B. RENFORCER LA COOPÉRATION

Tout concourt à renforcer la coopération : la demande comme l'offre, l'économie comme le temps, l'intérêt individuel comme l'intérêt général. Plusieurs personnes auditionnées, qu'il s'agisse de représentants de collectivités territoriales, de la SNCF ou de RFF ont souligné les obstacles posés par le fractionnement des acteurs dans la réalisation de projets multimodaux, comme les pôles d'échanges aux abords des gares.

a) Faire de la région le chef de file

La nécessité d'un chef de file en matière de transport est demandée par de nombreuses voix 72 ( * ) . Tel a également été le souhait formulé par le Président de la République, dans son discours lors des États généraux de la démocratie territoriale : « C'est ce principe de chef de file qu'il faut étendre à tous les domaines de l'action locale. Je pense aux transports, aux déplacements, pour lesquels on sait bien qu'il est nécessaire d'articuler ce qui est décidé dans les villes, les départements et les régions. Il n'est plus supportable d'avoir trois autorités régulatrices pour des modes de transport qui sont souvent communs ».

L'article L. 1213-2 du Code des transports prévoit que la région est chargée de l'élaboration du schéma régional des infrastructures et des transports « en association avec l'État dans le respect des compétences des départements, et en concertation avec les communes et leurs groupements ». Dans le prolongement de cette mission, il est proposé par l'Association des régions de France dans son manifeste sur le transport de voyageurs et l'Union des transports publics de faire de la région le chef de file en matière de transport.

Le projet de loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles proposait dans sa version initiale que la région soit chargée d'organiser, « en qualité de chef de file, les modalités de l'action commune des collectivités territoriales et de leurs établissements publics pour l'exercice des compétences relatives [...] à l'organisation des transports ». Tel que modifié par le Parlement, le texte, toujours en discussion, prévoit dans sa version en deuxième lecture au Sénat que la région est chargée d'organiser, en qualité de chef de file, les modalités de l'action commune des collectivités territoriales et de leurs établissements publics pour l'exercice des compétences relatives à « l'organisation de l'intermodalité et de la complémentarité des modes de transports ».

En outre, le schéma régional de transport, qui a souvent peu d'effets, voire n'existe pas, doit être repensé afin de proposer un vision des transports dans son ensemble : d'une part, il doit intégrer l'ensemble des autorités organisatrices des transports qui interviennent sur le territoire, d'autre part, pour le train, il doit prendre en compte et mettre en oeuvre la complémentarité des services ferroviaires qui se décomposent en trois niveaux :

- la grande vitesse pour relier les capitales régionales entre elles et rendre possible une ouverture sur l'Europe ;

- les lignes d'équilibre du territoire ;

- les lignes TER.

b) Réduire le nombre d'interlocuteurs des régions : vers un renforcement des pouvoir des directeurs régionaux SNCF et RFF

Plusieurs représentants des collectivités territoriales rencontrés ont souligné la complexité du dialogue, du fait de l'augmentation d'interlocuteurs du secteur ferroviaire . En effet, alors qu'au début des années 1990, ils avaient en face d'eux la seule entreprise SNCF, ils doivent aussi dialoguer aujourd'hui avec :

- RFF, créée en 1997, en tant que propriétaire de l'infrastructure ;

- Gares & Connexions, nouvelle branche du groupe SNCF depuis 2009.

Plusieurs intervenants ont noté que, paradoxalement, les pouvoirs du directeur régional SNCF semblaient diminuer, notamment du fait de la création de nouvelles branches au sein du groupe SNCF.

En outre, les collectivités territoriales ont souvent l'impression qu'au final, la décision est prise à Paris. Dès lors, la tentation est grande d'introduire au sein des négociations un acteur supplémentaire : le siège central.

Tant la SNCF que RFF cherchent à remédier à ce problème . Ainsi, la SNCF a entrepris une démarche de régionalisation. Quant à RFF, le directeur régional dispose désormais d'une délégation de pouvoir du président-directeur général. Il peut ainsi prendre tout acte lié à une acquisition, une aliénation ou un échange de biens immobiliers dont la valeur vénale ne dépasse pas un certain montant. De même, en matière de marchés publics, il peut prendre tout acte lié à la préparation, à la passation ou à l'exécution de marchés publics jusqu'à un certain montant.

L'objectivité nous conduit à penser que cette déconcentration nécessaire a besoin d'accompagnement :

- le dialogue SNCF-Région gagnerait en efficacité si l'Association des régions de France se dotait des moyens nécessaires en termes d'expertise et de conseils pour, par exemple, arrêter des clauses générales acceptées par les parties prenantes ;

- les relations entre la SNCF et les communautés d'agglomération gagneraient en efficacité si les dispositifs de coordination entre les collectivités territoriales étaient plus forts. Une étude est actuellement en cours afin d'étudier la mise à disposition du réseau ferroviaire. Toutefois, il faut compter avec la capture des structures au profit du périurbain. Dans certaines régions, la SNCF fait le « go between » sur la question de la coordination pour plusieurs raisons :

- la coopération entre collectivités n'est pas efficace. Ainsi, la mise en place d'une billetterie unique comme Korrigo se heurte à la question de la répartition des tarifs. Ces négociations et le suivi de ces dossiers par la SNCF nécessitent que le directeur régional demeure un certain temps ne place. Le taux de rotation, autrefois de trois ans, a été porté à cinq ans ;

- la deuxième grande difficulté est le foncier, car il y a plusieurs propriétaires sur un même terrain. La réforme ferroviaire prévoyant la mise en place du GIU devrait faciliter les choses sur le champ de la responsabilité opérationnelle. Aujourd'hui, un rapprochement avec le nouveau président de RFF a lieu en matière de foncier ;

- l'accès au réseau TGV pour des raisons économiques et d'attractivité des territoires. L'arrivée du TGV entraîne de grands changements : modifications des dessertes et des fréquences, du statut de la gare. Les élus doivent se préparer à l'arrivée du TGV. Cela ne consiste pas seulement à une restructuration ferroviaire, mais la ville doit avoir une offre suffisante pour éviter l'aspiration vers Paris.


* 72 Des présidents de conseil régional et la SNCF, notamment dans le cadre des auditions menées dans le cadre du présent rapport.

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