COMPTE RENDU DE LA TABLE RONDE

M. Jean-Marie Bockel, président

Mesdames et Messieurs,

Lorsque nous avons décidé d'organiser cette table ronde sénatoriale, nous l'avons centrée sur la problématique de l'accueil des réfugiés. Nombre d'entre nous ont été maires et connaissent cette question. Ils savent que l'accueil constitue une compétence de fait, même si elle n'est pas de droit. Avec cet afflux supplémentaire de migrants, qui s'ajoute à la problématique ancienne des demandeurs d'asile, dans un contexte d'émigration économique intense, la question de l'accueil est devenue un sujet complexe. S'y ajoute un contexte difficile, tant du point de vue économique que sur le plan des capacités de la France en termes de logement. Nous aborderons ce sujet dans l'esprit républicain, respectueux des lois, qui caractérise notre maison.

Nous savions, en décidant d'organiser cette table ronde, que le sujet serait toujours d'actualité au moment où elle se tiendrait. Or encore aujourd'hui, de nombreuses Unes de journaux affichent les peurs de nos concitoyens, qui sont partagés entre la solidarité et la crainte. Ce contexte forme la toile de fond de nos travaux et nous concerne, comme élus du peuple agissant au nom de l'État et des citoyens, lesquels sont, en toute légitimité, attentifs aux décisions que nous prenons. Tel est l'état d'esprit de nos échanges dans le cadre de cette table ronde.

Les problématiques en jeu sont donc les suivantes : l'organisation de l'accueil et les conséquences de ces arrivées massives dans des espaces où des communautés et des solidarités sont déjà présentes.

Le Sénat, dans son rôle de chambre des territoires, a pleinement vocation à accueillir le débat sur ces sujets et notre délégation agit dans le cadre de ses missions en organisant aujourd'hui cette table ronde.

Je salue les intervenants présents et je leur donne la parole.

I. INTERVENTIONS DES REPRÉSENTANTS DES ASSOCIATIONS D'ÉLUS LOCAUX

M. Jean-Jacques Barbaux, représentant de l'Assemblée des départements de France (ADF), président du conseil départemental de la Seine-et-Marne

La problématique qui nous rassemble aujourd'hui s'articule autour de trois entrées : celle du nombre, celle du droit et celle des moyens disponibles.

L'Assemblée des départements de France est naturellement vigilante à l'émergence de la problématique des migrants sur le territoire national. L'accueil et les flux migratoires ne sont pas nouveaux ; sont en revanche inédits le nombre de migrants, les délais, les moyens et la coordination des services publics face à ce déplacement massif de populations de réfugiés.

Les collectivités territoriales doivent savoir ce que l'État attend d'elles pour faire face à l'engagement de la République française d'accueillir les populations de migrants sur son territoire. Or à ce jour, rien ne semble formellement défini.

La France s'est engagée le 7 septembre 2015, en réponse à la demande de la Commission européenne, à accueillir 24 000 réfugiés en deux ans. La répartition a été décidée, semble-t-il, en fonction du nombre d'habitants de chaque pays. En France donc, 24 031 réfugiés devraient s'ajouter aux 9 100 personnes que l'État s'était déjà engagé à accueillir en juillet 2015. À ce nombre s'ajoutent également les 14 500 étrangers qui obtiennent le droit d'asile chaque année sur le territoire de la République. Je tiens à souligner que pendant deux ans, la France accordera deux fois plus de statuts administratifs que d'ordinaire à des ressortissants étrangers.

Face à ce défi, nous devons faire le constat de moyens insuffisants. Le Gouvernement compte sur l'engagement des maires pour accueillir ces 24 000 réfugiés. Or nos collègues ont estimé à 100 millions d'euros le budget nécessaire pour mener cette tâche à bien. L'État propose pour sa part 1 000 euros par réfugié pour compenser les dépenses communales d'hébergement, de prise en charge, d'accès aux soins et de scolarisation, et certaines régions ont doublé l'abondement de l'État. Il m'appartient néanmoins de souligner ce que sera le rôle, non pas volontaire, mais de plein droit, des départements.

