B. LA CHIRURGIE ESTHÉTIQUE : UN ENCADREMENT JURIDIQUE SOLIDE

Jusqu'en 1981, le Conseil national de l'ordre des médecins attribuait la compétence « chirurgie plastique reconstructrice et esthétique » soit à des chirurgiens, soit à des médecins ayant acquis une spécialité chirurgicale (comme l'ophtalmologie, la stomatologie ou l'oto-rhino-laryngologie) et suivi une formation supplémentaire en chirurgie plastique au cours de leur cursus universitaire. Depuis 1988, la chirurgie plastique reconstructrice et esthétique constitue une spécialité médicale à part entière , à laquelle est associée une formation universitaire spécifique, au même titre que l'ophtalmologie ou la dermatologie.

En France, la loi du 4 mars 2002 précitée , assortie des décrets d'application du 11 juillet 2005 et d'une circulaire en date du 23 décembre 2005, pose les fondements de la réglementation applicable à la chirurgie esthétique en disposant que les actes de chirurgie esthétique ne peuvent être pratiqués que par des médecins spécialistes en chirurgie plastique reconstructrice et esthétique .

1. Un cadre légal précis
a) Une distinction très nette entre les installations de chirurgie esthétique et les établissements de santé

Comme le rappelle une circulaire 40 ( * ) du 23 décembre 2005, les installations dans lesquelles est pratiquée la chirurgie esthétique « reçoivent des personnes non malades, non blessées, pour des interventions qui n'ont pas de motif curatif, quel que soit le bien-être qu'elles entendent procurer aux personnes intéressées » .

Elles ne relèvent donc pas de la catégorie des établissements de santé définie par les articles L. 6111-1 et L. 6111-2 du code de la santé publique qui assurent le diagnostic, la surveillance et le traitement des malades, des blessés et des femmes enceintes et ne sont pas, par conséquent, soumises pour leur création à l'autorisation prévue à l'article L. 6122-1 de ce même code. Leur inscription dans le schéma régional d'organisation sanitaire (Sros), prévue à l'article L. 1434-7, est incertaine.

En outre, la circulaire précitée rappelle la distinction entre les actes chirurgicaux à visée esthétique et les interventions de chirurgie plastique ou reconstructrice réalisées à la suite d'un accident ou d'un traitement, ou pour la correction d'une malformation ou d'un déficit fonctionnel, qui s'inscrivent dans une démarche thérapeutique.

Le décret du 20 juillet 2005 41 ( * ) a codifié un certain nombre de dispositions réglementaires relatives aux actes à visée esthétique. L'article R. 6322-1 du code de la santé publique définit ainsi la chirurgie esthétique comme l'ensemble « des actes chirurgicaux tendant à modifier l'apparence corporelle d'une personne, à sa demande, sans visée thérapeutique ou reconstructrice » .

L'annexe 2 jointe à la circulaire précitée du 23 décembre 2005 rappelle à titre purement indicatif les actes les plus courants :


Quelques interventions fréquemment pratiquées en chirurgie esthétique

Interventions sur le visage (tête et cou) :

- traitement chirurgical de la calvitie par détonsuration ou prélèvements de lambeaux ;

- lifting frontal, temporal ou cervico-facial ;

- chirurgie esthétique du nez (rhinoplastie) ;

- chirurgie esthétique des paupières (blépharoplastie) ;

- chirurgie des oreilles décollées ;

- chirurgie esthétique des lèvres (épaisses ou fines et minces) ;

- chirurgie du cou (cervicoplastie) ;

- implants (pommettes, par exemple) ;

- liposculpture - lipoaspiration ;

- lipostructure (réinjection de graisse autologue).

Chirurgie du thorax et de l'abdomen, sans préjudice des indications de chirurgie reconstructrice :

- mammoplastie d'augmentation avec pose de prothèse en cas d'aplasie ou d'hypoplasie mammaire ;

- mammoplastie pour hypertrophie ;

- chirurgie de la ptose mammaire en l'absence d'hypertrophie ;

- plastie abdominale ;

- liposuccion, lipo-aspiration.

