B. DES AMÉNAGEMENTS SOUHAITABLES AUX DISPOSITIFS DE SOUTIEN AU COMMERCE EXTÉRIEUR ET À LA DETTE GARANTIE

Dans son enquête, la Cour des comptes a examiné plus en détail trois dispositifs :

- la garantie de protection des épargnants ;

- le soutien au commerce extérieur dans le cadre de la garantie apportée par la COFACE ;

- les garanties de dettes apportées par l'Etat à divers emprunteurs.

1. La protection des épargnants : des risques limités pour l'Etat

L'Etat apporte sa garantie aux dépôts de l'épargne réglementée , dont l' encours a augmenté de 165 milliards d'euros fin 2006 à 394,4 milliards d'euros fin 2012 .

Les garanties de protection des épargnants concernent l'ensemble des dépôts effectués par ces derniers sur des livrets réglementés (livret A, livret bleu, livret de développement durable, livret d'épargne populaire) et les créances détenues par les établissements de crédits sur le fonds d'épargne tenu par la Caisse des dépôts et consignations.

La Cour des comptes observe 23 ( * ) que « le risque d'appel en garantie que supporte l'Etat à ce titre apparaît toutefois faible , compte tenu du modèle économique du Fonds d'épargne, de l'encadrement de son portefeuille d'actifs, des contraintes prudentielles qui lui sont applicables et du volant de liquidité dont il dispose .

« Dès lors, les enjeux que soulève la garantie de protection des épargnants présentent essentiellement un caractère budgétaire . L'absence de prélèvement pouvant être opéré, du fait des contraintes prudentielles, sur le résultat du fonds d'épargne, en contrepartie de la garantie accordée, privera en effet l'Etat, dans les années à venir, d'une recette significative, de l'ordre de 804,5 millions d'euros par an en moyenne sur la période 2006-2011 ».

2. Le soutien au commerce extérieur : des dispositifs exigeant une meilleure information du Parlement au regard des risques encourus

Dans un contexte économique plus incertain (cf. encadré ci-dessous sur l'impact de la crise financière) et une montée des incertitudes géographiques et sectorielles, la Cour des comptes s'inquiète des risques corrélés à l'augmentation des encours des crédits garantis par la COFACE, lesquels s'élevaient à 83,8 milliards d'euros fin 2012 .

Initiées en 1949, les procédures actuelles de garantie à l'export gérées par la COFACE recouvrent de nombreux instruments : assurance-crédit, assurance-prospection, garantie de change, garantie du risque économique, garanties de taux d'intérêts et garanties du risque exportateur. Par ailleurs, Natixis gère un dispositif de stabilisation des taux d'intérêt.

L'impact de la crise financière sur les garanties apportées par la COFACE

« Du point de vue de la Coface, les conséquences de la crise financière ne se limitent cependant pas à la hausse de la demande des entreprises exportatrices pour des contrats de sécurisation de leurs échanges internationaux.

« La crise financière se traduit, en effet, par des difficultés pour les entreprises ayant des projets internationaux d'accéder à des financements en devises et notamment en dollars.

« Plusieurs facteurs y concourent : raréfaction générale des refinancements « en blanc » qui touche en particulier ceux d'entre eux libellés en dollar ; retrait des money market funds américains des marchés financiers européens ; carence, dans le bilan des établissements de crédit en zone euro, de titres éligibles à des mises en pension (repuchase agreement ou repos) en dollars ; faible effectivité des facilités mises en oeuvre par l'Eurosystème pour faciliter l'accès à la ressource.

« En réponse, les entreprises exportatrices sont davantage qu'autrefois contraintes de recourir à des contrats de couverture euro/dollar, dont le coût est généralement élevé.

