Rapport d'information n° 318 (2011-2012) de MM. Philippe DALLIER et Jean-Claude PEYRONNET , fait au nom de la délégation aux collectivités territoriales, déposé le 31 janvier 2012

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N° 318

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2011-2012

Enregistré à la Présidence du Sénat le 31 janvier 2012

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation (1) sur le statut de l' élu ,

Par MM. Philippe DALLIER et Jean-Claude PEYRONNET,

Sénateurs.

La délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation est composée de Mme Jacqueline Gourault, présidente ; M. Claude Belot, Mme Anne-Marie Escoffier, MM. Christian Favier, Yves Krattinger, Antoine Lefèvre, Hervé Maurey, Jean-Claude Peyronnet, Rémy Pointereau et Mme Patricia Schillinger, v ice-présidents ; MM. Philippe Dallier et Claude Haut, secrétaires ; MM. Jean-Etienne Antoinette, Yannick Botrel, Mme Marie-Thérèse Bruguière, MM. François-Noël Buffet, Raymond Couderc, Jean-Patrick Courtois, Michel Delebarre, Éric Doligé, Jean-Luc Fichet, François Grosdidier, Charles Guené, Pierre Hérisson, Edmond Hervé, Pierre Jarlier, Georges Labazée, Joël Labbé, Gérard Le Cam, Jean Louis Masson, Rachel Mazuir, Jacques Mézard, Mme Renée Nicoux, MM. André Reichardt, Bruno Retailleau et Alain Richard.

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

La question du statut de l'élu local s'est posée de manière nouvelle dès l'acte I de la décentralisation.

En effet, les éléments dispersés et disparates qui tenaient lieu de statut de l'élu avant 1982 ne répondaient pas aux exigences nouvelles posées par les transferts de compétences organisés par le législateur.

Pour autant, dès janvier 1982, le rapport de notre ancien collègue Marcel Debarge 1 ( * ) avait défini les fondements d'un statut « moderne » de l'élu local ; l'ambition affichée était de « donner aux élus locaux les moyens de relever le défi de la décentralisation et d'introduire de nouveaux comportements conformes aux exigences de la démocratie ».

Bien que la pertinence de l'analyse réalisée par Marcel Debarge n'ait été remise en cause par aucun observateur, il a fallu attendre près de dix ans pour que ces préconisations trouvent une traduction juridique avec la loi du 3 février 1992 relative aux conditions d'exercice des mandats locaux.

La loi du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale et la loi du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité ont renforcé le dispositif initial, permettant aux élus d'exercer leurs mandats dans un contexte plus favorable.

L'intention du législateur était double : accorder aux élus locaux le temps nécessaire pour exercer des fonctions de plus en plus lourdes et complexes ; étendre le bénéfice de ce corpus de règles à un nombre plus grand d'élus locaux plutôt que de développer un statut particulier pour les présidents d'exécutifs locaux. Les évolutions figurant dans le projet de loi relatif à l'élection des conseillers territoriaux et au renforcement de la démocratie locale, dit projet de loi n° 61 2 ( * ) , qui n'a toujours pas été examiné à ce jour par le Parlement, s'inscrivent dans la même logique.

Cet édifice législatif suffit-il à bâtir un statut de l'élu local ? La réponse semble négative. Tel est le sentiment exprimé par les élus locaux, mais aussi les parlementaires qui saisissent régulièrement le Gouvernement de la question de l'élaboration, ou de l'achèvement, d'un véritable statut de l'élu. Ces débats portent notamment sur la protection matérielle des élus (indemnités, couverture sociale), sujets délicats à aborder mais pourtant déterminants.

Une proposition de loi visant à renforcer l'attractivité et à faciliter l'exercice du mandat local a ainsi été adoptée par le Sénat le 30 juin dernier à l'initiative M. Bernard Saugey et Mme Marie-Hélène Des Esgaulx, tandis qu'à l'Assemblée nationale, une proposition de loi tendant à rénover le statut de l'élu local a été déposée le 22 juin par M. Pierre Morel-A-L'Huissier.

En décidant de se saisir de cette question, votre délégation a souhaité donner un coup de projecteur sur cette situation paradoxale qui voit coexister de nombreuses dispositions juridiques constitutives d'un statut de l'élu et l'insatisfaction qui s'exprime à leur encontre.

L'inventaire et l'analyse qu'elle a élaborés dressent un état des lieux mitigé. S'il est incontestable que tous les sujets mis en exergue par le rapport de notre ancien collègue Marcel Debarge (indemnités, protection sociale, droits d'absence) ont reçu des réponses, et alors qu'aucune catégorie d'élu local n'a été laissée à l'écart par ces évolutions législatives, comment expliquer la persistance d'un sentiment d'insatisfaction ?

Selon votre délégation, aucune explication ne doit être esquivée. Peut-être la logique du statut ébauchée depuis 1992 est-elle arrivée à son terme ? Certes, des aménagements sont encore possibles, vos rapporteurs émettent d'ailleurs des propositions en ce sens, mais il ne s'agit pas d'une réforme majeure, d'un changement de référentiel dans la manière d'aborder la problématique du statut de l'élu.

Alors que les attentes des élus locaux sont de plus en plus importantes, tout comme les charges pesant sur eux, imaginer un nouveau cadre pour le statut de l'élu devient indispensable pour leur permettre d'exercer dans les meilleures conditions leurs mandats locaux. Des obstacles existent, comme la crainte d'une réaction négative de l'opinion publique ou la dégradation des finances publiques, autant d'éléments qui invitent à retarder le traitement de ces questions.

Pour autant, votre délégation estime nécessaire d'aller de l'avant. Elle s'interroge ainsi sur l'opportunité de maintenir le principe de gratuité des mandats locaux qui a, jusqu'à présent, constitué un frein à l'adoption d'un statut plus protecteur des élus. Elle invite les sénateurs et l'ensemble des acteurs à une réflexion rénovée sur ce thème, et sur les moyens de mettre en oeuvre un statut de l'élu protecteur, susceptible de répondre aux attentes des élus locaux et aux défis qu'ils relèvent quotidiennement.

Dans cet objectif, avant même que soient abordés en détail les éléments constitutifs du statut de l'élu, votre délégation considère que ces derniers doivent être regroupés dans un chapitre spécifique du Code général des collectivités territoriales. Un renforcement de leur visibilité constitue en effet la première étape de l'élaboration d'un nouveau cadre pour le statut de l'élu.

Proposition n° 1 : Regrouper dans un chapitre spécifique du Code général des collectivités territoriales les dispositions constitutives du statut de l'élu

I. LA RECHERCHE PERMANENTE DE LA CONCILIATION DU MANDAT AVEC LA VIE PROFESSIONNELLE DE L'ÉLU LOCAL

L'exercice d'un mandat local constitue pour les élus une charge de plus en plus lourde qui exige une grande disponibilité . Cette exigence de disponibilité ne cesse d'ailleurs de s'alourdir sous l'effet conjugué de la poursuite des transferts de compétences de l'Etat vers les collectivités territoriales et des exigences de plus en plus grandes de la population à l'égard des élus locaux. La question de la conciliation de l'exercice du mandat et de la vie professionnelle se pose donc de manière cruciale pour favoriser l'accès aux fonctions électives de personnes qui exercent une activité professionnelle, notamment dans le secteur privé.

Le législateur s'est donc attaché à faire émerger des solutions destinées à permettre aux élus locaux de disposer du temps nécessaire pour l'exercice de leurs mandats, tout en poursuivant leur activité professionnelle.

La recherche de telles solutions est complexe. En effet, la création de droits d'absence destinés à favoriser l'exercice du mandat suppose de trouver un juste milieu entre les intérêts du salarié, en l'occurrence l'élu local, et ceux de son employeur , sans que cette solution ne se traduise par un déséquilibre trop grand en faveur de l'une ou l'autre partie.

Il est, en effet, nécessaire que les élus locaux ayant une activité professionnelle puissent disposer de temps pour se consacrer aux affaires publiques, sans préjudice financier, ou professionnel, dissuasif et sans faire peser un poids trop lourd sur l'employeur (dont il est peut-être d'ailleurs l'unique ou l'un des rares collaborateurs).

La loi n° 92-108 du 3 février 1992 relative aux conditions d'exercice des mandats locaux a posé les principes juridiques favorisant la conciliation de l'exercice des mandats locaux avec la vie professionnelle des élus. Ces dispositions ont été utilement complétées par la loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité.

Les élus locaux ont ainsi la possibilité, grâce à des dispositifs d'autorisation d'absence, de se rendre disponibles pour se consacrer aux activités découlant de leur mandat .

Cette protection est d'autant plus forte qu'aucun licenciement, ni déclassement professionnel, aucune sanction disciplinaire ne peuvent être prononcés en raison de ces absences pour l'exercice du mandat, sous peine de nullité et de dommages et intérêts au profit de l'élu.

Au sein de cette législation, il convient toutefois de distinguer deux situations : d'une part, l'aménagement du contrat de travail afin de permettre à l'élu d'exercer son mandat tout en poursuivant son activité professionnelle ; d'autre part, la possibilité offerte à certaines catégories d'élus de suspendre leur activité professionnelle pendant la durée de leur mandat et de se consacrer à ce dernier à temps plein.

A. LA CRÉATION DE DROITS D'ABSENCE DESTINÉS À FAVORISER L'EXERCICE DU MANDAT

L'exercice du mandat local nécessite a minima la présence de l'élu lors des réunions de l'assemblée délibérante à laquelle il appartient. La question de la conciliation entre mandat local et activité professionnelle s'est donc naturellement posée en termes de droits d'absence , c'est-à-dire par la création de droits permettant à l'élu local de participer aux délibérations de son assemblée tout en conservant son activité professionnelle.

Trois catégories de droits d'absence peuvent être distinguées : les autorisations d'absence et les crédits d'heures, le congé formation et le congé pour se présenter aux élections locales.

1. Les autorisations d'absence et le crédit d'heures

Les candidats élus exerçant une activité professionnelle salariée, dans le secteur public ou privé, ont droit à des autorisations d'absence et à un crédit d'heures. Ces deux dispositifs ont des finalités distinctes.

a) Les autorisations d'absence pour participer aux réunions de l'assemblée délibérante

L'autorisation de s'absenter pour participer aux séances de l'assemblée à laquelle l'élu appartient ainsi qu'aux réunions des commissions dont il est membre, dès lors qu'elles ont été « instituées par une délibération du conseil... », est un droit ancien. Il a été consacré par les lois du 19 octobre 1946 (pour les fonctionnaires) et du 2 août 1949 (pour les salariés du secteur privé). Initialement limité aux conseillers municipaux et généraux, ce régime a ensuite été étendu aux conseillers régionaux.

La loi du 3 février 1992 a renforcé ce droit en intégrant dans le temps d'absence le « temps nécessaire » pour se rendre aux réunions et a étendu les autorisations aux autres réunions de l'élu (visant au final l'ensemble des « réunions des assemblées délibérantes et des bureaux des organismes où il a été désigné pour représenter » la collectivité).

Les autorisations d'absence permettent aux conseillers municipaux, généraux et régionaux, ainsi qu'aux membres de l'Assemblée de Corse et du conseil exécutif de celle-ci, de disposer du temps nécessaire « pour se rendre et participer » :

- aux séances plénières de leur assemblée ;

- aux réunions de commissions dont ils sont membres et instituées par une délibération de leur assemblée ;

- aux réunions des assemblées délibérantes et des bureaux des organismes où ils ont été désignés pour représenter leur collectivité.

Le droit à des autorisations d'absence s'impose à l'employeur . Ce dernier n'est cependant pas obligé de rémunérer le salarié absent. Dans cette hypothèse, la collectivité peut compenser la perte de revenus pour les élus ne bénéficiant pas d'indemnités de fonction.

b) Le crédit d'heures pour disposer du temps nécessaire à l'exercice du mandat

Le crédit d'heures se distingue des autorisations d'absence. Ces dernières sont motivées par un fait précis comme la réunion d'un conseil municipal. Le crédit répond à une logique différente, fondée sur un forfait horaire dont l'objet est de permettre à un élu de disposer de temps pour exercer son mandat. Ce droit d'absence va donc au-delà de la simple participation aux assemblées et aux divers organes qui leur sont liés.

Le crédit d'heures a été institué par la loi du 3 février 1992 , au profit des maires et de leurs adjoints, des conseillers généraux et régionaux et des conseillers municipaux des communes de plus de 100 000 habitants ; la loi du 27 février 2002 a élargi le champ à tous les conseillers municipaux des communes de 3 500 habitants et plus.

Il permet à l'élu de « disposer du temps nécessaire à l'administration de la commune ou de l'organisme auprès duquel il la représente et à la préparation des réunions des instances où il siège ». L'employeur dispose d'aucune latitude pour juger de la pertinence de la demande de l'élu tendant à utiliser ce crédit d'heures.

Celui-ci est fixé par référence à la durée hebdomadaire légale du travail. Il est forfaitaire, trimestriel, et n'est pas reportable d'un trimestre sur l'autre. Il varie entre 35 et 140 heures selon les fonctions de l'élu (nature du mandat, responsabilités exercées) et la population de la commune.

En cas de travail à temps partiel, ce crédit d'heures est « réduit proportionnellement à la réduction du temps de travail prévue pour l'emploi considéré ».

La loi du 27 février 2002 a augmenté le coefficient établi par rapport à la durée hebdomadaire légale du travail.

Certains conseils municipaux (communes chefs-lieux, touristiques, sinistrées, stations classées, stations de sports d'hiver ou d'alpinisme, attributaires de la dotation de solidarité urbaine au cours de l'un des trois exercices précédents...) peuvent voter une majoration du crédit d'heures, sans toutefois dépasser 30 % par élu et par an. Par ailleurs, lorsqu'un adjoint ou un conseiller supplée le maire empêché, il bénéficie, pendant la durée de cette suppléance, du crédit d'heures de celui-ci.

Les délégués des communes dans les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) bénéficient d'un crédit d'heures dont la durée est fixée par référence à celle des élus municipaux, en fonction de critères de population.

L'employeur (public ou privé) ne peut s'opposer à l'emploi du crédit d'heures qui constitue un véritable droit. Cependant, à la différence de l'autorisation d'absence, le non-paiement par l'employeur des heures d'absence constitue un principe, et non plus une suggestion.

Le droit au crédit d'heures s'applique aux fonctionnaires et aux agents contractuels de l'État, des collectivités locales et de leurs établissements publics administratifs, dès lors que ces personnes ne bénéficient pas de dispositions plus favorables. Compte tenu des nécessités du service public de l'enseignement, le service hebdomadaire des personnels appartenant à des corps ou à des cadres d'emploi d'enseignants qui bénéficient d'un crédit d'heures font l'objet d'un aménagement en début d'année scolaire. La durée du crédit d'heures est répartie entre le temps de service effectué en présence des élèves leur incombant statutairement et le temps complémentaire de service dont ils sont redevables.

c) Limites et conditions d'utilisation des droits d'absence

Le temps d'absence des élus au titre des autorisations d'absence et du crédit d'heures est soumis à un contingentement annuel . Il ne peut dépasser la moitié de la durée légale du travail pour une année civile, en décomptant cinq semaines de congés ainsi que les jours fériés.

Pour les salariés, cette notion s'apprécie sur la base de 35 heures par semaine civile, en décomptant cinq semaines de congés payés et les jours fériés. Toutefois, lorsqu'il est dérogé à cette durée (soit par décret en conseil des ministres, soit par convention ou accord collectif, soit en cas de régime d'équivalence), il est tenu compte de la durée du travail telle qu'elle résulte de ces dérogations. La durée hebdomadaire du travail prise en compte pour les salariés régis par un contrat de travail temporaire est celle fixée dans ce contrat (en application du Code du travail).

Pour les fonctionnaires, les agents contractuels de l'État, des collectivités locales et de leurs établissements publics administratifs, la durée légale annuelle du travail pour une année civile est de 1 607 heures. Toutefois, lorsqu'il est dérogé à cette durée, il en est tenu compte dans le calcul des droits d'absence.

Le temps d'absence est assimilé à une période de travail effectif pour les congés payés, l'accès aux prestations sociales et l'ancienneté.

Les élus, salariés ou non, qui ne perçoivent pas d'indemnités de fonction et qui peuvent justifier d'une diminution de rémunération du fait de l'exercice de leur droit à des autorisations d'absence ou de leur droit à crédit d'heures, peuvent bénéficier d'une compensation financière, limitée à 72 heures par élu et par an, de la part de la commune ou de l'organisme auprès duquel ils la représentent.

Malgré ses dispositions juridiques fortes, la gestion des droits d'absence peut se heurter à des difficultés d'application. En outre, ces droits ne sont pas ouverts à l'ensemble des élus locaux.

A ce jour, seuls les conseillers municipaux des communes de moins de 3 500 habitants ne bénéficient pas de ce dispositif. Votre délégation vous propose de leur étendre le bénéfice de ces droits d'absence 3 ( * ) .

Proposition n° 2 : Accorder le bénéfice du crédit d'heures aux conseillers municipaux des communes de moins de 3 500 habitants

2. Le congé de formation

Aux termes du Code général des collectivités territoriales, les membres d'un conseil municipal, général ou régional « ont droit à une formation adaptée à leur besoin ».

Les élus municipaux, départementaux, régionaux et des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) peuvent en effet, s'ils ont la qualité de salarié, solliciter de la part de leur employeur un congé pour bénéficier d'actions de formation.

Ce droit à formation a été affirmé par la loi du 3 février 1992. A l'origine, chaque élu avait droit, au cours de son mandat, à six jours de formation dispensée gratuitement par un organisme agréé dans un domaine de son choix mais en rapport avec l'exercice de son mandat. La durée du congé a été allongée de 6 à 18 jours, par mandat, par la loi du 27 février 2002.