Une fois le statut de réfugié obtenu, les personnes concernées bénéficient d'un récépissé de reconnaissance administrative. À cet instant, elles quittent les dispositifs d'accompagnement et de prestations médicales et sociales de l'État, et bénéficient des droits de travailler, de percevoir des prestations familiales et de bénéficier du RSA. Au regard de la situation économique que nous traversons tous, au regard des secteurs géographiques vers lesquels leur accueil à long terme est pressenti, qui sont des zones à faible tension de logement et donc à faible niveau d'emploi, il n'est pas à démontrer que nombre de réfugiés solliciteront le RSA. Ainsi, un ancrage de 200 réfugiés en Seine-et-Marne représente, sur 12 mois, 1 250 000 euros supplémentaires à trouver dans le budget de la collectivité. À cette dépense s'ajouteront les interventions des services sociaux et médico-sociaux, dont chacun mesure à ce jour l'extrême sollicitation dans le seul cadre du droit commun.

Il y a lieu de s'interroger pour les départements sur la mécanique d'accueil des primo-arrivants. En effet, le statut administratif de réfugié peut être attribué dans des délais raccourcis, avant que la destination des personnes concernées ne soit connue. Dans ce cas, c'est le département de l'« accueil groupé » qui doit servir le RSA (Revenu de Solidarité Active) aux réfugiés. Les départements doivent par conséquent être associés aux services de l'État dans le travail de régulation des réfugiés : régulation des groupes vers des destinations extérieures, régulation des personnes pour satisfaire aux candidatures d'accueil intra-départementales.

Se pose par ailleurs, comme pour le droit commun, la question de la compensation de ces dépenses d'allocations individuelles de solidarité.

Concernant le positionnement institutionnel des départements, je remarque que la mention de ces derniers dans la gestion de l'accueil des migrants en Ile-de-France comme en province, est ténue, voire invisible. C'est pourtant sur eux que pèsera rapidement et durablement la majeure partie des dépenses publiques liées à l'accueil de ces populations. Un travail de communication et d'association entre l'État et les départements doit rapidement être engagé. À l'inverse, la démarche qui consiste pour l'État à ouvrir des sites d'accueil sans aucune consultation des élus territoriaux ne doit pas être modélisée.

Se pose constamment, en filigrane, la question de l'acceptation par les populations de l'effort collectif à destination des demandeurs d'asile.

Or l'aide annoncée de 1 000 euros de l'État par individu et 1 000 euros de la région se situe très en-deçà des estimations établies par les communes et les départements - le RSA représentant à lui seul un budget de 150 millions d'euros. Par ailleurs, le plan de finance a confirmé le passage de 25 % à 50 % de la CVAE (cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises), laquelle sera fléchée vers les régions au détriment des départements. À titre d'exemple, l'incidence de cette mesure se monte, pour la Seine-et-Marne, à 80 millions d'euros.

M. Vincent Morette, représentant de l'Association des Petites Villes de France (APVF), maire de Montlouis-sur-Loire

La position générale de l'APVF consiste à rappeler que le volontariat des collectivités doit constituer le pilier de leur participation à l'accueil des réfugiés et que les mesures annoncées par le Gouvernement pour les soutenir dans la perspective d'un accueil doivent être pérennisées. L'APVF insiste sur le fait que cette participation ne peut avoir pour conséquence la naissance d'une nouvelle compétence locale pour les collectivités territoriales.

L'APVF souhaite tout d'abord exprimer son attachement aux valeurs de la République et de la laïcité et sa solidarité avec les réfugiés. Elle rappelle à ce titre que le tri des réfugiés, notamment selon des critères de confession, n'est pas acceptable.

Cette solidarité se retrouve dans l'expression spontanée de nombreux maires de petites villes, qui ont émis le souhait de s'engager dans l'organisation de l'accueil des réfugiés irakiens, syriens et érythréens. Un questionnaire de l'APVF, lancé avant la réunion avec M. le ministre de l'Intérieur, a recueilli 70 réponses positives de petites villes souhaitant accueillir des réfugiés : une famille jusqu'à 25 personnes. De nombreux maires de l'Association assistaient également à la réunion du 12 septembre 2015.

L'APVF rappelle cependant que les collectivités territoriales ne peuvent résoudre seules ce défi européen et international. L'État demeure le seul acteur public doté des moyens financiers et de la vision globale permettant d'organiser décemment et de façon équilibrée sur le territoire, l'accueil des réfugiés.