« Par ailleurs, dans ce contexte défavorable, les établissements de crédit tendent à augmenter le montant minimal des financements qu'ils proposent aux entreprises exportatrices. Selon les responsables de la Coface, ce montant plancher avoisinerait aujourd'hui 15 millions d'euros. Du point de vue des entreprises, cette tendance se traduit par la nécessité de monter des opérations d'une taille de plus en plus importante quitte à s'exposer, davantage qu'autrefois, aux risques associés aux échanges internationaux.

« En définitive, les entreprises exportatrices mènent des opérations de plus en plus importantes, dont la rentabilité est pénalisée par les coûts financiers auxquelles elles font face. Du point de vue de la Coface qui les assure, ces évolutions, qui les exposent à un risque de sinistre accru, doivent s'accompagner d'une politique d'autant plus prudente en matière de provisionnement ».

Source : enquête de la Cour des comptes reproduite en annexe, p. 153-154

Trois recommandations (n° s 6 à 8) sont formulées par la Cour des comptes :

- définir les risques que l'Etat souhaite couvrir avec les réserves de trésorerie du compte des procédures publiques et fixer, en conséquence, le montant des futurs prélèvements budgétaires de l'Etat sur ce compte ; les prélèvements sur le compte des procédures publiques ne devraient ainsi pas tenir compte du seul résultat de gestion en trésorerie, mais aussi de l'équilibre économique global où intervient la COFACE et du stock des risques garantis par la COFACE ; comme l'a observé à plusieurs reprises la Cour des comptes, il convient « que le solde de la trésorerie disponible sur le compte des procédures publiques soit maintenu à un niveau strictement supérieur au capital notionnel, c'est-à-dire le montant théorique de capital destiné à faire face aux risques éventuels, calculé par la COFACE sur la base des scénarios de réalisation de sinistres à un an » 24 ( * ) ;

- compléter l'information disponible , mise à disposition du Parlement, dans l'annexe du compte général de l'Etat (recommandation n° 7) et la documentation budgétaire du programme 114 « Appels en garantie de l'Etat » (recommandation n° 8) en ce qui concerne le soutien au commerce extérieur, notamment sur les points suivants :

• permettre d'apprécier les résultats individuels des différentes procédures, ainsi que les encaissements et décaissements réalisés sur le compte des procédures publiques ;


• inclure une analyse des garanties par secteur d'activité afin de sensibiliser le lecteur des comptes aux risques portés par un retournement de la conjoncture dans certains domaines, tels l'aéronautique ;


• faire ressortir les risques liés à la concentration géographique des encours ;


• compléter l'approche par les encours par une mise en regard des probabilités d'appel en garantie, qui sont, par exemple, bien supérieures dans le cadre de l'assurance prospection que dans celui de l'assurance-crédit ; l'objectif serait de pouvoir rapporter l'efficacité des différentes formes de garanties à leur coût pour d'autres procédures que pour l'assurance-prospection ;


• justifier les écarts entre le résultat technique et le résultat comptable.

3. Les encours de dette garantie : une hausse continue demandant un suivi plus effectif

Quand l'Etat apporte sa garantie à des emprunts souscrits par des entités publiques ou privées (sociétés, organismes bancaires, collectivités ou établissements publics), il se substitue au débiteur défaillant pour le remboursement des intérêts et des échéances d'amortissement prévues au contrat.

La comptabilisation de ces engagements est apparue insuffisante, notamment en ce qui concerne les intérêts garantis.

L'encours de dette garantie a nettement progressé : de 56,3 milliards d'euros fin 2006 à 163 milliards d'euros fin 2012, y compris les encours relevant du FESF.

Si les risques associés aux dettes garanties se sont peu réalisés jusqu'à présent, l'Etat a dû intervenir par des apports en capital pour améliorer la solvabilité de certains bénéficiaires de sa garantie, sur lesquels il n'a par ailleurs pas toujours de marge de négociations.

