EXAMEN EN MISSION D'INFORMATION

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M. Bruno Retailleau, président, a fait valoir que le projet de rapport contenait 92 propositions concrètes, pour que ne se reproduisent pas les conséquences - évitables - d'un phénomène inévitable, dont on pouvait craindre la répétition, les territoires littoraux étant à la fois de plus en plus convoités et de plus en plus exposés aux risques naturels en raison des changements climatiques.

Après avoir remercié le rapporteur pour la qualité de leur collaboration, il s'est félicité des conditions dans lesquelles s'était déroulée cette mission, qui a procédé à quelque 170 auditions et effectué quatre déplacements.

Confirmant l'excellent climat de travail de la mission, M. Alain Anziani, rapporteur, a rendu hommage au dynamisme du président de la mission, puis il s'est proposé de présenter l'essentiel des propositions du rapport, en les mettant en perspective avec les premières réflexions du rapport intermédiaire.

Au préalable, il a précisé que le bilan des personnes ayant péri en France, d'abord établi à 53 personnes, a été ramené, à la mi-juin 2010, à 47 personnes. Il a indiqué que le montant définitif des dommages matériels s'élevait à 2,5 milliards d'euros, dont 1 milliard non indemnisable.

M. Alain Anziani, rapporteur, a souligné la nécessité de réaliser des expertises complémentaires, pour affiner le tracé des « zones d'acquisition amiable », et de garantir un relogement des sinistrés dans leur agglomération d'origine, en renforçant les moyens dévolus aux établissements publics fonciers.

Evoquant la future cartographie nationale des zones dangereuses, il a considéré que les dites zones ne devaient pas être soumises à des règles homogènes, mais évaluées au cas par cas, en fonction des types de risques naturels auxquels elles étaient exposées, et distinguées afin de déterminer laquelle des trois possibilités suivantes devait être privilégiée :

- déclaration d'inhabitabilité, accompagnée de propositions d'acquisitions amiables, puis si nécessaire d'une expropriation pour risque naturel majeur ;

- déclaration d'inconstructibilité avec maintien des habitations existantes compatibles avec les dispositifs de prévention ou de protection existants ou à améliorer ;

- maintien de la constructibilité sous réserve de prescriptions adaptées à la nature et au niveau de risque.

M. Alain Anziani, rapporteur, a proposé de confier la gestion des plans de gestion des risques d'inondation (PGRI) situés sur le littoral aux préfets de département, les PRGI sur le littoral devant en outre être dotés d'un volet stratégique, d'un bilan de l'existant et de l'état des éléments de protection contre la mer, et d'un document retraçant l'ensemble de la chaîne d'alerte.

Les alertes devant absolument être bien comprises pour être efficaces, comme pouvaient l'être les traditionnelles sirènes, le rapporteur a regretté que l'administration puisse penser se dédouaner de ses responsabilités par l'envoi de messages impersonnels de type fax ou SMS. Il a proposé que chaque préfecture concernée établisse une cellule d'alerte dédiée à la communication avec les élus locaux en cas de risque avéré de submersion marine.

M. Bruno Retailleau, président, a souligné à son tour que l'administration ne pouvait se contenter d'une décharge de responsabilité sur les élus locaux. Il a estimé que cette cellule d'alerte devrait prendre toutes les dispositions pour qu'un véritable dialogue soit établi avec les élus concernés.

M. Alain Anziani, rapporteur, a suggéré d'interdire la délivrance d'autorisations d'urbanisme tacites dans les zones couvertes par un PPRN ou dans lesquelles un PPRN est en cours d'élaboration. Les préfets devraient en outre pouvoir assortir tous leurs déférés en matière d'urbanisme d'une demande de référé-suspension, dès lors que l'acte contesté aurait un impact potentiel sur la sécurité des populations.

Le rapporteur a fait valoir qu'une réflexion pourrait par ailleurs être conduite avec les habitants sur les possibilités de mise en place d'aménagements individuels de protection tels que les batardeaux, les rehaussements de planchers, les étages- refuges ou la neutralisation de rez-de-chaussée...

