B. UNE DYNAMIQUE FORTEMENT CONTRASTÉE PAR GRANDE RÉGION DU MONDE

La totalité des prospectives montrent que les besoins alimentaires augmenteront dans des proportions très variables selon les régions du monde.

Par exemple, l'étude de M. Philippe Collomb mentionne les coefficients multiplicateurs suivants, à l'horizon 2050 pour les différentes régions du monde, par rapport à une base 1 en 2000.

Besoins alimentaires à l'horizon 2050
(base 1 en 2000)

 

Afrique

Asie

Europe

Amérique

Amérique

Océanie

Croissance de la population

3,14

1,69

0,91

1,80

1,31

1,61

Composition population

1,07

1,02

0,98

1,03

0,99

1,00

Modification Régime aliment

1,64

1,38

1,00

1,07

1,00

1,00

Effet d'ensemble

5,14

2,34

0,91

1,92

1,31

1,61

En fonction des différentes composantes : population, composition (âge, sexe) et régime alimentaire

Source : « Une voie étroite pour la sécurité alimentaire d'ici à 2050 », M. Philippe Collomb

Un effort d'accroissement de la production très élevé serait nécessaire pour satisfaire la croissance des besoins alimentaires dans certaines régions.

Si ces besoins devaient être couverts par des productions locales, entre 2000 et 2050, l'Afrique devrait plus que quintupler sa production, l'Asie devrait plus que la doubler, et l'Amérique latine presque la doubler.

Seule l'Europe verrait sa contrainte alimentaire se détendre.

Ces données sont reprises avec quelques nuances de présentation par M. Michel Griffon pour lequel les besoins de production supplémentaires par région seront les suivants dans le cadre de l'hypothèse centrale déjà mentionnée (hypothèse de Collomb).

Estimation du déficit mondial à combler à l'horizon 2050

 

Asie

Amérique latine

Afrique du Nord et Moyen-Orient

Afrique subsaharienne

Pays industriels

Coefficient multiplicateur des besoins alimentaires 2050/2000

2,34

1,92

Estimé à 2,5*

5,14

Fixé à 1 : on suppose que les pays industriels n'ont plus besoin d'accroître leur alimentation.

Production 2000 (109t)

1 700

272

154

260

/

Consommation 2000

1 770

260

220

262

/

Production nécessaire en 2050 (109t) arrondi

4 140

370

550

1 340

Inchangée

Différence 2050/2000

2 440

98

396

1 080

Inchangée

* La catégorie ANMO (Afrique du Nord/Moyen-Orient) n'existe pas dans les travaux de Philippe Collomb. Le chiffre proposé est une estimation à partir des chiffres nationaux.

Source : « Nourrir la planète » - Michel Griffon

Par rapport à la situation de 2000, la production des zones hors-OCDE devrait passer de 2 386 à 6 400 millions de tonnes (4 014 millions de plus) dont 61 % en Asie et 27 % en Afrique subsaharienne (soit plus qu'un doublement).

En revanche, dans les pays industriels de l'OCDE les besoins n'augmenteraient pas ce qui se traduit par l'absence de pression à l'augmentation de la production locale du fait des besoins alimentaires indigènes.

Quant à elles, les projections de la FAO, hors prise en compte de biocarburants, sont résumées dans les tableaux ci-après en ce qui concerne la demande de céréales.

Projections de la FAO de consommation de céréales
(en millions de tonnes)

 

1999

2015

2030

2050

Consommation (hors biocarburants) dont :

1 866

2 287

2 677

3 010

Pays en développement

1 125

1 472

1 799

2 096

Pays développés

741

815

877

914

Source : FAO

Projections de la FAO de consommation de céréales
(Évolution annuelle en %)

 

1980/1990

1999/2008

1999/2015

2015/2030

2030/2050

Consommation dont :

1,9

1,6

1,4

1,1

0,6

Pays en développement

3

1,8

1,8

1,3

0,8

Pays développés

0,8

1,4

0,6

0,5

0,2

Source : FAO

Hors biocarburants, la consommation de céréales, qui augmenterait de 32 % entre 2015 et 2050, connaîtrait un accroissement de 61 % entre 2000 et 2050.

La consommation suivrait un rythme d'augmentation plus dynamique dans les pays en développement11(*).

Entre 1980 et 1990, la demande de céréales a augmenté au rythme annuel de 1,9 %, moyennant un différentiel entre les pays en développement où la croissance a atteint 3 % et les pays développés (+ 0,8 % par an).

Pour l'avenir, la FAO escompte un ralentissement du rythme d'expansion de la consommation qui prolongerait l'atténuation observée dans les années 2000 (+ 1,6 % pour le monde, avec + 1,8 % pour les pays en développement et + 1,4 % pour les pays développés).

De 1,1 % par an entre 2015 et 2030 la croissance de la consommation se réduirait de moitié entre 2030 et 2050 (+ 0,6 % l'an).

La demande deviendrait progressivement plate dans les pays développés (+ 0,2 % l'an entre 2030 et 2050) et elle passerait de 1,3 à 0,8 % de progression annuelle dans les pays en développement.

Pour les viandes, l'inflexion de la croissance de la consommation pour être moins prononcée, est également le trait marquant des prospectives de la FAO.