La Cour des comptes formule les quatre recommandations suivantes (n° s 9 à 12) :

- achever l'élaboration du nouvel outil de recensement de l'ensemble des garanties accordées par l'Etat et du nouveau guide de procédures spécialisé ;

- consolider la procédure de confirmation avec les organismes bénéficiaires de la garantie accordée par l'Etat ;

- achever le travail de fiabilisation du montant des intérêts de la dette garantie ;

- réduire la durée moyenne des opérations de dette garantie , au besoin via un dispositif de plafonnement applicable aux nouvelles opérations .

S'agissant du recensement de l'ensemble des garanties (recommandation n° 9), il convient de combler une lacune depuis 2006. En effet, les premières données, à vocation exhaustive, sur les engagements hors bilan de l'Etat avaient porté sur des données consolidées de l'ensemble des garanties accordées par l'Etat dans les années ayant précédé l'application de l'ensemble des dispositions de la LOLF. Un tel document de synthèse des garanties de l'Etat n'existe plus depuis 2006 suite à la censure par le Conseil constitutionnel de dispositions figurant en loi de finances et non dans la LOLF 25 ( * ) , faute d'amendement de coordination lors de la discussion de la LOLF 26 ( * ) .

Sur la recommandation n° 11 relative à la fiabilisation du montant des intérêts de la dette garantie, il convient d'observer les difficultés résultant de leur évaluation. Cette question a été examinée par la commission des finances du Sénat, par exemple, lors de la garantie accordée par l'Etat à la Caisse des dépôts et consignations sur le projet A400M mené par EADS 27 ( * ) .

Enfin, il convient de retenir le principe figurant dans la recommandation n° 12, selon lequel les émissions de dette ne peuvent être garanties que pendant une durée limitée, les dérogations à ce principe devant être justifiées.


* 23 Enquête reproduite en annexe. Citation p. 10. Les éléments soulignés le sont par votre rapporteur spécial.

* 24 Enquête de la Cour des comptes reproduite en annexe. Citation p. 160.

* 25 Cf. supra , paragraphe I A 1.

* 26 En application de dispositions de la loi n° 2003-1312 du 30 décembre 2003 de finances rectificative pour 2003 introduites par le Sénat, il était prévu que, avant l'entrée en vigueur de la LOLF, pour les exercices 2004 et 2005, une annexe sur les garanties jointe au compte général de l'administration des finances précise, pour chaque dispositif de garantie, le régime de la garantie, son éventuelle rémunération et une analyse du risque. Par ailleurs, cette même annexe devait énumérer la liste des garanties accordées au cours des deux dernières années, ainsi que les charges résultant des appels en garantie effectués au cours des cinq dernières années. Ces informations devaient ensuite figurer dans le compte général de l'Etat à compter de 2006, après l'entrée en vigueur de la LOLF. Dans une décision en date du 29 décembre 2003, le Conseil constitutionnel a invalidé les dispositions applicables après 2005, en considérant que, à partir de l'entrée en vigueur de la LOLF, elles relevaient du champ de la loi organique et non de la loi de finances. Ces dispositions n'ayant pas été réintroduites dans le texte de la LOLF, il n'existe plus, depuis 2006, de document budgétaire de synthèse présentant de manière aussi exhaustive les garanties de l'Etat.

* 27 Un amendement de Philippe Marini, rapporteur général, à l'article 40 du quatrième projet de loi de finances rectificative (n° 2010-1658 du 29 décembre 2010) pour 2010, tendait à limiter le plafonnement de cette garantie à 417 millions d'euros, qui correspondait aux données alors connues. L'objectif était que le Gouvernement soumette à nouveau cette question au Parlement, une fois fixé le montant de la rémunération de la Caisse des dépôts et consignations au titre des coûts de financement. Cet amendement avait été retiré en séance publique, après que le Gouvernement se fut engagé à ce que seuls soient facturés les coûts réellement supportés au titre du financement et de la gestion des dispositifs. Le ministre du budget avait également précisé qu'il rendrait compte au Parlement, après la négociation, des engagements pris in fine par l'Etat.

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