M. Alain Anziani, rapporteur, a proposé de rendre obligatoire l'adoption par une commune d'un plan communal de sauvegarde (PCS) simple et rapidement effectif, dès lors que la réalisation d'un plan de prévention du risque (PPR) lui a été prescrite.

En outre, la sensibilisation du grand public à ces questions devait être favorisée par des opérations concrètes de terrain et des simulations soumises à évaluation, dans le cadre, par exemple, de journées nationales de prévention des risques. A ce propos, il s'est félicité de l'achèvement tout récent d'un site national de sensibilisation du grand public consacré à la gestion des risques d'origine naturelle.

Abordant ensuite la question de la gestion des digues et des protections contre la mer, M. Alain Anziani, rapporteur, a déclaré que des études « au cas par cas » devaient être réalisées pour le rehaussement et/ou le renforcement des digues, en tenant compte des changements climatiques, ainsi que des zones d'expansion des crues et de l'ensemble du réseau hydraulique et des fleuves, les normes en matière d'ingénierie des digues devant par ailleurs être définies plus précisément.

Il a insisté sur le fait que la remise en état des digues endommagées par la tempête devait être réalisée en urgence avant les grandes marées d'équinoxe attendues au mois de septembre prochain.

Le recensement des digues maritimes et fluviales devait être poursuivi et achevé pour clarifier le régime de propriété et envisager un transfert de propriété publique qui permettrait de fixer les responsabilités.

M. Alain Anziani, rapporteur, a affirmé qu'il lui paraissait tout à fait possible et souhaitable d'imaginer un dispositif pérenne de financement et responsabilisant, comprenant un double mécanisme financier national et local : national sur le fonds Barnier ; local, par le déplafonnement et la modulation de la taxe locale d'équipement appliquée sur les permis de construire.

M. Bruno Retailleau, président, a appuyé cette proposition. Il a estimé que les indemnisations pour les acquisitions amiables devraient être financées par un prélèvement sur la caisse centrale de réassurance. Il a considéré que le fonds Barnier devrait, pour sa part, être sollicité pour prendre en charge la participation de l'Etat au financement des travaux sur les digues, cette part ne pouvant pas être inférieure à 50 %. Mais il a fait valoir qu'à côté de ce financement national, il était légitime d'envisager un financement local à partir de la taxe locale d'équipement en prévoyant une modulation selon la dangerosité de la zone où la construction est envisagée. Il a souligné qu'il y aurait là un élément de responsabilisation.

Puis évoquant les moyens de communication mis à la disposition des secours, M. Alain Anziani, rapporteur, a estimé que si le système ANTARES présentait de nombreux inconvénients, il avait cependant le mérite d'exister, et que les coûts liés aussi bien à son amélioration qu'à son fonctionnement pourraient et devraient être supportés par l'Etat.

Au chapitre des indemnisations, M. Alain Anziani, rapporteur, a estimé indispensable une révision des modalités de contrôle par la Commission européenne des aides publiques versées à la suite d'une catastrophe naturelle, afin de permettre un versement rapide de ces aides aux filières économiques sinistrées. Il a ajouté qu'un mode de compensation des pertes de recettes fiscales induites pour les collectivités territoriales par la démolition des maisons situées en zones d'acquisition amiable devrait être mis en place.

Le rapporteur a appelé de ses voeux l'octroi par les autorités communautaires d'une aide au titre du Fonds de solidarité de l'Union européenne (FSUE), en vue de contribuer au financement des interventions d'urgence entreprises par les autorités publiques nationales et locales face aux conséquences de la tempête Xynthia. Il a jugé nécessaire de simplifier les règles d'attribution de ce fonds.

M. Alain Anziani, rapporteur, s'est déclaré favorable à la création d'un schéma d'aménagement des zones à risque permettant de mettre en place une distribution spatiale des activités adaptée au risque de submersion marine. Ce schéma devrait, selon lui, distinguer quatre types de zones à risques :

- les zones devant être laissées ou rendues à leur état naturel (par référence aux zones de danger mortel définies dans la cartographie nationale) ;

- les zones qui, bien que dangereuses, peuvent recevoir des activités économiques, touristiques ou culturelles diurnes ;

- les zones dans lesquelles l'occupation humaine est acceptée, mais de manière limitée et sous condition ;

- enfin, les zones soumises à un risque limité, et où l'occupation humaine est autorisée sans restrictions particulières.