Le congé de formation bénéficie aux élus salariés - fonctionnaires ou contractuels (du secteur public ou du secteur privé). Il vaut pour toute la durée du mandat et ce, quel que soit le nombre de mandats détenus par l'élu. Il est renouvelable en cas de réélection.

Les élus salariés doivent faire une demande écrite à leur employeur au moins 30 jours avant le stage en précisant la date, la durée du stage et le nom de l'organisme de formation agréé par le ministre de l'Intérieur.

La compensation de la perte éventuelle de salaire, de traitement ou de revenus justifiée est comprise dans les frais de formation, qui sont une dépense obligatoire pour la collectivité.

S'agissant des salariés du privé, si l'employeur n'a pas répondu 15 jours avant le début du stage, la demande est considérée comme accordée. Si l'employeur privé estime au contraire, après avis du comité d'entreprise ou des délégués du personnel, que l'absence du salarié aurait des conséquences préjudiciables à la production et à la bonne marche de l'entreprise, la demande peut être refusée, à condition toutefois d'être motivée et notifiée à l'intéressé.

Les élus fonctionnaires ou contractuels sont soumis au même régime mais la décision de refus de l'autorité hiérarchique, s'appuyant sur les nécessités de fonctionnement du service, doit être communiquée avec son motif à la commission administrative paritaire au cours de la réunion qui suit cette décision. Tout refus doit, en tout état de cause, être motivé et notifié à l'intéressé.

Un nouveau refus ne peut être opposé à l'élu salarié ou agent public qui renouvelle sa demande à l'expiration d'un délai de quatre mois après la notification d'un premier refus.

Dans tous les cas, l'organisme dispensateur de formation doit délivrer à l'élu une attestation constatant sa fréquentation effective, que l'employeur peut exiger au moment de la reprise du travail.

3. Le congé pour se présenter aux élections locales

Le dispositif de droits d'absence a été complété par des mesures relatives à l'aval de l'exercice d'un mandat local, c'est-à-dire la participation à l'élection.

La loi du 27 février 2002 a, en effet, étendu le bénéfice du congé électif, institué par la loi n° 78-3 du 2 janvier 1978 au bénéfice des candidats aux seules élections parlementaires4 ( * ), aux candidats aux élections locales. Ainsi, le salarié qui est candidat à l'élection au sein d'un conseil municipal d'une commune d'au moins 3 500 habitants, d'un conseil général, d'un conseil régional ou de l'Assemblée de Corse bénéficie d'un congé de dix jours ouvrables pour participer à la campagne électorale.

Ce salarié utilise son congé « à sa convenance », à condition que chaque absence soit au moins d'une demi-journée entière, et que l'employeur soit averti vingt-quatre heures au moins avant le début de chaque absence.

Sur demande du salarié, la durée des absences est imputée sur celle du congé payé annuel, dans la limite des droits qu'il a acquis à ce titre à la date du premier tour de scrutin. Lorsqu'elles ne sont pas imputées sur le congé payé annuel, les absences ne sont pas rémunérées et donnent lieu à récupération en accord avec l'employeur. La durée des absences est toutefois assimilée à une période de travail effectif pour la détermination des droits à congés payés, ainsi que des droits liés à l'ancienneté résultant des dispositions légales et des stipulations conventionnelles.

Il est à noter que le projet de loi relatif à l'élection des conseillers territoriaux et au renforcement de la démocratie locale a prévu, dans son article 5, que le régime du congé électif soit étendu aux communes de 500 habitants et plus, afin d'encourager les candidatures aux élections municipales dans les petites communes.

B. LA POSSIBILITÉ DE SUSPENDRE L'ACTIVITÉ PROFESSIONNELLE ET LES MODALITÉS DE RETOUR AU MONDE DU TRAVAIL

La création de droits constitue un droit important pour l'exercice du mandat local. Cette solution n'est cependant pas adaptée à toutes les situations, nécessaire elle n'est pas toujours suffisante. C'est pourquoi, la loi du 3 février 1992 a proposé une innovation importante pour les élus en leur reconnaissant le droit de devenir des élus à temps plein . Cette consécration a été rendue possible par l'adoption de plusieurs dispositions législatives permettant aux élus d'interrompre leur activité professionnelle pour se consacrer à l'exercice de leur mandat, puis à bénéficier de garanties sur leur réinsertion professionnelle à l'issue du mandat.

Ces dispositions protectrices ne sont pas ouvertes à tous les élus locaux. Alors que, dans un premier temps, le législateur avait soumis le bénéfice de ce dispositif à des seuils démographiques, cette première condition a été assouplie et le bénéfice de cette disposition a été étendu à tous les présidents d'exécutifs locaux.

Le législateur a, ici encore, recherché un équilibre entre les intérêts de l'élu et la nécessité de lui permettre d'exercer son mandat dans les meilleures conditions possibles, d'une part, et les contraintes susceptibles de peser sur son employeur, d'autre part.

1. La possibilité de suspendre son activité professionnelle pour exercer le mandat

La logique des autorisations d'absence et des crédits d'heures répond à une logique précise : celle liée à la situation d'un élu local qui conserve son activité professionnelle et qui a donc besoin de droits d'absence pour participer à la vie locale.

Le législateur a considéré que cette logique avait des limites et s'avérait insuffisante pour l'exercice de certains mandats locaux, notamment lorsque l'élu assure des fonctions exécutives. Dans ce cas de figure, il a été estimé qu'un élu, qui le souhaite, doit pouvoir se consacrer à son mandat à temps complet. Les élus exerçant une activité professionnelle devaient alors pouvoir bénéficier d'une disposition juridique leur permettant d'interrompre leur activité professionnelle pour exercer leur mandat.

Un mécanisme de suspension du contrat de travail ou d'interruption de l'activité professionnelle a ainsi été instauré pour permettre à l'élu de se consacrer exclusivement à l'exercice de son mandat.

Le droit à suspension du contrat a initialement été introduit dans le Code du travail, par la loi n° 78-3 du 2 janvier 1978, pour les parlementaires. Il a été étendu aux élus locaux par la loi du 3 février 1992 et aménagé par celle du 5 avril 2000.

Ce mécanisme ne profite toutefois pas à l'ensemble des élus locaux. Le droit de cessation de l'activité professionnelle pour l'exercice du mandat est en effet actuellement reconnu au profit des maires, des adjoints au maire des communes de plus de 20 000 habitants, des présidents de communautés et de « syndicats mixtes ouverts » associant exclusivement des collectivités territoriales et des groupements de collectivités, des vice-présidents des communautés de plus de 20 000 habitants et de « syndicats mixtes ouverts » associant exclusivement des collectivités territoriales et des groupements de collectivités, de plus de 20 000 habitants, des présidents et vice-présidents ayant délégation de l'exécutif des conseils généraux et régionaux.

Compte tenu de la charge croissante pesant sur les adjoints au maire et sur les vice-présidents d'EPCI à fiscalité propre de plus de 10 000 habitants, vos rapporteurs vous proposent d'abaisser le seuil ouvrant droit à la suspension du contrat de travail 5 ( * ) . Cette mesure est d'ailleurs d'autant plus nécessaire que le législateur vient d'élaborer les modalités d'élaboration d'achèvement de la carte intercommunale dont la mise en oeuvre va se traduire par un surcroit d'activité pour les élus concernés.

Proposition n° 3 : Ouvrir le bénéfice du droit à la suspension du contrat de travail aux adjoints des communes et vice-présidents d'EPCI à fiscalité propre de plus de 10 000 habitants

Dans l'hypothèse où ils relèveraient d'un contrat de travail salarié, les élus doivent justifier d'une ancienneté supérieure à un an pour bénéficier du droit à suspendre leur contrat de travail pour se consacrer à l'exercice de leur mandat.

L'élu doit informer l'employeur par lettre recommandée avec avis de réception. La suspension du contrat de travail prend effet quinze jours après cette notification. Le contrat de travail est suspendu jusqu'à l'expiration du mandat mais il n'est pas résilié.

Les élus fonctionnaires de l'Etat ou des collectivités peuvent, pour leur part, bénéficier, pour l'exercice de leur mandat, et à leur demande, d'une mise en disponibilité de plein droit ou d'un détachement (soumis à autorisation hiérarchique).

Toutefois, la position de détachement, qui est plus favorable que la mise en disponibilité en termes de carrière (maintien des droits à avancement et à retraite) n'est possible que pour certains mandats. Ainsi, le détachement sera de plein droit (« sur leur demande » toutefois) pour tous les maires, les adjoints au maire des communes de plus de 20 000 habitants, tous les présidents de communautés, les vice-présidents de communautés de plus de 20 000 habitants, les présidents et vice-présidents des conseils généraux et régionaux ayant reçu une délégation de ces derniers.

Les autres conseillers élus bénéficieront d'une mise en disponibilité, qui est de droit dans ce type de situation (décret n° 98-854 du 16 septembre 1985, art. 47).

Malgré les préconisations du rapport Mercier 6 ( * ) , ni la loi du 5 avril 2000, ni celle du 27 février 2002 n'ont cherché à étendre le dispositif de suspension du contrat de travail à l'ensemble des adjoints au maire, des conseillers généraux et des conseillers régionaux.

La loi n° 2010-1563 du 16 décembre 2010 a prévu l'instauration de conseillers territoriaux qui viendront se substituer aux conseillers généraux et régionaux. Votre délégation s'interroge donc sur l'opportunité d'étendre le bénéfice de la suspension du contrat de travail à cette nouvelle catégorie d'élus (interrogation qui doit bien évidemment être déconnectée de la question de fond, tranchée par le législateur, sur l'opportunité de créer cette nouvelle catégorie). Cette évolution législative pourrait être aisément justifiée par les exigences de ce nouveau mandat appelé à être particulièrement « prenant » 7 ( * ) .

Proposition n° 4 : Etendre aux conseillers territoriaux la possibilité de suspendre leur contrat de travail pour exercer leur mandat

2. Les droits à l'issue du mandat

Lorsqu'il quitte son mandat, l'élu local bénéficie d'un certain nombre de mesures destinées à faciliter sa réinsertion professionnelle.

a) Le droit à réinsertion à l'issue du mandat

A l'expiration du mandat, l'élu salarié du privé ayant suspendu son contrat de travail peut demander à reprendre son activité professionnelle et retrouver, dans les deux mois, un emploi analogue assorti d'une rémunération équivalente . Il bénéficie alors de tous les avantages acquis par les salariés de sa catégorie pendant la durée de son mandat.

La réintégration n'est applicable qu'à l'issue d'un seul mandat . Dans l'hypothèse où le mandat aurait été renouvelé, la réintégration n'est possible que si la durée de suspension est inférieure à cinq ans . En cas de renouvellement de mandat après un mandat d'une durée au moins égale à cinq ans, l'élu bénéficie pendant un an d'une priorité de réembauche dans un emploi correspondant à sa qualification. Il jouit alors de tous les avantages qu'il avait acquis au moment de son départ.

Les élus fonctionnaires qui ont été placés en détachement sont obligatoirement réintégrés, immédiatement et, au besoin, en surnombre, dans leur corps d'origine et affectés dans un emploi correspondant à leur grade.

Pour les autres élus locaux, placés, à leur demande, en situation de disponibilité, la réintégration n'est pas automatique. Elle est subordonnée au respect de certaines conditions comme l'obligation de faire connaître son souhait de réintégration trois mois au moins avant l'expiration de la disponibilité.

b) Les droits connexes au droit à réinsertion

Les élus locaux qui ont eu recours aux dispositifs de suspension de leur activité professionnelle peuvent, malgré les garanties de réintégration qui s'y attachent, connaître des difficultés au moment du retour dans leur emploi.

Par conséquent, diverses mesures destinées à sécuriser la fin du mandat ont été prévues, sans que leur efficacité soit égale à une réintégration pure et simple.

L'ancien élu doit pouvoir bénéficier de dispositifs lui permettant de s'adapter à ses nouvelles fonctions. Sa nouvelle activité peut, en effet, exiger de sa part une réadaptation.

La loi du 3 février 1992 a d'abord prévu l'organisation d'un stage de remise à niveau , organisé dans l'entreprise, pour tenir compte notamment de l'évolution des postes de travail ou de celle des techniques utilisées. Seuls les titulaires des fonctions exécutives locales bénéficiant de la réintégration professionnelle prévue dans le Code du travail peuvent accéder à ce stage. Les élus concernés doivent néanmoins en faire la demande.

La loi du 27 février 2002 a étendu à ces élus d'autres dispositifs du Code du travail qui bénéficient normalement aux salariés. Désormais, les élus ont ainsi droit, sur demande, « à une formation professionnelle et à un bilan de compétences dans les conditions fixées par le livre IX du Code du travail ».

Lorsque les intéressés demandent, en outre, à bénéficier du congé de formation ou d'un congé de bilan de compétences, le temps passé au titre du mandat local est assimilé aux durées d'activité exigées pour l'accès à ces congés.

3. Accompagner financièrement la réinsertion professionnelle

En 2000, le rapport Mercier avait suggéré la création d'une « indemnité d'aide au retour à la vie professionnelle ». Cette indemnité différentielle devait bénéficier aux personnes ayant cessé leur activité professionnelle pour se consacrer à leur mandat de maire à temps plein pendant six mois à l'issue du mandat. Pour bénéficier de cette aide, l'ancien élu devait être inscrit au chômage, ou avoir repris une activité lui procurant des revenus inférieurs à son indemnité d'élu local.

L'objectif poursuivi par la mission sénatoriale était de permettre aux élus de suspendre leur activité professionnelle le temps de leur mandat et de pouvoir se réinsérer sur le marché du travail à l'issue de ce dernier sans subir une pénalisation financière trop importante.

Cette proposition a reçu une traduction juridique en 2002.

a) La création d'une allocation de fin de mandat

La loi du 27 février 2002 a créé une « allocation de fin de mandat ». Il s'agit d'une allocation différentielle dont le montant correspond à la différence entre l'indemnité de fonction antérieure à l'exercice du mandat et les nouveaux revenus . Versée au titre d'un seul ancien mandat et pour une période de six mois maximum, son montant ne peut excéder 80 % de la différence entre le montant de l'indemnité brute mensuelle que percevait l'élu avant retenue à la source de l'imposition et l'ensemble des ressources qu'il perçoit à l'issue du mandat (revenus du travail, revenus de substitution et indemnités liées à d'autres mandats électifs).

Le bénéfice de cette allocation de fin de mandat (AFM) est réservé aux élus ayant suspendu leur activité professionnelle pour se consacrer aux fonctions exécutives suivantes : maire d'une commune d'au moins 1 000 habitants ; adjoint au maire, ayant reçu délégation de fonction, d'une commune de plus de 20 000 habitants ; président d'une communauté d'au moins 1 000 habitants, vice-président, ayant reçu délégation de fonction, d'une communauté de plus de 20 000 habitants, président de conseil général, de conseil régional ou du conseil exécutif de l'Assemblée de Corse, vice-président, ayant reçu délégation de fonction, d'un conseil général ou régional.

Pour bénéficier de l'AFM, l'élu doit en faire la demande, au plus tard cinq mois après la fin du mandat, et être inscrit à Pôle Emploi ou avoir repris une activité professionnelle procurant des revenus inférieurs aux indemnités de fonction antérieurement perçues.

La loi n° 2004-809 du 13 août 2004 a posé deux nouvelles conditions restreignant le bénéfice du dispositif. Ainsi, l'allocation ne peut être versée qu'aux élus dont le mandat a pris fin lors du renouvellement général de leur assemblée (ou, pour les conseillers généraux, lors du renouvellement d'une série sortante). En outre, l'adjoint au maire ou le vice-président d'un conseil général ou régional doit avoir reçu une délégation de fonction de la part du maire ou du président du conseil.

Cette allocation, imposable, n'est pas cumulable avec celle que l'élu pouvait déjà percevoir au titre d'un mandat de conseiller général ou régional. L'allocation n'est versée qu'au titre d'un seul mandat.

Le projet de loi relatif à l'élection des conseillers territoriaux et au renforcement de la démocratie locale prévoit, dans son article 6, que l'allocation de fin de mandat soit étendue aux maires des communes de moins de 1 000 habitants, afin de leur permettre de suspendre leur activité professionnelle pour se consacrer à plein temps à leurs fonctions. Cette disposition a été intégrée dans la proposition de loi visant à renforcer l'attractivité et à faciliter l'exercice du mandat local adoptée au Sénat le 30 juin dernier (article 9) 8 ( * ) . Cette dernière étend également le bénéfice de cette allocation aux adjoints des communes d'au moins 10 000 habitants ayant reçu délégation (le seuil étant auparavant fixé à 20 000) 9 ( * ) .

b) Cette allocation peine à atteindre ces objectifs

La gestion de l'allocation de fin de mandat est assurée par le fonds d'allocation des élus en fin de mandat (FAEFM), administré par la Caisse des dépôts et consignations.

Le fonds d'allocation des élus en fin de mandat

Créé par la loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité, le fonds d'allocation des élus en fin de mandat (FAEFM) a pour objectif d'offrir aux élus locaux ayant cessé leur activité professionnelle pour exercer une fonction élective, un soutien financier temporaire facilitant le retour à la vie professionnelle à la fin de leur mandat.

Cette loi est complétée par les décrets n° 2003-592 du 2 juillet 2003 et n° 2003-943 du 2 octobre 2003 relatifs à la cotisation et à l'allocation du FAEFM. Par ailleurs, une circulaire du ministère de l'intérieur en date du 31 décembre 2003 précise les modalités de gestion du FAEFM.

Le FAEFM est alimenté par une cotisation annuelle obligatoire intégralement à la charge des collectivités territoriales et des EPCI à fiscalité propre dont le nombre d'habitants est supérieur à 1 000. Le taux de cotisation a été fixé à 0,2 % du montant annuel maximum des indemnités de fonction des élus (la perception de cette cotisation est suspendue depuis 2009).

