C. LOI N° 2015-992 DU 17 AOÛT 2015 RELATIVE À LA TRANSITION ÉNERGÉTIQUE POUR LA CROISSANCE VERTE

Au 31 mars 2019, 96 % des dispositions 54 ( * ) de la loi « Transition énergétique » appelant un texte d'application sont applicables .

Seules deux mesures réglementaires attendues sont parues entre le 1 er avril 2018 et le 31 mars 2019, période de contrôle du présent rapport : il s'agit des décrets portant programmation pluriannuelle de l'énergie des îles Wallis et Futuna ( n° 2018-809 du 24 septembre 2018 ) et de la Martinique ( n° 2018-852 du 4 octobre 2018 ) ( article 203 ).

On notera aussi la parution de deux textes d'application non attendus par la loi venant modifier le dispositif du chèque énergie ( article 201 ), l'un pour prendre en compte le bilan de son expérimentation ( décret en Conseil d'État n° 2016-555 du 6 mai 2016 ), l'autre pour mettre en oeuvre les engagements du Gouvernement , à la fois pour revaloriser son montant moyen de et, à la suite du mouvement des « gilets jaunes », en élargir le bénéfice à 2,2 millions de ménages supplémentaires ( arrêté du 26 décembre 2018 ). À partir du 1 er janvier 2019, les montants attribués sont ainsi majorés de 50 euros par rapport aux montants alloués en 2018 et le plafond d'attribution du chèque énergie est porté de 7 700 euros à 10 700 euros par an et par unité de consommation, ce qui fera passer le nombre de bénéficiaires de 3,6 millions à 5,8 millions de ménages pour l'année 2019.

Enfin, deux mesures réglementaires initialement requises pour appliquer le volet logement ne sont plus attendues en raison de l'adoption de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique, dite loi « Elan ».

Tel est le cas des dispositions de l'article 11 relatif au carnet numérique. Dans son rapport rendu au Gouvernement en janvier 2016, M. Alain Neveü avait conclu à la nécessité de compléter la loi avant de pouvoir publier le décret d'application de la mesure. L'article 182 de la loi « Elan », a entièrement réécrit les dispositions relatives au carnet numérique. Le décret attendu en application de la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte est en conséquence devenu obsolète.

Il en va de même s'agissant de la réglementation thermique RT 2018 visée à l'article 14 . L'entrée en vigueur de la nouvelle réglementation thermique qui devait intervenir en 2018 est reportée à 2020 en application de l'article 181 de la loi « Elan ». Cette réglementation devra prévoir pour les constructions nouvelles, en fonction des différentes catégories de bâtiments, le niveau d'empreinte carbone à respecter, évalué sur l'ensemble du cycle de vie du bâtiment, en intégrant la capacité de stockage du carbone dans les matériaux.

Plusieurs dispositions suivies par la commission des affaires économiques restent inapplicables :

• Volet bâtiment

Deux mesures d'application (hors rapports) sont encore attendues.

Concernant la mise à disposition, prévue à l'article 28 , d'afficheurs déportés pour les consommateurs en situation de précarité énergétique disposant d'un compteur communicant, la direction générale de l'énergie et du climat (DGEC) avait initialement indiqué à la commission que les deux arrêtés relatifs à la compensation des coûts correspondants pour les fournisseurs d'électricité et de gaz naturel faisaient encore l'objet de réflexions afin de garantir un déploiement à un coût maîtrisé pour la collectivité et susceptible d'apporter des bénéfices énergétiques et industriels.

Dans une réponse récente à une question écrite 55 ( * ) , le Gouvernement a précisé que les coûts du dispositif étaient « supérieurs à ceux initialement envisagés », que l'élargissement du chèque énergie à 2,2 millions de bénéficiaires supplémentaires décidé par ailleurs les augmenterait « sensiblement » et qu'il réfléchissait par conséquent à « des modes de financement du dispositif de nature extrabudgétaire » ; l'utilisation « pour partie » des certificats d'économies d'énergie serait ainsi envisagée, ce qui nécessiterait de modifier la loi .

