b) Une autonomie fiscale limitée
L'autonomie fiscale des collectivités territoriales, contrairement à leur autonomie financière, ne fait l'objet d'aucune définition constitutionnelle et ne bénéficie par conséquent d'aucune garantie légale.
Cette autonomie fiscale a été fortement remise en cause par la réforme . Les départements et les régions, en particulier, ont perdu une partie de leurs marges de manoeuvre en matière de fixation des taux et en termes de bases d'imposition, désormais réduites corrélativement à l'augmentation de la part des dotations de l'Etat dans le panier de recettes locales.
Selon le rapport « Carrez-Thénault » publié en mai 2010 53 ( * ) , sur la maîtrise des dépenses locales, le « bloc communal » peut désormais moduler 41 % de ses recettes contre 48 % antérieurement à la réforme, les départements 16 % seulement contre 35 % auparavant, les régions ayant quant à elles un pouvoir de taux sur 14 % de leurs recettes contre 30 % avant réforme .
Source : DGCL 2010
Source : DGCL 2010
Source : DGCL 2010
La réforme de la taxe professionnelle est donc à l'origine d'une recomposition des paniers fiscaux dans des proportions qui permettent de conclure à une déformation de la répartition du pouvoir de taux au profit du seul « bloc communal » . En effet, ce dernier n'a pas connu de modification sensible de son ratio d'autonomie fiscale quand celui des départements et régions a été plus que divisé de moitié.
(1) L'autonomie fiscale du bloc communal est globalement stable
Le bloc communal peut désormais moduler 41 % de l'ensemble de ses ressources. Selon l'Association des maires de France (AMF) 54 ( * ) , ce pouvoir de taux s'élève à 88 % s'agissant de la seule fiscalité directe .
Les communes et établissements publics de coopération intercommunale peuvent moduler le taux des quatre taxes directes locales (taxe d'habitation, taxe foncière sur les propriétés bâties, taxe foncière sur les propriétés non bâties et CFE). Le bloc communal n'a en revanche aucune possibilité de moduler le taux de la CVAE, dont elle perçoit 26,5 % du produit total, ou des IFER. Il n'a pas non plus la maîtrise des montants de compensation prévus par la réforme, la DCRTP et le FNGIR (soit 3,4 milliards d'euros).
Estimations du montant des dispositifs de compensation versés au bloc communal en 2011 |
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(en millions d'euros) |
DCRTP |
FNGIR |
Secteur communal |
1 250 |
2 209 |
Dont communes |
272 |
|
Dont EPCI |
978 |
Source : DGCL (février 2012)
De fortes disparités en matière d'autonomie fiscale existent au sein du bloc communal .
D'une part, l'autonomie fiscale des communautés à fiscalité propre s'est dégradée de façon plus importante que celle des communes isolées. Elles perçoivent aujourd'hui les trois quarts du montant total de la CVAE perçue par le bloc communal, sur laquelle elles ne disposent d'aucun pouvoir de taux. Elles sont aujourd'hui les principales destinataires des compensations de l'Etat (près de 1 milliard d'euros de DCRTP sur les 1,25 milliard d'euros au total versées au bloc communal). Les communautés disposaient avant réforme d'un pouvoir de taux sur 93 % de leurs recettes (essentiellement la taxe professionnelle) contre 74 % en moyenne aujourd'hui. Cette perte d'autonomie doit néanmoins être nuancée car le plafonnement de la taxe professionnelle à 3,5 % de la valeur ajoutée, instauré en 2007, supprimait, avant réforme, tout pouvoir de taux sur plus de 52% des bases nationales pour près de 90% des communautés 55 ( * ) .
D'autre part, les modalités de mise en oeuvre de la réforme ont suscité au sein du bloc communal de très fortes disparités de situation entre les territoires . Les communautés de taille importante avec un fort tissu industriel se retrouvent désormais avec un montant élevé de FNGIR et de DCRTP et ne bénéficient plus, de ce fait, du même levier fiscal qu'avant la réforme. C'est le cas notamment pour la communauté urbaine de Dunkerque, les communautés d'agglomération de Maubeuge ou du Val de Fensch, dont plus de 60 % des ressources proviennent aujourd'hui des montants de compensation et de garantie des ressources 56 ( * ) .
* 53 Rapport du groupe de travail sur la maîtrise des dépenses locales, présidé par Gilles Carrez et Michel Thénault (mai 2010)
* 54 Réponse de l'AMF au questionnaire de la mission commune d'information.
* 55 Réponse de l'AdCF au questionnaire de la mission commune d'information (janvier 2012).
* 56 Les membres de la mission commune d'information ont réalisé un déplacement en janvier 2012 à Dunkerque pour mesurer l'ampleur des effets de la réforme sur ce territoire très industrialisé. La mission a également auditionné Philippe Tarillon, président de la communauté d'agglomération du Val de Fensch, des représentants du SAN Ouest Provence et de la communauté d'agglomération du pays de Montbéliard sur des problématiques semblables.