La gestion administrative, technique et financière du FAEFM est confiée à la Caisse des dépôts et consignations.

Source : Rapport annuel du FAEFM

L'excédent de ressources du fonds, constaté au 31 décembre 2009, est lié au faible nombre de demandes d'allocations.

A la fin 2008, c'est-à-dire à l'issue des élections municipales et cantonales, 134 allocations étaient servies (117 élus municipaux, 16 élus des EPCI, ainsi qu'un vice-président de conseil général).

Le service chargé de la gestion des fonds avait reçu 148 demandes d'allocations, parmi lesquelles 11 ne remplissaient pas les conditions légales et 3 avaient été déposées hors délai.

Le faible nombre de demandes d'indemnisation a conduit le Gouvernement, sur proposition du comité des finances locales, à abaisser le taux de cotisation des collectivités territoriales à 0 % à compter de l'année 2010. La trésorerie du FAEFM lui permet de faire face à ses charges, sans ressources supplémentaires.

L'AFM a rencontré un succès très limité et la mise en oeuvre de cette disposition ne peut faire l'objet que d'une appréciation nuancée. Interrogées par vos rapporteurs, les associations d'élus considèrent que le caractère largement méconnu de ce dispositif explique seul le faible nombre de demandes déposées auprès du FAEFM .

II. LA PROTECTION MATÉRIELLE DU MANDAT

La question de la protection matérielle des élus a été posée de manière très précoce . Dès 1789, le décret du duc de Liancourt prévoit d'établir un traitement égal pour tous les députés, ainsi que d'indemniser les frais de voyage. Ce document fonde le principe d'une protection matérielle des parlementaires, il sera complété, sous la monarchie de Juillet, par un système d'indemnisation des élus locaux. Toutefois, le système d'indemnisation des élus locaux demeure moins abouti que celui des parlementaires et reste marqué par une tradition de gratuité du mandat local.

Ainsi, malgré ces précédents historiques, aucun statut de l'élu local ne verra le jour. Il faudra attendre 1970 pour qu'émergent les premiers éléments d'une protection matérielle qui aille au-delà de la seule indemnisation des élus et leur assure également une protection sociale. Mais, ce n'est véritablement qu'à partir du début des années 1990, près de dix ans après l'acte I de la décentralisation, que le législateur a déterminé les contours d'une protection matérielle cohérente, harmonisée et calquée sur le droit commun.

Pourquoi assurer une telle protection matérielle aux élus locaux ? La motivation est transparente et consubstantielle à la notion même de démocratie. Cette protection matérielle est un élément de reconnaissance du rôle des élus locaux et un instrument d'équité sociale ; elle permet de favoriser un accès égal au mandat ; elle est donc source de diversité dans la composition des assemblées locales. En délégation, plusieurs de nos collègues ont particulièrement insisté sur ce dernier point. Ils ont souligné combien l'objectif d'un accès égal au mandat implique une protection matérielle globale de l'élu tant au cours du mandat qu'au sortir de celui-ci.

Cette protection constitue également une juste compensation des charges liées au mandat. Car, comme le soulignait le rapport Mauroy 10 ( * ) en 2000, les citoyens s'engageant dans la vie politique locale doivent aussi pouvoir abandonner, partiellement, leur activité professionnelle, sans préjudice grave, tant dans leur carrière que dans la perspective de la retraite.

La protection matérielle dont bénéficient les élus locaux se compose de deux blocs : contre les risques maladie, accidents du travail et vieillesse, d'une part, et par l'existence d'un régime indemnitaire, d'autre part.

A. UNE PROTECTION SOCIALE CALQUÉE SUR LE DROIT COMMUN

Avec le régime indemnitaire, la protection sociale constitue l'élément principal de la protection matérielle dont doivent bénéficier les élus locaux . L'action du législateur a eu pour objet de s'assurer que l'exercice du mandat local s'accompagne d'une protection suffisamment cohérente pour ne pas se traduire par une dégradation de la situation des intéressés en matière d'assurance sociale. Concrètement, cette problématique concerne tous les risques couverts par les assurances sociales (maladie, maternité, accidents du travail et maladies professionnelles, famille et vieillesse).

Bien qu'il soit difficile de porter un jugement définitif sur l'efficacité de cette protection matérielle, il est possible de considérer que la question de la protection financière est aujourd'hui mieux traitée que celle de la protection sociale. Ceci est particulièrement vrai dans le domaine de l'assurance vieillesse, fondée sur des principes contributifs, pour laquelle les élus locaux ont du mal à acquérir de véritables droits.

1. Des solutions simples pour la couverture des risques autres que la vieillesse

Jusqu'en 1992, toute évolution de la protection sociale des élus locaux a été freinée par l'absence d'un véritable statut juridique des indemnités perçues par eux. Ces versements ne correspondant pas à des salaires, puisque le Code général des collectivités territoriales pose le principe de la gratuité des fonctions électives, il semblait difficile d'envisager de prélever des cotisations d'assurance sociale sur ces indemnités.

Le législateur a levé cet obstacle juridique, ouvrant ainsi la voie à l'adhésion des élus locaux à la sécurité sociale au titre de leur mandat.

a) L'adhésion des élus au régime général de l'assurance maladie

Depuis 1992, le législateur, soucieux d'assurer la couverture sociale des élus locaux, a organisé sous certaines conditions leur adhésion au régime général des assurances sociales dans les domaines de la maladie- maternité-invalidité- décès et de la vieillesse.

Soucieuse que cette adhésion corresponde à une nécessité au vu de l'exercice du mandat, la loi a distingué deux catégories d'élus locaux : ceux ayant cessé leur activité professionnelle pour exercer leur mandat et ceux n'ayant pas interrompu leur activité professionnelle (les retraités étant intégrés à cette seconde catégorie).

Cette distinction a pour objet d'assurer la couverture sociale des élus qui ne bénéficient pas de cette protection au titre de leur activité professionnelle. Il s'agit donc bien de s'assurer que l'exercice d'un mandat local ne se traduise pas par une dégradation de la couverture sociale de son titulaire ; en aucun cas, cette situation n'offre des avantages supplémentaires aux élus locaux concernés.

Ainsi, les élus qui ont cessé leur activité professionnelle pour l'exercice de leur mandat, et qui ne relèvent plus à titre obligatoire d'un régime de sécurité sociale, sont affiliés, par détermination de la loi, au régime général de la sécurité sociale pour les prestations en nature de l'assurance- maladie- maternité- invalidité- décès et vieillesse.

L'intervention du législateur a eu lieu en deux temps : tout d'abord, cette adhésion a concerné les prestations en nature (remboursement des soins et des médicaments), puis depuis 2002, les prestations en espèces (indemnités journalières en cas d'arrêt de travail).

Ces dispositions concernent les maires, leurs adjoints dans les communes de plus de vingt mille habitants, les présidents et vice-présidents ayant délégation de l'exécutif des conseils généraux et régionaux, les présidents et vice-présidents des EPCI ayant une délégation de l'exécutif.

L'assiette des cotisations est constituée par le montant des seules indemnités de fonction effectivement perçues par les élus.

Le taux de cotisation est celui fixé pour les assurés relevant du régime général. Ces cotisations sont personnelles et obligatoires, tant pour les collectivités que pour les élus.

Le recouvrement des cotisations est assuré par les URSSAF.

b) La collectivité territoriale assureur de l'élu local

Dans un certain nombre de cas, le législateur n'a pas recouru à l'adhésion aux assurances sociales et a chargé les collectivités territoriales d'assurer la protection des élus , notamment en cas d'accident survenu dans l'exercice de leur mandat.

Cette situation n'a rien de surprenant d'un point de vue juridique : d'autres employeurs peuvent jouer le rôle d'assureur de leurs employés (c'est notamment le cas de l'Etat pour ses fonctionnaires).

Cette réparation des accidents subis par les élus locaux a constitué le premier élément de leur protection sociale, avant que la loi du 3 février 1992 ne définisse un régime de protection sociale plus large.

Comme pour l'assurance maladie, l'étendue de cette protection est variable suivant les catégories d'élus.

Pour de simples conseillers municipaux, cette protection est limitée aux accidents survenant à l'occasion des séances du conseil municipal, aux réunions de commissions ou de certains organismes, ainsi que lors de l'exécution d'un mandat spécial.

Les élus exerçant des responsabilités dans leur collectivité, comme le maire et ses adjoints ainsi que les conseillers généraux et régionaux, bénéficient de garanties plus importantes dans l'exercice de leurs fonctions.

La loi ne précise pas l'ensemble des situations concernées par cette protection. Mais la jurisprudence a retenu une conception large de la notion d'exercice des fonctions, qui peut concerner la participation personnelle de l'élu à la lutte contre un incendie déclaré chez un administré, le fait de s'assurer qu'un chemin déclaré impraticable l'est réellement ou encore la vérification de l'état d'avancement du chantier d'un établissement scolaire.

En cas d'accident, les collectivités locales versent directement aux professionnels et établissements de santé le montant des prestations afférentes à l'accident dont les élus ont été victimes. Ces prestations sont calculées selon les tarifs appliqués en matière d'assurance maladie. Les règles générales de la responsabilité de la puissance publique s'appliquent ; il ne s'agit donc pas d'une réparation forfaitaire prédéfinie par la loi ; ce régime de responsabilité emporte réparation intégrale des préjudices subis qu'elles qu'en soient l'importance et la nature : perte de revenus, préjudice esthétique, dommages aux biens. Le conjoint, les descendants et les ascendants lésés sont eux susceptibles de recevoir une compensation.

Cette couverture comprend également la protection des élus et de leurs familles contre les violences et outrages.

2. Des choix pragmatiques pour permettre aux élus locaux de cotiser à l'assurance vieillesse

La couverture du risque vieillesse constitue la question centrale de la protection sociale des élus. Nombre de nos collègues l'ont souligné avec force en délégation.

Dès 1982, le rapport Debarge avait fait de cette question son axe prioritaire en matière de droits à accorder aux élus locaux. Deux thèmes principaux avaient retenu l'attention de ce rapport exploratoire.

Premièrement, « garantir un droit à une retraite décente » afin que les élus locaux ayant consacré de nombreuses années au service de leurs concitoyens ne soient pas pénalisés au moment de leur départ à la retraite. Bien que posée en termes différents, cette problématique est toujours au centre des réflexions menées sur la protection sociale des élus.

Deuxièmement, déterminer les moyens de permettre aux élus locaux d'acquérir des droits à la retraite liés à leur(s) mandat(s). Le rapport Debarge énumérait trois possibilités : l'affiliation à l'Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'Etat et des collectivités publiques (IRCANTEC), l'affiliation à la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL), ou la création d'une caisse nationale autonome de retraite des élus locaux, départementaux et régionaux.

La loi du 3 février 1992 a écarté l'hypothèse de la création d'un régime spécifique réservé aux élus locaux. Elle a opté pour une solution pragmatique, en harmonisant le système de retraite complémentaire ouvert jusque là aux maires et à leurs adjoints et en prévoyant l'affiliation au régime général de l'assurance vieillesse des élus locaux, sous certaines conditions.

a) Une assurance vieillesse à deux niveaux

La loi du 3 février 1992 a tout d'abord permis de mettre fin à l'hétérogénéité des situations précédentes qui voyaient cohabiter un régime de retraite spécifique pour les maires, institué en 1972, et la construction de solutions plus ou moins satisfaisantes à l'initiative des conseils généraux.

Elle a également dégagé les principes constitutifs du régime d'assurance vieillesse des élus locaux. Désormais, tous les élus locaux qui perçoivent une indemnité devront cotiser à l'IRCANTEC.

Quels sont les grands traits de ce système de retraite ?

Il comporte tout d'abord une règle applicable à tous les élus qui perçoivent une indemnité de fonction pour l'exercice de leurs fonctions. Ces élus locaux sont affiliés à l'Institution de retraite complémentaire des agents non titulaires de l'État et des collectivités publiques (IRCANTEC). Cette affiliation est obligatoire.

Elus affiliés à l'IRCANTEC : les différents mandats concernés

(Source Ircantec)

1 er janvier 1973

• Les maires ;

• Les adjoints réglementaires ;

• Les adjoints supplémentaires ;

• Les maires délégués des communes fusionnées ;

• Les adjoints spéciaux ;

• Les présidents et vice-présidents de communauté urbaine.

Juillet 1977

• Les maires et adjoints de communes de Mayotte (date de la première élection municipale).

1 er janvier 1980

• Les maires et adjoints des territoires de la Nouvelle-Calédonie et dépendances de la Polynésie française en fonction.

30 mars 1992

• Les conseillers régionaux ;

• Les conseillers généraux ;

• Certains conseillers municipaux :

- les conseillers municipaux des villes de plus de 100 000 habitants ;

- les conseillers municipaux des villes de moins de 100 000 habitants ayant des mandats spéciaux ;

- les conseillers d'arrondissement de Paris, Lyon, Marseille, susceptibles de bénéficier d'indemnités de fonction (par écrêtement d'indemnité de fonction d'un autre élu par exemple) ;

- les présidents de délégation spéciale ;

- les membres de délégation spéciale faisant fonction d'adjoints.

• Les présidents et vice-présidents d'établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) ;

• Les élus municipaux délégués dans les conseils des communautés urbaines et des communautés de villes.

1 er juillet 1995

• Les présidents et vice-présidents des centres de gestion départementaux ou interdépartementaux de la fonction publique territoriale.

12 juillet 1999

• En plus des présidents et vice-présidents des EPCI, les autres membres de l'organe délibérant des EPCI :

- syndicat de communes ;

- syndicat mixte composé exclusivement de communes et de leurs groupements ;

- communauté de communes ;

- communauté d'agglomération ;

- communauté d'agglomération nouvelle ;

- syndicat d'agglomération nouvelle et de Communauté urbaine qui perçoivent des indemnités de fonction.

1 er mars 2002

• Les conseillers municipaux des communes de moins de 100 000 habitants.

1 er janvier 2003

• Les conseillers généraux de Mayotte.

18 août 2004

• Les présidents et vice-présidents d'un conseil d'administration de service départemental d'incendie et de secours (SDIS).

Cette affiliation à l'IRCANTEC constitue le socle du régime d'assurance vieillesse des élus locaux.

A partir de ce socle commun, les élus percevant des indemnités voient leur régime de retraite complété par un autre niveau d'affiliation, soit au régime général d'assurance vieillesse, soit à un régime par capitalisation.

Ce choix ne relève pas du libre arbitre des élus concernés : il est dicté par le législateur en fonction de la situation professionnelle des élus.

Les exécutifs locaux qui ont suspendu leur activité professionnelle, et qui ne relèvent d'aucun autre régime de base, sont affiliés au régime général.

Les cotisations des élus concernés et de leurs collectivités sont assises sur les indemnités effectivement perçues, selon les taux de droit commun applicables à la part « salarié « et à la part « employeur ».

Les élus locaux qui perçoivent des indemnités de fonction et qui ne sont pas affiliés ès qualité au régime général d'assurance vieillesse peuvent également se constituer des droits à pension auprès d'un fonds de retraite par rente. Le tableau ci-après récapitule les droits à assurance vieillesse des élus en fonction de leur situation.

Les régimes de retraite des élus locaux

Source : AMF

Elus poursuivant
leur activité professionnelle ou étant à la retraite

Elus ayant cessé leur activité professionnelle pour l'exercice de leur mandat

1 er niveau de retraite :

IRCANTEC

IRCANTEC

2 ème niveau de retraite :

Régime de retraite facultatif par rente :
FONPEL ou CAREL

Sécurité sociale

L'assurance vieillesse des élus locaux est ainsi conçue selon les mêmes principes que la retraite de la majorité de nos concitoyens . Elle se compose de deux étages, un obligatoire et un complémentaire. Les cotisations et les pensions sont calculées selon les règles applicables aux autres assurés.

b) Comment améliorer l'assurance vieillesse des élus locaux ?

Le montant des pensions perçues par les élus locaux au titre de leur mandat est souvent mis en avant pour dénoncer les insuffisances de la protection offerte par le statut.

Cette question est régulièrement abordée, dans le cadre des questions écrites posées par les parlementaires au Gouvernement, et plusieurs propositions de loi ont été déposées pour tenter de remédier à cette insuffisance.

Pourquoi le montant de la retraite des élus est-il inférieur à celui des autres assurés du régime général ?

Compte tenu de la durée de l'exercice de leurs mandats, les élus peuvent être pénalisés par les modalités de calcul des pensions de retraites. En effet , les droits à pension acquis auprès des différents régimes (régime général, IRCANTEC, régimes par rentes) dépendent étroitement du niveau et du nombre d'années de cotisations effectivement versées au titre de chaque régime .

Les pensions des élus sont donc étroitement liées au nombre de mandats durant lesquels ils ont pu cotiser, ainsi qu'au montant des indemnités auxquelles ils ont pu prétendre. Rappelons qu'au 1 er janvier 2010, il fallait 160 trimestres de cotisation pour bénéficier d'une retraite à taux plein (donc, pour un élu local, avoir détenu un mandat pendant quarante ans !)

Certes, ces pensions sont cumulables avec les pensions acquises au titre de l'activité professionnelle. Mais les règles de calcul de pension ne sont pas favorables aux polypensionnés, c'est-à-dire aux assurés ayant cotisé à plusieurs régimes de retraite différents, ce qui peut être le cas des élus locaux.

Ainsi, pour prendre le seul exemple d'un maire ayant cessé son activité professionnelle de salarié du secteur privé, sa retraite sera constituée de ses cotisations au régime général, de ses cotisations au régime ARGIRC ou ARCCO et à l'IRCANTEC. En ayant cotisé à deux régimes complémentaires distincts, le montant de sa retraite complémentaire sera inférieur au montant auquel il aurait pu prétendre en cotisant une carrière complète au sein d'un seul et même régime. Il en est de même de sa pension versée par le régime général.

