LE CONTRÔLE DES INVESTISSEMENTS ÉTRANGERS AU TITRE DE LA PROTECTION DE L'ORDRE PUBLIC ET DE LA SÉCURITÉ

La croissance des investissements étrangers ne s'est pas toujours effectuée dans le respect des règles de concurrence. Ainsi, alors même qu'elle a des capacités d'acquisition considérables, la Chine n'hésite pas à apporter des aides d'État à ses entreprises, au soutien de leurs acquisitions comme de leurs offres de services, ce qui leur permet de proposer des prix artificiellement bas, à qualité équivalente et avec des coûts de fabrication comparables.

Or s'il existe des procédures anti-dumping en matière commerciale qui peuvent prendre appui sur les règles de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), force est de constater que l'acquisition de manière déloyale par des groupes étrangers, notamment chinois, d'une expertise et de technologies clés en rachetant des entreprises européennes n'entre pas dans leur champ. Quant aux politiques sectorielles européennes de contrôle, même si elles sont guidées par une préoccupation de sécurité et peuvent conduire à interdire une opération, elles ne constituent pas pour autant des contrôles des investissements directs étrangers en Europe (A).

Dès lors, plusieurs États européens ont mis en place un dispositif de contrôle des investissements étrangers dans des secteurs stratégiques, dispositif que certains d'entre eux ont récemment renforcé (B).

L'UNION EUROPÉENNE : UNE APPROCHE PAR LA CONCURRENCE ET DES POLITIQUES SECTORIELLES CIBLÉES GUIDÉES PAR DES ENJEUX DE SÉCURITÉ

L'Europe a toujours privilégié une approche par la concurrence, le respect des règles de concurrence lui paraissant de nature à garantir un « level playing field », autrement dit l'équité des échanges, y compris en matière d'investissements directs étrangers.

C'est à ce titre que l'Union européenne a, par exemple, mis en place un contrôle des concentrations pour prévenir les abus de position dominante 3 ( * ) , ou qu'elle réprouve les aides d'État comme l'absence de réciprocité, en matière commerciale comme en matière d'investissements.

Ces principes figurent également en bonne place dans les accords commerciaux bilatéraux ou multilatéraux auxquels l'Union européenne est partie.

L'Union européenne a par ailleurs adopté des législations sectorielles visant, par exemple, à améliorer la sécurité des approvisionnements dans le domaine de l'énergie 4 ( * ) ou en matière de sécurité des réseaux et des systèmes 5 ( * ) ou encore la sécurité aérienne 6 ( * ) . Elle s'est préoccupée d'identifier les matières premières clés 7 ( * ) ou les projets d'intérêt commun en matière d'infrastructures de télécommunications 8 ( * ) . Elle a également organisé une évaluation prudentielle des acquisitions dans le secteur financier 9 ( * ) .

Pour autant, il ne saurait être considéré que ces dispositifs constitueraient autant de contrôles des investissements étrangers dans ces secteurs. Ainsi que la Commission l'indique dans l'analyse qu'elle fait de la compatibilité de la proposition de règlement avec ces législations et des possibles synergies que le règlement pourrait créer, ces dispositifs ont vocation à s'articuler avec la proposition de règlement qui fait l'objet du présent examen.


* 3 Règlement (CE) 2004/139 relatif au contrôle des concentrations entre entreprises.

* 4 Directive 2008/114/CE sur les infrastructures critiques, directives 2009/72/CE et 2009/73/CE sur l'électricité et le gaz.

* 5 Directive 2016/1148 concernant des mesures destinées à assurer un niveau élevé commun de sécurité des réseaux et des systèmes d'information dans l'Union.

* 6 Règlement (CE) 2008/1008 fixant une condition de nationalité pour l'octroi de licences d'exploitation pour le transport aérien de passagers.

* 7 Dans le cadre de l'initiative « matières premières » lancée en 2008.

* 8 Règlement (UE) 2014/283 concernant des orientations pour les réseaux transeuropéens dans le domaine des infrastructures de télécommunications.

* 9 Directive 2007/44/CE sur les établissements financiers, 2013/36/UE sur les activités d'assurance et de réassurance et 2014/65/UE sur les marchés d'instruments financiers.

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