B. LA CONFORMITÉ AVEC LE PACTE DE STABILITÉ ET DE CROISSANCE

1. La conformité à la règle d'évolution du solde structurel jusqu'en 2015 au moins

En ce qui concerne la conformité de la France à la règle d'amélioration du solde structurel d'au moins 0,5 point de PIB par an, il convient de distinguer deux méthodologies de calcul du solde structurel :

- celle du présent projet de programme de stabilité, qui repose sur la trajectoire de PIB potentiel de la LPFP ;

- celle de la Commission européenne, qui retient une hypothèse de PIB potentiel différente.

Il a été montré précédemment que la « conversion », par le présent projet de programme de stabilité, du solde effectif en solde structurel, était conforme à la méthodologie de la LPFP.

Le présent projet de programme de stabilité ne présente pas d'estimation du solde structurel en retenant la trajectoire de PIB potentiel de la Commission européenne. Le tableau ci-après réalise un tel calcul.

Il montre (ligne G) que, même selon l'hypothèse de croissance potentielle de la Commission européenne, la France respecterait jusqu'en 2015 la règle d'amélioration minimale du solde structurel de 0,5 point de PIB par an pour les Etats n'ayant pas atteint leur objectif de solde structurel à moyen terme.

En revanche, il existe un risque que cela ne soit plus le cas à partir de 2016. Selon la Commission européenne la croissance potentielle est de 1,1 % en 2015-2016 59 ( * ) . Or, le projet de programme de stabilité ne prévoit, pour les années concernées, aucun effort en recettes, la réduction du déficit structurel provenant exclusivement du fait que les dépenses augmenteraient moins vite que le PIB potentiel . En effet, il est prévu une croissance potentielle de 1,5 %, alors que l'évolution des dépenses publiques est estimée à + 0,4 % en 2016 et + 0,6 % en 2017.

Seulement, si l'on retient une hypothèse de croissance potentielle de 1,1 % par an, une croissance des dépenses de l'ordre de 0,5 % en volume correspond à une moindre amélioration du solde structurel .

L'échéance est toutefois éloignée, et la question encore théorique.

Le solde public prévu par le projet de programme de stabilité : conversion indicative en solde structurel au sens de la Commission européenne

(en points de PIB)

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Données

A

Solde public effectif

-7,5

-7,1

-5,2

-4,8

-3,7

-2,9

-2,0

-1,2

-0,7

B

Ecart de production, selon la Commission européenne 60 ( * )

-2,7

-2,0

-1,4

-2,4

-3,3

-3,1

-2,3

-1,4

-0,5

C

Mesures ponctuelles et temporaires 61 ( * )

0,0

0,0

0,0

-0,1

-0,1

-0,1

-0,1

0,0

0,0

Calculs

D

Solde conjoncturel (A - B×0,5)

-1,4

-1,0

-0,7

-1,2

-1,7

-1,6

-1,1

-0,7

-0,3

E

Solde corrigé du cycle 62 ( * ) (A-D)

-6,2

-6,1

-4,5

-3,6

-2,1

-1,4

-0,9

-0,5

-0,4

F

Solde structurel au sens de la Commission européenne (E-C)*

-6,2

-6,1

-4,5

-3,5

-2,0

-1,3

-0,8

-0,5

-0,4

Solde structurel, selon la Commission européenne**

-6,1

-5,8

-4,5

-3,3

Solde structurel, selon le programme de stabilité

-3,7

-2

-1,0

-0,2

0,2

0,5

G

Evolution (F n -F n-1 )

-

0,1

1,6

1,0

1,6

0,7

0,5

0,3

0,1

H

Moyenne 2010-2013

1,1

* Il s'agit d'ordres de grandeur, l'ensemble des hypothèses de la Commission européenne n'étant pas explicitées.

** Dernières données disponibles.

Source : commission des finances

La ligne H indique l'évolution du solde structurel (recalculé selon la méthodologie de la Commission européenne) en moyenne sur la période 2010-2013. En effet, le Conseil a demandé à la France d'améliorer son solde structurel de plus de 1 point de PIB par an en moyenne sur cette période (cf. infra ) 63 ( * ) . Avec une amélioration moyenne de 1,1 point de PIB, cette exigence serait également respectée.