Existe-t-il des solutions pour limiter les effets indésirables des cotisations à de multiples régimes ?

En l'état, le recours à des procédures exorbitantes de droit commun n'est pas souhaité : le législateur a toujours prévu que le régime de retraite des élus locaux serait régi par les règles de droit commun .

Des ajustements sont néanmoins possibles pour améliorer, dans le respect des règles existantes, les retraites perçues par les élus locaux.

Le premier consiste à s'assurer de l'application de la législation existante. Aujourd'hui, les élus peuvent souscrire une retraite par rente. Mais, notamment dans les petites communes, les élus renoncent à leur affiliation pour ne pas faire peser le coût de cette mesure sur les finances locales, leur collectivité devant en effet contribuer à hauteur de la moitié au montant des cotisations. La proposition de vos rapporteurs est de rendre cette affiliation obligatoire, sauf décision contraire du conseil municipal.

Ainsi, les élus concernés bénéficieront des deux niveaux de retraites auxquels ils ont droit. L'effectivité de ce droit conduira, via une augmentation des cotisations totales, à une forme de revalorisation du montant de leur pension, particulièrement pour les élus des plus petites communes qui perçoivent les indemnités les moins élevées et acquièrent des droits à retraite limités 11 ( * ) .

Proposition n° 5 : Rendre obligatoire l'adhésion au régime de retraite par rente pour les élus qui n'ont pas cessé leur activité professionnelle

Le second ajustement consiste à permettre aux élus qui cessent leur activité professionnelle d'adhérer au régime de retraite par rente 12 ( * ) en sus de leur adhésion au régime général et à l'IRCANTEC 13 ( * ) .

Cette solution exorbitante du droit commun est justifiée par la nécessité de permettre à cette catégorie d'élus de se constituer des droits à retraite « décents » en compensant la perte induite par l'interruption de leur carrière professionnelle.

Proposition n° 6 : Permettre aux élus qui cessent leur activité professionnelle d'adhérer au régime de retraite par rente (en sus du régime général et du régime complémentaire)

Avec ces propositions, votre délégation suggère de concentrer les efforts sur deux catégories d'élus en particulier, les élus des petites communes qui renoncent parfois à leurs droits, et les élus qui font le choix de mettre entre parenthèses leur carrière professionnelle pour se consacrer à leur mandat.

B. L'ÉPINEUSE QUESTION DE LA RÉMUNÉRATION DES ÉLUS LOCAUX

La question de la rémunération, quel que soit le régime juridique de cette dernière, constitue un élément incontournable de toute réflexion sur le statut des élus locaux.

La détermination d'un niveau de rémunération suffisant est un élément nécessaire pour assurer une indemnisation du temps consacré au service de la collectivité. Cette indemnisation doit être juste : sans excès, mais sans que l'exercice du mandat ne se traduise par une dégradation de la sécurité matérielle de ceux qui l'exercent.

Cette question est épineuse à plusieurs égards.

Tout d'abord, parce que la question de l'indemnisation des élus locaux a un effet sur les finances publiques, et notamment sur les finances publiques locales. Or, il apparaît que la dégradation des comptes publics est un argument souvent avancé pour repousser à des lendemains meilleurs la question du statut « financier » des élus locaux. C'est également un argument repris par les élus eux-mêmes pour renoncer à leurs indemnités lorsque le budget de la collectivité est mal en point.

Ensuite, parce que nos concitoyens sont toujours sensibles aux questions liées à la rémunération des élus et plus largement au financement de la vie politique. La crainte d'une réaction négative de l'opinion publique constitue donc un frein à l'action des pouvoirs publics en ce domaine.

Enfin, la détermination d'une juste rémunération au regard des tâches à effectuer dans l'exercice du mandat s'avère complexe, comme en témoignent les interrogations soulevées au sein de votre délégation. Quels curseurs retenir pour définir cette rémunération ? Quels montants correspondent à une juste rémunération ? Comment articuler la détermination de la rémunération liée à un mandat dans la problématique plus large du cumul des mandats ? La course au cumul n'est-elle pas que le résultat de la médiocrité du niveau des indemnités ?

Dans ce contexte difficile, les pouvoirs publics ont choisi d'avancer de façon pragmatique en pérennisant un principe de gratuité qui demeure consubstantiel à l'exercice du mandat et en faisant émerger des solutions destinées à permettre à un nombre plus grand d'élus de bénéficier d'une indemnisation.

1. Des règles claires pour déterminer la rémunération des élus locaux

L'action du législateur en matière de régime indemnitaire se caractérise d'abord par sa volonté de déterminer des règles claires en matière d'indemnisation des élus .

Cette clarification se traduit par l'élaboration de règles applicables à chaque niveau de collectivités territoriales, mettant ainsi fin à l'hétérogénéité des pratiques constatées avant 1992.

Pour atteindre cet objectif, le législateur a retenu trois critères destinés à déterminer le montant du régime indemnitaire auquel peuvent prétendre les élus locaux. Il a ensuite étendu à l'ensemble des élus la règle de plafonnement du régime indemnitaire qui s'appliquait déjà aux parlementaires exerçant des fonctions de maire.

a) Un régime indemnitaire fondé sur trois critères

Le législateur a retenu trois critères aussi objectifs et transparents que possible pour déterminer les droits à indemnités des élus locaux.

Ces critères simples font aujourd'hui l'objet d'un consensus.

Le premier critère vise à déterminer les élus susceptibles de bénéficier d'un régime indemnitaire au titre de leur mandat ou de leurs fonctions .

Cette détermination est rendue nécessaire par l'affirmation du principe de gratuité des mandats qui induit l'adoption d'une mesure législative expresse pour attribuer une indemnité à un élu.

Le périmètre des élus pouvant prétendre à une indemnisation est donc délimité par la loi. Sont concernés les maires et leurs adjoints, les conseillers généraux et les conseillers régionaux, les présidents et vice-présidents d'EPCI à fiscalité propre, mais également les conseillers municipaux des communes de plus de 100 000 habitants.

Le deuxième critère permet de distinguer les niveaux d'indemnité perçus par les élus locaux . Cette distinction repose sur les critères démographiques.

Le législateur précise que le montant des rémunérations pouvant être perçues sera différencié en fonction des strates démographiques, au sein de chaque niveau de collectivités territoriales. Il existe ainsi neuf strates différentes au niveau communal, cinq pour les conseils généraux et quatre pour les conseils régionaux. Ce principe s'applique également aux EPCI à fiscalité propre. Le législateur a régulièrement réduit le nombre de strates composant le barème : il y avait treize strates au niveau communal avant la loi de 1992, puis dix et aujourd'hui neuf. Cette réduction s'est traduite par une revalorisation du montant indemnitaire versé aux élus des communes les moins peuplées.

Indemnités de fonction brutes mensuelles des maires

Au 30 mars 1992

(L. 123-5-1
du Code des communes)

Au 1 er juillet 2010

(L. 2123-23
du CGCT)

Population
(nombre d'habitants)

Taux maximal

(% IB 1015)

Indemnité
brute

Taux maximal

(% IB 1015)

Indemnité
brute

Francs

(Euros)

Euros

(Francs)

Moins de 500

12

2 436

371

17

646,25

4 239

De 500 à 999

17

3 452

526

31

1 178,46

7 730

De 1 000 à 3 499

31

6 294

960

43

1 634,63

10 722

De 3 500 à 9 999

43

8 730

1 331

55

2 090,81

13 715

De 10 000 à 19 999

55

11 167

1 702

65

2 470,95

16 208

De 20 000 à 49 999

65

13 197

2 012

90

3 421,32

22 442

De 50 000 à 99 999

75

15 227

2 321

110

4 181,62

27 430

100 000 et plus
(y compris PML)

145

5 512,13

36 157

De 100 000 à 200 000

90

18 273

2 786

Plus de 200 000

95

19 288

2 940

Paris, Marseille, Lyon

115

23 348

3 559

Le troisième critère retenu par le législateur permet de déterminer le montant des indemnités . Ces dernières sont calculées « par référence au montant du traitement correspondant à l'indice terminal de l'échelle indiciaire de la fonction publique » (indice 1015).

Une telle solution permet de fixer le montant de l'indemnité selon des modalités compréhensibles par tous les acteurs. Le montant des rémunérations est ainsi revalorisé à chaque majoration de la valeur du point de la fonction publique, sans qu'il soit nécessaire de modifier la législation existante. Le Code général des collectivités territoriales fixe le pourcentage de l'indice 1015 susceptible d'être alloué à chaque élu local.

Ces dispositions permettent de déterminer le montant mensuel brut des indemnités de fonction de chaque catégorie d'élus locaux. Ces barèmes proposent des indemnités maximales qui doivent faire l'objet d'un vote de la part du conseil municipal, du conseil général ou du conseil régional.

Le choix de cette solution préserve la hiérarchie des indemnités versées aux différentes catégories d'élus , tout en permettant une revalorisation annuelle ou infra-annuelle qui tient compte des effets de l'inflation.

Certaines situations particulières ouvrent droit à des majorations du régime indemnitaire. Le tableau ci-dessous en présente une liste récapitulative.

Majoration d'indemnité de fonction

Les conseils municipaux ont la possibilité de majorer les indemnités de fonction des maires, adjoints et conseillers municipaux, pour tenir compte de certaines situations particulières occasionnant un surcroît de travail. Ces majorations sont facultatives et se cumulent entre elles. Elles s'appliquent sur les taux fixés par le conseil municipal. Elles concernent :

1) - les communes chefs-lieux de département majoration fixée à 25 %

- les communes chefs-lieux d'arrondissement majoration fixée à 20 %

- les communes chefs-lieux de canton majoration fixée à 15 %

2) les communes sinistrées

3) les villes classées : stations hydrominérales, climatiques, balnéaires, touristiques ou rurales, ainsi que les villes classées stations de sports d'hiver ou d'alpinisme.

Les majorations sont égales à 50 % pour les communes dont la population totale est inférieure à 5 000 habitants, et 25 % pour celles dont la population totale est supérieure à 5 000 habitants.

4) les communes dont la population totale depuis le dernier recensement a augmenté à la suite de la mise en route de travaux publics d'intérêt national.

Les majorations sont égales à 50 % pour les communes dont la population totale est inférieure à 5 000 habitants, et 25 % pour celles dont la population totale est supérieure à 5 000 habitants.

5) les communes ayant été, au cours de l'un au moins des trois exercices précédents, attributaires de la dotation de solidarité urbaine.

Pour ces communes, les indemnités de fonction peuvent être votées dans la limite de la strate démographique supérieure.

Déterminés par la loi de 1992, ces critères n'ont pas fait l'objet de modifications majeures depuis. Il convient toutefois de souligner des évolutions de deux natures.

Premièrement, les barèmes applicables pour calculer le montant des indemnités allouées aux maires ont été revalorisés en 2000 . Il en a été de même pour les adjoints au maire en 2002.

Deuxièmement , les catégories d'élus bénéficiaires ont été élargies par le législateur. C'est notamment le cas pour les représentants des communes au sein des organes délibérants des EPCI . Une nouvelle extension pourrait prochainement entrer en vigueur, puisque l'article 13 du projet de loi relatif à l'élection des conseillers territoriaux et au renforcement de la démocratie locale prévoit l'attribution d'un régime indemnitaire aux délégués communautaires des communautés de communes. Cette disposition vise à harmoniser les dispositifs applicables à l'ensemble des EPCI et notamment aux communautés urbaines et aux communautés d'agglomération.

b) Un régime indemnitaire plafonné

Dès 1982, le rapport Debarge avait posé le principe d'un plafonnement des indemnités pouvant être perçues par les élus locaux , en proposant que leur montant soit limité à 1,5 fois le montant de l'indemnité parlementaire (soit 8 230,87 euros au 1 er juillet 2010).

Ce plafonnement figure dans le Code général des collectivités territoriales. Les articles L. 2123-20 (élus municipaux), L. 3123-18 (conseillers généraux), L. 4135-18 (conseillers régionaux) et L. 5211-12 (membres des organes délibérants des EPCI) disposent ainsi qu'un élu local ne peut percevoir un montant total de rémunération et d'indemnité de fonction supérieur à 1,5 fois le montant de l'indemnité parlementaire telle qu'elle est définie à l'article 1 er de l'ordonnance n° 58-1210 du 13 décembre 1958 portant loi organique relative à l'indemnité des membres du Parlement.

L'existence de ce plafonnement fait l'objet d'un consensus . Quelques voix discordantes s'élèvent néanmoins, comme celle du député René Dosière, pour demander un abaissement de ce plafond à une fois l'indemnité parlementaire de base, soit 5 514,68 euros mensuels.

D'autres observateurs, dont l'un de vos rapporteurs (J.-C. Peyronnet), considèrent qu'il ne faut pas écarter l'hypothèse selon laquelle la relative faiblesse des indemnités versées aux élus locaux, notamment dans les strates démographiques les plus faibles, les incitent à cumuler les mandats ou les fonctions pour bénéficier d'un régime indemnitaire plus en rapport avec les charges qu'ils assument.

Il convient également de souligner que le cumul maire-membre d'un organe délibérant d'un EPCI est quasiment obligatoire, même si des exceptions notables peuvent être relevées. Les nouvelles modalités de désignation des conseillers communautaires prévues par la réforme territoriale (ordre de présentation des candidats sur la liste) ne feront d'ailleurs que renforcer ce phénomène.

Si la question du plafonnement des indemnités ne fait pas véritablement l'objet d'un débat, il est une question plus technique qui fait l'objet d'interrogations régulières de la part des élus locaux : celle relative au périmètre des indemnités prises en compte pour le calcul de ce plafond.

La législation en vigueur est très claire sur le sujet. Toutes les indemnités et rémunérations perçues à l'occasion de l'exercice direct ou indirect des mandats entrent dans la définition du plafond fixé par le législateur . Bien qu'il n'existe pas de nomenclature officielle recensant la totalité des indemnisations susceptibles d'être perçues, cette règle englobe notamment les mandats électoraux, la présence au sein d'un conseil d'administration d'un établissement public local, du centre national de la fonction publique territoriale, la participation au conseil d'administration ou au conseil de surveillance d'une société d'économie mixte locale ou la présidence d'une telle société.

C'est donc bien l'ensemble des indemnités susceptibles d'être perçues par les élus locaux qui doit être pris en compte dans le calcul de ce plafond.

2. Les voies d'une amélioration du régime indemnitaire des élus locaux

A partir de 1992, le législateur a défini les catégories d'élus susceptibles de bénéficier d'un régime indemnitaire, ainsi que les montants alloués.

Sa réflexion s'est appuyée sur une analyse de l'existant, notamment sur les indemnités versées aux maires et conseillers municipaux, ainsi que celles perçues par les conseillers généraux.

La solution dégagée s'est avérée satisfaisante. Des règles claires et transparentes ont été définies, et le bénéfice de la protection matérielle a été étendu à de nombreuses catégories d'élus locaux.

Pour autant, des améliorations sont encore possibles, aussi bien dans le cadre défini par la législation actuelle que par la recherche de solutions innovantes (comme ce « statut d'agent civique territorial » proposé par le rapport Mauroy en 2000).

a) Clarifier la nature juridique de l'indemnité

Ainsi que le rappelle régulièrement le Gouvernement, en réponse aux questions écrites posées par les parlementaires, l'indemnité de fonction a pour objet de compenser les éventuelles pertes de rémunération dont les élus peuvent faire l'objet du fait de leur mandat ou, selon une autre formule utilisée, de compenser forfaitairement les sujétions résultant du mandat électif.

La circulaire du 15 avril 1992 relative aux conditions d'exercice des mandats locaux rappelle que l'indemnité de fonction allouée aux élus locaux ne présente ni le caractère d'un salaire, ni d'un traitement, ni d'une rémunération quelconque.

Ce caractère juridique exorbitant du droit commun a longtemps justifié que sa soumission à l'impôt sur le revenu se fasse selon des règles particulières (imposition à la source) et sur la base d'un barème fixé par la loi de finances.

Depuis 1992, ces indemnités peuvent être également soumises à cotisations prélevées par les Urssaf pour l'affiliation au régime général de l'assurance maladie ou de l'assurance vieillesse.

Le versement d'une indemnité n'est pas incompatible avec la perception d'allocations chômage, d'allocations versées dans le cadre de conventions de préretraite progressive ou dans celui des conventions d'allocations spéciales du fonds national de l'emploi.

Notre collègue Jacqueline Gourault avait néanmoins, à l'occasion de la table ronde organisée par votre délégation le 1 er juin 2010, attiré l'attention sur la nécessité de protéger un élément spécifique du régime indemnitaire : la fraction représentative des frais d'emploi.

Cette fraction représentative des frais d'emploi est versée à tous les élus locaux qui bénéficient d'une indemnisation ; elle est égale à l'indemnité d'un maire d'une commune de moins de 500 habitants (soit 646,25 euros mensuels).

Cette fraction n'est pas imposable, elle n'est pas intégrée dans le revenu fiscal de référence, elle constitue une indemnisation forfaitaire des frais susceptibles d'être engagés par l'élu pour l'exercice de son mandat.

Vos rapporteurs et votre délégation soutiennent la proposition émise par notre collègue Jacqueline Gourault. Cette clarification permettra aux élus de connaître précisément les revenus qu'ils doivent prendre en compte pour toute demande d'octroi d'une prestation ou d'une allocation soumise à conditions de ressources.

