G. FAUT-IL « CIVILIANISER » DAVANTAGE LES SOUTIENS ?

1. L'objectif partagé d'une « civilianisation » du soutien...

Le livre blanc prévoyait que le recentrage des militaires sur l'opérationnel s'accompagnerait d'une montée en puissance des civils dans le soutien : « Les personnels militaires devront se concentrer sur les missions opérationnelles, les personnels civils sur les tâches administratives et de soutien, dès lors qu'elles ne sont pas l'objet d'une externalisation . ».

Cet objectif a conduit à une répartition des suppressions d'emplois globales à raison de 75 % sur les emplois militaires et 25 % sur les emplois civils. Par ailleurs, 75 % des suppressions portent sur les fonctions de soutien et 25 % sur les fonctions opérationnelles.

Dans les bases de défense 45 ( * ) , 12 303 postes sont décrits en organisation pour les personnels civils. Le taux de civilianisation est de 42,24% en 2012.

A moyen terme, les orientations cible pour 2016 font apparaître une progression du taux de civilianisation global passant de 42 % en 2011 à 46 % en 2016 et une progression des emplois de responsabilité pour les civils, passant de 67 postes en 2011 à 93 en 2013.

La répartition par catégorie est la suivante :

- une augmentation de 0,5% des postes de niveau I (+ 1 poste) ;

- une diminution de 5,6% des postes de niveau II (-59 postes) ;

- une diminution de 0,2% des postes de niveau III (-23 postes).

Interrogé sur sa politique en matière de civilianisation, le ministère de la défense a décrit les 5 axes permettant de développer l'emploi du personnel civil :

LES 5 AXES POUR DÉVELOPPER L'EMPLOI CIVIL (SOURCE : SGA)

- les travaux engagés entre les centres ministériels de gestion (CMG) et les EMSD en 2011 conduisant à l'établissement de diagnostics territoriaux d'emploi vont être poursuivis et étendus à partir des REO 2012. Une méthodologie commune aux CMG et à tous les employeurs vient d'être élaborée par la DRH-MD ; cela permettra l'élaboration de diagnostics territoriaux d'emploi dont la finalité est de rapprocher les personnels en surnombre des emplois vacants sur un bassin d'emploi. Au-delà de cet état des lieux, l'objectif est de bâtir un plan d'action contribuant à une gestion anticipée des postes ouverts et à un meilleur reclassement des personnels restructurés ou en surnombre. Ce partage d'informations devrait permettre de mieux cerner la ressource locale et les besoins en compétences des employeurs, notamment les GSBdD ;

- deuxième axe : l'identification d'environ 700 postes "stratégiques" en collaboration avec les employeurs, ce qui permettra de bâtir un plan d'encadrement et de constituer un vivier.

Afin d'organiser la mobilité sur ces postes et notamment en vue de constituer des binômes civilo-militaires, une période privilégiée de mobilité (PPM) expérimentale sur ces postes est lancée en 2012. L'objectif est de l'étendre en 2013 (PPM 2013, dès septembre 2012) et de la caler sur le calendrier des mouvements des personnels militaires ;

- troisième axe : l'élaboration (en cours) d'une directive de la DRH-MD sur l'emploi et la mobilité des personnels civils ; elle a vocation à aborder tous les problèmes pouvant se poser en terme de processus, de priorité des mobilités, de gestion et à faire connaître les dispositifs d'accompagnement de la mobilité (notamment conseil carrière) ;

- quatrième axe : l'organisation de rendez-vous mobilité ou forums de l'emploi ayant pour objectif de rapprocher l'offre et la demande, de permettre aux agents de rencontrer directement les employeurs, de s'informer et aux employeurs de faire connaître leurs besoins. Le premier forum ministériel de l'emploi a eu lieu 13 février 2012 sur le périmètre francilien (CMG de St-Germain et SPAC) et a réuni plus de 1 000 agents et plus de 20 employeurs. Cet exercice devra être dupliqué ensuite sur le périmètre des autres CMG (Toulon en juin, Metz en septembre) ;

- cinquième axe : il porte sur la systématisation du conseil de carrière aux étapes clés de la carrière (changement de grade, réussite concours ou examens professionnels, ...).

Vos rapporteurs ont pu constater sur le terrain une réelle volonté pour que la place et le nombre des personnels civils au sein des bases de défense soit en progression.

2. ... doit s'appliquer avec souplesse, en tenant compte des situations locales et des impératifs de gestion de carrière des civils comme des militaires
a) La stérilité des approches dogmatiques....

Cette question semble toutefois abordée avec un peu trop de dogmatisme, ce qui comporte un risque d'opposition entre deux catégories de personnels pourtant complémentaires.

On entend ainsi un certain nombre de jugements très définitifs sur la question, dont on peut faire le florilège :

- les civils auraient un plus long temps de travail, dans la mesure où, de par leur statut, les militaires s'entraînent, font du sport, etc... ; d'autres contestent cette argumentation, en rétorquant que les militaires sont culturellement d'une grande disponibilité ;

- les civils ne seraient pas mobiles (or beaucoup de civils ont été mutés à l'intérieur du ministère ou en interministériel ces dernières années) ;

- les civils apporteraient de la « rigidité » là où les militaires sont mutés très fréquemment, (d'autres disent aussi de la continuité, de la mémoire) ;

- les militaires sont seuls projetables en opérations, y compris dans le soutien ;

- les militaires doivent pouvoir trouver, après le temps des engagements extérieurs, une période de « respiration », en deuxième partie de carrière, dans les postes du soutien.

En particulier, vos rapporteurs n'adhèrent pas aux discours tendant à opposer les deux catégories de personnels. Chacun doit pouvoir trouver sa place, autour de l'objectif global et partagé de la civilianisation du soutien, mais sans dogme.

b) ...doit céder le pas à une application locale, souple et raisonnée.
(1) Le poids de l'histoire et la diversité des situations locales

Ce qu'on observe sur le terrain, c'est surtout une très grande diversité de situations. Certaines bases de défense ou services du soutien sont fortement civilianisés.

Ainsi, vos rapporteurs ont constaté qu'à Toulon 57% des agents du groupement de soutien sont des civils ; dont 15 cadres. Le chef du service soutiens communs, qui dirige 700 personnes, est un civil.

À Tours, le successeur de l'actuelle chef du groupement de soutien, une commissaire originaire de l'armée de l'air, sera un civil.

Dans le commissariat, la proportion de civils est de 70% contre 30% de militaires.

Ainsi donc les chiffres nationaux cachent de très fortes disparités locales.

Il ne faut pas sous-estimer le poids de l'héritage des situations issues du passé. Dans la Marine nationale, le taux de civilianisation était traditionnellement plus élevé que dans l'armée de l'air, qui avait traditionnellement plus de militaires dans le soutien, l'armée de terre se situant à mi-chemin.

Il semble normal que la situation évolue de façon non uniforme vers l'objectif commun d'une plus grande civilianisation.

(2) Les difficultés parfois rencontrées pour « armer » des postes avec des personnels civils

Vos rapporteurs ont été très attentifs aux observations des représentants syndicaux du personnel civil qui ont attiré leur attention sur la faiblesse du nombre de postes à responsabilité occupés par des civils. Le ministère a d'ailleurs présenté des objectifs d'augmentation de ces postes à responsabilité.

Pourtant ils ont pu constater sur le terrain une certaine difficulté parfois à obtenir des candidatures de personnels civils sur des postes à responsabilité, concernant par exemple des postes d'adjoint ou de chef de groupement de soutien.


* 45 Source : réponse écrite du SGA en date du 7 mars 2012

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