III. LES DIFFICULTÉS DE LA FICTION FRANÇAISE

A. LE PARADOXE DE LA FICTION FRANÇAISE

En dépit d'une réglementation très protectrice, la fiction française n'est pas très performante. En termes de volume, la France produit moins que ses voisins : deux fois moins que les Anglais et trois fois moins que les Allemands .

Ce constat est particulièrement frappant pour la fiction de première partie de soirée :

- en termes de diffusion, la fiction étrangère représente 60 % des fictions diffusées en première partie de soirée en France ;

- alors que les 10 meilleures audiences de fiction correspondent à des fictions nationales en Angleterre, en Allemagne, en Espagne et en Italie, 7 des 10 meilleures audiences de fiction en France sont américaines 25 ( * ) .

L'effet de ces audiences en berne est que la fiction ne serait pas rentable . TF1 a ainsi indiqué au groupe de travail qu'en 2009, son coût de grille était de 171 millions d'euros pour la fiction française, avec des recettes publicitaires liées à ces programmes autour de 89 millions d'euros, soit une perte nette de 82 millions d'euros . Les raisons en seraient la baisse de l'audience, la hausse des coûts de la fiction, son public âgé et la concurrence des séries américaines des autres chaînes. En trois diffusions, l'équilibre n'est pas non plus atteint.

Votre rapporteur considère que cette situation est malsaine et que les obligations de production ont vocation à produire des effets vertueux pour les chaînes de télévision.

Non seulement la fiction de première partie de soirée est peu vue en France, mais elle s'exporte aussi très mal.

Alors que les recettes d'exportation du secteur audiovisuel américain ont été multipliées par deux depuis les années 1990, les ventes de la production française sont assez faibles, à hauteur de 110,6 millions d'euros au total et 20 millions d'euros dans la fiction (contre 22,9 millions d'euros en 2002).

C'est un peu moins inquiétant dans le documentaire et dans l'animation, mais selon TVFI, les ventes internationales de programmes audiovisuels français auraient presque triplé de 1991 à 2001, puis baissé de près de 25 % entre 2001 et 2011 .

Comme le note le CSA, « si l'animation et le documentaire continuent en 2011 de tirer les performances des ventes à l'exportation, les ventes de l'animation ont diminué de 37 % depuis 2001 et les ventes de fiction sont en recul depuis 2000 » 26 ( * ) .

En dépit de l'absence de chiffres fiables, chacun s'accorde à reconnaître que la balance commerciale de la production française est très négative (la valeur des acquisitions de séries américaines par TF1 sont déjà bien supérieures à celle des programmes français exportés).

Votre rapporteur considère que la faiblesse de la fiction française est doublement dommageable :

- d'une part, elle ne correspond pas à l'idée qu'il se fait de l'exception culturelle , qui a précisément pour objectif de permettre aux cultures nationales d'exprimer leur originalité et leurs singularités, même dans des marchés domestiques où il est moins aisé de rentabiliser la production ;

- d'autre part, cet échec relatif à des effets économiques négatifs en termes d'emplois créés sur le territoire français .


* 25 La fiction sur les chaînes nationales gratuites, chiffres-clés 2005-2010 , Conseil supérieur de l'audiovisuel, 2011

* 26 Deux années d'application de la réglementation de 2010 relative à la contribution des éditeurs de services de télévision au développement de la production audiovisuelle , CSA, janvier 2013.

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