B. LA CRÉATION DES UHSA POUR FACILITER L'ACCÈS À L'HOSPITALISATION EN PSYCHIATRIE

Le dispositif d'accès aux soins des détenus prévoit que, si une consultation spécialisée est nécessaire et qu'elle ne peut être organisée au sein de l'UCSA, elle doit être organisée dans le centre hospitalier dont dépend la prison. Mais en pratique il est souvent difficile d'organiser la sortie, on parle d'extraction, d'une personne détenue pour une consultation de spécialiste ou une hospitalisation. Cette difficulté tient au fait que toute sortie d'un détenu se fait sous escorte. Du fait des difficultés de coordination avec la gendarmerie, celles-ci sont désormais uniquement assurées par les surveillants pénitentiaires. Or ils sont peu nombreux et les moyens de transports dont ils disposent varient d'un département à l'autre.

Concrètement, il est donc difficile de mobiliser les moyens pour qu'un détenu puisse se rendre à une consultation à l'hôpital. D'autant plus que la demande doit correspondre aux capacités d'organisation des services hospitaliers. Tant qu'un détenu est à l'hôpital, il doit se trouver sous surveillance de l'administration pénitentiaire ou être dans un local sécurisé. Ceci aboutit à ce que la contrainte de surveillance prime sur les besoins en matière de soins, particulièrement pour ce qui relève de la psychiatrie. Les détenus nécessitant une hospitalisation en établissement psychiatrique se trouvaient parfois placés d'office dans les chambres d'isolement ou orientés vers les unités pour malades difficiles, quelle que soit la pathologie dont ils souffraient, et même si cette forme de prise en charge s'avérait inappropriée voire contre-productive.

C'est pour remédier à cette situation qu'il a été décidé de créer des unités hospitalières spécialement aménagées (UHSA) pour l'accueil des détenus nécessitant une hospitalisation psychiatrique à temps plein. Ces unités ont été définies par la loi et par des décrets. Il s'agit de bâtiments dédiés, construits sur l'emprise d'établissements psychiatriques, et dont la sécurité périmétrique est assurée par le ministère de la justice. Chaque UHSA dispose de quarante ou, pour les plus grandes, soixante places d'hospitalisation et d'un nombre de personnels dédiés fixé par une circulaire de 2011.

Dans l'ensemble, le ratio soignants/patients est le même qu'en population générale. On peut néanmoins noter que les postes de soignants en UHSA sont plutôt valorisés par les personnels et qu'on constate moins d'absentéisme que dans les autres services. La présence effective tend donc à être plus importante.

Cette uniformité dans l'organisation recouvre une forte diversité régionale. Les huit UHSA actuellement en fonctionnement - une neuvième a ouvert cette année à Marseille - sont en effet le fruit de plusieurs compromis locaux.

Tout d'abord, un compromis entre les exigences de sécurité fixées par l'administration pénitentiaire et le projet de soins porté par l'équipe médicale qui a préfiguré l'unité. Extérieurement, bien qu'elles se trouvent sur un terrain comprenant un ensemble de bâtiments dédiés aux soins psychiatriques, les UHSA se présentent comme des prisons. Elles ont un mur d'enceinte entouré de grillages et un accès sécurisé, contrôlé par des surveillants de l'administration pénitentiaire. Nul ne peut y entrer sans justifier de son identité et passer par les portiques de sécurité qui mènent aux parloirs, surveillés par l'administration pénitentiaire, et aux unités de soins. Cependant, une fois ces formalités accomplies, les surveillants de l'administration pénitentiaire n'ont plus accès aux locaux internes de l'UHSA, qui sont des services hospitaliers placés sous l'autorité des médecins.

La difficulté à concilier les deux cultures se traduit dans l'agencement des bâtiments : à Lyon et à Toulouse, vos rapporteurs ont ainsi pu voir des cours réservées à la promenade des détenus ou destinées à offrir un espace de pause aux personnels, dont l'administration pénitentiaire avait obtenu que l'accès soit interdit ou particulièrement restreint de crainte d'une évasion par hélicoptère. De même ce sont des considérations de sécurité qui ont limité les espaces réservés aux familles tant au Vinatier qu'à Toulouse, ce qui limite singulièrement la possibilité de travail avec elles.

Ensuite, chaque projet médical a entraîné des choix qui font qu'aucune UHSA ne ressemble à une autre. Celle de Lyon, la première à avoir été construite, se situe sur deux niveaux, tandis que celle de Toulouse, de plain-pied, présente une forme rayonnante complexe, et que celle de Villejuif adopte un agencement plus classique en rectangle. Ces choix découlent de la manière dont les soignants ont conçu la prise en charge des patients.

Tous suivent en effet une progression entre le moment de leur arrivée et celui de leur sortie qui les place successivement dans différentes parties de l'UHSA.

Ces parcours sont conçus de manière plus ou moins fluide. Les malades qui arrivent au sein de l'UHSA nécessitent une hospitalisation à temps plein car ils sont en situation de crise. Si un premier traitement a parfois pu être administré au sein de l'établissement pénitentiaire où ils se trouvaient ou du SMPR où ils ont été transférés, voire dans un hôpital extérieur, les malades qui arrivent en UHSA sont dans une situation qui implique une première phase d'observation et de prise en charge médicamenteuse souvent lourde.

A l'issue de cette première phase, la pathologie peut être précisément déterminée et un traitement destiné à la stabiliser peut être mis en place. Enfin, dans une troisième phase, le patient stabilisé est placé dans une situation d'autonomie croissante destinée à lui permettre de réintégrer son établissement d'origine. L'accent mis sur ces différentes phases et le degré d'accompagnement des patients varient d'une équipe médicale à l'autre, ce qui se traduit dans l'agencement des locaux.

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