d'affaires de l'année N).

* 8 Cf . annexe II « Comparatif des statuts de l'entrepreneur individuel » (14 avril 2010).

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