2. La conformité à la règle d'effort structurel
a) L'obligation d'un effort structurel d'au moins 0,5 % du PIB par an

Le pacte de stabilité comprend des dispositions relatives à l'effort structurel, sans toutefois faire, en tant que telle, référence à cette notion. Il mentionne en effet une « analyse des dépenses, déduction faite des mesures discrétionnaires en matière de recettes », dans l'article 5 du règlement n° 1466/97 tel qu'il résulte du « six pack ». Cette définition correspond à la notion, retenue par la France en matière de politique budgétaire, d'effort structurel 64 ( * ) .

L'effort structurel

L'effort structurel des administrations publiques représente ce qui, dans la variation du solde structurel, est imputable à l'action discrétionnaire des pouvoirs publics . Il est défini comme la somme d'un effort en dépense et d'un effort en recettes.

L'effort en dépense correspond à la baisse des dépenses publiques (en points de PIB) corrigée des effets de la conjoncture ; ainsi, ne sont pas prises en compte les variations de la dépense liées au cycle économique.

L'effort en recettes, quant à lui, est égal à l'impact estimé des mesures fiscales et sociales nouvelles .

Par exemple, les dépenses publiques augmentent de 1,0 % en volume alors que la croissance potentielle est de 1,5 % en volume. Dès lors, le ratio dépenses / PIB potentiel augmente d'environ 0,25 point de PIB :

(1,5 - 1,0) × 0,5 = 0,25 point de PIB

Comme cela a déjà été indiqué, le coefficient de 0,5 s'explique par le fait que les dépenses publiques s'élèvent à environ la moitié du PIB.

Si, par ailleurs, les mesures nouvelles sur les recettes sont d'un point de PIB, alors l'effort structurel s'élève à 1,25 point de PIB :

1 + 0,25 = 1,25 point de PIB

La notion d'effort structurel se distingue de l'évolution du solde structurel du fait que cette dernière dépend aussi des fluctuations spontanées du ratio recettes / PIB.

Le solde structurel au sens du pacte de stabilité est légèrement différent de celui prévu par la loi organique du 17 décembre 2012 et de la LPFP 2012-2017. En particulier, il n'inclut pas les dépenses d'intérêt 65 ( * ) . Toutefois cela peut être, en pratique, négligé.

b) Une exigence respectée

L'hypothèse d'élasticité des prélèvements obligatoires au PIB retenue par le présent projet de programme de stabilité étant chaque année de 1 ou 0,9, l'effort structurel est nécessairement égal ou supérieur à l'amélioration du solde structurel.

Dès lors que la règle d'amélioration du solde structurel d'au moins 0,5 point par an est respectée (au moins jusqu'en 2015), tel est nécessairement le cas de la règle d'effort structurel.

3. La conformité à la règle de dette

Le pacte de stabilité prévoit désormais qu'est en déficit excessif un Etat dont le supplément de dette en % du PIB, par rapport au seuil de 60 % du PIB ne s'est pas réduit en moyenne d'un vingtième les trois dernières années.

Il s'agit bien d'une règle en points de PIB, et non en milliards d'euros. En pratique, elle permet un déficit effectif d'environ 1 point de PIB ( cf . encadré ci-après).

La règle de dette, une règle souvent mal comprise

La règle est exprimée en % du PIB (et non en milliards d'euros).

Or, la croissance du PIB tend à réduire le ratio dette / PIB.

La règle de dette autorise donc un déficit permanent d'environ 1 % du PIB (et n'exige pas un excédent, contrairement à ce qui est parfois affirmé).

Par exemple (pour simplifier, on raisonne sur une année), si la croissance est de 3 % en valeur, un Etat dont la dette est de 90 % du PIB une année n a, l'année n+1 (avant prise en compte du déficit de n+1), une dette de 90/103=87,4 %, ce qui représente une diminution de 2,6 points, le déficit autorisé en n+1 est de 1,1 % du PIB :

2,6-1,5 = 1,1 % du PIB

Plus précisément, la Commission européenne vérifiera rétrospectivement, pour une année n, si la formule ci-après est respectée 66 ( * ) :

Dette de l'année n = 60 % + 0,95/3 (dette de l'année n-1 - 60 %) + 0,95 2 /3 (dette de l'année n-2 - 60 %) + 0,95 3 /3 (dette de l'année n-3 - 60 %).

