B. DES DÉLAIS VARIABLES ET EN LÉGÈRE AUGMENTATION MALGRÉ UN RECOURS GÉNÉRALISÉ À LA PROCÉDURE ACCÉLÉRÉE

Le délai moyen de prise des textes est également légèrement supérieur à celui constaté sur la session précédente. En moyenne, les mesures règlementaires ont été publiées cinq mois et 12 jours après la promulgation de la loi, soit près d'un mois de plus qu'en 2019 (quatre mois et 17 jours). Le délai moyen est proche de celui de la session 2017-2018 (cinq mois et 10 jours).

Il reste toutefois inférieur à la limite de six mois que s'est fixée le Gouvernement par la circulaire du Premier ministre du 29 février 2008, et ce y compris pour les propositions de lois, pour lesquelles le délai s'élève à cinq mois et 27 jours .

Seule la commission des finances constate que les délais de publication des mesures d'application attendues pour les lois votées en 2018-2019 dépassent en majorité le délai de six mois. Toutefois, le délai moyen de publication de ces mesures ne dépasse que légèrement 6 mois et deux semaines, et n'est donc que faiblement supérieur au délai moyen.

En revanche, la probabilité qu'une mesure soit finalement prise plus d'un après la promulgation de la loi décroit considérablement. Au cours de la XVe législature, aucun décret d'application n'a été pris au-delà de deux ans après la promulgation de la loi , et seuls 5 % d'entre eux ont été pris entre un an à deux ans après celle-ci. Un décret qui ne serait donc pas publié une fois passée cette période n'aurait donc que peu de chance de l'être finalement.

Le recours à la procédure accélérée est toujours généralisé , quoique légèrement inférieur à celui constaté dans le bilan dressé en 2018. Il concernait 31 lois sur la session 2018-2019 , soit deux-tiers des lois votées, parmi lesquelles figurent environ deux-tiers des mesures d'application attendues. Par conséquent, il est d'autant plus essentiel que la mise en application complète des lois soit à la hauteur de la rapidité qui est exigée du législateur.

C. UN RENDU DES RAPPORTS CHRONIQUEMENT INSUFFISANT

1. La faiblesse permanente du nombre de rapports remis au Parlement

Comme les années précédentes, le taux de dépôt des rapports sur la session est très bas, à peine 12 %, contre 35 % l'année passée. Le constat de cette insuffisance est récurrent : sur la XVe législature, seulement 27 % des rapports prévus par la loi ont été remis , soit 50 rapports déposés sur 183 demandés. Ce taux diminue encore nettement dans certaines commissions : ainsi, 6 % des rapports seulement ont été remis à la commission des affaires sociales depuis 2017. La faiblesse de ce taux est d'autant moins compréhensible s'agissant des rapports demandés par le Gouvernement lui-même ; or seuls 8 % des rapports dont la publication a été introduite dans la loi par un amendement gouvernemental ont été remis sous la XVe législature .

Le délai de publication moyen est en 2018-2019 de 7 mois et 13 jours, soit un peu moins que sur la législature, où le délai moyen est de 10 mois et 13 jours. La commission des finances souligne quant à elle que seuls 57 des 105 rapports attendus pour les lois promulguées depuis 2014 ont été effectivement remis au Parlement, soit à peine plus de la moitié. Par ailleurs, vingt rapports sont devenus sans objet depuis 2014. Ce constat est partagé par la commission de la culture, qui note que les dix-neuf rapports en attente de parution dans ses secteurs de compétence ne verront probablement jamais le jour.

Une vigilance particulière doit donc être maintenue sur le rendu des rapports , ce qui a été souligné par les représentants des commissions lors de l'audition du Secrétaire général du Gouvernement.

2. Malgré les efforts du Sénat pour en adapter la demande

Le Sénat n'est à l'origine que de vingt des 183 demandes de rapports prévues sous la XVe législature . Sur la même période, l'Assemblée nationale a inscrit dans les textes de lois 126 demandes de rapport. Par ailleurs, seuls 11 % des rapports demandés par le Sénat ont été déposés, contre 69 % des rapports demandés par l'Assemblée nationale .

