IV. LES PROBLÉMATIQUES PRIORITAIRES RETENUES PAR LA MISSION

Avant de présenter les conclusions de la mission, il convient d'indiquer dans quel esprit elle a abordé ses travaux, enrichis par la rencontre de nombreux acteurs de terrain et par la connaissance des territoires qui caractérise le Sénat. Elle a peu à peu identifié des problématiques essentielles que l'on peut regrouper en cinq axes de travail : la reconstruction d'un socle industriel et la valorisation des atouts industriels de la France, la culture industrielle et l'innovation, la construction des filières, l'action des territoires et l'échelon européen.

A. PREMIER AXE : RECONSTRUIRE UN VÉRITABLE SOCLE INDUSTRIEL ET VALORISER LES ATOUTS INDUSTRIELS DE LA FRANCE

Si l'on pense habituellement au positionnement de l'industrie dans les secteurs d'avenir, il convient également de s'interroger sur des productions qui, tout en étant beaucoup mieux connues et anodines en apparence, n'en sont pas moins stratégiques. Par exemple, pourrions-nous à nouveau produire des textiles à grande échelle, sans se limiter à certaines niches ?

En d'autres termes, dans une économie marquée par la mondialisation de la chaîne de production, disposons-nous toujours, en France ou en Europe, des savoir-faire stratégiques de base ? Aurions-nous encore les capacités de production de masse indispensables pour faire face, le cas échéant, à une situation de crise pendant lesquelles certains échanges internationaux seraient suspendus ?

La déliquescence du tissu industriel peut avoir pour conséquence une déperdition irrémédiable de technologie. Des pans entiers de secteurs autrefois majeurs, tels que la chimie ou le textile, sont concernés par ce risque. Il suffit parfois qu'une entreprise ferme pour qu'un savoir-faire disparaisse. Dans les petites entreprises, ce cycle peut s'enclencher lorsque l'entrepreneur prend sa retraite : les problèmes de transmission des entreprises doivent donc être étudiés.

La pratique de global sourcing comme la pression entretenue par des donneurs d'ordre sur leurs fournisseurs peuvent également avoir des incidences sur des pertes d'avantage technologique. De la même manière, il convient de ne pas mésestimer les rachats impromptus de PME performantes dans le seul but de capter le savoir-faire technologique

Ce serait une grave erreur de mesurer l'importance de l'industrie à sa part dans le PIB. Ce secteur représente les quatre cinquièmes du total des dépenses de recherche et développement et les quatre cinquièmes des exportations françaises. La crise de ces dernières années ayant dissipé l'illusion selon laquelle le secteur financier pouvait alimenter une croissance durable, l'industrie apparaît comme le moteur de la croissance de demain et le facteur indispensable d'une amélioration de la balance commerciale française.

La mission est donc convaincue, à l'opposé de toute « sinistrose », qu'il est indispensable de raffermir le socle industriel là où il se lézarde. À cet égard, les PME travaillant en grappe et les entreprises de taille intermédiaire sont les moteurs de la croissance, qui ont besoin de carburant, c'est-à-dire de financement.

Le « site France » peut en effet s'appuyer sur de nombreux points forts :

- un coût de l'énergie aujourd'hui moindre par rapport à celui de nos partenaires européens, comme le souligne l'audition d'industriels italiens à Sophia Antipolis ;

- un secteur agricole et agroalimentaire sans équivalent en Europe ;

- des infrastructures de qualité, s'agissant aussi bien du réseau routier que des lignes ferroviaires à grande vitesse, qui favorisent les échanges entre les entreprises tout en permettant le développement d'entreprises leaders dans la construction d'infrastructures et de matériel de transport ;

- une géographie et un climat propices au développement des énergies renouvelables qui joueront un rôle crucial dans les trente années à venir ;

- un accent mis de longue date sur le développement des transports collectifs, qui pourrait se révéler un atout considérable à long terme en raison du renchérissement prévisible du coût des émissions de gaz à effet de serre.

Le constat de la désindustrialisation ne vaut pas renonciation au retour à un développement plus équilibré de l'économie française, en prenant l'industrie comme fondement.

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