L'APVF écarte donc la possibilité que la participation des collectivités territoriales ait pour conséquence la constitution d'une compétence locale dans ce domaine. Il importe de tenir compte en la matière :

- des capacités d'accueil des collectivités ;

- de leur situation économique, sociale et financière ;

- des efforts déjà engagés.

Nombre d'entre elles travaillent en effet par exemple depuis plusieurs années avec les structures gestionnaires des centres d'accueil des demandeurs d'asile (CADA) installés sur leur territoire.

L'APVF veillera particulièrement à ce que la mise en oeuvre du schéma national d'accueil des demandeurs d'asile, prévu par la loi sur la Réforme du droit d'asile du 29 juillet 2015, s'effectue dans le dialogue. L'Association salue les efforts déjà consentis par l'État. Cependant, elle souhaite que ces moyens soient pérennisés le temps nécessaire à la résolution de cette crise. Il en va de même pour les moyens annoncés à destination des personnes les plus précaires, notamment pour l'hébergement d'urgence des personnes sans abri.

Je souhaite également évoquer l'expérience de Montlouis-sur-Loire, commune péri-urbaine de 11 500 habitants située à 15 kilomètres de Tours et à 12 kilomètres d'Amboise, sur les bords de la Loire. Cette ville développe depuis plusieurs années la qualité du « bien vivre et agir ensemble », qui repose sur :

- des aménagements urbains favorisant la mixité sociale et la protection de l'environnement ;

- un fort soutien au lien associatif et intergénérationnel ;

- une écoute et des services publics de proximité ;

- le développement d'une diversité culturelle et sportive.

Nos deux jumelages, avec l'Allemagne et l'Italie, confortent notre attachement humaniste aux échanges avec les pays d'Europe.

La solidarité est intrinsèque aux valeurs politiques soutenues par la majorité, et lors des voeux à la population, nous avions placé l'année 2015 sous le signe de la fraternité. Ainsi, devant le drame qui se joue aux portes de l'Europe et au sein même de l'Union, agir pour l'accueil des réfugiés est devenu comme une évidence. Au début du mois de septembre, des élus tourangeaux ont pris une position de principe commune par le biais de l'UDESR (Union Départementale des Élus Socialistes et Républicains). Cet accord, formalisé par les maires lors d'une conférence le 8 septembre 2015 à Tours, rappelle leur volonté d'agir dans le cadre élaboré par le Gouvernement et sous l'égide de l'État.

La ville de Montlouis-sur-Loire, fortement attachée aux valeurs républicaines, a, après avoir recensé ses possibilités de logement, identifié trois possibilités de logement pour des familles, sur une durée de moyen ou long terme. Cette décision importante a été débattue lors du Conseil municipal du 14 septembre 2015 ; après un long débat, la mise à disposition de ces logements a été adoptée à l'unanimité.

Suite à la réunion ministérielle du 12 septembre 2015 et à la réunion de cadrage du préfet d'Indre et Loire le 18 septembre, un groupe de travail a été mis en place dans la ville de Montlouis-sur-Loire. Il réunit notamment les bailleurs sociaux, les services municipaux concernés (comme le CCAS), les relais associatifs et institutionnels, ainsi que la Maison des solidarités, qui accueille les Restos du Coeur, le Secours populaire et la Banque alimentaire. Toutes les problématiques pratiques ont été soulevées pour un accueil digne sur le moyen et long terme : le logement, la santé, la barrière de la langue, l'habillement, le mobilier, les produits de première nécessité, les déplacements, la scolarisation des enfants. Les propositions spontanées des citoyens sont également centralisées par les services municipaux, et un coordinateur local suit l'ensemble du dossier avec les services de l'État. Dans l'attente de la réunion de coordination départementale, nous savons, par voie de presse uniquement, qu'une trentaine de réfugiés seraient potentiellement accueillis en Indre-et-Loire.

La ville de Montlouis, attachée à la justice sociale et à la laïcité, en accord avec l'APVF, souhaite concrétiser cet accueil dans les meilleures conditions, sans se substituer à l'État, qui doit garder la maîtrise de cette mission régalienne pour cette politique volontariste d'intégration.

