E. UNE EUROPE EN MAL D'ATTRACTIVITÉ, PERÇUE COMME UNE PUISSANCE UNIQUEMENT COMMERCIALE

1. En dépit d'instances de dialogue UE-ASEAN...

La Commission européenne a été le premier acteur international à établir des relations informelles avec l'ASEAN dès 1972. Elle est devenue un partenaire de dialogue en 1977. UE et ASEAN sont liées par un accord de coopération depuis 1980, une déclaration pour un partenariat renforcé en 2007, et un plan d'action renouvelé en avril 2012.

Une réunion dite « de dialogue » se réunit deux fois par an au niveau des ministres des affaires étrangères.

A cela s'ajoute l'initiative au départ franco-singapourienne de Sommet Europe-Asie (ASEM), dont le premier s'est réuni à Bangkok en 1996, avec pour objet d'approfondir le dialogue économique, politique et culturel.

Un organe permanent a en outre été créé, il y a quinze ans : la Fondation Asie-Europe (ASEF), dont le siège est à Singapour, pour développer des échanges culturels et humains entre les sociétés civiles des Pays-membres d'Europe et d'Asie.

Les outils de dialogue existent donc sur le plan institutionnel. Pour autant, vos rapporteurs ont pu ressentir, lors de leur mission en Asie du Sud-est, un certain manque d'attractivité de l'Europe, perçue comme affaiblie par la gestion de ses difficultés économiques et monétaires.

2. ...L'UE manque de visibilité, d'attractivité, et parait cantonnée au strict registre commercial
a) Une vision de l'Europe empreinte de doutes

C'est un fait : nos interlocuteurs asiatiques, ivres de leur croissance économique pharaonique, de leur jeunesse et de leur dynamisme, portent parfois sur l'Europe un regard dubitatif. L'Union est parfois perçue comme une puissance sur le déclin, empêtrée dans son chômage de masse et la gestion de ses crises budgétaire et économique.

C'est un fait que l'Europe a perdu du terrain en Asie du Sud-est : du fait du dynamisme des partenaires asiatiques, l'Union européenne qui était le premier partenaire commercial est désormais reléguée à la troisième place et est susceptible de descendre encore dans ce classement.

La proximité historique et culturelle s'efface peu à peu avec les nouvelles générations.

b) Un tropisme essentiellement commercial

L'Union européenne est avant tout identifiée comme une puissance commerciale.

C'est un fait : aujourd'hui les relations entre l'UE et l'ASEAN demeurent avant tout centrées sur l'économie .

L'UE représente aujourd'hui le troisième partenaire commercial de l'ASEAN (derrière la Chine et le Japon) et l'ASEAN est le quatrième partenaire commercial de l'UE. Si, en valeur, les échanges sont en progression (les échanges ont atteint 181 milliards d'euros en 2012), la part de l'UE dans les échanges avec l'ASEAN est toutefois en diminution ces dernières années, au profit de la Chine. L'UE reste cependant, avec 25 % des investissements directs, le premier investisseur étranger dans la région.

L'Union européenne en tant que telle est perçue comme politiquement absente en Asie du Sud Est. Ainsi, malgré la création en 1996 de l'ASEM, format de dialogue entre l'UE et l'Asie du Sud Est, l'Europe n'apparaît pas comme un acteur identifié en matière de sécurité, bien qu'elle ait signé en juillet 2012 le traité d'amitié et de coopération en Asie du Sud Est (TAC).

L'Union européenne, si elle est considérée comme « un partenaire de dialogue » dans l'ASEAN Regional Forum (ARF), n'est pas encore véritablement perçue comme un acteur stratégique important dans cette région.

3. Des États membres de l'UE en concurrence directe sur le plan économique

En outre, les États-Membres sont concurrents dans cette région (comme ailleurs) sur le plan économique.

L'exemple de l'Allemagne revient le plus souvent : lors de leur mission au Vietnam, vos rapporteurs ont ainsi pu constater l'étendue du soutien des pouvoirs publics allemands à la dynamisation du flux d'affaires avec ce pays. Ainsi par exemple, en face du Consulat général de France à Ho Chi Minh ville (où existe certes une antenne d'Ubifrance, mais où il n'y a plus de services économiques, ceux-ci ayant été regroupés et redimensionnés à Hanoi), une « Maison de l'Allemagne » se construit, bâtiment imposant de plusieurs étages qui devrait, selon les premières informations recueillies, rassembler tant des services de nature diplomatiques et commerciaux que des entreprises... La chancelière allemande a d'ailleurs effectué plusieurs visites dans la région (tout comme en Chine d'ailleurs), signe de la mobilisation très forte sur cet enjeu asiatique.

Il faut noter également que, d'après nos informations et dans le cadre d'une coopération remportée par appel d'offre, les Allemands sont les seuls européens à disposer, dans les locaux du secrétariat général de l'ASEAN, d'une présence physique permanente de plusieurs personnes . Les diplomates français accrédités auprès de l'ASEAN ne s'y rendent quant à eux qu'épisodiquement...

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