En réponse à votre commission, le Gouvernement a précisé qu'il ne s'agirait pas de remettre en cause en soi le principe d'un affichage déporté mais d'en adapter les modalités pratiques de mise en oeuvre, à la fois pour assurer un déploiement effectif conforme aux technologies actuelles et pour en réduire le coût. Une des solutions envisagées, qui impliquerait elle aussi de modifier la loi, pourrait consister en la possibilité de mettre à disposition un émetteur radio sur le compteur communicant qui permette d' accéder à ses données de consommation via une application sur smartphone , dont les ménages, y compris précaires, sont de plus en plus nombreux à être équipés.

L'obligation législative imposée aux fournisseurs deviendrait alors une obligation d'accès aux données en temps réel , et plus d'affichage en temps réel, qui pourrait selon les cas être satisfaite par ce nouvel équipement communicant avec une application ou par un écran dédié. La mise à disposition d'un afficheur déporté ne résultant plus d'une obligation réglementaire, elle pourrait alors faire l'objet d'un programme CEE ad hoc (notamment pour cibler les ménages précaires ne disposant pas d'un smartphone) 56 ( * ) .

Alors que des millions de compteurs communicants sont déjà installés et que le dispositif des afficheurs déportés devait commencer à être déployé au 1 er janvier 2018 , aucun calendrier n'est indiqué, à ce stade , pour procéder aux modifications législatives requises, sachant qu'il faudra ensuite encore au moins trois mois après l'adoption définitive de ces dispositions législatives pour modifier ou prendre les textes réglementaires nécessaires à leur application concrète 57 ( * ) .

• Énergies renouvelables

Une seule mesure reste inapplicable. Il s'agit de l'expérimentation du complément de rémunération pour les petits et moyens projets ainsi que pour les filières non matures, dont les modalités devraient être précisées par arrêté ( article 104 ). Si une telle expérimentation n'a jusqu'à présent pas été décidée , le Gouvernement n'excluait pas, l'an dernier, de recourir à ces dispositions, à l'avenir , par exemple pour les installations encore sous obligation d'achat de moins de 500 kW (méthanisation, biogaz de stations d'épuration, petite hydroélectricité, etc.).

• Régulation des réseaux et des marchés

Seul le mécanisme d'interruptibilité gazière prévu à l'article 158 , par lequel les industriels gazo-intensifs acceptant de voir leur alimentation interrompue en cas de menace sur le fonctionnement du système gazier bénéficieraient d'une compensation financière, reste à ce jour inapplicable en l'absence de publication des deux arrêtés requis pour en fixer les conditions et le volume de capacités concernées.

Depuis, l'article 12 de la loi « Hydrocarbures » l'a complété d'un dispositif d'interruptibilité non rémunérée et avait habilité le Gouvernement à légiférer par ordonnance pour étendre l'interruptibilité prévue par la loi « Transition énergétique » à des clients raccordés aux réseaux de distribution et rendre la compensation financière optionnelle , habilitation que le Gouvernement n'a finalement pas utilisée.

Selon les réponses obtenues par votre commission sur la loi « Hydrocarbures », la concertation a eu lieu sur ces deux dispositifs et les consultations obligatoires requises auront lieu d'ici à l'été, avant leur notification à la Commission européenne et avec pour objectif une mise en oeuvre mise en oeuvre opérationnelle au 1 er avril 2020 .

Enfin, sur les 26 rapports attendus , un est devenu sans objet 58 ( * ) , 13 ont été remis jusqu'à présent , dont quatre au cours de la période de contrôle du présent rapport et deux sur des articles relevant de la commission des affaires économiques :

- le rapport concernant le suivi de l'atteinte des objectifs de la politique énergétique , attendu au second semestre 2018 et remis en janvier 2019 ( article 1 er ) ; ce rapport montre en particulier le non-respect de la trajectoire de baisse des émissions de gaz à effet de serre sur la période 2015-2018,

- le rapport annuel d'activité du centre scientifique et technique du bâtiment ( article 9 ). Le rapport d'activité 2017 a été présenté devant l'OPECST le 27 septembre 2018.

On signalera aussi le cas du rapport sur les moyens de substituer une aide globale à l'ensemble des aides fiscales attachées à l'installation de certains produits de la construction ( article 14 ) : si le sujet a bien été abordé dans un rapport sur les aides à la rénovation énergétique des logements publié en avril 2017 par l'Inspection générale des finances et le Conseil général de l'environnement et du développement durable (CGEDD), il est regrettable que ce document n'ait pas été officiellement transmis au Parlement , conformément à la lettre et à l'esprit de la loi.