Techniques de liposuccion ou lipo-aspiration, notamment :

- traitement des surcharges graisseuses :

- de la paroi abdominale ;

- de la face interne des bras ;

- de la région trochantérienne (apophyse située à l'extrémité supérieure du fémur) ;

- des cuisses ;

- de la face interne des genoux.

Dermabrasion :

La dermabrasion mécanique est l'acte qui consiste à enlever la couche superficielle de la peau avec une meule à rotation très rapide. L'indication dans le domaine de la chirurgie esthétique est celle de l'effacement des ridules de la lèvre supérieure et de la lèvre inférieure.

b) Une autorisation administrative préalable des installations

La loi du 4 mars 2002 a inséré, dans le titre II du livre III de la sixième partie du code de la santé publique, un chapitre II intitulé « Chirurgie esthétique » . Les articles L. 6322-1 à L. 6322-3 de ce code soumettent ainsi les installations de chirurgie esthétique à une autorisation spécifique préalable à leur mise en service, délivrée par le directeur général de l'agence régionale de santé territorialement compétente .

Le régime d'autorisation des installations de chirurgie esthétique repose sur une double obligation :

- l'exigence d'une accréditation des installations , au même titre que les établissements de santé publics et privés. Cette « procédure externe d'évaluation dénommée certification » est mise en oeuvre par la Haute Autorité de santé (HAS) en application de l'article L. 6113-3 du code de la santé publique ;

- la délivrance d'une autorisation par le directeur général de l'agence régionale de santé territorialement compétente.

La circulaire du 23 décembre 2005 précise que l'autorisation est valable pour une durée d'exploitation de cinq ans.

Les installations sont, par ailleurs, soumises aux normes de fonctionnement en vigueur pour la chirurgie, la chirurgie ambulatoire et la sécurité anesthésique. Elles ont ainsi l'obligation d'adopter le système prévu à l'article L. 6111-1 du code de la santé publique applicable aux établissements de santé, qui leur impose d'assurer notamment « les examens de diagnostic, la surveillance et le traitement des malades » ainsi que de mener une réflexion sur les questions éthiques posées par l'accueil et la prise en charge des malades.

c) Des actes non pris en charge qui ne peuvent bénéficier de publicité

Aux termes de l'article L. 6322-1 du code de la santé publique, « l'activité, objet de l'autorisation, n'entre pas dans le champ des prestations couvertes par l'assurance maladie au sens de l'article L. 321-1 du code de la sécurité sociale » .

Le même article interdit aux installations autorisées de bénéficier d'une publicité « directe ou indirecte, sous quelque forme que ce soit » . Cette prescription a le même fondement de principe que les interdictions déontologiques faites aux médecins par l'article R. 4127-19 du code de la santé publique, qui dispose que « la médecine ne doit pas être pratiquée comme un commerce » et qu'à ce titre « sont interdits tous procédés directs ou indirects de publicité et notamment tout aménagement ou signalisation donnant aux locaux une apparence commerciale » .

La circulaire du 23 décembre 2005 précise que cette interdiction concerne tous les moyens d'information, Internet compris. En revanche, elle souligne qu' « elle n'empêche aucunement les titulaires de l'autorisation de donner au public, sans employer les procédés de la publicité, des renseignements de fait sur leurs installations, leurs activités et les compétences de leurs praticiens, en les présentant avec sobriété » .

Cette interdiction ne fait aucunement obstacle aux communications de nature scientifique, dans les revues spécialisées par exemple, ni aux ouvrages d'enseignement, dès lors que ces publications ne comportent pas de mentions spécifiques en faveur d'un établissement.


* 40 Circulaire n° DGS/SD2B/DHOS/O4/2005/576 du 23 décembre 2005 relative à l'autorisation et au fonctionnement des installations de chirurgie esthétique.

* 41 Décret n° 2005-840 du 20 juillet 2005 relatif à la sixième partie (dispositions réglementaires) du code de la santé publique.

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