Cette règle ne jouera pas tant que la France n'aura pas mis fin à son déficit excessif (soit, selon le projet de programme de stabilité, en 2014). Au cours des trois années suivantes (soit jusqu'en 2017), le Conseil pourra fixer des objectifs moins contraignants 67 ( * ) .

Le présent projet de programme de stabilité précise que « pour la France, d'après les derniers calculs de la Commission, un ajustement structurel minimal de 0,2 point par an à partir de 2014 assurerait de respecter le critère à partir de 2017, soit un ajustement minimal moins important que celui devant être assuré pour revenir à l'objectif à moyen terme d'équilibre structurel. La trajectoire du programme de stabilité assure largement des progrès suffisants pour respecter le critère de dette en 2017 : il sera en effet respecté dès la période 2015-2017 » 68 ( * ) .


* 59 Cf . présent projet de programme de stabilité, p. 43.

* 60 Cf . prévisions économiques de l'hiver 2013 (2009-2014). On suppose ensuite que la croissance est de 2 % par an, et la croissance potentielle au sens de la Commission européenne de 1,1 % par an.

* 61 Source : présent projet de programme de stabilité.

* 62 La Commission européenne distingue un « solde corrigé du cycle » et un « solde structurel », seul ce dernier étant corrigé des mesures exceptionnelles et temporaires.

* 63 Dans sa recommandation du 30 novembre 2009, en raison notamment du plan de relance, le Conseil a décalé à 2013 l'année où la France devait revenir sous le seuil des 3 points de PIB. Toutefois, elle devait toujours « assurer un effort budgétaire annuel moyen supérieur à 1 % du PIB sur la période 2010-2013 ».

* 64 Le règlement précité exige, dans le cas des Etats n'ayant pas atteint leur objectif à moyen terme, que « l'augmentation annuelle des dépenses ne dépasse pas un taux inférieur à un taux de référence pour la croissance potentielle du PIB à moyen terme », ce dernier taux correspondant à l'évaluation de la croissance potentielle par la Commission européenne, « sauf si ce dépassement est compensé par des mesures discrétionnaires en matière de recettes » . L'effort structurel se définissant comme la somme de la diminution du ratio dépenses / PIB potentiel et des mesures nouvelles sur les recettes, il s'agit bien d'une règle d'effort structurel.

* 65 Comme l'indique le règlement 1466/97, pour l'application de la règle d'effort structurel du volet préventif du pacte de stabilité, « les dépenses globales n'incluent pas les dépenses d'intérêt, les dépenses liées aux programmes de l'Union qui sont intégralement couvertes par des recettes provenant de fonds de l'Union et les modifications non discrétionnaires intervenant dans les dépenses liées aux indemnités de chômage » .

* 66 Cf . code de conduite sur le pacte de stabilité du 3 septembre 2012.

* 67 « Pendant une période de trois ans à compter de la correction du déficit excessif, l'exigence relative au critère de la dette est considérée comme remplie si l'État membre concerné réalise des progrès suffisants vers la conformité, tels qu'évalués dans l'avis formulé par le Conseil sur son programme de stabilité ou de convergence » (nouvelle rédaction de l'article 2 du règlement (CE) n° 1467/97 visant à accélérer et à clarifier la mise en oeuvre de la procédure concernant les déficits excessifs).

* 68 Le projet de programme de stabilité précise que « pendant cette période de transition, les Etats membres doivent respecter un ajustement structurel linéaire minimum. Pour le définir, la Commission définit une trajectoire d'ajustement linéaire du solde structurel qui, si elle était suivie, permettrait de respecter la référence à la fin de la période de transition. La trajectoire « minimale » consisterait à (i) ne pas chaque année s'écarter de plus de 0,25 % du PIB de cet ajustement structurel, et (ii) au total, ne pas être à plus de 0,75 % de la cible d'ajustement. Si l'un de ces critères n'est pas rempli, la Commission considère que les progrès sont « insuffisants » » .

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