II. LES MOYENS DE RELANCER L'ACTIVITÉ DU FRET FERROVIAIRE EN FRANCE

A. UNE FORTE DEMANDE SOCIÉTALE ET DES CLIENTS EN FAVEUR DU FRET FERROVIAIRE

1. Une forte demande sociétale
a) Un transport « propre », qui répond aux objectifs ambitieux du Grenelle de l'environnement

Les choix de société en matière de transport sont en train d'évoluer sensiblement. Beaucoup d'observateurs considèrent que les gouvernements successifs ont fait le double choix, sans jamais l'avouer publiquement, de privilégier le transport par train pour les voyageurs et le transport par camion pour les marchandises. D'ailleurs, votre commission de l'économie a souvent eu l'occasion de regretter la préférence accordée par les conseils régionaux aux TER au détriment des trains de fret qui manquent souvent de sillons disponibles. Ce choix politique a sans doute eu des justifications pertinentes, mais il montre aujourd'hui clairement ses limites. En effet, il existe aujourd'hui une forte attente de la part des citoyens pour diminuer le nombre de camions sur les routes et promouvoir le fret ferroviaire en contrepartie.

Le Grenelle de l'environnement illustre cette prise de conscience de la nécessité de promouvoir les transports alternatifs à la route. En effet, la loi Grenelle I prévoit l'augmentation de 14 % à 25 % de la part du transport non routier et non-aérien du transport de marchandises d'ici 2022 27 ( * ) , aussi bien pour des raisons écologiques, que de sécurité routière ou encore d'aménagement du territoire. Plus fondamentalement, cet objectif répond également aux préoccupations du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC), qui plaide pour une réduction de moitié des émissions mondiales de gaz à effet de serre d'ici à 2050, si l'on souhaite limiter l'élévation de la température moyenne mondiale à 2°C 28 ( * ) .

D'un point de vue général, il convient de rappeler que le secteur des transports génère une forte pollution atmosphérique . Ce secteur émet en effet quatre gaz à effet de serre différents (CO 2 , N 2 H, CH 4 et HFC), étant précisé que le dioxyde de carbone représente à lui seul plus de 95 % des émissions. Le secteur des transports génère 33,9 % des émissions de CO 2 en France en 2008, contre moins de 30 % en 1990. En valeur absolue, ce secteur a provoqué le rejet dans l'air de 133 millions de tonnes de dioxyde de carbone, à comparer aux 116 millions émis en 1990. Il est également à l'origine d'un cinquième des émissions d'hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP), d'un quart des rejets de monoxyde de carbone, et des deux tiers quasiment des émissions d'oxydes d'azote.

Part des transports routiers
dans les émissions de l'ensemble du secteur des transports

Source : Citepa/Coralie/format Secten  - mise à jour juin 2009

Le bilan écologique du fret ferroviaire est largement plus favorable que celui du transport routier de marchandises. Le transport ferroviaire en général, qu'il soit de voyageurs ou de marchandises, n'est responsable que de 0,4 % des émissions en 2007, contre 93,6 % pour le transport routier. Le transport routier en général est quant à lui essentiellement responsable des émissions de polluants atmosphériques de l'ensemble du secteur des transports. Ce secteur est également l'une des principaux émetteurs de particules fines 29 ( * ) , très néfastes pour la santé de nos concitoyens. Un rapport demandé par la Direction Générale de l'Environnement de la Commission européenne a ainsi estimé en 2005 que 100 000 décès sont attribuables chaque année aux particules fines dans l'Union européenne. Une autre étude, réalisée à partir de mesurages personnalisés de PM 2,5 chez des individus vivant dans quatre grandes agglomérations françaises, a montré qu'un cancer sur dix était attribuable à ce type de particules fines 30 ( * ) .

Si l'on s'attache précisément à la pollution générée par une tonne de marchandises transportées sur un kilomètre, le constat est sans appel . En effet, le rapport Bain précité s'est livré à une synthèse intéressante de différentes études sur ce sujet, et a conclu que le transport routier émet 82 grammes de CO 2 par tonnes-kilomètre contre seulement 8 pour la voie ferrée. Autrement dit, le trafic de fret ferroviaire représente seulement un dixième du trafic de fret tous modes confondus, mais les trains de marchandises polluent dix fois moins que les poids lourds. Si l'on se réfère aux informations fournies par le Gouvernement, le bilan écologique du transport des marchandises par fer est également très positif et peut se résumer aux chiffres suivants : pour une tonne kilomètre transportée (c'est-à-dire une tonne de marchandises transportée sur une distance d'un kilomètre), l'émission de CO 2 est de :

- 2 grammes par train entier en traction électrique et 55 grammes en traction thermique (diesel) ;

- 38 grammes par bateau (maritime) ;

- 196 grammes par semi-remorque de 21 à 32 tonnes de poids total autorisé en charge (PTAC) et 982 grammes par un véhicule utilitaire léger (3,5 tonnes de PTAC) ;

- 481 grammes émis par avion fret longue distance et 1 028 grammes par avion fret courte distance.

Certes, on ne saurait passer sous silence que le bilan global du fret ferroviaire est moins flatteur lorsqu'il s'agit de vieilles locomotives diesel. Compte tenu de l'importance des lignes non électrifiées, on compte aujourd'hui 537 locomotives diesel à la SNCF, tandis que ses concurrents ont également largement recours à ce type de locomotives.


* 27 Cf. l'article 11 de la loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement.

* 28 Cf. le rapport « Le fret mondial et le changement climatique, perspectives et marges de progrès », Conseil d'analyse stratégique, septembre 2010.

* 29 Les particules fines, qu'elles soient d'origine naturelle ou non, désignent les particules de moins de 10 microns de diamètre (PM 10), de moins de 2,5 microns (PM 2,5) et celles inférieures à un micron (PM 1).Plus ces particules sont fines, et plus elles pénètrent profondément dans les poumons.

* 30 Cf. Fiche repère « Risques de cancers et particules fines », Institut National du Cancer », 16 février 2009, p. 4.

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