D. UNE COMMUNICATION FINANCIÈRE TRÈS ALLUSIVE

Au demeurant, la communication financière des entreprises opacifie la dimension fiscale de leurs activités.

Le rapprochement entre les données fiscales publiées par les entreprises et leurs comptes consolidés n'apporte qu'une information partielle sur la contribution fiscale des entreprises et le taux d'effort fiscal qu'elles supportent effectivement.

A leur manière les données mentionnées dans le rapport du CPO illustrent cette imperfection en laissant quelque peu perplexe le lecteur moyennement informé.

Selon le CPO, l'IS payé sur une base consolidée s'élevait à 2,76 milliards d'euros pour BNP Paribas en 2011, à 1,64 milliard pour la BPCE, à 2,85 milliards pour le Crédit Agricole, à 1,32 milliard pour la Société Générale et à 1,07 milliard pour AXA. Le montant cumulé des impôts sur les sociétés atteint 8,57 milliards pour les quatre banques de l'échantillon. Cette somme peut être mise en rapport avec les recettes brutes totales d'IS des banques en 2011 soit 7,6 milliards d'euros quand les recettes nettes se sont situées à 4 milliards d'euros environ.

L'apparente discordance des données trouve ses explications dans les différences de champ et de population statistique auxquels chacune se rattache. Mais ces explications n'apportent pas grand-chose à la lisibilité de l'effort fiscal des entreprises considérées.

Une observation complémentaire s'impose s'agissant de la qualité de l'information diffusée sur ce point par les superviseurs.

Les autorités monétaires publient régulièrement des informations sur la situation des banques. On en a extrait un tableau mentionné plus haut exposant l'évolution du PNB de six groupes bancaires français et sa distribution entre différents emplois. Une ligne recense les impôts. Il serait bon que l'information ainsi présentée soit plus complète. Les impôts mentionnés regroupent la totalité des impôts comptabilisés qui sont mis en regard du PNB et des soldes intermédiaires de gestion consolidés par le groupe, ces données étant compilées, qui plus est, sur la base des seules informations financières fournies par les entreprises concernées.

La présentation ainsi faite induit des appréciations éloignées de la réalité de la charge fiscale finalement supportée effectivement par ces entreprises ( cf. infra ).

Une partie des prélèvements comptabilisés se compenseront, notamment du fait des éliminations de doubles impositions.

Par ailleurs, il faudra encore compter avec les effets des reports de déficits.

À ce problème de significativité des données publiées s'ajoutent ceux déjà mentionnés d'exhaustivité de l'information relayée par l'autorité monétaire à partir des états financiers des entreprises : il n'y a aucune désagrégation des données fiscales par pays ou par ligne d'activité, non plus a fortiori qu'il n' y a d'indication sur le taux d'effort contributif local des entreprises couvertes par les statistiques concernées.

À l'avenir, cette situation devrait évoluer.

Les dispositions votées dans le cadre de la loi bancaire à l'initiative du Sénat permettront d'améliorer l'information sur ce point grâce au dispositif codifié à l'article L 511-45 du code monétaire et financier, qui est analogue aux dispositions prévues par la directive CRD IV.

Il faudra cependant veiller à ce que la référence au périmètre de consolidation, finalement retenue, ne permette pas une altération de l'information .

On sait que les choix des entreprises peuvent varier sur ce point et que des structures peuvent être exclues du champ de consolidation comptable pour défaut de « matérialité », du fait d'une conception exigeante de ce dernier critère.

Ainsi, BNP Paribas estime qu'une entité réunissant moins de 500 millions d'euros de total de bilan est présumée présenter un caractère négligeable pour l'établissement des comptes consolidés. Il en va de même pour les entités dégageant un résultat net avant impôt inférieur à un million d'euros.

Sans doute faudra-t-il s'assurer que le dispositif soit entièrement cohérent avec celui , plus « enveloppant » prévu par le règlement européen du 11 décembre 2012. Celui-ci devrait enrichir l'information financière de la mention, pour chaque « coentreprise » significative, par l'entité déclarante de la charge ou du produit d'impôt sur le résultat, au-delà des liens capitalistiques entre le déclarant et l'entité considérée et indépendamment de sa consolidation dans les comptes du déclarant.

La marge laissée aux établissements pour définir le périmètre de leur consolidation comptable pose problème aux yeux de votre rapporteur. Sans doute faut-il observer que les choix sont contrôlés par les commissaires aux comptes et qu'ils ne sont pas exclusifs de toute information sur les entités exclues dont les résultats snt par hypotèse fiscalisables.

Mais, par définition, il existe un « effet lampadaire » qui conduit à se focaliser sur les entités recensées dans le périmètre de consolidation comptable de sorte que le contrôle des comptes peut s'exercer avec moins d'acuité sur ce qui en est exclu.

Par ailleurs, la qualité des informations qui figurent au hors-bilan ou qu'elles soient réunies dans des registres commerciaux peut être moindre que celles disponibles quand l'entité est consolidée. Il faut encore compter avec les lacunes administratives de certaines juridictions qui combinées avec l'existence de structures juridiques opaques peuvent aboutir à un défaut complet d'informations sur des structures liées aux grands groupes bancaires mais finalement aspirées dans un trou noir de l'information.

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