L'ensemble des commissions souligne une baisse continue des demandes de rapports du fait des efforts du Parlement, à l'exception de la commission des finances pour laquelle le nombre de dispositions prévoyant la remise d'un rapport demeure élevé (36 en 2017-2018). Toutefois, cette commission souligne que 82 % de ces dispositions sont issues d'un amendement de l'Assemblée nationale. Par ailleurs les sept rapports demandés au Gouvernement dans la loi du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises ont été remis : l'ensemble de ces demandes de rapport était issu d'amendements de l'Assemblée nationale. Comme le note M. Vincent Eblé, président de la commission des finances, « L'intervention directe des parlementaires pour obtenir ces informations est souvent plus efficace que d'attendre un rapport ».

3. Et un contenu des rapports qui n'est pas toujours satisfaisant

Au-delà de la question de la remise des rapports, se pose la question de leur qualité. En effet, lorsque les rapports sont rendus, il est fréquent que leur contenu n'apporte pas d'élément nouveau. La commission des finances cite ainsi l'exemple du rapport relatif à l'évolution des dépenses et des ressources de la Société du Grand Paris. Ce rapport a bien été remis en novembre 2019, mais ne comporte selon la commission aucune information inédite.

Le contrôle effectué par le Sénat permet de pallier l'absence de remise des rapports. Ainsi, le rapport prévu par l'article 37 sur le fléchage des financements perçus par Mayotte dans le cadre du « Plan Mayotte », concernant l'éducation et la mise en oeuvre de la scolarisation obligatoire dès trois ans à Mayotte et en Guyane, n'a pas été remis alors qu'il aurait dû l'être avant le 26 janvier 2020. Conformément à sa position constante depuis plusieurs années, consistant à réduire les demandes de rapports au Parlement, le Sénat avait voté pour la suppression de cet article. La commission de la culture indique cependant qu'elle continuera à suivre l'évolution du taux de scolarisation des élèves de maternelle dans ces deux territoires, ainsi que l'accompagnement de l'État en la matière, dans le cadre des prochains questionnaires budgétaires.

Par ailleurs, la procédure de remise de rapports n'est pas toujours respectée . En effet, la transmission des rapports ne passe pas systématiquement par le Secrétariat général du Gouvernement. Dès lors, les Assemblées n'ont pas toujours la même information : le rapport prévu par l'article 24 de la loi de programmation des finances publiques pour 2018-2022 a ainsi été remis à l'Assemblée nationale mais non au Sénat.

4. Le problème répété de la non remise de rapports de l'article 67

L'article 67 de la loi n° 2004-1343 du 9 décembre 2004 de simplification du droit dispose qu'« à l'issue d'un délai de six mois suivant la date d'entrée en vigueur d'une loi, le Gouvernement présente au Parlement un rapport sur la mise en application de cette loi ». Ce rapport doit mentionner « les textes réglementaires publiés et les circulaires édictées pour la mise en oeuvre de ladite loi ». Il indique également les mesures d'application manquantes et les raisons qui justifient cette absence. Par conséquent, ces rapports sont extrêmement utiles au suivi de l'application des lois et constituent un outil précieux de dialogue entre le Gouvernement et le Parlement.

Au cours de l'année parlementaire 2018-2019, deux rapports ont été remis par le Gouvernement au Parlement pour la commission de la culture, trois pour la commission des finances et aucun pour la commission de l'aménagement du territoire. Par ailleurs, les rapports, lorsqu'ils sont transmis, le sont majoritairement hors délai.

La commission des lois regrette également que ces rapports ne fassent pas mention des arrêtés, alors que l'article 67 de la loi du 9 décembre 2004 indique que ces rapports doivent mentionner les textes règlementaires et non uniquement les décrets. Ce point est d'autant plus dommageable qu'un quart des dispositions attendues par cette commission sont des arrêtés.

Le Gouvernement publie sur le site Internet Legifrance des échéanciers de mise en application des lois promulguées. Ces tableaux ne sont pas régulièrement mis à jour et ne comportent pas les justifications sur l'absence de mesure d'application attendues. Ils ne sauraient donc remplacer les analyses attendues dans les rapports de l'article 67, analyses qui sont malheureusement fréquemment absentes.

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