CONTRIBUTION DU GROUPE CRC

Lorsque cette commission d'enquête a été créée au mois de juillet 2014, notre pays n'avait pas encore subit les attentats meurtriers du 9 janvier 2015.

Nos collègues du groupe UDI-UC, à l'origine de la création de la commission, étaient alors, comme nous tous, préoccupés par la menace contre notre sécurité et nos libertés que représente l'augmentation des départs de jeunes, Français pour la plupart, qui vont combattre en Syrie ou en Irak. Nos collègues souhaitaient légitimement que les parlementaires puissent prendre toute la mesure du pernicieux malaise que traduisent ces départs, connaître précisément le fonctionnement des réseaux qui les organisent, et évaluer la pertinence et l'efficacité des moyens que se donne notre pays pour s'en défendre.

Après les attentats du mois de janvier, les enquêtes menées par les services spécialisés dans la lutte contre le terrorisme n'ont fait que confirmer l'ampleur, la profondeur et la dangerosité de ce phénomène, et par là-même l'urgence à le traiter.

Notre groupe apprécie la qualité et la rigueur du rapport de notre collègue Jean-Pierre Sueur, fruit du travail intense mené par les membres de la commission d'enquête.

Nous partageons, pour l'essentiel, les analyses de la situation qui sont présentées.

Par exemple, le constat qui est fait du retard pris par les autorités responsables à engager des actions de prévention contre l'adhésion de certains jeunes aux idées du radicalisme islamiste. Ou bien encore, les lacunes de notre dispositif de renseignement dans la lutte antiterroriste, les limites de ses capacités humaines et techniques, la coordination souvent insuffisante des services entre eux et la nécessité d'obtenir une meilleure coopération avec les services spécialisés de l'Union européenne ainsi qu'avec ceux d'acteurs régionaux des conflits au Moyen-Orient, comme la Turquie.

Par ailleurs, notre rapporteur a souligné, à juste titre, l'efficacité de notre système judiciaire antiterroriste, qui doit rester respectueux des droits et des libertés, publiques et individuelles.

Il a également attiré l'attention sur les difficultés auxquelles se heurte le renseignement pénitentiaire ou l'accompagnement social en détention, particulièrement en ce qui concerne les moyens qui leurs sont attribués. Cet accompagnement social mériterait d'ailleurs d'être différencié selon qu'il s'agit d'hommes ou de femmes.

Enfin, la complexité du contrôle de l'utilisation de l'internet par les réseaux djihadistes et les obstacles auxquels se heurte la lutte contre le financement du terrorisme sont aussi analysés avec précision.

Avec une centaine de recommandations qui concernent tous ces domaines, le rapport de notre commission d'enquête formule, de façon très détaillée, des propositions de nature à améliorer l'efficacité du combat que notre société doit mener contre le terrorisme.

Les mesures proposées concernant la prévention de l'attirance d'une frange de la jeunesse pour l'islamisme radical, ou la lutte contre la diffusion de l'idéologie véhiculée par ces réseaux, mériteraient d'être rapidement mise en oeuvre par les pouvoirs publics. Il faudrait également approfondir la réflexion sur la mise en place de structures de « déradicalisation » pluridisciplinaires, mêlant approche sociale, psychologie et religion.

A cet égard, nous aurions souhaité une présentation plus claire et plus précise de la conception républicaine de la laïcité, telle qu'il est proposé de la replacer au coeur de l'action de l'État. En effet, la place et le rôle des religions dans notre société, quand elles sont instrumentalisées et dévoyées par les organisations que nous voulons combattre, sont des questions centrales pour comprendre le phénomène auquel nous sommes confrontés.

Nous regrettons ainsi que la réorganisation de la représentation du culte musulman dans notre pays n'ait pas fait l'objet de propositions, car sa hiérarchisation et sa structuration sont inexistante. Il est en effet nécessaire que les responsables du culte musulman prennent leur part dans ce combat afin d'éviter les amalgames entre l'islam et une forme de terrorisme.

Concernant l'amélioration de l'organisation et du cadre de la lutte antiterroriste, de nombreuses mesures, qui sont souvent de bon sens ou qui proposent des augmentations d'effectifs et de moyens, pourraient être directement, et rapidement, appliquées sans nécessiter de modification législative.

En revanche, nous sommes plus réservés sur les modalités d'un contrôle renforcé des frontières de l'Union européenne et sur le contenu des accords de réadmission signés avec des pays hors UE.

Pour ce qui est de certaines propositions concernant l'adaptation de la réponse pénale, nous aurons notamment l'occasion de préciser nos positions dans le cadre de la prochaine discussion du projet de loi sur le renseignement. En particulier, par rapport à l'instauration d'un régime juridique de « saisie des données informatiques » ainsi que sur l'autorisation des techniques de captation des données à distance.

Enfin, de nombreuses mesures préconisées dans le rapport de notre commission d'enquête supposerait, pour être réellement appliquées, que soient engagés d'importants moyens budgétaires et financiers. Dans le cadre de la politique dogmatique de réduction de la dépense publique sur laquelle le gouvernement actuel est arc-bouté, nous craignons malheureusement que toutes celles-ci restent lettre-morte.

Tels sont les quelques éléments supplémentaires de réflexion que notre groupe souhaitait évoquer à l'occasion de l'adoption du rapport sur la commission d'enquête sur l'organisation et les moyens de la lutte contre les réseaux djihadistes en France et en Europe dont nous avons apprécié la rigueur et l'équilibre.

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