Le Conseil national de la mer et des littoraux pourrait, a-t-il précisé, se voir confier une mission de soutien aux collectivités territoriales dans l'aménagement des zones littorales à risque.

Une nouvelle gouvernance du littoral devrait être envisagée, en particulier en élargissant explicitement les compétences du Conseil national de la mer et des littoraux et du secrétariat général de la mer, afin de leur confier une triple mission de prévention des risques d'inondation par submersion, de protection des espaces fragiles et d'aménagement du territoire.

M. Bruno Retailleau, président, a indiqué que l'élaboration d'une proposition de loi pourrait être envisagée pour la rentrée afin de donner une traduction concrète aux propositions de la mission de nature législative.

M. Éric Doligé a rappelé que Mme Chantal Jouanno, secrétaire d'Etat à l'écologie, avait annoncé récemment que le site public d'information consacré aux risques était effectivement sur le point d'être ouvert.

Il a considéré que le système ANTARES était trop compliqué du fait du nombre d'intervenants et que, les frais de gestion étant à la charge des collectivités, un nombre croissant de maires exprimaient le désir de sortir du dispositif. Le projet de loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure (dite LOPSI 2), qui arrivera devant le Parlement au mois de septembre, sera, a-t'il ajouté, l'occasion de sécuriser son financement. Il a craint cependant que le dispositif soit bouleversé par une refonte radicale évoquée par les autorités.

M. Eric Doligé s'est déclaré très favorable à la perspective de déposer une proposition de loi à la suite du rapport, cette proposition de loi pouvant s'accompagner de la mise en place d'une cellule de suivi des propositions.

Il a estimé que le traitement de la problématique des digues devait être inclus dans celle, plus global, des risques naturels. Il a rappelé que le Centre européen de prévention des risques d'inondation (CEPRI) venait de mettre en place un groupe de travail, ouvert aux parlementaires, consacré aux digues.

M. Eric Doligé a approuvé la proposition de révision de la taxe locale d'équipement, tout en précisant qu'il conviendrait de veiller à son affectation.

Il a enfin mentionné la nécessité d'adapter l'équipement des camions des services départementaux d'incendie et de secours (SDIS) à toutes les conditions d'utilisation.

M. Bruno Retailleau, président, a fait valoir que le rapport veille à ouvrir une perspective plus globale de gestion des risques, qui étaient croissants. Il a plaidé pour un système ANTARES moderne permettant d'expédier une cartographie ou un diagnostic « au pied » de la victime. Il a rappelé les propos du rapporteur préconisant la prise en charge par l'Etat de la modernisation du dispositif.

M. Ronan Kerdraon s'est félicité de la qualité du rapport et de l'état d'esprit ayant présidé aux travaux de la mission. Les rencontres avec la population et les élus ont, selon lui, constitué des moments forts, dont on retrouvait les traces dans les propositions, qui devaient à présent avoir une traduction législative.

Il a considéré que l'école était un endroit privilégié pour diffuser la culture du risque. Les plans de prévention des risques naturels (PPRN) étant au programme d'éducation civique, il a estimé que des exemples précis tirés de la tempête Xynthia devraient être inclus dans les enseignements.

M. Ronan Kerdraon a enfin fait valoir :

- que les propositions portant sur les procédures d'alerte étaient très opportunes ;

- qu'en matière d'urbanisme, le contrôle devait s'exercer plus strictement ;

- et que la mise en oeuvre de l'ensemble des actions et mesures prises devait être réalisée en concertation avec les élus.

M. Jean-Claude Merceron a estimé que les propositions du rapport avaient le grand mérite d'être concrètes et de traiter de l'ensemble du littoral de façon intégrée. Il a rappelé que les populations visitées avaient été réconfortées par le passage de la mission, ce qui constitue le signe que les rapports humains doivent être mis au centre des réponses institutionnelles. Il a préconisé d'en revenir à des idées simples comme un système de sirènes adapté ou la mise en place d'aménagements individuels de protection tels que les batardeaux ou les zones refuges dans les habitations.