Proposition n° 7 : Exclure la fraction représentative des frais d'emploi des revenus pris en compte pour le versement d'une prestation ou d'une allocation sous conditions de ressources

Cette proposition, tout comme celle relative au statut juridique de l'indemnité, renvoie à des problèmes concrets rencontrés par les élus locaux en cas de cumul d'indemnités avec des allocations ou des prestations versées à l'élu à titre personnel. Plusieurs questions écrites posées par nos collègues sur la situation des élus locaux rencontrant des difficultés pour continuer à percevoir l'allocation adulte handicapé (AAH), allocation subsidiaire versée sous conditions de ressources, constituent un exemple concret des difficultés soulevées par le manque de transparence du statut de la fraction représentative de frais d'emploi. Mais la perception du RSA, ou la prise en compte de cette partie de l'indemnisation dans un jugement de divorce sont autant de dossiers pour lesquels cette clarification s'avérera utile.

Proposition n° 8 : Préciser la définition juridique de l'indemnité

b) Adopter des dispositions spécifiques pour les maires

Il semble indispensable à vos rapporteurs de concentrer leurs propositions de revalorisation du régime indemnitaire au bénéfice des maires.

C'est, à leurs yeux, le mandat local qui entraîne le plus de contraintes et donc qui nécessite la plus grande disponibilité. Nos concitoyens en sont conscients et des crises de vocations ont pu être constatées lors des dernières élections municipales, notamment en 2001 et 2008.

La disponibilité des maires, exigée tant par la charge de travail que par leurs administrés, suppose un niveau d'indemnisation qui permette de compenser les éventuelles pertes de revenus liées à une modification du contrat de travail du maire (temps partiel, suspension du contrat de travail), sauf à réduire l'origine sociologique des maires et à entraîner une surreprésentation des retraités (que les statistiques du ministère de l'intérieur ne font pas apparaître actuellement).

Vos rapporteurs font trois propositions en ce sens.

Tout d'abord, améliorer l'indemnisation des maires des communes de moins de 3 500 habitants.

Depuis 2002, la loi prévoit l'attribution automatique des indemnités maximales prévues par la loi pour les maires des communes de moins de 1 000 habitants, sauf décision contraire du conseil municipal. Il s'agit là de couper court à tout débat sur le montant des indemnités du maire et d'éviter que sous la pression de la population, des autres membres du conseil municipal, des contraintes budgétaires locales, le maire renonce à ses indemnités et exécute son mandat sans indemnisation.

La première mesure consisterait à étendre le bénéfice de cette mesure à tous les maires des communes de moins de 3 500 habitants 14 ( * ) .

Proposition n° 9 : Relever automatiquement le seuil démographique à partir duquel, sauf opposition du conseil municipal, un maire bénéficie de l'indemnité de fonction fixée au taux maximal par la loi (passer de 1 000 habitants à 3 500 habitants)

Ensuite vos rapporteurs proposent une mesure spécifique pour les maires qui cessent leur activité professionnelle, ou qui la réduisent afin d'exercer leur mandat.

Il s'agit de créer une dérogation dans l'agencement mis en place par le législateur depuis 1992, dont l'harmonisation des situations a été la ligne de conduite principale puisque l'objectif est bien d'établir un régime spécifique pour les maires à temps plein.

Ce régime spécifique prévoirait, à législation constante sur le cumul des mandats, que les maires qui suspendent leur activité professionnelle pour exercer leur mandat, ou qui réduisent leur temps de travail, bénéficient d'une majoration exceptionnelle de leurs indemnités.

En délégation, Rémy Pointereau a émis des réserves au sujet de cette proposition, considérant qu'elle allait représenter un coût important pour les communes, sans pour autant garantir une amélioration conséquente de la condition matérielle des maires concernés. C'est la raison pour laquelle il a proposé de cibler cette mesure sur certaines catégories de communes.

On observera cependant que, même avec une telle majoration, les conseils municipaux conserveraient le dernier mot sur l'indemnité totale allouée aux maires, puisqu'ils fixeraient toujours le montant de l'indemnité proprement dite, à partir de laquelle serait calculée ladite majoration. Cette mesure se veut donc avant tout un signal, un encouragement à l'intention des salariés dont la vocation -si précieuse pour la démocratie locale- peut être contrariée par le constat que les sacrifices qu'implique l'exercice d'un mandat de maire au regard de la vie professionnelle sont pour eux bien plus lourds que pour d'autres citoyens.

Pour autant, la remarque de notre collègue Rémy Pointereau met opportunément l'accent sur l'utilité qu'il pourrait y avoir à prendre en considération, sur ce point comme sur d'autres, la taille des communes. D'où la proposition suivante :

Proposition n° 10 : Accorder une majoration indemnitaire de 50 % aux maires qui cessent leur activité professionnelle pour se consacrer à leur mandat ; éventuellement, limiter cette majoration aux maires des communes n'excédant pas un certain seuil de population

Vos rapporteurs considèrent toutefois que, si un tel seuil était fixé, il devrait être suffisamment élevé pour tenir compte de la charge de travail d'un maire d'une commune moyenne, très difficilement compatible avec la poursuite d'une carrière professionnelle.

Cette mesure s'adresse d'ailleurs principalement aux maires des communes moyennes : en pratique, peu de maires de petites communes arrêtent leur activité professionnelle pour se consacrer à plein temps à leur mandat.

Enfin vos rapporteurs proposent qu'une réflexion s'engage pour définir les modalités de rémunération des maires au titre de leurs activités effectuées pour le compte de l'Etat. Cette rémunération viendrait en sus du régime indemnitaire et une dotation spécifique serait versée à chaque collectivité

Proposition n° 11 : Verser une rémunération complémentaire aux maires au titre de leurs activités effectuées pour le compte de l'Etat

c) S'interroger sur la pertinence du maintien du principe de gratuité

Les propositions de vos rapporteurs s'inscrivent jusqu'à présent dans un cadre juridique inchangé qui assure la pérennité du principe de gratuité des mandats.

Il leur semble néanmoins utile de s'interroger sur la pertinence du maintien du principe de gratuité afin de déterminer si ce dernier constitue un obstacle à la définition d'un statut de l'élu plus complet.

Le principe de la gratuité des fonctions électives locales s'est imposé depuis l'origine. La démocratie locale est en effet marquée par ce principe de gratuité dont les historiens font parfois remonter l'origine jusqu'à Montaigne pour qui « la charge de maire semble d'autant plus belle qu'elle n'a ni loyer, ni gain autre que l'honneur de son exécution ».

La traduction juridique de ce principe est assurée par l'article L. 2123-17 du Code général des collectivités territoriales. Bien que les dispositions de cet article ne s'imposent qu'aux maires et conseillers municipaux, ce principe de gratuité a été étendu à l'ensemble des mandats locaux. Une jurisprudence constante confirme cette interprétation, ainsi que le Conseil d'Etat l'a rappelé dans un arrêt du 27 juillet 2005.

Cette disposition juridique pose plutôt un principe philosophique qu'une interdiction pure et simple de verser une quelconque rémunération aux élus locaux. Les élus locaux peuvent, en effet, percevoir des indemnités dans les conditions prévues par la loi.

La création d'un régime indemnitaire spécifique aux élus locaux n'est donc pas incompatible avec le principe de gratuité, mais seule une mention législative expresse peut y déroger. Toute l'action du législateur a donc consisté, dans le respect du principe de gratuité, à rechercher un juste équilibre entre la nécessaire compensation du temps passé au service de la collectivité et le risque d'une professionnalisation des élus.

Depuis les lois de décentralisation, le maintien du principe de gratuité a été mis en débat lors de l'examen de chacun des grands textes ayant évoqué le statut des élus, notamment en 1992 (exercice des mandats locaux), en 1999 (statut des délégués des communes au sein des EPCI), en 2000 (limitation du cumul des mandats) et en 2002 (démocratie de proximité).

La suppression du principe de gratuité a toujours été repoussée par le législateur, et notamment par le Sénat, en raison du risque de professionnalisation des élus qui en découlerait. L'utilisation de cet argument doit être débarrassée de toute ambiguïté. La professionnalisation qui doit être évitée est celle liée à la carrière. Si le statut doit assurer une protection matérielle et sociale aux élus locaux, ces éléments constitutifs ne doivent pas se traduire par l'organisation d'une carrière élective qui pourrait entraîner des effets négatifs. Ce refus de la professionnalisation est une constante de la réflexion sur le statut de l'élu dans le rapport Debarge, comme dans le rapport Mauroy.

Pour autant, l'idée de professionnalisation qui est combattue par le législateur n'est pas liée à celle de l'acquisition des compétences nécessaires à l'exercice du mandat, acquisition devenue indispensable avec l'accroissement des compétences transférées aux collectivités territoriales, et le poids toujours plus lourd de la réglementation applicable. Les élus locaux doivent acquérir les compétences nécessaires, par le biais de leur droit à formation par exemple, à l'exercice de leur mandat, ils doivent également être en mesure de cesser leur activité professionnelle pour se consacrer à temps plein à la gestion de leur collectivité.

Néanmoins, le maintien du principe de gratuité a conduit le législateur à écarter, au nom du risque de professionnalisation, certaines solutions préconisées pour renforcer le statut de l'élu. C'est notamment le cas de la proposition du rapport Mauroy de créer pour les présidents de conseil régional, de conseil général, les maires et leurs principaux adjoints, un statut d'agent civique territorial, salarié de leur collectivité.

Plus largement se pose en effet la question de savoir si le maintien de ce principe de gratuité a constitué un obstacle à l'élaboration d'un statut de l'élu comparable à celui mis en place dans certains pays où les élus exerçant leur mandat à temps plein disposent d'un statut assimilé à celui des fonctionnaires.

C'est le cas des maires en Allemagne ou aux Pays-Bas. Ainsi, en Allemagne, les maires des communes les plus importantes et les présidents de conseils d'arrondissements sont assimilés à des fonctionnaires pendant toute la durée de leur mandat, tout en conservant leur liberté d'action, tandis que les autres élus locaux, qui exercent leur mandat à titre bénévole, ne sont en général indemnisés que pour le manque à gagner et pour les frais liés à l'exercice de leur mandat.

Vos rapporteurs considèrent qu'il est temps de réfléchir aux conséquences de la suppression de toute référence au principe de gratuité dans le Code général des collectivités territoriales. Le maintien de ce principe est un frein à la constitution d'un statut moderne de l'élu local.

Proposition n° 12 : Supprimer l'article L. 2123-17 du Code général des collectivités territoriales, qui pose le principe de la gratuité des fonctions

ANNEXES

Annexe 1 : Les propositions de votre délégation

• Proposition n° 1 : Regrouper dans un chapitre spécifique du Code général des collectivités territoriales les dispositions constitutives du statut de l'élu

• Proposition n° 2 : Accorder le bénéfice du crédit d'heures aux conseillers municipaux des communes de moins de 3 500 habitants

• Proposition n° 3 : Ouvrir le bénéfice du droit à la suspension du contrat de travail aux adjoints des communes et vice-présidents d'EPCI à fiscalité propre de plus de 10 000 habitants

• Proposition n° 4 : Etendre aux conseillers territoriaux la possibilité de suspendre leur contrat de travail pour exercer leur mandat

• Proposition n° 5 : Rendre obligatoire l'adhésion au régime de retraite par rente pour les élus qui n'ont pas cessé leur activité professionnelle

• Proposition n° 6 : Permettre aux élus qui cessent leur activité professionnelle d'adhérer au régime de retraite par rente (en sus du régime général et du régime complémentaire)

• Proposition n° 7 : Exclure la fraction représentative des frais d'emploi des revenus pris en compte pour le versement d'une prestation ou d'une allocation sous conditions de ressources

• Proposition n° 8 : Préciser la définition juridique de l'indemnité

• Proposition n° 9 : Relever automatiquement le seuil démographique à partir duquel, sauf opposition du conseil municipal, un maire bénéficie de l'indemnité de fonction fixée au taux maximal par la loi (passer de 1 000 habitants à 3 500 habitants)

• Proposition n° 10 : Accorder une majoration indemnitaire de 50 % aux maires qui cessent leur activité professionnelle pour se consacrer à leur mandat ; éventuellement, limiter cette majoration aux maires des communes n'excédant pas un certain seuil de population

• Proposition n° 11 : Verser une rémunération complémentaire aux maires au titre de leurs activités effectuées pour le compte de l'Etat

• Proposition n° 12 : Supprimer l'article L. 2123-17 du Code général des collectivités territoriales, qui pose le principe de la gratuité des fonctions

Annexe 2 : Examen du rapport d'information par la délégation, le 31 janvier 2012

M. Jean-Claude Peyronnet, rapporteur. - Le précédent bureau de la délégation nous avait confié une réflexion sur le statut « social » des élus, en parallèle d'un travail mené sur le cumul des mandats, qui vous sera présenté par nos collègues François-Noël Buffet et Georges Labazée le 14 février.

Nous avions déjà présenté les conclusions de ce travail à la délégation en décembre 2010. Nous croyons pouvoir dire, Philippe Dallier et moi-même, qu'elles ont été globalement bien accueillies. Un report de leur adoption avait cependant été souhaité par son président, afin que les contours de certaines de ces propositions puissent être précisés.

L'ensemble des interrogations que nous avions soulevées restent malheureusement d'actualité, ce qui nous conduit à vous les présenter une nouvelle fois aujourd'hui, avec quelques aménagements de forme plus que de fond. Je tiens à préciser que nous avions réalisé ce travail en étroite collaboration avec l'AMF. Depuis, cette dernière n'a pas modifié ses positions à ce sujet.

Si vous le permettez, je voudrais désormais rappeler quelques éléments sur la démarche suivie et l'état de la réflexion sur le statut de l'élu, au risque de me répéter, à l'attention de nos collègues qui ont rejoint la délégation depuis peu.

La question du statut de l'élu local s'est posée de manière nouvelle dès l'acte I de la décentralisation. Les éléments dispersés et disparates qui tenaient lieu de statut de l'élu avant 1982 ne répondaient pas aux exigences nouvelles posées par les transferts de compétences organisés par le législateur.

Dès janvier 1982, le rapport de notre ancien collègue Marcel Debarge avait défini les fondements d'un statut « moderne » de l'élu local. L'objectif était de donner aux élus locaux les moyens de relever le défi de la décentralisation et d'introduire de nouveaux comportements conformes aux exigences de la démocratie.

Bien que la pertinence de l'analyse réalisée par Marcel Debarge n'ait été remise en cause par aucun observateur, il a fallu attendre près de dix ans pour que ses préconisations trouvent une traduction juridique avec la loi du 3 février 1992 relative aux conditions d'exercice des mandats locaux. La loi du 12 juillet 1999 relative au renforcement et à la simplification de la coopération intercommunale et la loi du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité ont renforcé le dispositif initial, permettant aux élus d'exercer leurs mandats dans un contexte plus favorable.

L'intention du législateur était double : il s'agissait, d'une part, accorder aux élus locaux le temps nécessaire pour exercer des fonctions de plus en plus lourdes et complexes, et, d'autre part, étendre le bénéfice de ce corpus de règles à un nombre plus grand d'élus locaux, plutôt que de développer un statut particulier pour les présidents d'exécutifs locaux.

La question qui se pose désormais est de savoir si cet édifice législatif suffit à bâtir un statut de l'élu local. La réponse semble négative. Tel est le sentiment exprimé par les élus locaux, mais aussi les parlementaires qui saisissent régulièrement le Gouvernement de la question de l'élaboration, ou de l'achèvement, d'un véritable statut de l'élu.

En décidant de se saisir de cette question, notre délégation a souhaité donner un coup de projecteur sur un statut de l'élu constitué de nombreuses dispositions disparates et sur l'insatisfaction qu'il génère.

L'inventaire et l'analyse que nous avons élaborés dressent un état des lieux mitigé. S'il est incontestable que tous les sujets mis en exergue par le rapport de notre ancien collègue Marcel Debarge (indemnités, protection sociale, droits d'absence) ont reçu des réponses, et qu'aucune catégorie d'élu local n'a été laissée à l'écart par ces évolutions législatives, comment expliquer la persistance d'un sentiment d'insatisfaction ?

Peut-être la logique du statut ébauchée depuis 1992 est-elle arrivée à son terme ? Des aménagements sont, certes, encore possibles et nous allons d'ailleurs vous soumettre des propositions en ce sens ; mais il ne s'agira pas d'une réforme majeure, ni d'un changement de référentiel dans la manière d'aborder la problématique du statut de l'élu.

Alors que les attentes des élus locaux sont de plus en plus importantes, tout comme les charges pesant sur eux, l'heure n'est-elle pas venue d'imaginer un nouveau cadre pour leur permettre d'exercer dans les meilleures conditions leurs mandats ?

Pour essayer d'y parvenir, tout en respectant les contraintes financières qui s'imposent aux collectivités territoriales, nous avons choisi de concentrer notre attention sur trois sujets principaux : premièrement, l'amélioration immédiate du statut des maires ; deuxièmement, l'ajustement des mesures existantes ; troisièmement, une réflexion sur l'opportunité de maintenir le principe de gratuité des mandats.

Je commence par la situation des maires, qui nous a semblé le sujet le plus préoccupant. Une crise des vocations est palpable, comme nous avons pu le constater à l'occasion des dernières élections municipales de 2008. Il faut dire que les charges pesant sur les maires sont de plus en plus lourdes, du fait des transferts de compétences et de la complexité toujours plus grande des politiques publiques ; sans compter les attentes de nos concitoyens, qui sont de plus en plus importantes à l'égard de leurs élus locaux, et de leur maire en particulier.

Il nous a donc semblé indispensable d'apporter une réponse spécifique à la situation des maires et, plutôt que de continuer à saupoudrer en quelque sorte les améliorations du statut de l'élu local, de différencier la situation des maires par rapport aux autres élus locaux.

