2. Les submersions marines

Les submersions marines sont des inondations temporaires de la zone côtière par les eaux d'origine marine. Leur origine est liée à une élévation temporaire du niveau de la mer et à son état d'agitation. Étant données les conséquences prévisibles de la hausse du niveau des mers liée au réchauffement climatique, il est nécessaire de prendre conscience de la montée en charge de cette nouvelle réalité de la politique d'aménagement du littoral.

À terme, la prévention des risques naturels liés aux submersions marines pourrait légitimement figurer au rang des objectifs énoncés au 2° de l'article L. 321-1 du code de l'environnement , au même titre que la protection des équilibres biologiques et écologiques, la lutte contre l'érosion, ou la préservation des sites et paysages et du patrimoine.

Un dispositif contraignant pourrait également être mis en oeuvre :

- en intégrant le risque de submersion marine dans la détermination de la capacité d'accueil ;

- en imposant une obligation pour les SCoT et les PLU d'interdire toute urbanisation nouvelle dans les espaces soumis à un risque d'inondation, sous réserve d'exceptions pour les activités économiques et services publics exigeant la proximité immédiate de l'eau.

Sans nier l'impératif de protection et de sécurité des populations, vos rapporteurs souhaitent éviter toute interprétation maximaliste du principe de précaution . Dans le contexte actuel, des dispositions trop contraignantes seraient en effet contreproductives :

- une nouvelle réglementation ajouterait de la complexité, alors qu'il suffirait que toutes les prescriptions des plans de prévention des risques littoraux (PPRL) soient effectivement appliquées ;

- l'ajout d'un objectif de prévention des risques d'inondation ne manquerait pas d'ouvrir une brèche supplémentaire de contentieux qui pèserait encore davantage sur l'urbanisme littoral.

Ainsi, il serait préférable de privilégier une approche progressive et volontaire, en proposant d'abord aux communes qui le souhaitent, de se donner les moyens d'une démarche de prévention efficace.

a) L'extension de la bande des 100 mètres

La loi Littoral n'aborde la question des submersions marines que de manière indirecte, à travers le prisme de l'érosion des côtes. L'article L. 146-4-III prévoit en effet que « le PLU peut étendre la largeur de la bande littorale au-delà de 100 mètres, lorsque des motifs liés à la sensibilité des milieux ou à l'érosion des côtes le justifient ».

Cette possibilité est certes inexploitée. Néanmoins, pour ne pas fermer la porte à une collectivité qui souhaiterait prendre des mesures spécifiques de prévention, vos rapporteurs préconisent d' ajouter un troisième motif d'extension de la bande littorale, pour les risques naturels liés aux submersions marines .

b) L'opposabilité des modèles numériques de terrain

Les cartes de submersibilité servant de référence pour l'élaboration des zonages sont parfois insatisfaisantes sur le plan méthodologique, de l'aveu-même de certaines DDTM qui les utilisent. Elles s'appuient sur des données peu précises et des règles arbitraires du type « maximum des marées centennales + 50 cm de protection supplémentaire » au fondement scientifique discutable. Elles ne distinguent pas non plus les côtes rocheuses des côtes sablonneuses, alors que le sable ralentit nettement la vitesse de pénétration des eaux. Ces cartes conduisent ainsi à prendre des précautions excessives : en appliquant de telles règles aux Pays-Bas, une grande partie de leur territoire ne pourrait plus être urbanisée.

Par conséquent, vos rapporteurs recommandent de généraliser progressivement l'utilisation de modèles numériques de terrain . Combinées à des études dynamiques prenant en compte la profondeur de pénétration des eaux, les cartes altimétriques établies par laser aéroporté (LIDAR) offrent une précision scientifique non contestable. Par rapport aux règles administratives actuelles, leur utilisation pourrait conduire à desserrer certaines contraintes d'urbanisme liées à la prévention du risque de submersion, dont le cumul avec la loi Littoral est régulièrement dénoncé par les élus locaux, en particulier dans le département de la Manche.

LE PROGRAMME LITTO3D

Développé conjointement par l'Institut géographique national (IGN) et le Service hydrographique et océanographique de la marine (SHOM), ce programme vise à produire un référentiel altimétrique continu terre-mer sur la frange littorale.

La mesure des levés est effectuée à l'aide d'un laser aéroporté , topographique pour la partie terrestre et bathymétrique pour la partie maritime, et éventuellement complétée par un sondeur multifaisceaux embarqué à bord de navires pour les zones inaccessibles au laser bathymétrique (eaux trop profondes ou turbides).

Le programme Litto3D est déployé sur les territoires pour lesquels un financement amont peut être mis en place. Les partenariats financiers font généralement intervenir l'État, les collectivités territoriales et des fonds européens (FEDER en particulier).

Dans le cadre du programme Litto3D, la région Languedoc-Roussillon a engagé une politique volontariste de couverture en cartes LIDAR : leur précision est actuellement affinée par un troisième passage de laser aéroporté. Grâce au travail du Centre de recherches et d'études côtières (CREC) de l'université de Caen, le département de la Manche dispose également d'outils numériques permettant de mieux appréhender la gestion du risque de submersion marine . Il serait opportun de faire fructifier ces initiatives en permettant aux communes de les utiliser pour définir leurs zonages au plus près des réalités du terrain .

A fortiori, dans le cadre de la politique d' ouverture des données publiques , la base Litto3D est accessible au public depuis le 1 er février 2013 sur le portail data.shom.fr. Ces informations risquent d'alimenter le contentieux si les administrations n'en tiennent pas compte.

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