M. Bruno Retailleau, président, a fait valoir que le rapport soulignait le rôle du Conseil national de la mer et des littoraux (CML) pour aider les élus dans l'aménagement des zones littorales à risque et qu'il proposait de faire de cette instance et du secrétariat général à la mer et au littoral (SGML) des lieux d'intégration des politiques publiques et de prévention des risques de submersion.

Mme Marie-France Beaufils s'est félicitée de la qualité du travail de la mission. Elle a souligné que la contribution des élus locaux au devenir de leur territoire devait être essentielle et que cette contribution ne pouvait qu'influer positivement sur leur rôle dans la diffusion d'une culture du risque.

Elle a estimé que les permis de construire ne devraient être délivrés que s'ils étaient conformes aux obligations légales et règlementaires, ce qui n'est pas systématiquement le cas aujourd'hui, bien qu'il s'agisse d'un enjeu crucial.

Mme Marie-France Beaufils a rappelé qu'il était possible d'imposer des obligations sur la construction de biens. Jugeant nécessaire d'approfondir la réflexion dans ce domaine, elle a fait valoir que les propriétaires ayant dû respecter des obligations spécifiques pour la construction de leur bien, afin de renforcer leur résistance et leur résilience aux risques, devaient pouvoir en tirer bénéfice sur le montant de leurs primes d'assurance. Elle a mis en avant la question de la conformité du permis de construire aux obligations prescrites.

Mme Marie-France Beaufils a fait valoir que les enseignants chargés de l'éducation aux risques devaient être correctement formés à ces problématiques, en tenant compte des spécificités de leur région. Elle a insisté sur le temps de formation qui devait être donné aux élus locaux.

M. Michel Doublet a rappelé le climat excellent ayant présidé aux travaux de la mission. Il a souhaité que la proposition de loi envisagée soit simple, cohérente et pragmatique, s'efforçant d'éviter les lourdeurs administratives et d'associer les acteurs locaux.

Il a estimé que les propositions de l'Etat dans les zones d'acquisitions amiables de Charente-Maritime étaient faites sur des bases élevées. Il a relevé que, depuis le rapport d'étape de la mission, beaucoup de sinistrés avaient été séduits par ces propositions.

M. Bruno Retailleau, président, a précisé que le prix moyen des propositions d'acquisition amiable s'établissait, pour les résidences principales, à 368 000 euros en Charente-Maritime et à 332 000 euros en Vendée et, pour les résidences secondaires, à 295 000 euros en Charente-Maritime et à 238 000 euros en Vendée.

M. Daniel Laurent a lui aussi rappelé que la mission avait travaillé dans un climat de sérénité. Rappelant que les commissions des sites avaient imposé des solutions aux élus, ce qui lui paraissait inacceptable, il a souhaité que la proposition de loi évite toute contrainte administrative inutile à l'égard des élus. Il a souligné le rôle essentiel de l'Education nationale dans la sensibilisation aux risques.

M. Philippe Darniche a félicité le président et le rapporteur pour la qualité du travail accompli. Il lui a paru essentiel que le rapport soit suivi d'effets et associe les élus locaux. Il a jugé important que des dispositions soient insérées dans le projet de loi LOPSI 2. Parallèlement, une proposition de loi devait permettre de traiter les questions essentielles.

M. Philippe Darniche a dit s'attendre à ce que la diffusion d'une culture du risque soit longue, du fait de l'absence de responsabilisation de la population dans ce domaine. Il a donc plaidé pour une multiplication des initiatives et pour une action dans la durée qui s'appuie sur les maires et les élus municipaux.

Il a enfin rendu hommage aux maires des communes touchées par la tempête, qui ont déployé une énergie remarquable pour être en mesure d'ouvrir la saison touristique d'été.

M. Bruno Retailleau, président, a précisé que les 92 propositions de la mission n'étaient pas toutes de nature législative. Il a souligné que le dépôt d'une proposition de loi permettrait aux membres de la mission de concrétiser leurs propositions. Il a jugé indispensable d'assurer un suivi des mesures arrêtées par l'Etat.

À l'issue du débat, la mission d'information a autorisé la publication du rapport.

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