E. D'AUTRES ÉCARTS PAR RAPPORT À L'ESPRIT DE LA RÉFORME

La proposition de nommer Jean-Pierre Farandou en remplacement de Jacques Rapoport à la tête de SNCF Réseau , alors qu'il a effectué une grande partie de sa carrière au sein de l'exploitant historique de transport, a aussi témoigné d'une certaine légèreté de l'État face à l'enjeu d'indépendance du gestionnaire du réseau par rapport à l'exploitant, pourtant réaffirmé par la loi du 4 août. Il démontre, dans le même temps, l'appropriation par le régulateur de ses nouveaux pouvoirs, puisque celui-ci s'est opposé à cette nomination comme la loi l'y autorisait.

De façon plus générale, les exemples ne manquent pas pour illustrer l'absence d'« État-stratège ». Alors que l'article 1 er de la loi du 4 août 2014 le charge de l'organisation et du pilotage de la filière industrielle et que plusieurs sénateurs de la commission l'avaient alerté de longue date sur la situation préoccupante de la filière ferroviaire, il a dû gérer en catastrophe le risque de fermeture du site Alstom de Belfort, en commandant des trains à grande vitesse pour des lignes classiques.

Du côté du groupe public ferroviaire , si l'on peut saluer le succès de la réunification des différentes activités de gestion de l'infrastructure, qui n'était pas sans difficulté, compte tenu des cultures différentes des agents, les effets de la réforme se font encore attendre . C'est en particulier le cas de l'amélioration du processus d'allocation des sillons comme des économies d'échelle annoncées du côté du gestionnaire d'infrastructure, dont la dérive des coûts continue.

De plus, certaines mesures prévues par la loi du 4 août 2014 ont tardé à être mises en oeuvre . Elle obligeait par exemple SNCF Réseau à prendre des mesures d'organisation interne pour assurer le respect par son personnel de l'interdiction de divulgation des informations confidentielles. Pour cela, le décret n° 2015-139 du 10 février 2015 relatif à la confidentialité des données détenues par le gestionnaire de l'infrastructure ferroviaire et à la commission de déontologie du système de transport ferroviaire lui a imposé d'établir un plan de gestion des informations confidentielles , obligation figurant désormais à l'article L. 2122-4-5 du code des transports. Or, l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières n'a été saisie que le 29 juillet 2016 de ce plan de gestion des informations confidentielles .

Plus grave encore, certains choix d'organisation du groupe public ferroviaire ne respectent pas la loi de réforme ferroviaire, comme l'a démontré la mise en demeure formulée par l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières le 25 mai 2016 92 ( * ) . Elle relève que le rattachement de l'entité SNCF Combustible auprès de l'Epic faîtier SNCF n'est pas conforme au code des transports , dans la mesure où SNCF Combustible détermine les modalités d'accès aux stations gazole et les redevances à acquitter par les entreprises ferroviaires, une mission que le code des transports a réservée au gestionnaire d'infrastructure SNCF Réseau .


* 92 Décision n° 2016-078 du 25 mai 2016 portant mise en demeure de la SNCF pour non-respect des règles fixant les conditions d'exercice des missions d'approvisionnement en combustible par SNCF Réseau et SNCF Mobilités.

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