B. L'« APPROCHE PAR LE BAS », À PARTIR DE LA DÉFINITION DE LA DÉPENSE FISCALE (ALLEMAGNE, FRANCE)

Cependant, tout écart par rapport au système de référence « large » indiquée ci-avant n'est pas considéré par tous les Etats comme une dépense fiscale.

En particulier, certains Etats ne définissent pas explicitement de tel système, mais partent d'une définition - souvent assez restrictive - des dépenses fiscales. C'est ce que la commission des finances appelle « l'approche par le bas ».

1. Une définition très restrictive des dépenses fiscales : des « quasi-subventions » à visée incitative (Allemagne)

Au sens le plus strict, une « dépense fiscale » constitue, comme son nom l'indique, un allégement fiscal correspondant à une politique publique (ce qui exclut les allégements « techniques », comme ceux tendant à éviter les doubles impositions) et qui pourrait « en pratique » (c'est-à-dire, en particulier, sans coût prohibitif) être remplacé par une dépense 18 ( * ) .

Ainsi, certains Etats considèrent qu'une dépense fiscale doit nécessairement pouvoir être remplacée par une subvention incitative. Selon cette approche, les allégements à vocation redistributrice ne sont donc pas des dépenses fiscales.

L'Allemagne retient une approche de ce type.

Elle a fait figure de pionnier en matière d'évaluation des dépenses fiscales. C'est en effet en 1967 qu'elle a publié son premier Rapport sur les subventions budgétaires ( Subventionsbericht ).

Elle n'utilise pas de mot pouvant être littéralement traduit par « dépense fiscale ». Cependant, les rapports précités présentent exclusivement des « avantages fiscaux » [ Steuervergünstigungen ] pouvant être plus ou moins assimilés à des subventions. On considérera donc, dans les développements ci-après, que le mot Steuervergünstigung désigne les dépenses fiscales.

L'Allemagne distingue deux sortes de dépenses fiscales :

- celles qui peuvent être assimilées à des subventions au sens des rapports sur les subventions, ce qui implique qu'elles « favorise[nt] directement ou indirectement certains secteurs ou sous-secteurs de l'économie » ;

- celles qui, bien que présentant des caractéristiques similaires à celles des subventions, ne répondent pas à cette logique sectorielle et économique, favorisant soit l'économie dans son ensemble (abattement sur l'impôt sur le revenu correspondant au rabais sur le personnel), soit un secteur social déterminé (organisations d'utilité publique, associations, églises, partis, secteur de la santé et l'assurance sociale).

Les allégements qui bénéficient juridiquement aux ménages sont toutefois considérés comme des dépenses fiscales, dès lors qu'ils constituent des subventions indirectes aux entreprises.

La principale différence par rapport à la France est que les allégements à vocation redistributive ne sont pas considérés comme des dépenses fiscales.

La définition des dépenses fiscales en Allemagne

« L'objet du rapport sur les subventions est, de manière inchangée depuis 1967, établi par le paragraphe 12 de la loi de stabilité et de croissance (StGW).

« Par « aides financières » [Finanzhilfen] il faut comprendre des prestations en argent du Bund en dehors de l'administration fédérale, alors que les « dépenses fiscales » [Steuervergünstigungen] correspondent à des allégements fiscaux dérogatoires [spezielle steuerliche Ausnahmeregelungen] qui conduisent à de moindres recettes pour les pouvoirs publics.

« Le concept de « subvention » du gouvernement fédéral se concentre, conformément à la mission légale, sur des prestations pour des entreprises privées et des secteurs d'activité. Le paragraphe 12 de la loi appelle en particulier « aides financières » des moyens fédéraux pour des aides à l'adaptation, au maintien et à la productivité en faveur des entreprises et des secteurs d'activité.

« Si des aides ne peuvent être rangées dans ces catégories, elles sont désignées comme « autres prestations ». Sont considérées comme subventions indirectes des aides diminuant le coût de certains biens ou services pour les ménages privés mais pouvant être imputées directement aux événements économiques. Cela vaut par exemple pour les aides dans le domaine de la construction de logements.

« Une distinction similaire vaut pour les « dépenses fiscales » [Steuervergünstigungen], qui doivent être réparties conformément aux « aides financières ». Un régime fiscal spécial [steuerliche Sonderregelung] est considéré comme une subvention, et par là même comme une dépense fiscale [Steuervergünstigung] au sens du rapport sur les subventions, dès lors qu'il favorise directement ou indirectement certains secteurs ou sous-secteurs de l'économie.

« Les dépenses fiscales [Steuervergünstigungen] sont aussi des régimes spéciaux [Sonderregelungen] directs qui favorisent l'économie de manière générale, dans un objectif d' intérêt général. Les régimes fiscaux spéciaux [steuerliche Sonderregelungen], qui, d'après cette distinction, ne peuvent être considérés comme des subventions, mais présentent des caractéristiques similaires à celles des subventions, figurent, à titre d'information, dans l'annexe 3.

« Il s'agit de dispositions favorisant indirectement l'économie en général (comme l'abattement sur l'impôt sur le revenu correspondant au rabais sur le personnel) et de règles favorisant non l'économie mais, directement ou non, un secteur social déterminé (principalement des organisations d'utilité publique, des associations, des églises, des partis, le secteur de la santé et l'assurance sociale). »

Source : ministère fédéral des finances, « Zweiundzwanzigster Subventionsbericht », janvier 2010 (traduction par la commission des finances)


* 18 Cette approche conduit en principe à considérer que ne constituent pas des dépenses fiscales les allégements dont l'impact dépend du revenu du contribuable, ce qui exclut les réductions d'assiette d'IR. En revanche, les réductions et crédits d'impôt, qui s'imputent in fine sur le montant de l'impôt et ne dépendent pas du revenu du contribuable - pourvu, dans le premier cas, que celui-ci soit assujetti à l'IR - peuvent être considérés comme des dépenses fiscales. Dans le cas des impôts non progressifs (c'est-à-dire, en particulier, l'IS et la TVA), la quasi-totalité des allégements fiscaux constituent, selon cette définition restrictive, des dépenses fiscales.

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