Projections de la FAO pour l'élevage
(en millions de tonnes)

 

1999

2015

2030

2050

 Consommation dont :

228

305

380

463

Pays en développement

127

191

258

334

Pays développés

101

113

123

130

Source : FAO

Projections de la FAO pour la viande
(Évolution annuelle en %)

 

1981/1990

1999/2008

1999/2015

2015/2030

2030/2050

 Consommation dont :

3,3

2,3

2

1,5

1

Pays en développement

5,2

3,1

2,8

2

1,3

Pays développés

2,3

1,3

0,8

0,5

0,3

Source : FAO

Ainsi, la distribution des besoins en énergie végétale fait apparaître une forte dispersion entre régions.

Cette dispersion est encore considérablement accentuée quand on considère les besoins de chaque pays.

Les travaux présentés par M. Philippe Collomb en témoignent avec une particulière netteté.

Évolution des besoins en énergie d'origine végétale
selon le pays entre 1995 et 2050 : Afrique
(nombre par lequel il faut multiplier les besoins de l'année 1995
pour obtenir les besoins de l'année 2050)

Source : « Une voie étroite pour la sécurité alimentaire d'ici à 2050 »
M. Philippe Collomb - FAO

Évolution des besoins en énergie d'origine végétale
selon le pays entre 1995 et 2050 : Amérique latine
(nombre par lequel il faut multiplier les besoins de l'année 1995
pour obtenir les besoins de l'année 2050)

Source : « Une voie étroite pour la sécurité alimentaire d'ici à 2050 »
M. Philippe Collomb - FAO

Évolution des besoins en énergie d'origine végétale
selon le pays entre 1995 et 2050 : Asie
(nombre par lequel il faut multiplier les besoins de l'année 1995,
pour obtenir les besoins de l'année 2050)

Source : « Une voie étroite pour la sécurité alimentaire d'ici à 2050 »
M. Philippe Collomb - FAO

Ces cartes régionales des besoins en énergie végétale situent les problèmes :

- la croissance des besoins régionaux pourra excéder de beaucoup la valeur moyenne obtenue à l'échelle mondiale ;

- les pays les plus concernés se regroupent principalement en Afrique.

La liste ci-dessous qui propose une classification des pays selon le niveau de croissance annuelle des besoins en énergie végétale à l'horizon 2050 en témoigne.

Les plus fortes croissances de besoins en énergie d'origine végétale entre 1995 et 2050 (*) (classement par valeurs décroissantes)

Rang

Pays

Accroissement des besoins (*)

Rang

Pays

Accroissement des besoins (*)

Croissance annuelle moyenne de 4 à 5 % entre 1995 et 2050

1

Éthiopie

15,42

13

Nigéria

10,04

2

Mozambique

14,52

14

Congo

9,85

3

Congo (ex-Zaïre)

13,87

15

Haïti

9,81

4

Libéria

12,65

16

Côte d'Ivoire

9,61

5

Burundi

12,23

17

Zambie

9,51

6

Malawi

12,21

18

Ouganda

9,34

7

Angola

12,11

19

Afghanistan

9,16

8

Rwanda

11,58

20

Guinée

9,13

9

Sierra Leone

10,92

21

Togo

9,07

10

Niger

10,58

22

Cameroun

8,78

11

Ghana

10,57

23

Centrafricaine (Rép.)

8,68

12

Tchad

10,34

24

Burkina-Faso

8,66

Croissance annuelle moyenne de 3 à 4 % entre 1995 et 2050

25

Bénin

8,27

35

Sénégal

6,24

26

Yémen

8,25

36

Guatemala

6,12

27

Tanzanie

7,99

37

Gabon

5,87

28

Kenya

7,34

38

Nicaragua

5,73

29

Cambodge

7,09

39

Laos

5,68

30

Madagascar

7,02

40

Namibie

5,53

31

Mali

6,95

41

Népal

5,45

32

Bangladesh

6,80

42

Zimbabwe

5,40

33

Lesotho

6,53

43

Soudan

5,29

34

Somalie

6,43

     

Croissance annuelle moyenne de 2 à 3 % entre 1995 et 2050

44

Honduras

4,80

53

Salvador

3,79

45

Viêt-nam

4,73

54

Botswana

3,70

46

Bolivie

4,38

55

Jordanie

3,55

47

Irak

4,23

56

Syrie

3,53

48

Birmanie

4,19

57

Sri Lanka

3,50

49

Pérou

4,02

58

Inde

3,37

50

Philippines

3,89

59

Mauritanie

3,22

51

Libye

3,87

60

Iran

3,05

52

Pakistan

3,80

     

Croissance annuelle moyenne de 1 à 2 % entre 1995 et 2050

61

Dominicaine (Rép.)

2,90

73

Algérie

2,14

62

Indonésie

2,81

74

Malaisie

1,99

63

Paraguay

2,55

75

Jamaïque

1,93

64

Thaïlande

2,48

76

Chine

1,90

65

Équateur

2,39

77

Tunisie

1,88

66

Afrique du Sud

2,33

78

Trinité et Tobago

1,86

67

Corée du Sud

2,30

79

Chili

1,84

68

Panama

2,27

80

Liban

1,81

69

Venezuela

2,25

81

Colombie

1,80

70

Maroc

2,24

82

Mexique

1,79

71

Égypte

2,18

83

Brésil

1,75

72

Costa Rica

2,16

     

(*) Nombre par lequel il faut multiplier les besoins de l'année 1995 pour obtenir les besoins de l'année 2050.


* 11 Compte tenu des résultats de la projection des productions céréalières exposés par ailleurs, les importations nettes des pays en développement couvriraient une part de plus en plus importante de leurs besoins (de 9,7 à 14,7 % de ceux-ci) malgré le ralentissement de la croissance de la demande de céréales que comporte ce scénario.