Notre objectif prioritaire est de permettre aux maires qui le souhaitent de cesser leur activité professionnelle pour exercer leur mandat à temps plein. Cette possibilité leur est, certes, déjà ouverte. Pour autant, les modalités de cette cessation d'activité ne sont pas totalement satisfaisantes, notamment en termes de rémunération : le maire est souvent moins bien payé que certains de ses collaborateurs, et cette rémunération est peu élevée au regard des responsabilités qui lui sont confiées. Nous avions donc proposé une majoration de 50 % de l'indemnité des maires soumise à l'approbation du conseil municipal, réservée à ceux qui cesseraient complètement leur activité professionnelle, une majoration de 25 % pouvant être accordée à ceux qui choisiraient de maintenir une activité professionnelle à temps partiel. L'idée était de venir en compensation des charges assumées par les maires, mais également de les inciter à exercer ce mandat à temps complet, sans que cela ne se traduise par une dégradation matérielle de leur situation. Cette proposition avait suscité une réserve lors de la première présentation de ce rapport, de la part de notre collègue Yves Détraigne. Il avait notamment fait valoir qu'elle pouvait avoir des conséquences dommageables sur les finances des plus petites communes, alors que le développement de l'intercommunalité allait certainement changer la nature de la fonction de maire dans ces mêmes petites communes. Nous avons toutefois décidé de maintenir cette proposition, considérant qu'une amélioration du statut de l'élu implique nécessairement un minimum d'efforts de la part des collectivités - même s'il est évident que ces efforts doivent être maîtrisés.

Les deux autres propositions n'avaient pas soulevé d'opposition. Pour mémoire, il s'agit de prévoir une rémunération des maires au titre des activités effectuées pour le compte de l'Etat, et de relever le seuil démographique à partir duquel un maire bénéficie de l'indemnité de fonction fixée au taux maximal par la loi (passer de 1 000 à 3 500 habitants), sauf avis contraire du conseil municipal.

Ces trois mesures, d'inégale importance, nous semblent de nature à renforcer le statut des maires, dont le rôle dans notre système local est irremplaçable et dont l'action est saluée par nos concitoyens.

M. Philippe Dallier, rapporteur. - Dans un deuxième temps, nous avions proposé un ajustement la législation actuelle afin d'améliorer ponctuellement la situation des élus locaux.

Ces propositions peuvent être regroupées autour de trois grandes catégories composant l'actuel statut de l'élu local : les droits d'absence, les retraites et le statut juridique de leur indemnité. Je me permets à mon tour de les exposer.

Comme vous le savez, la plupart des élus locaux bénéficient de plusieurs dispositifs dits de droits d'absence : autorisations d'absence, crédits d'heures, congé formation, congé pour se présenter aux élections locales et, bien entendu, possibilité de suspendre son contrat de travail. L'objectif de ces dispositifs est de leur permettre de concilier une activité professionnelle avec l'exercice d'un mandat local. S'ils peuvent apparaître insuffisants ou incomplets, il n'en demeure pas moins que le législateur a cherché à définir un équilibre fragile entre l'intérêt de l'employeur de l'élu local et les contraintes liées à l'exercice du mandat.

Dans ce domaine, les propositions que nous avions faites n'avaient pas soulevé de difficultés, sous réserve du remplacement du terme de « droit à la cessation d'activité » par celui de « suspension du contrat de travail », plus intelligible, à la demande de notre président d'alors, M. Claude Belot. En réalité, les deux expressions figurent dans notre droit ; le code général des collectivités territoriales parlant de la « cessation d'activité » et renvoyant aux dispositions du code du travail, qui, de son côté, parle de « suspension du contrat de travail ». Comme il s'agit, dans le cadre de notre rapport, d'ouvrir des pistes et non de formaliser une proposition de loi, nous ne voyons pas d'objection à parler de « suspension de contrat de travail ». Sur le fond, il s'agit d'élargir les catégories d'élus susceptibles d'être autorisés à suspendre leur contrat de travail pour se consacrer à leur mandat, en ouvrant cette possibilité aux adjoints des communes et vice-présidents d'EPCI à fiscalité propre de plus de 10 000 habitants, ainsi qu'aux conseillers territoriaux. Je précise que la proposition de loi visant à renforcer l'attractivité et à faciliter l'exercice du mandat local adoptée par le Sénat en juin 2011 à l'initiative de nos collègues Bernard Saugey et Marie-Hélène Des Esgaulx prévoit également que ce droit soit étendu, mais aux seuls adjoints des communes de plus de 10 000 habitants.

L'autre proposition que nous avions formulée consiste à accorder le bénéfice du crédit d'heures aux conseillers municipaux élus dans les communes de moins de 3 500 habitants qui sont, à ce jour, les seuls élus exclus de ce dispositif. Celui-ci, rappelons-le, permet à l'élu de disposer du temps nécessaire à l'administration de la commune, c'est-à-dire à la préparation des réunions des instances dans lesquelles il siège.

Hormis les droits d'absence, nous avions également proposé des ajustements législatifs dans le domaine de l'acquisition des droits à pension. Deux évolutions sont envisageables. Il s'agirait, d'une part, de rendre obligatoire, pour les élus qui n'ont pas cessé leur activité professionnelle, l'adhésion au régime de retraite par rente. Cette adhésion est aujourd'hui facultative et un certain nombre d'élus locaux y renoncent pour éviter de faire peser un poids supplémentaire sur les finances communales. D'autre part, dans le même esprit, nous estimons nécessaire que les élus cessant leur activité professionnelle pour se consacrer à leur mandat puissent également souscrire à cette retraite par rente qui, je le rappelle, constitue une dépense obligatoire pour les collectivités territoriales. Cette dernière proposition représente une rupture avec le droit actuel selon lequel la retraite des élus locaux est formée de deux niveaux seulement (régime général et Ircantec ou Ircantec et retraite par rente).

Nous souhaitons ainsi, dans le prolongement de nos propositions précédentes, favoriser les élus qui cessent leur activité pour se consacrer à leur mandat local, afin que ce choix ne se traduise pas par une dégradation de leur situation matérielle.

Dans un troisième temps, il nous semble nécessaire que les pouvoirs publics se penchent sur le statut juridique des indemnités versées aux élus locaux qui, vous le savez, ne présente ni le caractère d'un salaire, ni celui d'un traitement, ni celui d'une rémunération quelconque. Pourquoi préciser ce statut juridique alors que la question de la fiscalité de l'indemnité ou du prélèvement des cotisations sociales a été réglée ? Notre présidente Mme Jacqueline Gourault avait eu l'occasion de le souligner devant nous, avec force, lors de la table ronde organisée par notre délégation le 1 er juin 2010. Il s'agit de lever certaines incertitudes auxquelles sont confrontés les élus locaux. C'est le cas notamment du statut de la fraction représentative des frais d'emploi. Cette fraction non imposable, versée à tous les élus locaux qui perçoivent une indemnité, pose des problèmes concrets aux élus, notamment en cas de cumul d'indemnités avec des allocations ou des prestations versées sous condition de ressources. C'est pourquoi plusieurs de nos collègues ont adressé au gouvernement de nombreuses questions écrites sur la situation des élus locaux qui se voyaient privés du bénéfice de l'allocation adulte handicapé (AAH), du fait d'une mauvaise interprétation de la prise en compte de la fraction représentative des frais d'emploi dans le calcul de la rémunération des élus. Il s'agit là de clarifier le droit en vigueur afin de sécuriser la situation des élus locaux.

M. Claude Belot avait regretté le caractère imprécis de la proposition visant à « préciser la définition juridique de l'indemnité ». Nous la maintenons toutefois, considérant que les propositions que nous faisons ne constituent pas une proposition de loi mais des pistes de réflexion. C'est la raison pour laquelle nous n'avons pas souhaité régler définitivement cette question, mais appeler à une analyse plus approfondie, d'autant plus nécessaire que toute décision prise en la matière aura des conséquences dans un certain nombre de domaines, qu'il convient d'évaluer avec précision en amont, en concertation avec les élus locaux.

Pour conclure, je voudrais aborder un sujet particulièrement complexe et polémique, comme j'avais déjà eu l'occasion de le faire lors de la première présentation de ce rapport, celui de la gratuité du mandat. Nous estimons nécessaire d'aller de l'avant sur la question du statut de l'élu afin de tenir compte des contraintes de plus en plus lourdes qui pèsent sur les élus locaux.

Aussi, nous nous interrogeons sur l'opportunité de maintenir le principe de gratuité des mandats locaux qui a, jusqu'à présent, constitué un frein à l'adoption d'un statut plus protecteur des élus. La suppression de ce principe est souvent perçue comme synonyme de professionnalisation des fonctions électives. Or, ce terme de professionnalisation - utilisé comme repoussoir dans de nombreux débats sur le statut de l'élu - est impropre. Ce que nous voulons éviter, ce n'est pas la professionnalisation des élus locaux, qui est nécessaire, mais bien la création d'un statut comparable, par exemple, à celui de la fonction publique, qui offrirait aux élus une carrière avec des revalorisations régulières de salaires, voire des promotions.

Nous pensons que la suppression du principe de gratuité ne conduit pas automatiquement à l'instauration d'une « carrière ». Aussi souhaitons-nous inviter les membres de notre délégation, nos collègues sénateurs et l'ensemble des acteurs à une réflexion rénovée sur ce thème et sur les moyens de mettre en oeuvre un statut de l'élu protecteur, susceptible de répondre aux attentes des élus locaux et aux défis qu'ils relèvent quotidiennement.

Mme Jacqueline Gourault, présidente. - Merci, Messieurs les rapporteurs. J'ouvre le débat. La parole est à M. Yannick Botrel.

M. Yannick Botrel. - Merci, Madame la présidente. La prise en charge financière des mandats locaux est le fond du problème. Nous devons éviter deux écueils : d'une part, une prise en charge financière insuffisante du coût des mandats locaux, qui pénalise les élus et, d'autre part, une prise en charge excessive pouvant conduire à une professionnalisation, ce qui mettrait l'élu dans une situation difficile le jour où il perd son mandat. Nous devons trouver un juste équilibre.

Par ailleurs, un autre point doit être soulevé : certains élus, qui exercent une activité professionnelle, peuvent être amenés à la suspendre pendant l'exercice de leur mandat. On évoque souvent la surreprésentation de certaines catégories socioprofessionnelles, celle-ci s'explique par la faculté de retrouver son emploi à la fin du mandat, qui diverge fortement selon les métiers. Or, il s'agit d'un élément essentiel de la possibilité, pour tous les citoyens, d'accéder à un mandat électif. Certaines catégories socioprofessionnelles sont, de ce point de vue, plus favorisées que d'autres.

En ce qui concerne la juste compensation financière, certaines choses peuvent en effet être améliorées mais, pour l'exercice de certains mandats, l'indemnisation me paraît correcte, surtout si l'on compare avec l'environnement professionnel de certains salariés.

Je souhaite par ailleurs insister sur un sujet qui n'a pas été évoqué : les personnes qui ont quitté volontairement leur emploi pour exercer un mandat local ne peuvent pas valider leurs trimestres de cotisation pour la retraite. Certes, il existe des complémentaires santé. Mais, ce qui compte, comme nous avons pu le voir lors du débat en séance publique sur la réforme des retraites, c'est la validation des trimestres. Je propose donc d'offrir à un élu la possibilité de continuer à cotiser et à valider ses trimestres.

Mme Jacqueline Gourault, présidente. - Merci. M. Antoine Lefèvre a demandé la parole.

M. Antoine Lefèvre. - Je voudrais revenir sur ce qui a été dit par nos rapporteurs. La question du cumul des mandats est indissociable de celle du statut de l'élu. En effet, le cumul est un moyen pour certains élus de compenser la renonciation à une activité professionnelle. Lorsque j'ai été élu maire d'une ville de préfecture, j'ai fait le choix de mettre de côté ma carrière professionnelle pour me consacrer à plein temps à mon mandat local. N'étant pas fonctionnaire, je disposais d'une garantie de reprise dans mon entreprise de deux ans. Ce délai est toutefois incompatible avec la durée du mandat. Aussi, on m'a conseillé d'avoir un deuxième mandat pour éviter une situation précaire, surtout en cas de non-réélection à mon mandat communal. Je suis prêt à rouvrir le débat sur le cumul des mandats, mais une bonne représentation des élus de toutes les catégories socioprofessionnelles nécessite une amélioration du statut de l'élu.

Dans la même perspective, je voudrais évoquer un sujet qui me tient particulièrement à coeur : la cotisation pour la retraite. Ayant fait le choix de suspendre ma carrière professionnelle, avec les risques que j'assume, j'ai appris que je n'avais pas le droit de cotiser. Lorsque je me suis adressé au service juridique de l'AMF, on m'a informé qu'en cas de non-réélection, je relèverais de la CMU. Pour ceux qui ont fait le choix d'être élu à temps plein, c'est la double peine. J'ai interrogé les gouvernements à de nombreuses reprises, par des questions écrites et orales. La réponse est toujours la même. Nous sommes trop peu nombreux dans ce cas, d'où une absence de modification de la loi. Nous ne demandons pas un traitement de faveur ; mais la possibilité de pouvoir cotiser. Je pense qu'il y a une profonde injustice dans le statut de l'élu.

Je voudrais aborder un autre sujet : le principe de gratuité des fonctions électives. Je le trouve assez hypocrite. Nous savons bien que dans beaucoup de communes, notamment les communes rurales, le fait d'accepter de ne pas recevoir des indemnités est devenu un élément de choix du maire. Or, c'est avant tout la situation sociale qui permet ou non de refuser ces indemnités. Il y a donc une distorsion. Ainsi, certains jeunes élus ne peuvent pas bénéficier des indemnités qui leur sont pourtant dues et qui doivent être votées lors de la première réunion du conseil municipal. Il y a donc une hypocrisie et un vrai malaise sur ce sujet. Aussi, la délégation doit appuyer ce projet de suppression de la gratuité du mandat qui ne correspond plus du tout à la réalité.

Mme Jacqueline Gourault, présidente. - Je vous remercie pour cette intervention constructive et pour ce témoignage.

M. Raymond Couderc. - Je vais défendre la même idée en apportant un éclairage différent. Nous devons faire en sorte que les indemnités soient de droit et que le vote devienne optionnel. Il interviendrait seulement pour diminuer ou supprimer ces indemnités. Avoir des indemnités de droit permettrait d'éviter ce sentiment de « faire de la charité » pour les élus qui veulent bien s'occuper de la commune. Par ailleurs, les conseils municipaux doivent mieux représenter la diversité de la société, en termes socioprofessionnels, mais aussi en termes de classe d'âge. Or, j'observe dans les conseils municipaux des villes de même taille que la mienne que la charge est devenue tellement chronophage, que les conseillers municipaux sont majoritairement des retraités. Pourquoi ? Parce que nous sommes obligés, aujourd'hui, dans nos villes, de déléguer à tous les élus de l'équipe municipale. Et ceux-ci ont des réunions en permanence : avec les services de l'Etat, du conseil régional, du conseil général, ou de concertation, en raison de textes devenus trop compliqués et nécessitant ces rencontres pour leur bonne application. Dès lors, ils sont obligés de se consacrer à plein temps, ou quasiment à plein temps, à leur mandat. Si nous n'arrivons pas à trouver une solution satisfaisante pour la compensation financière des élus de nos communes, les conseils municipaux seront composés majoritairement de personnes non actives.

M. François Grosdidier. - Je partage à la fois les propositions de nos rapporteurs et ce qui a été dit depuis le début du débat. Certes, la question de l'indemnisation des élus est souvent mal comprise par nos concitoyens. Or, je rappelle que si les élus nationaux, régionaux et départementaux sont correctement indemnisés, les élus communaux sont indemnisés de façon dérisoire, certains touchant moins que le SMIC horaire.

En ce qui concerne la suspension de contrat, il faut insister sur la notion de suspension. Je voudrais citer l'exemple de mon adjointe, qui était également conseillère régionale. En tant qu'adjoint au maire, elle bénéficiait d'une suspension de contrat et pouvait cotiser pour sa retraite. Lorsqu'elle a été élue au conseil régional, elle a dû abandonner son mandat communal. Elle ne pouvait dès lors plus bénéficier de suspension de contrat de travail, ni cotiser.

Par ailleurs, je souhaiterais plus d'informations sur la proposition n° 9 : « Relever automatiquement le seuil démographique à partir duquel un maire bénéficie de l'indemnité de fonction fixée au taux maximal par la loi (passer de 1 000 habitants à 3 500 habitants) ». Mes connaissances sont imparfaites, mais il me semblait que dans toutes les assemblées communales, il était procédé à un vote sur les indemnités, et pas seulement dans les communes de moins de 3 500 habitants. Dans ma commune de 15 000 habitants, nous avons toujours délibéré sur les indemnités. Aujourd'hui, il n'y a aucune indemnité automatique pour les mandats communaux. C'est gênant à la fois pour les élus et pour l'opposition. Il est, par ailleurs, difficilement compréhensible pour nos concitoyens que leurs élus consacrent leur première réunion à la fixation des indemnités, après avoir fait campagne sur les problèmes que ceux-ci rencontrent au quotidien. Je ne comprends pas la volonté de mettre en place un seuil à 1 000 habitants. J'estime que dans toutes les communes, à défaut de délibération contraire, les indemnités prévues par la loi doivent être versées. Si un maire ou des adjoints renoncent à tout ou partie de leurs indemnités, c'est leur droit et ils peuvent faire cette démarche, mais la renonciation ne doit plus être perçue comme naturelle.

M. Jean-Claude Peyronnet . - Il me semble que dans les communes de moins de 1 000 habitants, l'indemnité est automatique.

