EXAMEN EN COMMISSION

La commission s'est réunie le mardi 19 octobre 2010 pour l'examen du présent rapport. A l'issue de la présentation faite par les rapporteurs, MM. Pierre Bernard-Reymond et Richard Yung, le débat suivant s'est engagé :

M. Pierre Fauchon :

Je suis soulagé que la France et l'Allemagne aient pu parvenir à cet accord. J'étais pessimiste sur le couple franco-allemand. Je me félicite donc qu'il ait su se ressaisir. Il était indispensable de prendre des mesures pour avancer. C'est un enjeu vital pour l'Europe dans le contexte de la mondialisation. Il me semble inévitable que, avec l'élargissement des compétences européennes engagé depuis le traité de Maastricht avec la création des deuxième et troisième piliers, les chefs d'Etat et de gouvernement reprennent la main sur certains dossiers.

En ce qui concerne les sanctions, il me semble que nous ne devons pas verser dans le « fétichisme juridique ». L'Europe est en train d'évoluer profondément. Pour cette structure juridique en voie de construction, nous devons admettre des solutions transitoires qui peuvent paraître imparfaites, tant que l'Europe ne se sera pas dotée d'une véritable Constitution. De ce point de vue, des sanctions politiques, c'est-à-dire la suspension des droits de vote, auraient l'avantage de la clarté. Elles peuvent paraître choquantes sur le plan intellectuel, mais le système proposé revêt une logique profonde qui tient à la nécessité de respecter des règles communément édictées. En la matière, nécessité fait loi.

M. Robert Badinter :

L'accord conclu hier démontre une fois de plus que, sans entente franco-allemande, la construction européenne ne progresse pas.

L'histoire nous enseigne que les Etats, au sein des organisations internationales, se mettent généralement d'accord sur le plus petit dénominateur commun pour dégager un consensus. Seules des institutions communes, en particulier la Commission et le Parlement européen, ont permis de faire progresser l'Union européenne. Les choix effectués pour la désignation du président du Conseil européen et du Haut représentant ont bien montré que les Etats ne souhaitaient pas une trop grande affirmation des instances communes.

Jacques Delors avait évoqué, pour définir l'Union européenne, une fédération d'Etats-nations. Mais il s'agit d'une projection française, le concept d'Etat-nation étant très loin d'exister partout en Europe, comme le montre le cas de la Belgique ou de l'Italie. Il est très difficile de demander à des Etats membres de prendre des sanctions contre d'autres Etats membres. On le voit bien au Conseil de sécurité de l'ONU. C'est pourquoi le système de sanctions proposé me parait peu crédible et s'inscrit dans une vision technocratique, encore accentuée en ce qui concerne l'éventuelle suspension des droits de vote.

En revanche, je suis favorable à la conduite, dans les Etats membres, de contrôles plus fréquents et plus approfondis en amont. C'est pourquoi j'approuve votre proposition d'accroître les compétences de la Cour des comptes européennes et de lui confier des tâches d'évaluation.

M. Richard Yung :

Je partage assez largement votre point de vue. La tâche que la France et l'Allemagne entendent confier au Président Van Rompuy ne sera pas facile.

M. Pierre Fauchon :

Les Allemands sont particulièrement attachés au renforcement des sanctions. Il est possible que seuls quelques autres Etats membres partagent leur point de vue. J'y vois une opportunité pour développer des coopérations renforcées.

M. Richard Yung :

Le pouvoir au sein du système institutionnel européen a clairement basculé en direction du Conseil européen.

M. Pierre Fauchon :

C'était inévitable.

M. Jean Bizet :

Il est vrai que la dérive en faveur de la Commission commençait à devenir préoccupante. Ses propositions en matière de sanctions vont extrêmement loin et je considère que l'accord franco-allemand trouvé hier constitue un point d'équilibre. N'oublions pas que le gouvernement allemand a besoin de sécuriser sa position sur le Fonds de stabilisation financière par rapport à la Cour constitutionnelle de Karlsruhe.

M. Pierre Bernard-Reymond :

Il est indispensable de trouver un équilibre sur la répartition des pouvoirs dans le système institutionnel. Nous constatons que les parlements nationaux, sur de nombreux sujets, sont incontournables.

M. Robert Badinter :

Rappelons-nous qui a choisi le président du Conseil européen ! Force est de constater que les gouvernants des Etats membres n'ont pas distingué les personnalités les plus marquées.

M. Pierre Bernard-Reymond :

Il me semble que le système de sanctions retenu devrait avoir un vrai pouvoir dissuasif. Par ailleurs, Angela Merkel avait sans doute besoin de rentrer dans son pays avec un accord sur ce point.

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A l'issue de ce débat, la Commission a autorisé la publication du rapport d'information.

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