M. Emmanuel Heyraud, représentant de l'Association des Maires de Grandes Villes de France (AMGVF), directeur de la cohésion sociale et du développement urbain

L'accueil des réfugiés dans les grandes villes constitue naturellement un sujet particulièrement important pour nos adhérents. L'AMGVF a d'ailleurs tenu le 9 septembre 2015 une réunion extraordinaire sur la crise migratoire traversée par la France et plus généralement par l'Europe, réunion suivie d'une conférence de presse à l'Assemblée nationale, et qui a donné lieu à une résolution des maires de grandes villes et présidents d'intercommunalités sur les conditions de l'accueil des 24 000 migrants attendus d'ici 2017. L'AMGVF a ainsi demandé l'élaboration par l'État d'un plan d'accueil et d'accompagnement dans la durée, en cohérence avec les orientations européennes, et en étroite coordination avec les collectivités locales. L'Association demande également un effort équilibré sur les territoires, prenant en compte les situations et charges socio-économiques de chaque commune.

À la suite de cette réunion, certains élus de l'AMGVF ont également assisté à la réunion ministérielle du 12 septembre 2015. Ils y ont rappelé la nécessaire générosité individuelle et collective dans une telle situation d'urgence, mais aussi la responsabilité de l'État sur les court, moyen et long termes. Les élus de l'association souhaitent un certain « professionnalisme » dans la gestion de ce dossier, les bonnes volontés ne suffisant pas en l'espèce. Lors de cette réunion du 12 septembre, le ministre de l'Intérieur a annoncé qu'un fonds de 15 millions d'euros avait été sanctuarisé pour apporter aux communes une somme de 1 000 euros par place supplémentaire d'ici 2017. Il apparaît à l'AMGVF que cette somme ne couvrira qu'en partie les frais à la charge des communes ou des intercommunalités, notamment pour la scolarisation des enfants, l'insertion et l'intégration sociale et professionnelle des familles. Des élus de toutes sensibilités situent la somme nécessaire entre 5 000 euros - ce qui est le montant de l'aide forfaitaire en Allemagne - et 8 000 euros par personne. L'union européenne a quant à elle basé son aide aux États sur une somme forfaitaire de 6 000 euros.

Le 16 septembre à l'Assemblée nationale, le Premier ministre annonçait 5 000 places supplémentaires d'hébergement en CADA (Centre d'Accueil des Demandeurs d'Asile) en plus des 8 500 places prévues pour 2016. Or, selon les experts, 20 000 places supplémentaires seraient aujourd'hui nécessaires pour faire face à l'afflux des migrants. Nous disposons à ce jour de 25 000 places, qui sont loin de suffire à l'accueil des demandeurs d'asile identifiés. Il est par ailleurs de notoriété publique que les le système souffre d'embolie depuis longtemps avec des reconduites à la frontière peu nombreuses et souvent inappliquées.

Il ressort des débats entre élus locaux que nombre d'entre eux sont inquiets à l'idée d'accueillir de nouveaux migrants demandeurs d'asile et réfugiés dans des territoires qui connaissent déjà de lourdes difficultés socio-économiques. Des villes du Nord de la France ont ainsi fait connaître leurs réserves quant à leur capacité à accueillir dans de bonnes conditions et sur la durée de nouvelles populations. Des recours auprès des tribunaux ont également été déposés, contre l'occupation apparemment illégale d'immeubles HLM voués à la destruction.

Sur ce dossier particulièrement sensible, l'AMGVF rappelle sa volonté de travailler en lien étroit avec l'État sur le moyen et le long terme, sans substitution ni subordination, avec les moyens afférents, au service de la solidarité locale et nationale.

Mme Valérie Létard, vice-présidente de l'Association des maires de France (AMF) et représentante de l'Assemblée des communautés de France (ADCF), sénatrice du Nord

L'AMF se situe dans la droite ligne des propos des intervenants précédents.

La France doit prendre toute sa part à la solidarité européenne. Si les collectivités doivent absolument être partenaires dans cet effort, l'État demeure le seul et unique responsable de l'accueil et de la prise en charge des demandeurs d'asile puisqu'il s'agit d'une véritable compétence régalienne. Telle est la clé de la réussite d'une bonne prise en charge et d'un bon accompagnement des réfugiés. Il faut garder une organisation efficace et donc un pilotage unique ; a contrario , un dispositif basé sur la bonne volonté des élus locaux nous mettrait dans l'incapacité d'accueillir les réfugiés dans de bonnes conditions et d'instruire les dossiers dans les délais adéquats. La clé d'une bonne prise en charge des demandeurs d'asile et en particulier des réfugiés tient à une instruction rapide des dossiers, en lien avec les territoires et de façon équitablement répartie sur le territoire national.