Mme Jacqueline Gourault, présidente. - J'ai récemment fait adopter un amendement dans le cadre de la proposition de loi de notre collègue Bernard Saugey, reprenant des dispositions que j'avais moi-même proposées. Malheureusement, la proposition de loi Saugey n'a pas été votée. Aujourd'hui, dans les communes de moins de 1 000 habitants, une délibération demeure nécessaire et, la plupart du temps, les maires sont gênés parce que les conseils municipaux ne veulent pas leur accorder les indemnités maximum. Il y a dans le monde rural une profonde évolution. Autrefois, la fonction de maire était exercée bénévolement : l'agriculteur ou le notable qui avait une situation suffisamment installée était maire et on avait pris l'habitude de ne pas voter d'indemnités dans les petites communes. Puis un jour, un citoyen de 32 ans se fait élire et doit prendre sur son temps de travail. Il demande alors une indemnité, ce qui est presque considéré comme indécent. C'est d'autant plus injuste que, pour les communes de moins de 1 000 habitants, l'Etat verse une « dotation de l'élu rural », qui est faite pour compenser, certes en partie, les indemnités attribuées aux maires. C'est une raison supplémentaire pour que ces dernières soient attribuées d'office.

M. Jean-Claude Peyronnet. - Depuis 2002, la loi prévoit que pour les communes de moins de 1 000 habitants, l'indemnité du maire est fixée au maximum autorisée, sauf autorisation contraire.

M. François Grosdidier. - Ce que je souhaite, c'est que les indemnités soient de droit pour toutes les communes, de la plus petite à la plus grande ville. Lorsque, par exemple, nous créons un poste de rédacteur, nous n'avons pas besoin de déterminer son salaire en conseil municipal. Cela devrait être la même chose pour le maire, car une grille d'indemnisation est fixée par la loi. En ce qui concerne l'indemnisation des conseillers municipaux, je tiens tout d'abord à signaler que les préfectures ont des lectures différentes de ce qui est permis de faire dans ce domaine. A partir de 100 000 habitants, tous les conseillers municipaux perçoivent une indemnité. Je suis en faveur d'un abaissement de ce seuil. Cependant, je ne pense pas qu'il faille priver l'équipe municipale de la possibilité de moduler l'enveloppe globale d'indemnisation. Il s'agit d'éviter les règlements de compte, c'est-à-dire une suspension des indemnités des maires en cours de mandat.

Dans ma commune, l'enveloppe est augmentée de 15 % car nous sommes chef-lieu de canton. C'est sur ces 15 % que j'indemnise les conseillers délégués. Je ne suis pas favorable à la suppression de toute souplesse mais il faut empêcher que, sur un vote politique, l'indemnité d'un maire, qui a des responsabilités et des obligations légales, soit suspendue. Dans tous les cas, je considère que les indemnités reviennent de plein droit aux élus, indépendamment de la taille de la commune. Un maire d'une ville de 30 000 ou de 100 000 habitants gagne moins que les cadres municipaux, alors qu'il s'agit d'un travail à temps plein. Par ailleurs, cela éviterait un débat malsain et le procès de l'exécutif fait par l'opposition au sujet de la première délibération du conseil municipal nouvellement élu. Enfin, je pense à nos collègues élues, les frais de garde étant une contrainte supplémentaire. Aujourd'hui, la ville ne peut pas les prendre en charge, y compris pour les conseillers non indemnisés. Aussi, je suis en faveur d'une prise en charge des frais de garde, indépendamment des indemnités.

Mme Jacqueline Gourault, présidente. - La délibération est effectivement obligatoire dans toutes les communes, quelle que soit leur population. Dans les communes de moins de 1 000 habitants, le droit prévoit que l'indemnité soit fixée au taux maximal prévu, sauf opposition du conseil municipal. Dans les faits, nous savons bien qu'il y a souvent des discussions à ce sujet.

Je laisse désormais la présidence à Patricia Schillinger, me voyant dans l'obligation de m'absenter, ce dont je vous prie de m'excuser.

M. Rémy Pointereau. - Vos propositions me conviennent dans l'ensemble. Il faudra peut-être rediscuter de la gratuité des fonctions. Je m'interroge toutefois au sujet de la proposition n° 10 « Accorder une majoration indemnitaire de 50 % aux maires qui cessent leur activité professionnelle pour se consacrer à leur mandat ». Il faudrait à mon sens réserver cette possibilité à un type de communes déterminé. Cette mesure sera en effet très coûteuse et difficile à assumer pour les communes de moins de 1 000 habitants. En outre, elle risque de ne pas être suffisante : avec la limitation du cumul des mandats, cette majoration ne permettra pas aux maires de ces petites communes de vivre de leur indemnité. Pour une commune de 500 habitants par exemple, le maire reçoit environ 600 euros d'indemnités mensuelles. Avec une majoration de 50 %, il percevra 900 euros seulement. Il doit en outre assumer toute une série de dépenses coûteuses : frais de représentation, de déplacement, de réception, etc. Dans ces conditions, comment voulez-vous qu'un maire arrête son activité professionnelle pour se consacrer à son mandat ?

Pour des communes de petite ou de moyenne taille, je me demande s'il ne vaudrait pas mieux faciliter le remboursement des frais de représentation et de déplacement, que les maires financent aujourd'hui avec leur indemnité de fonction.

Avec cette proposition n° 10, nous allons vers une professionnalisation des élus. Je redoute que certaines personnes se présentent aux municipales dans l'idée qu'ils vont être rémunérés pour des fonctions exercées à temps plein, alors que dans les plus petites communes, les maires ont besoin de consacrer au maximum deux ou trois jours par semaine à l'administration de leur commune. Permettez-moi donc de vous faire part de mon inquiétude au sujet de cette proposition. Je me demande si un seuil en nombre d'habitants ne devrait pas accompagner cette proposition.

Je constate également qu'aujourd'hui, il est plus facile pour un fonctionnaire d'exercer un mandat local, que pour un agriculteur ou une personne exerçant une profession libérale... et il ne s'agit pas seulement là d'une question d'indemnité.

M. Jean-Claude Peyronnet, rapporteur. - Ce qui est en jeu ici, ce n'est pas le montant de l'indemnité, mais la possibilité d'exercer à temps partiel. Je comprends ces arguments. Il est toujours délicat d'instaurer des seuils.

Les indemnités ont été nettement revalorisées entre 1992 et, aujourd'hui, l'indemnité brute d'un maire d'une commune de moins de 500 habitants a, par exemple, augmenté de 370 euros à 650 euros environ. Celle d'un maire d'une commune de 10 000 à 19 999 habitants a augmenté de 1 700 euros à plus de 2 400 euros. Pour une commune de 1 000 habitants, l'indemnité est actuellement de 1 600 euros environ. Si l'on y ajoute une majoration de 50 %, elle s'élève à 2 400 euros. Cela me semble raisonnable.

M. Rémy Pointereau. - Certes, mais qui paie ? Je préférerais que l'on parle de frais de représentation.

M. Jean-Claude Peyronnet, rapporteur. - Il pourrait être ajouté que la mesure proposée pourra éventuellement être limitée aux maires des communes n'excédant pas un certain seuil de population.

M. Philippe Dallier. - Tout à fait.

M. Rachel Mazuir. - Les frais kilométriques d'un président ou d'un vice-président de conseil général sont pris en charge. Je me demande si cette possibilité n'est pas également offerte aux maires ?

Mme Patricia Schillinger, présidente. - Effectivement, notamment pour les grands déplacements.

M. Rémy Pointereau. - Une délibération est nécessaire à chaque fois.

M. Rachel Mazuir. - Je ne suis pas sûr que l'approche du statut de l'élu par les indemnités soit la voie à suivre.

M. Jean-Claude Peyronnet, rapporteur. - Bien sûr, il ne s'agit que de la proposition n° 10.

M. Rachel Mazuir. - Le problème principal, récurrent, est celui de l'inégalité flagrante devant la possibilité d'être candidat. Aujourd'hui, seuls les hauts fonctionnaires ont un statut de l'élu ! Ils peuvent continuer leur carrière et retrouver des fonctions après leur mandat, à un niveau égal à celui auquel ils pourraient prétendre sans avoir interrompu leur activité professionnelle. Dans le reste de la fonction publique toutefois, des difficultés existent, puisque la progression de carrière est interrompue.

Dès lors, comment permettre à des ouvriers, par exemple, d'être candidats et de retrouver leur travail à la fin d'un mandat, tout en conservant une progression dans leur carrière ? Comment permettre aux femmes qui, dans notre société - et il s'agit là d'un constat et non d'un jugement de valeur -, s'occupent largement des enfants, d'être candidates ?

A mon sens, cette question doit être traitée de manière prioritaire, avant celle de l'indemnité, même si je reconnais qu'il est difficile d'y trouver des réponses. S'agissant des indemnités, il est vrai que leur octroi pourrait être simplifié si elles étaient de droit et ne nécessitaient plus le vote de délibérations.

Pour les petites communes, j'ai constaté personnellement l'absence de candidats aux fonctions de maire dans mon département. Il a parfois fallu attendre plus d'un mois pour que certains maires soient désignés !

Je peux, en outre, témoigner qu'être maire de petite commune implique en général beaucoup plus de travail qu'être adjoint au maire dans une grande ville, tant les sollicitations sont nombreuses.

Je rappelle que les indemnités sont très différentes selon les situations. Outre ces dernières, il y a le problème des retraites. La préoccupation principale doit être de trouver les moyens de faciliter l'accès de tous aux fonctions électives, et je suis persuadé que l'indemnité n'est pas la seule réponse.

M. Philippe Dallier, rapporteur. - Nous sommes bien d'accord sur le fait que l'indemnité n'est pas le problème principal. Les inquiétudes liées à la retraite ou au retour à l'emploi en cas de défaite électorale sont effectivement plus importantes. S'agissant de la retraite, je proposerais bien que tout le monde soit affilié au régime général, y compris les parlementaires. Ces derniers ne pourraient alors plus être accusés d'être privilégiés. Le fait de cotiser à la même caisse permettrait en outre de valider les trimestres effectués. Mais il faudrait alors que cette réforme soit globale : il devrait également être mis fin à l'ensemble des régimes spéciaux... Ce serait à mon sens la solution la plus égalitaire.

Si les élus cumulent les mandats, c'est certes pour des raisons d'indemnité, mais aussi parce qu'ils ont peur de se retrouver sans activité à la fin de leur mandat. Dans la fonction publique, il est effectivement possible de retrouver un poste du jour au lendemain mais, en cas de suspension du contrat de travail, dans le privé, une telle possibilité n'existe pas au bout de deux mandats. Il est difficile de résoudre ce problème : nous ne pouvons pas obliger une petite entreprise à reprendre son employé au bout d'une douzaine d'années... Nous avons bien vu comment le débat public sur l'indemnisation des parlementaires a terminé, il s'agit d'une question épineuse.

Mme Marie-Thérèse Bruguière. - Effectivement, les indemnités sont toujours sujettes à discussion. Je voudrais évoquer la question des grilles indemnitaires des EPCI. Lorsqu'une commune ne possède qu'un seul représentant au conseil de l'EPCI, ce dernier assiste à toutes les réunions, qui sont nombreuses. Or, il ne perçoit aucune indemnité pour cela, alors que les présidents et les vice-présidents en ont une. Et si l'on divise une enveloppe commune pour l'ensemble des membres de l'organe délibérant, cela représente un faible montant en comparaison à l'activité fournie, surtout si on le compare à l'indemnité du président.

M. Claude Haut. - Je pense que toutes ces propositions vont dans le bon sens, mais il est certain que notre réflexion ne permettra pas de régler l'ensemble des questions que se posent les élus. Beaucoup de lois ont traité du statut de l'élu, et nous avons avancé de façon progressive. La prochaine loi sur le sujet ne résoudra pas non plus la totalité des problèmes rencontrés par les élus.

Les propositions dont nous débattons seront discutées au sein de plusieurs organismes, associations d'élus, assemblées, avant d'aboutir à un texte législatif qui n'en retiendra peut-être que quelques-unes. S'il y aura toujours des difficultés au sujet de l'indemnité, que ce soit vis-à-vis des administrés ou des autres élus, nous pouvons apporter des réponses sur d'autres sujets, notamment la question des retraites.

M. Jean-Claude Peyronnet. - Pour illustrer ces avancées par petits pas, neuf lois ont abordé le système des affiliés à l'Ircantec de 1973 à 2004, pour en étendre progressivement les possibilités d'adhésion.

M. Yves Krattinger. - La stratégie des petits pas que vous évoquez est la seule qui soit réaliste et concrètement envisageable. A travers mon expérience d'élu local depuis près de quarante et un ans, je constate, en matière d'indemnités, que les maires des petites communes sont confrontés à des obstacles, notamment dans leurs relations avec le conseil municipal. Il est en effet difficile de demander à son conseil des indemnités lorsque le maire prédécesseur parvenait à s'en priver. Pourtant, l'exercice des fonctions de maire engendre tout un ensemble de coûts - qu'ils s'agissent de frais de déplacements, de télécommunications, ou autres - qui laissent à penser que le statut de l'élu bénévole ne s'ancre pas dans la réalité et ne peut subsister. En ce qui concerne la question des cotisations retraite, il me semble cohérent d'accepter que l'élu puisse capitaliser quelques trimestres liés à sa fonction et son investissement auprès de ses concitoyens. Il est aussi nécessaire de régler les contraintes liées à l'activité professionnelle, notamment la difficulté de poursuivre son métier dans le secteur privé tout en exerçant les fonctions d'exécutif communal, le problème de la couverture sociale, ainsi que la question du retour à l'emploi éventuel après un ou plusieurs mandats de maire. Ces questions appellent à la réflexion et nous devons les faire progresser peu à peu, chaque fois qu'il nous en sera donné l'occasion.

M. Rachel Mazuir. - Je voulais avant tout relever que la couverture sociale comprend aussi bien la retraite que la couverture santé. Par ailleurs je tenais à faire remarquer que beaucoup d'erreurs sont commises concernant les avantages et indemnités que perçoivent les parlementaires et les élus locaux. Si l'on compare ainsi le poste de vice-président d'un conseil général à celui d'un des douze vice-présidents d'une entreprise de 2 000 employés avec un budget s'élevant à 600 millions d'euros, le salaire de 2 300 euros net perçu par cet élu local est bien loin de celui d'un cadre placé dans une situation professionnelle équivalente.

Mme Patricia Schillinger, présidente. - Ayant bénéficié d'une expérience personnelle d'élue locale depuis 2001, en tant qu'adjointe au maire puis maire en 2008 d'une commune de 3 200 habitants, je pense que les indemnités doivent être de droit pour tout maire en exercice et que ce montant doit être déterminé par le législateur au niveau national. Je propose qu'il en soit de même pour les conseillers municipaux et les adjoints car il est aujourd'hui regrettable que les élus locaux soient l'objet de critiques parce qu'ils percevraient des indemnités à tort au vue de leur situation familiale et de leur vie privée. Le montant des indemnités doit, pour sa part, être fonction du nombre d'habitants que compte la commune, comme en dispose certes l'article L.2123-23 du CGCT. Toutefois, ces seuils sont trop larges car il y a une différence dans la charge de travail d'une commune de 1 000 habitants et d'une commune comme la mienne, alors que les indemnités sont les mêmes. Le lien entre la population et l'indemnité reçue doit être resserré.

M. Rachel Mazuir. - Pardonnez-moi mais je ne partage pas exactement votre avis concernant la charge de travail des élus des petites communes. En effet, aujourd'hui il n'y a plus de services de l'Etat pour assister les élus, seules les communes de plus grande taille vont pouvoir bénéficier de services étoffés pour alléger leur charge quotidienne.

Mme Patricia Schillinger, présidente. - De nombreux maires, moi incluse, devons réaliser le travail de secrétariat car il nous est financièrement impossible de recruter d'autre personnel. Cette situation ne peut perdurer et devra être repensée. Parmi les autres éléments qui doivent évoluer suite à cette réflexion, subsiste la question de la couverture sociale. J'ai été confrontée au cas d'une adjointe au maire qui ne pouvait être assurée par la sécurité sociale car son époux bénéficiait d'une couverture privée dans le cadre de son emploi. Cette situation, même si elle est rare, est regrettable. De même, subsiste le problème de la retraite de l'élu quittant ses fonctions et ne pouvant bénéficier d'indemnité chômage. Je pense qu'il faudrait mettre en place une aide minimum afin de retrouver un emploi.

Mes chers collègues, avez-vous des objections ou remarques à apporter à ce rapport ?

M. Rémy Pointereau. - Je ne souscris pas à la proposition n° 10...

M. Antoine Lefèvre. - Je voulais simplement évoquer un thème abordé au moment de la réforme des collectivités territoriales, celui de l'honorariat. En cette période de recherche de symboles, et dans une optique de réduction des coûts, il serait bien de revoir ces dispositions et, éventuellement, le baisser à deux mandats car il devient rare qu'un élu exerce trois mandats.

M. Rachel Mazuir. - Une dernière remarque : les pompiers volontaires, après vingt ans de services, reçoivent une allocation vétérance, tandis que les élus de base n'ont droit à aucune reconnaissance, surtout ceux qui n'ont pas progressé et sont restés élus de base.

Par ailleurs, même si elle n'a pas été évoquée dans nos débats, il ne faut pas oublier la responsabilité des chefs exécutifs qui requiert d'être assuré dans le cadre d'un éventuel conflit au pénal...

Mme Patricia Schillinger, présidente. - Procédons maintenant au vote. Y-a-t-il des objections ?

Le rapport de MM. Jean-Claude Peyronnet et Philippe Dallier est approuvé.

