III. LE RÔLE PRÉGNANT DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES

La Cour des comptes a relevé dans un rapport récent que « s'il est difficile de reconstituer l'ensemble des coûts de la politique de l'asile », il est possible de constater que « les crédits proviennent du budget général de l'État, mais également de taxes affectées, des collectivités territoriales et de fonds européens » 9 ( * ) .

Les collectivités sont mises à contribution de façons très diverses, comme le montrent les exemples suivants :

- en Alsace, le centre communal d'action sociale (CCAS) de la ville de Strasbourg, qui gère le 115 et l'hébergement d'urgence en hôtel dans le Bas-Rhin, consent des avances de trésorerie importantes ;

- en région Rhône-Alpes, le conseil régional fait bénéficier les demandeurs d'asile de la presque gratuité des transports régionaux ;

- à Paris, le budget de la ville supporte plus de 38 millions d'euros au titre de l'accueil des étrangers alors même que ces dépenses incombent normalement à l'État ; le Samu social de Paris participe à l'hébergement des familles demandeuses d'asile 10 ( * ) ;

- des collectivités territoriales subventionnent également certaines plateformes d'accueil, participant ainsi directement au financement des dispositifs d'accueil des demandeurs d'asile.

L'actualité la plus récente a encore accentué cette implication. À titre d'illustration :

- la commune du Vigan dans les Cévennes a voté dès le mois de juin la mise à disposition de trois logements communaux pour des familles réfugiées ;

- la commune de Pouilly-en-Auxois, en Côte-d'Or, accueille une soixantaine de demandeurs d'asile dans son ancienne gendarmerie depuis le mois de février ;

- la ville de Saint-Denis met à disposition les locaux vacants d'une ancienne gendarmerie et des centres de vacances municipaux ;

- le département de la Gironde a mis en ligne une plateforme collaborative « solidarités-réfugiés » permettant aux différents acteurs (associations, entreprises, citoyens, mais aussi collectivités territoriales) de coordonner leurs actions de solidarité autour de l'arrivée de migrants. Développée avec des outils libres, cette plateforme pourra être reprise par d'autres collectivités.

Ainsi, les collectivités territoriales agissent selon des modalités très diverses, pour ne pas dire hétérogènes. Jusqu'à présent, selon le témoignage des participants à la table ronde du 1 er octobre, le pilotage susceptible de rationaliser ce foisonnement a été pour le moins lacunaire : on en trouvera des exemples éclairants dans le compte rendu qui suit. Relevons cependant, d'un autre côté, qu'un centralisme aveugle risque de se substituer bientôt à cette sympathique variété : l'article L 744-2 du code des étrangers 11 ( * ) dispose désormais que « le schéma national d'accueil des demandeurs d'asile », qui fixe la répartition des places d'hébergement destinées aux demandeurs d'asile sur le territoire national est « arrêté par le ministre chargé de l'asile, après avis des ministres chargés du logement et des affaires sociales ». Il est seulement transmis au Parlement pour information. Les élus participant à la table ronde du 1 er octobre ont dénoncé les effets pervers prévisibles de cette absence d'association des collectivités aux décisions applicables sur leur territoire.

D'où le mot d'ordre proposé en matière d'accueil par les mêmes élus : pilotage national et coproduction territoriale.


* 9 Rapport de la Cour des comptes, Relevé d'informations provisoires - L'accueil et l'hébergement des demandeurs d'asile , février 2015.

* 10 L'Ile-de-France représentait en 2014 près de 38 % du flux annuel des demandeurs d'asile en France métropolitaine, Paris enregistrant 37,5 % de la demande régionale.

* 11 Dans sa rédaction issue de la loi du 29 juillet 2015.

Page mise à jour le

Partager cette page