La question des déboutés doit également être prise en compte. L'instruction menée par l'OFPRA (Office Français de Protection des Réfugiés et Apatrides), et la Cour Nationale du Droit d'Asile (CNDA) en cas de recours, détermine si un migrant relève ou non du statut de réfugié, de la convention de Genève et du droit d'asile. Si tel n'est pas le cas, les personnes déboutées doivent bénéficier d'un accompagnement vers le retour. De nombreux débats ont porté sur cette problématique car la France se trouve en difficulté sur ce point. En 2014 en effet, 44 700 personnes ont été déboutées du droit d'asile. Si elles demeurent dans le dispositif CADA ou l'hébergement d'urgence, le pays ne peut plus accueillir les migrants prioritaires car menacés dans leur pays. Nous devons, sans stigmatiser les personnes en situation irrégulière, déterminer nos priorités et mieux appliquer la loi. Or nous savons l'impossibilité de raccompagner une personne qui est demeurée de longs mois, voire plusieurs années, sur le territoire. En revanche, si cette mesure était prise rapidement, le retour pourrait s'opérer de façon digne, responsable et accompagnée.

Il faut qu'au niveau des collectivités, des départements et de l'État, soit réalisé un diagnostic de la réalité socio-économique des territoires avant tout accueil, pour ne pas ajouter de la souffrance à la souffrance des français. Tous les territoires ne se trouvent pas dans la même situation.

Le dispositif doit également reposer sur la volonté des élus, lesquels estiment mieux que quiconque la capacité de leur ville à accueillir et à accompagner des réfugiés. Les services de l'État doivent piloter ce travail, en véritable coproduction avec les élus locaux : seules des solutions accompagnées à ces deux niveaux seront acceptées par tous. L'État doit garder la main et les collectivités doivent seulement venir se positionner ensuite. Pour exemple, de nombreux maires préfèrent aux structures collectives la solution de l'hébergement diffus, beaucoup plus acceptable. Le suivi des familles est cependant beaucoup plus complexe dans ce dispositif : c'est pourquoi il faut veiller à ne pas placer les familles dans des territoires trop isolés, dans lesquels les travailleurs sociaux auront des difficultés à les accompagner. Ces questions doivent être envisagées en amont, dans un dialogue avec les structures qui connaissent le sujet, comme l'ADOMA, les générosités ne pouvant pas suffire. De plus, seul le dispositif CADA permet de prendre en charge les frais liés à l'accompagnement des demandeurs d'asile ; l'action du CCAS (Centre Communal d'Action Sociale) ne doit concerner que la scolarisation et la recherche de solutions d'hébergement. C'est sur proposition de la collectivité et avec un pilotage de l'État que cela doit se faire, sinon le dispositif ne peut fonctionner. Des expérimentations sur des centres dédiés pour accompagner vers le retour volontaire sont d'ailleurs en cours, près de Metz notamment.

Enfin, l'instruction des dossiers par l'OFPRA et la CNDA doit privilégier les interventions territoriales. Les équipes de l'OFPRA possèdent en effet une capacité de traitement extrêmement rapide des dossiers, ce qui permet d'accompagner dignement vers le retour des familles ne relevant pas du droit d'asile. En outre, les familles hébergées en province rencontrent les plus grandes difficultés pour se rendre à Paris aux convocations de l'OFPRA, ce qui multiplie les reports et entraîne des frais supplémentaires.

Nous devons absolument veiller à ne pas « emboliser » les structures d'hébergement d'urgence, et à leur répartition équitable sur le territoire, qui en améliorera l'acceptabilité pour les Français. Dans mon territoire par exemple, 45% des personnes en structures d'hébergement d'urgence sont en situation irrégulière. Nous devons trouver des solutions pour accélérer le système avec une bonne application de la loi et permettre ainsi une bonne intégration des réfugiés et un accompagnement digne vers le pays d'origine. L'application de la loi n'implique pas nécessairement une augmentation des places d'accueil, mais une meilleure prise en charge pour une bonne acceptation.

L'accueil des réfugiés peut être contenu en France, mais il doit être maîtrisé et doit partir du principe que les français ne doivent pas avoir l'impression que ce sera au détriment de la prise en charge de leurs propres difficultés.

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