B. OUVRIR UN DROIT DE DÉLAISSEMENT EN FAVEUR DES PROPRIÉTAIRES DANS LES ZONES DE DANGER EXTRÊME

1. Renverser la logique des « zones noires »

Corrélativement à la mise en place d'un schéma d'aménagement des zones littorales à risque, un droit de délaissement devrait être mis en place.

En effet, en l'état du droit, les propriétaires de maisons exposées à un risque naturel grave, sérieux et avéré ne peuvent pas demander à bénéficier de la solidarité nationale afin de préserver leur vie et celle de leurs proches. Le seul moyen, pour eux, d'abandonner leur habitation est d'être soumis à la procédure d'expropriation pour risque naturel majeur prévue par la loi « Barnier », ou d'être inclus dans une zone d'acquisition amiable délimitée, de manière autonome, par les pouvoirs publics.

Votre mission considère que cette situation, qui laisse à l'État seul l'initiative de la protection des vies humaines, n'est pas satisfaisante et que les citoyens doivent pouvoir, eux aussi, être en mesure de démontrer l'existence d'un risque insupportable.

Il s'agit donc de renverser la logique des « zones noires » en mettant en place un mécanisme de délaissement qui permettrait aux particuliers, individuellement et volontairement, de faire appel à l'État pour obtenir le rachat de leur bien 87 ( * ) .

En effet, comme votre rapporteur l'a déjà indiqué, il existe sur notre territoire de nombreuses zones soumises à un risque naturel aussi sérieux que celui qui existe dans les « zones d'extrême danger » de Charente-Maritime et de Vendée.

Lors de son déplacement en Gironde, votre mission a ainsi constaté l'existence, dans la commune de Saint-Louis-de-Montferrand, d'une zone comprenant une quarantaine de maisons et exposée à un risque grave, si bien que ceux qui y habitent subissent des inondations violentes et fréquentes, qui mettent régulièrement leur vie en danger. Or, les propriétaires concernés -dont la plupart souhaitent partir de cette zone dangereuse- ne peuvent pas céder leur bien dans des conditions satisfaisantes, ce qui les empêche de trouver un autre logement dans un secteur moins risqué.

Si votre mission a par ailleurs préconisé de leur ouvrir la procédure d'acquisition amiable, le droit de délaissement pourrait constituer une autre voie intéressante pour répondre à leur situation.

2. Instituer un droit de délaissement pérenne et de portée générale

Selon votre mission, un droit de délaissement pérenne et de portée générale devrait être instauré pour répondre à ce type de situations.

Elle souligne, à cet égard, qu'un mécanisme de délaissement a déjà été créé dans les zones exposées à un risque technologique majeur par la loi « Bachelot » du 30 juillet 2003.

L'article L. 515-16 du code l'environnement dispose ainsi que, « à l'intérieur du périmètre d'exposition aux risques, les plans de prévention des risques technologiques peuvent, en fonction du type de risques, de leur gravité, de leur probabilité et de leur cinétique [...], délimiter [...] des secteurs où, en raison de l'existence de risques importants d'accident à cinétique rapide présentant un danger grave pour la vie humaine , les communes ou les établissements publics de coopération intercommunale compétents peuvent instaurer un droit de délaissement des bâtiments ou parties de bâtiments existant à la date d'approbation du plan ».

Ce mécanisme pourrait utilement être transposé aux zones soumises à un risque naturel majeur (ou, plus précisément, à un « risque important » de catastrophe naturelle présentant un « danger grave » pour la vie humaine) et s'exercer dans les secteurs délimités par un PPRS ou par un schéma d'aménagement du littoral.

Proposition n° 91 de la mission :

Créer, sur le modèle du droit de délaissement prévu dans le cadre des PPR technologiques (article L. 515-16 du code de l'environnement), un droit de délaissement pour les zones exposées à un risque naturel majeur.


* 87 Comme indiqué précédemment, cette approche a connu un début de mise en oeuvre : Mme Chantal Jouanno, Secrétaire d'Etat chargée de l'Ecologie a indiqué, lors du débat en séance publique du 16 juin dernier, qu'un droit d'acquisition amiable a été mis en place, en dehors des « zones noires », pour les propriétaires d'habitations ayant subi des dégâts supérieurs à 50 % suite à la tempête Xynthia.

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