EXAMEN PAR LA COMMISSION

La commission des affaires européennes s'est réunie le mardi 21 janvier 2014 pour l'examen du présent rapport. À l'issue de la présentation faite par M. Simon Sutour, le débat suivant s'est engagé :

M. André Gattolin . - L'ampleur du phénomène m'étonne.

M. Simon Sutour , président . - Bernadette Bourzai a dénombré 163 actes délégués ou d'exécution pour le règlement relatif à la santé animale. J'ai fait le même constat au sujet du texte sur la protection des données personnelles. La CNIL s'en était émue. Tous les domaines sont touchés, de plus en plus.

M. André Gattolin . - Avec les difficultés rencontrées lors de la transposition des directives, il s'agit là d'un nouveau détournement de la volonté du législateur européen.

M. Simon Sutour , président . - Ce phénomène n'a pas été anticipé. Il faut renforcer le contrôle politique parlementaire. Un nouveau traité n'est pas à l'ordre du jour, mais nous devons surveiller la Commission ; elle doit sentir que les Parlement sont vigilants.

M. André Gattolin . - Les règlements européens sont d'application immédiate. Avec cette pratique des actes délégués, que devient l'influence déjà amoindrie, du législateur national, et des Parlements nationaux en particulier, sur la Commission ?

Mme Bernadette Bourzai . - MM. Bizet et Yung ont fait le même constat que moi sur la santé végétale. Cet abus des actes délégués devient une nouvelle tendance. Il faut y mettre un coup d'arrêt. La Commission doit respecter le contrôle de subsidiarité. Cet avis politique est justifié.

M. Yannick Botrel . - Votre description est éloquente. Je suis stupéfait de cette situation. Il y a une dérive de la Commission, à tel point que des actes délégués contredisent les actes de base. Nous devons agir vigoureusement et renforcer notre vigilance. Mais si comparaison n'est pas raison, l'écart constaté n'est-il pas comparable à l'écart entre la loi et le décret d'application dans notre droit ?

M. Simon Sutour , président . - En effet. Quand le Gouvernement n'oublie pas de publier le décret d'application, auquel cas la loi est inapplicable...

La commission adopte à l'unanimité l'avis politique proposé dans le texte suivant :


Avis politique
sur le recours aux actes délégués

Vu les articles 290 et 291 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE),

Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relative à la santé animale (COM (2013) 260 final),

Vu la proposition de règlement de la Commission du 12 décembre 2013 modifiant le règlement (UE) n° 1169/2011 du Parlement européen et du Conseil concernant l'information des consommateurs sur les denrées alimentaires en ce qui concerne la définition des nanomatériaux manufacturés (C (2013) 8887 final),

Vu la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil adaptant à l'article 290 du TFUE une série d'actes juridiques prévoyant le recours à la procédure de réglementation avec contrôle (COM (2013) 451 final),

Vu la proposition de règlement du Parlement et du Conseil adaptant aux articles 290 et 291 du TFUE une série d'actes juridiques prévoyant le recours à la procédure de réglementation avec contrôle (COM (2013) 751 final),

Considère que le pouvoir délégué à la Commission européenne dans le but de compléter les actes de base adoptés par le législateur européen selon la procédure législative ordinaire est une nécessité pratique qui n'est pas remise en cause ;

Déplore le recours systématique, voire, dans certains cas, manifestement excessif, aux actes délégués qui confère un pouvoir exorbitant à la Commission européenne ;

Considère que cette utilisation doit être mieux encadrée ;

Rappelle que plusieurs assemblées parlementaires ont d'ores et déjà exprimé leurs réserves sur l'utilisation excessive des actes délégués ;

Souligne que les parlements nationaux ne peuvent exercer leur contrôle de subsidiarité sur les actes délégués ;

Observe qu'il est extrêmement difficile de réunir les majorités requises au Parlement européen et au Conseil pour « exprimer des objections » et a fortiori modifier les projets d'actes délégués ;

S'inquiète de la procédure de sélection des comités d'experts chargés d'assister la Commission dans la préparation des actes délégués ;

Souhaite que dans la sélection des membres desdits comités d'experts, la Commission revienne à la pratique des experts des États membres ;

Déplore que dans certains cas, la Commission ait choisi de s'affranchir manifestement des orientations voulues par le législateur européen et des limites posées par les délégations de compétences prévues dans le texte de base lui-même ;

Demande, en conséquence, que les règlements porteurs de la délégation soient aussi complets que possible et que les éléments essentiels soient précisés afin de réduire au minimum le recours aux actes délégués ;

Demande à la Commission européenne de ne préparer des actes délégués que dans le strict respect des délégations prévues dans l'acte de base.

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