Dans les champs de compétences de la commission des affaires économiques, doivent encore être remis :

- le rapport quinquennal détaillant la stratégie nationale à l'échéance 2050 pour mobiliser les investissements en faveur de la maîtrise de l'énergie dans le parc national de bâtiments publics ou privés, à usage résidentiel ou tertiaire ( article 4 ). Selon les informations transmises par la DHUP, la remise de ce rapport est adossée à la remise d'un rapport à la Commission européenne portant sur un sujet proche. Il devait être remis en mars 2017 ;

- le rapport sur la mise en place d'un mécanisme financier visant à inciter, via un bonus , les propriétaires dont le bien atteint des objectifs de performance énergétique supérieurs à un référentiel d'économie d'énergie minimale à déterminer, et à pénaliser, via un malus , ceux dont le bien présente des performances énergétiques inférieures à ce référentiel ( article 14 ). Ce rapport devait être remis avant le 17 août 2016 ;

- le rapport faisant état de l'ensemble des financements permettant l'attribution de subventions pour la rénovation énergétique des logements occupés par des ménages aux revenus modestes, de l'opportunité de leur regroupement au sein d'un fonds spécial concourant à la lutte contre la précarité énergétique et des modalités d'instauration d'un tel fonds ( article 19 ). Ce rapport devait être remis avant le 17 février 2016 ;

- le rapport sur l'opportunité d'aides fiscales à l'installation de filtres à particules sur l'installation de chauffage au bois pour les particuliers ( article 21 ). Ce rapport devait être remis avant le 17 août 2016 ;

- le rapport sur les modalités d'intégration, dans les critères de risques au titre d'un environnement physique agressif, des rayonnements ionisants subis, le cas échéant, par les travailleurs du secteur nucléaire ( article 125 ), qui devait être remis au plus tard le 17 février 2016 . En réponse aux demandes réitérées de la commission, le Gouvernement se contente d'indiquer que l'article L. 4161-1 du code du travail relatif aux facteurs de risques professionnels a fait l'objet d'une réécriture en 2017 et qu'il est renvoyé à un décret pour préciser les facteurs de risques visés ; en l'espèce, les deux décrets parus en décembre 2017 n'intègrent pas davantage les rayonnements ionisants parmi les critères de risques que les dispositions précédentes et l'objet du rapport n'est donc pas satisfait ;

- le rapport sur la mise en oeuvre, par les établissements de crédit et les sociétés de financement, d'un scénario de tests de résistance réguliers représentatifs des risques associés au changement climatique ( article 173 ), dont la remise était attendue avant le 31 décembre 2016 ; entre février et avril 2017, la direction générale du Trésor a certes mis en consultation, sur son site internet, un projet de rapport intitulé « L'évaluation des risques liés au changement climatique dans le secteur bancaire » censé appliquer l'article 173 mais d'une part, ce projet de rapport ne traite pas directement de la mise en oeuvre d'un scénario de tests de résistance et, d'autre part, le rapport définitif n'est jamais paru.


* 54 Soit 178 dispositions devenues applicables sur les 186 attendant un texte d'application, si l'on tient compte des 9 dispositions appelant initialement une mesure d'application mais considérées comme étant, depuis, devenues sans objet.

* 55 Question écrite n° 09215 de M. Patrick Chaize publiée au Journal officiel du 28 février 2019.

* 56 Un financement par les CEE n'est pas possible en l'état du droit, le code de l'énergie prévoyant que des CEE ne peuvent être délivrés pour des actions résultant exclusivement du respect de la réglementation en vigueur (puisqu'il s'agit bien d'inciter à réaliser des économies d'énergie nouvelles et non exigées, par ailleurs, par une disposition légale ou réglementaire).

* 57 Modification du décret n° 2016-1618 du 29 novembre 2016 et prise des trois arrêtés relatifs aux protocoles de communication, au plafond de compensation des fournisseurs et aux informations minimales à afficher.

* 58 Rapport sur la « compensation carbone » prévu à l'article 162, sans objet depuis la création du dispositif par l'article 68 de la loi n° 2015-1785 du 29 décembre 2015 de finances pour 2016.

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