Annexe 3 : Origine socioprofessionnelle des élus

Secteur

Part
des maires
(en %)

Part des conseillers généraux
(en %)

Part des conseillers régionaux
(en %)

Secteur privé indépendant (agriculteurs, artisans, commerçants, chefs d'entreprise, professions libérales, information et arts)

30,32

28,06

22,68

Salariés d'entreprise

18,47

14,96

20,29

Fonction publique

15,71

27,44

24,96

Retraités

28,32

18,95

12,75

Autres (personnes sans activité professionnelle, dont étudiants et chômeurs au sens du BIT, professions diverses ou inconnues)

7,19

10,59

19,33

Total

100,00

100,00

100,00

Source : DGCL

ORIGINE SOCIOPROFESSIONNELLE DES MAIRES

Secteur

Nombre de maires
(en 2008)

Part des maires
(en %)

Secteur privé indépendant (agriculteurs, artisans, commerçants, chefs d'entreprise, professions libérales, information et arts)

11 116

30,32

Salariés d'entreprise

6 770

18,47

Fonction publique

5 759

15,71

Retraités

10 380

28,32

Autres (personnes sans activité professionnelle, dont étudiants et chômeurs au sens du BIT ; professions diverses ou inconnues)

2 634

7,19

Total

36 659

100,00

ORIGINE SOCIOPROFESSIONNELLE DES CONSEILLERS GÉNÉRAUX

Secteur

Nombre de
conseillers généraux
(en 2008)

Part
des conseillers
(en %)

Secteur privé indépendant (agriculteurs, artisans, commerçants, chefs d'entreprise, professions libérales, information et arts)

1 131

28,06

Salariés d'entreprise

603

14,96

Fonction publique

1 106

27,44

Retraités

764

18,95

Autres (personnes sans activité professionnelle, dont étudiants et chômeurs au sens du BIT ; professions diverses ou inconnues)

427

10,59

Total

4 031

100,00

ORIGINE SOCIOPROFESSIONNELLE DES CONSEILLERS RÉGIONAUX

Secteur

Nombre
de conseillers régionaux
(en 2008)

Part
des conseillers
(en %)

Secteur privé indépendant (agriculteurs, artisans, commerçants, chefs d'entreprise, professions libérales, information et arts)

379

22,68

Salariés d'entreprise

339

20,29

Fonction publique

417

24,96

Retraités

213

12,75

Autres (personnes sans activité professionnelle, dont étudiants et chômeurs au sens du BIT ; professions diverses ou inconnues)

323

19,33

Total

1 671

100,00

ORIGINE SOCIOPROFESSIONNELLE DES DÉPUTÉS

Secteur

Nombre de députés
(en 2008)

Part des députés
(en %)

Secteur privé indépendant (agriculteurs, artisans, commerçants, chefs d'entreprise, professions libérales, information et arts)

198

34,62

Salariés d'entreprise

121

21,15

Fonction publique

210

36,71

Retraités

23

4,02

Autres (personnes sans activité professionnelle, dont étudiants et chômeurs au sens du BIT ; professions diverses ou inconnues)

20

3,50

Total

572

100,00

ORIGINE SOCIOPROFESSIONNELLE DES SÉNATEURS

Secteur

Nombre de sénateurs
(en 2008)

Part des sénateurs
(en %)

Secteur privé indépendant (agriculteurs, artisans, commerçants, chefs d'entreprise, professions libérales, information et arts)

119

36,06

Salariés d'entreprise

39

11,82

Fonction publique

127

38,48

Retraités

26

7,88

Autres (personnes sans activité professionnelle, dont étudiants et chômeurs au sens du BIT ; professions diverses ou inconnues)

19

5,76

Total

330

100,00

Annexe 4 : Indemnités de fonction brutes mensuelles des maires

Au 30 mars 1992

(L. 123-5-1 du Code des communes)

Au 1 er juillet 2010

(L. 2123-23 du CGCT)

Population
(nombre d'habitants)

Taux maximal

(% IB 1015)

Indemnité brute

Taux maximal

(% IB 1015)

Indemnité brute

Francs

(Euros)

Euros

(Francs)

Moins de 500

12

2 436

371

17

646,25

4 239

De 500 à 999

17

3 452

526

31

1 178,46

7 730

De 1 000 à 3 499

31

6 294

960

43

1 634,63

10 722

De 3 500 à 9 999

43

8 730

1 331

55

2 090,81

13 715

De 10 000 à 19 999

55

11 167

1 702

65

2 470,95

16 208

De 20 000 à 49 999

65

13 197

2 012

90

3 421,32

22 442

De 50 000 à 99 999

75

15 227

2 321

110

4 181,62

27 430

100 000 et plus (y compris PML)

145

5 512,13

36 157

De 100 000 à 200 000

90

18 273

2 786

Plus de 200 000

95

19 288

2 940

Paris, Marseille, Lyon

115

23 348

3 559

Annexe 5 : Montants maximaux bruts mensuels des indemnités de fonction des titulaires de mandats locaux (au 1er juillet 2010)

INDEMNITÉS DE FONCTION BRUTES MENSUELLES DES MAIRES

Population

(nombre d'habitants)

Taux maximal

(en % de l'IB 1015)

Indemnité brute

(en euros)

Moins de 500

17

645,25

De 500 à 999

31

1 178,46

De 1 000 à 3 499

43

1 634,63

De 3 500 à 9 999

55

2 090,81

De 10 000 à 19 999

65

2 470,95

De 20 000 à 49 999

90

3 421,32

De 50 000 à 99 999

110

4 181,62

100 000 et plus (y compris PML)

145

5 512,13

INDEMNITÉS DE FONCTION BRUTES MENSUELLES DES ADJOINTS

Population

(nombre d'habitants)

Taux maximal

(en % de l'IB 1015)

Indemnité brute

(en euros)

Moins de 500

6,6

250,90

De 500 à 999

8,25

313,62

De 1 000 à 3 499

16,5

627,24

De 3 500 à 9 999

22

836,32

De 10 000 à 19 999

27,5

1 045,40

De 20 000 à 49 999

33

1 254,48

De 50 000 à 99 999

44

1 672,65

De 100 000 à 200 000

66

2 508,97

Plus de 200 000

72,5

2 756,07

INDEMNITÉS DE FONCTION BRUTES MENSUELLES DES CONSEILLERS MUNICIPAUX

Type de commune

Taux maximal

(en % de l'IB 1015)

Indemnité brute

(en euros)

100 000 habitants et plus :
conseillers municipaux (art. L. 2123-24-1-I)

6

228,09

Moins de 100 000 habitants :
conseillers municipaux (art. L. 2123-24-1-II)

6

(dans enveloppe maire et adjoints)

228,09

Ensemble des communes :
conseillers municipaux délégués (art. L. 2123-24-1-III)

Indemnité comprise dans l'enveloppe budgétaire maire et adjoints

INDEMNITÉS DE FONCTION BRUTES MENSUELLES DES CONSEILLERS GÉNÉRAUX

Population

(nombre d'habitants)

Taux maximal

(en % de l'IB 1015)

Indemnité brute

(en euros)

Moins de 250 000

40

1 520,59

De 250 000 à moins de 500 000

50

1 900,73

De 500 000 à moins de 1 million

60

2 280,88

De 1 million à moins de 1,25 million

65

2 470,95

1,25 million et plus

70

2 661,03

INDEMNITÉS DE FONCTION BRUTES MENSUELLES DES CONSEILLERS RÉGIONAUX

Population

(nombre d'habitants)

Taux maximal

(en % de l'IB 1015)

Indemnité brute

(en euros)

Moins de 1 million

40

1 520,59

De 1 million à moins de 2 millions

50

1 900,73

De 2 millions à moins de 3 millions

60

2 280,88

3 millions et plus

70

2 661,03

COMMUNAUTÉS URBAINES ET COMMUNAUTÉS D'AGGLOMÉRATION

INDEMNITÉS DE FONCTION BRUTES MENSUELLES DES PRÉSIDENTS

Population

(nombre d'habitants)

Taux maximal

(en % de l'IB 1015)

Indemnité brute

(en euros)

De 20 000 à 49 999

90

3 421,32

De 50 000 à 99 999

110

4 181,62

De 100 000 à 199 999

145

5 512,13

Plus de 200 000

145

5 512,13

INDEMNITÉS DE FONCTION BRUTES MENSUELLES DES VICE-PRÉSIDENTS

Population

(nombre d'habitants)

Taux maximal

(en % de l'IB 1015)

Indemnité brute

(en euros)

De 20 000 à 49 999

33

1 254,48

De 50 000 à 99 999

44

1 672,65

De 100 000 à 199 999

66

2 508,97

Plus de 200 000

72,5

2 756,07

Délégués des communes
au conseil des communautés urbaines et des communautés d'agglomération

Taux maximal

(en % de l'IB 1015)

Indemnité brute

(en euros)

De 100 000 à 399 999 habitants
(art. L. 5215-16 et L. 5216-4)

6

228,09

De 400 000 habitants au moins
(art. L. 5215-17 et L. 5216-4-1)

28

1 064,41

ÉTABLISSEMENTS PUBLICS DE COOPERATION INTERCOMMUNALE DOTÉS D'UNE FISCALITÉ PROPRE
AUTRES QUE LES COMMUNAUTÉS URBAINES ET LES COMMUNAUTÉS D'AGGLOMÉRATION :

COMMUNAUTÉS DE COMMUNES ET SYNDICATS D'AGGLOMÉRATION NOUVELLE

INDEMNITÉS DE FONCTION BRUTES MENSUELLES DES PRÉSIDENTS

Population

(nombre d'habitants)

Taux maximal

(en % de l'IB 1015)

Indemnité brute

(en euros)

Moins de 500

12,75

484,69

De 500 à 999

23,25

883,84

De 1 000 à 3 499

32,25

1 225,97

De 3 500 à 9 999

41,25

1 568,11

De 10 000 à 19 999

48,75

1 853,22

De 20 000 à 49 999

67,50

2 565,99

De 50 000 à 99 999

82,49

3 135,83

De 100 000 à 200 000

108,75

4 134,10

Plus de 200 000

108,75

4 134,10

INDEMNITÉS DE FONCTION BRUTES MENSUELLES DES VICE-PRÉSIDENTS

Population

(nombre d'habitants)

Taux maximal

(en % de l'IB 1015)

Indemnité brute

(en euros)

Moins de 500

4,95

188,17

De 500 à 999

6,19

235,31

De 1 000 à 3 499

12,37

470,24

De 3 500 à 9 999

16,50

627,24

De 10 000 à 19 999

20,63

784,24

De 20 000 à 49 999

24,73

940,10

De 50 000 à 99 999

33

1 254,48

De 100 000 à 200 000

49,5

1 881,73

Plus de 200 000

54,37

2 066,86

ÉTABLISSEMENTS PUBLICS DE COOPÉRATION INTERCOMMUNALE SANS FISCALITÉ PROPRE :

SYNDICATS MIXTES COMPOSÉS EXCLUSIVEMENT DE COMMUNES ET D'ÉTABLISSEMENTS PUBLICS
DE COOPÉRATION INTERCOMMUNALE

INDEMNITÉS DE FONCTION BRUTES MENSUELLES DES PRÉSIDENTS

Population

(nombre d'habitants)

Taux maximal

(en % de l'IB 1015)

Indemnité brute

(en euros)

Moins de 500

4,73

179,81

De 500 à 999

6,69

254,32

De 1 000 à 3 499

12,20

463,78

De 3 500 à 9 999

16,93

643,59

De 10 000 à 19 999

21,66

823,40

De 20 000 à 49 999

25,59

972,80

De 50 000 à 99 999

29,53

1 122,57

De 100 000 à 200 000

35,44

1 347,24

Plus de 200 000

37,41

1 422,13

INDEMNITÉS DE FONCTION BRUTES MENSUELLES DES VICE-PRÉSIDENTS

Population

(nombre d'habitants)

Taux maximal

(en % de l'IB 1015)

Indemnité brute

(en euros)

Moins de 500

1,89

71,5

De 500 à 999

2,68

101,88

De 1 000 à 3 499

4,65

176,77

De 3 500 à 9 999

6,77

257,36

De 10 000 à 19 999

8,66

329,21

De 20 000 à 49 999

10,24

389,27

De 50 000 à 99 999

11,81

448,95

De 100 000 à 200 000

17,72

673,62

Plus de 200 000

18,70

710,87

SYNDICATS MIXTES ASSOCIANT EXCLUSIVEMENT COMMUNES, EPCI, DÉPARTEMENTS ET RÉGIONS

INDEMNITÉS DE FONCTION BRUTES MENSUELLES DES PRÉSIDENTS

Population

(nombre d'habitants)

Taux maximal

(en % de l'IB 1015)

Indemnité brute

(en euros)

Moins de 500

2,37

90,09

De 500 à 999

3,35

127,35

De 1 000 à 3 499

6,10

231,89

De 3 500 à 9 999

8,47

321,98

De 10 000 à 19 999

10,83

411,70

De 20 000 à 49 999

12,80

486,59

De 50 000 à 99 999

14,77

561,48

De 100 000 à 200 000

17,72

673,62

Plus de 200 000

18,71

711,25

INDEMNITÉS DE FONCTION BRUTES MENSUELLES DES VICE-PRÉSIDENTS

Population

(nombre d'habitants)

Taux maximal

(en % de l'IB 1015)

Indemnité brute

(en euros)

Moins de 500

0,95

36,11

De 500 à 999

1,34

50,94

De 1 000 à 3 499

2,33

88,57

De 3 500 à 9 999

3,39

128,87

De 10 000 à 19 999

4,33

164,60

De 20 000 à 49 999

5,12

194,64

De 50 000 à 99 999

5,91

224,67

De 100 000 à 200 000

8,86

336,81

Plus de 200 000

9,35

355,44

Annexe 6 : Fonds d'allocation des élus en fin de mandat

ALLOCATAIRES EN 2008

Catégorie

Nombre

Maire

64

Adjoint au maire

53

Président d'EPCI

5

Vice-président d'EPCI

11

Président de Conseil général

0

Vice-président de Conseil général

1

Président de Conseil régional

0

Vice-président de Conseil régional

0

Total

134

MONTANT MOYEN DES ALLOCATIONS VERSÉES

Catégorie

Allocation
moyenne

Allocation minimale

Allocation maximale

Maire

1 387,25 €

187,60 €

3 089,38 €

Adjoint au Maire

1 436,01 €

33,53 €

4 035,75 €

Président d'EPCI

1 424,30 €

887,45 €

2 645,23 €

Vice-président d'EPCI

1 246,93 €

781,96 €

1 926,24 €

Vice-président de Conseil général

2 504,12 €

2 504,12 €

2 504,12 €

Président de Conseil général

0,00 €

0,00 €

0,00 €

Président de Conseil régional

0,00 €

0,00 €

0,00 €

Vice-président de Conseil régional

0,00 €

0,00 €

0,00 €


* 1 Rapport au Premier ministre sur le statut de l'élu local, départemental et régional et la limitation du cumul des fonctions et mandats électifs.

* 2 Session 2009/2010.

* 3 Cette proposition a également été formulée par le député Pierre Morel-A-L'Huissier dans sa proposition de loi tendant à rénover le statut de l'élu local (article 4).

* 4 « dans la limite de vingt jours ouvrables » (Code du travail, art. L 122-24-1 al. 1 er ).

* 5 La proposition de loi visant à renforcer l'attractivité et à faciliter l'exercice du mandat local adoptée au Sénat le 30 juin 2011 étend le bénéfice du droit à la suspension du contrat de travail aux adjoints au maire des communes de plus de 10 000 habitants (article 8).

Dans sa proposition de loi tendant à rénover le statut de l'élu local (article 3), le député Pierre Morel-A-L'Huissier suggère une ouverture du bénéfice de ce droit plus étendue, incluant les adjoints au maire de toutes les communes ainsi que l'ensemble des vice-présidents des EPCI mentionnés aux articles L. 5211-12 et L. 5215-1 du CGCT.

* 6 Michel Mercier, Mission commune d'information chargée de dresser le bilan de la décentralisation et de proposer des améliorations de nature à faciliter l'exercice des compétences locales, sur la sécurité juridique des actes des collectivités locales et les conditions d'exercice des mandats locaux, Sénat 1999-2000, n°166.

* 7 Appelée à se prononcer sur cette question lors de l'examen de la proposition de loi des sénateurs Bernard Saugey et Marie-Hélène Des Esgaulx, qui étendait le bénéfice du droit à la suspension du contrat de travail aux conseillers généraux et régionaux sans fonction particulière dans leur collectivité, la Commission des lois a préféré reporter l'examen de cette disposition à l'examen du projet de loi n° 61. Elle a été suivie par le Sénat.

* 8 Elle est également présente dans la proposition de loi tendant à rénover le statut de l'élu local du député Pierre Morel-A-L'Huissier (article 8).

* 9 La proposition de loi du député Pierre Morel-A-L'Huissier l'étend aux adjoints au maire de toutes les communes, ainsi qu'aux vice-présidents des communautés de communes (article 8).

* 10 Refonder l'action publique locale, rapport au Premier ministre

* 11 Une suggestion identique a été intégrée à la proposition de loi tendant à rénover le statut de l'élu local du député Pierre Morel-A-L'Huissier (article 7).

* 12 Une mesure similaire avait été proposée par plusieurs de nos collègues sénateurs, proposition de loi visant à améliorer le régime de retraite des élus locaux ayant cessé leur activité professionnelle pour se consacrer exclusivement à leur mandat, Sénat n°99, 2007-2008.

* 13 Le député Pierre Morel-A-L'Huissier propose, quant à lui, de donner le choix aux élus ayant cessé d'exercer leur activité entre l'affiliation au régime général et la constitution d'une retraite par rente (article 7).

* 14 La proposition de loi visant à renforcer l'attractivité et à faciliter l'exercice du mandat local adoptée au Sénat le 30 juin 2011 supprime la possibilité de délibération contraire du conseil municipal mais ne modifie pas le seuil démographique d'octroi automatique des indemnités maximales (article 9 bis). Cet article résulte d'un amendement présenté par Mme Gourault en commission des lois et a été défendu en séance par M. Todeschini. Cf. compte-rendu des débats de la séance du Sénat du 30 juin 2011.

La proposition de loi tendant à rénover le statut de l'élu local du député Pierre Morel-A-L'Huissier prévoit quant à elle que l'ensemble des communes rémunèrent leurs maires au taux fixé par la loi, perdant alors son statut de plafond pour devenir impératif (article 1 er ).

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