C. LES AUTRES RAPPORTS A PRÉSENTER EN VERTU D'UNE LOI : UN ÉQUILIBRE BANCAL

En dehors des rapports dits « de l'article 67 », un très grand nombre de dispositions législatives prescrivent au Gouvernement de présenter au Parlement, soit en annexe du projet de loi de finances ou du projet de loi de financement de la sécurité sociale, soit séparément de manière ponctuelle ou périodique, différents rapports d'information et d'application 7 ( * ) .

1. Des statistiques objectivement médiocres

Or, comme votre commission l'a déjà souligné l'an dernier, des retards parfois conséquents obèrent la remise des documents attendus par le législateur, beaucoup de rapport n'étant même jamais déposés sur le bureau des assemblées.

En définitive, si on raisonne sur le stock total des lois répertoriées dans la base Apleg depuis 1980 8 ( * ) (soit 1 797 lois), 415 lois ont prévues de manière spécifique la remise d'un ou plusieurs rapports (autres que les rapports de l'article 67 ou que les rapports exigés en vertu d'une autre obligation légale générale) : or, 263 lois seulement ont reçu un ou plusieurs des rapports demandés, soit un taux global inférieur à 65 %. Cette situation n'est guère satisfaisante, d'autant qu'en dehors des questions écrites, les assemblées ne disposent guère de moyens de pression pour amener le Gouvernement à fournir en temps et en heure les informations attendues.

Sur ce point, le rapport présenté l'an dernier par la commission de la culture résumait assez bien le sentiment général « Le retard persiste concernant le dépôt des rapports pour les lois récentes comme pour les plus anciennes, les gouvernements successifs ne manifestant que peu de volonté à cet égard ».

Cette situation ancienne et dénoncée de longue date ne semble pas s'être significativement redressée durant l'année parlementaire 2012-2013, comme les commissions permanentes s'accordent, cette année encore, à le déplorer.

Réitérant ses observations de l'année dernière, la commission de la culture rappelle ainsi que « le nombre de rapports en attente de parution demeure particulièrement élevé : quarante-huit rapports depuis 2000. Sur cette même période, vingt-sept rapports sont parus ».

De même, la commission des finances, particulièrement concernée (puisqu'elle assure le suivi des lois de finances où figurent le plus grand nombre de demandes de rapports), regrette que « seuls 77 des 197 rapports attendus pour les lois promulguées depuis 2001 ont été effectivement remis au Parlement, soit moins de la moitié (44,5 % lorsque l'on tient compte du fait que certaines dispositions législatives prévoyant la remise de rapports ont été abrogées, 39 % seulement si l'on ne considère pas cette réalité) ».

Surtout, cette commission souligne que certains rapports emblématiques font l'objet d'une remise tardive ou restent toujours en attente, citant l'exemple de l' annexe budgétaire sur le réseau conventionnel de la France en matière d'échange de renseignements ou de l'annexe budgétaire sur les contrôles effectués par l'administration fiscale sur les filiales détenues à l'étranger par des entreprises françaises : « l'article 136 de la loi du 29 décembre 2010 de finances pour 2011 dispose que le « nombre de contrôles annuels effectués par l'administration fiscale sur la base de l'article 209 B du code général des impôts ainsi que le montant des assiettes recouvrées, le nombre d'entreprises concernées et la liste des pays à fiscalité privilégiée concernés au sens de l'article 238 A du même code sont publiés, chaque année, en annexe de la loi de finances ». Ces informations n'ont malheureusement jamais été publiées. Il s'agit de données chiffrées concernant les contrôles effectués par l'administration fiscale sur les filiales détenues à l'étranger par des entreprises françaises ».

2. Le dilemme du trop et du trop peu...

Reste qu'à côté d'un discours assez convenu sur les retards endémiques dans la production des rapports demandés par le Parlement ou sur les rapports attendus mais jamais présentés, se dégage l'impression que pour beaucoup de parlementaires, le problème majeur des rapports réside plutôt dans le trop que dans le trop peu...

Ainsi, au cours de l'audition du 11 juin, notre collègue Jean-Claude Lenoir a clairement indiqué que membre de la commission des affaires économiques, il soutenait entièrement la position de son Président de commission « qui voudrait que l'on cesse de demander à tout propos un rapport au Gouvernement : c'est un détournement de l'article 40. Je sais, pour avoir appartenu à l'administration centrale, que celle-ci est inondée de demandes de rapports, qui ne seront lus par personne hormis leur auteur... ».

M. Marc Laménie s'est fait porteur du même message, rappelant en outre qu'en plus des rapports parlementaires, « d'autres instances en produisent : la Cour des comptes, les chambres régionales des comptes, le Conseil économique, social et environnemental, etc... Beaucoup d'énergie est ainsi gaspillée dans un travail de l'ombre souvent laissé sans suite. Nos concitoyens sont dépassés : venons-en à la simplification ».

Force est de reconnaître que les assemblées parlementaires se voient remettre chaque année un nombre considérable de rapports de toute sorte, dont il est très difficile -pour ne pas dire impossible- de prendre intégralement connaissance .

Ainsi, d'après les statistiques de la direction de la Séance, au cours de l'année parlementaire 2012-2013, 77 rapports ont été déposés sur le bureau du Sénat, sans compter bien entendu les rapports émanant de l'Assemblée nationale ou du Sénat et l'importante documentation grise transmise par différents autres canaux (commissions permanentes, etc...).

Le tableau estimatif ci-après, établi par la direction de la Séance, donne une idée de ce foisonnement :

Session

Rapports périodiques

Rapports uniques

Rapports de l'article 67

Total

2008-2009

37

14

22

73

2009-2010

49

23

24

96

2010-2011

39

29

22

100

2011-2012

46

26

44

116

2012-2013

38

26

13

77

TOTAL

209

118

125

452

Nombre et répartition des rapports au Parlement
déposés par le Gouvernement au cours des cinq dernières sessions

Du coup, il semblerait peut-être préférable que le Parlement demande moins de rapports au Gouvernement, mais qu'il veille à en assurer une meilleure exploitation, notamment en optimisant les actuels circuits de distribution afin qu'un rapport donné parvienne plus sûrement aux sénateurs les mieux à même d'en faire usage.


* 7 La liste des rapports, publiée en annexe du Recueil des textes relatifs aux Pouvoirs publics publiés conjointement par les deux assemblées, donne une idée du nombre et de la diversité des documents demandés

* 8 Une statistique annuelle n'aurait pas en soi grande signification, car hormis les rapports dits « de l'article 67 », les délais impartis au Gouvernement pour présenter ses autres rapports sont assez variables et parfois longs (ne serait-ce que pour pouvoir apprécier la mise en oeuvre d'un dispositif sur une durée suffisante).

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