C. RENFORCER LA GESTION DE PROXIMITÉ DES FILIÈRES ET DES ÉCOSYSTÈMES INDUSTRIELS LOCAUX

Les activités industrielles reposent sur des investissements souvent importants en capital matériel comme immatériel : machines, infrastructures, formation, contacts avec les autres acteurs. Les petites et moyennes entreprises ne peuvent donc devenir compétitives sans l'appui des collectivités, qui peuvent encourager la mise en réseau grâce à leur place centrale au contact des administrations d'État comme des particuliers et des entrepreneurs, ainsi que de l'ensemble des acteurs appelés à jouer un rôle dans le développement économique : représentation du monde économique (organismes consulaires, conseil économique et social régional, organisations professionnelles et syndicales), établissements de formation, organismes de recherche, acteurs du financement...

Les PME devraient également s'appuyer sur l'ensemble de la filière via des « contrats de filière » fixant des objectifs partagés par les acteurs publics et privés.

La notion d' « écosystème » a été plusieurs fois évoquée pour désigner cette coopération stratégique entre acteurs publics et privés , qui va dans les deux sens :

- du côté des entrepreneurs, M. Franck Riboud, président-directeur général de Danone, a insisté sur la nécessaire prise en compte, par une entreprise et dans son propre intérêt, de son environnement économique et social, ce qui l'amène à financer à titre d'exemple un petit club de football local par l'intermédiaire du fonds « Danone Écosystème » ;

- du côté des élus, M. Pierre Moscovici, député et président du Pays de Montbéliard Agglomération, a repris le même terme pour décrire l'objectif de mise en place d'une coopération permettant innovation et maintien de l'emploi, grâce à une dynamique offensive d'investissement, d'accompagnement des entreprises qui innovent ou se développent, de soutien à la recherche et aux activités de services et de production.

1. Des collectivités au service des entreprises

Les collectivités, notamment avec la création d'agences de développement, disposent des réseaux et de la connaissance du terrain qui leur permettent d'apporter un soutien efficace aux entreprises souhaitant se développer localement, lancer des produits ou exporter.

Plusieurs acteurs du monde de l'entreprise rencontrés par la mission ont salué le rôle positif des collectivités et des autres acteurs publics lors de la crise économique et financière, notamment par leur capacité d'écoute et leur proximité par rapport aux entreprises.

a) La mise à disposition du foncier

Les entreprises industrielles sont consommatrices de terrains pour installer leurs chaînes de production. Elles souhaitent souvent rester proches de leurs fournisseurs ou grands clients, tout en ayant un accès aux infrastructures de transport. La disponibilité d'un foncier de qualité est donc l'une des premières conditions de l'installation, voire de l'extension d'une industrie locale.

Les collectivités jouent à cet égard un rôle essentiel, par exemple lors du réaménagement des friches industrielles, de la reconversion de bases militaires ou de la libération d'emprises ferroviaires.

Outre l'acquisition du foncier, les collectivités participent à la création sur le site de zones d'activité, d'infrastructures, d'hôtels industriels... Elles peuvent également définir dans certains cas un projet global permettant d'associer développement urbain (logements, commerces, services publics) et mise en valeur économique (entreprises), à l'instar de celui exposé à Mulhouse sur l'ancien site DMC, lors de la visite de la mission.

b) La mobilisation des compétences et d'une main d'oeuvre qualifiée

La qualité de la main d'oeuvre a été présentée à plusieurs reprises comme l'un des éléments qui permettent le maintien, voire le rapatriement des activités de conception et de production.

Le rôle des collectivités apparaît donc, en lien avec les entreprises et grâce à leur connaissance du contexte économique et professionnel local, d'identifier les profils de main d'oeuvre nécessaires aux industries du territoire et de favoriser la mise en place d'une offre éducative et de formation continue adaptée.

c) Le transfert d'innovation et la mutualisation des connaissances

Les collectivités peuvent également favoriser le transfert d'innovation et l'échange d'information sur les bonnes pratiques.

On peut citer à titre d'exemple la base de données du Centre de recherche de l'innovation pour son transfert (CRIT) mis en place par le Conseil général de Lot-et-Garonne et la Caisse des dépôts et consignations, qui s'adresse à tous les acteurs du développement rural souhaitant repérer des opérations innovantes pour les transférer sur leur territoire. Cette base de données, établie à partir de 1997, propose des fiches descriptives d'actions innovantes transférables d'un territoire à un autre. L'innovation peut porter sur un savoir-faire ou sur une méthode.

d) L'étude des marchés

La connaissance du marché (grandes tendances, clients, acheteurs, concurrents, opportunités...) est cruciale pour la réussite d'un projet : une grande entreprise dispose à cet égard d'avantages certains par rapport aux petites entreprises, car elle peut mobiliser plus facilement des connaissances en interne ou lancer des études de marché.

Afin d'aider les PME locales, la région peut maintenir un centre d'information sur les marchés pertinents pour les entreprises locales. Elle peut notamment réaliser et leur communiquer une base de données des autres entreprises présentes sur leur marché.

e) L'accompagnement à l'étranger

Les régions tissent aujourd'hui des liens au niveau international et plus particulièrement européen : la politique régionale de l'Union européenne favorise la coopération entre les territoires, notamment entre les régions frontalières.

Il est donc naturellement du ressort des régions d'apporter un appui à des actions de prospection à l'étranger ou de présentation des activités des entreprises (foires, salons). Les régions doivent pour cela détecter les entreprises à potentiel et les aider à développer leur culture internationale.

Les acteurs publics peuvent également, sur la base d'un dossier de candidature exposant un projet de développement, aider un chef d'entreprise à partir pendant une durée limitée dans un pays étranger afin d'étudier les conditions de marché locales. Cette aide, qui peut prendre la forme d'une enveloppe financière et de mise en relation avec les missions économiques à l'étranger, devrait s'accompagner nécessairement d'une évaluation a posteriori .

f) Des procédures d'appel d'offres qui n'excluent pas les entreprises locales

De nombreux interlocuteurs de la mission ont dénoncé l'attitude, qualifiée à plusieurs reprises d' « angélique », de la France dans les appels d'offres publics, dont l'ouverture offre des opportunités aux pays concurrents alors que, bien souvent, ces derniers imposent des clauses destinées à protéger leurs entreprises.

Tout en tenant compte des règles nationales et européennes en matière de marchés publics, les collectivités devraient avoir la possibilité d'affirmer dans les cahiers des charges les priorités de leur politique industrielle afin, par exemple, de favoriser l'utilisation de ressources ou de sous-traitants locaux. Il s'agit d'un enjeu d'équité, afin de participer à la compétition économique dans une situation de départ équilibrée, mais aussi d'un enjeu écologique, une segmentation exagérée de la chaîne de production entraînant une multiplication des transports de produits intermédiaires génératrice d'émissions de gaz à effet de serre.

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