C. LES PROPOSITIONS COMPLÉMENTAIRES DU GROUPE DE TRAVAIL

Au-delà des trois grands dossiers sur lesquels s'est concentrée la gestion de la crise dans les premières semaines, le groupe de travail a identifié plusieurs sujets appelant des réponses urgentes .

1. Soutenir les formations professionnalisantes et accompagner les jeunes diplômés 2020 à s'insérer sur le marché du travail

En fragilisant les entreprises, la crise touche de plein fouet les formations professionnalisantes.

Pierre angulaire de ces formations et chemin le plus court vers l'emploi pour les jeunes diplômés, le stage en entreprise est le premier à être mis à mal . Il s'agit d'une source d'inquiétude majeure pour les étudiants, qui comptent sur cette première expérience professionnelle pour valoriser leur cursus, mais aussi souvent pour financer leurs études.

Le secteur de l'enseignement supérieur a vite pris la mesure des conséquences désastreuses du confinement sur le déroulement des stages. Dès le 19 mars, la Dgesip mettait en ligne ses recommandations aux établissements en la matière. Le 26 mars, c'était au tour de la commission des titres d'ingénieur (CTI) de donner ses lignes directrices aux écoles d'ingénieurs, les encourageant à identifier au cas par cas les adaptations à mettre en oeuvre.

Le groupe de travail encourage les établissements à faire preuve de souplesse et de flexibilité , en mettant au point de nouvelles modalités de stage, en décalant les calendriers, en signant des avenants aux contrats déjà établis.

La même inquiétude se pose pour le sort des alternants , dont la formation est basée sur le principe d'une période d'études suivie d'une période en entreprise, qu'ils soient en contrat d'apprentissage ou en contrat de professionnalisation.

S'agissant des alternants en cours de contrat, les établissements et les entreprises ont fait preuve de réactivité en mettant en place une continuité pédagogique pour la partie études et en basculant en télétravail pour la partie en entreprise. Même s'ils parviennent à achever leur formation dans les prochains mois, ces jeunes vont cependant être confrontés à une insertion très difficile sur le marché du travail .

La situation devrait être encore plus compliquée pour les futurs alternants qui devront faire face à une diminution des offres de recrutement des entreprises . Les branches professionnelles n'ont d'ailleurs pas caché leur très grande inquiétude sur le risque d'enrayement de la dynamique de l'alternance.

Le groupe de travail appelle en conséquence à des mesures de soutien en faveur de l'alternance pour atténuer les effets de l'effondrement qui s'annonce .

Plus globalement, avec le spectre de la récession, le groupe de travail estime que c'est sur l'accompagnement vers l'emploi que vont devoir se focaliser les efforts pour ne pas faire des diplômés 2020 et ceux des années à venir des générations sacrifiées de la crise . Qui plus est, le soutien à l'emploi des jeunes diplômés est un important facteur de relance de l'économie . Plusieurs leviers sont envisageables, parmi lesquels des mesures incitatives à l'embauche sous forme d'allègements de charges sur les cotisations salariales et/ou patronales, des aides ciblées en faveur de la recherche d'emploi, des facilités pour le remboursement des prêts bancaires .

2. Financer le prolongement des contrats doctoraux et postdoctoraux par une augmentation de la subvention pour charges de service public des établissements publics d'enseignement supérieur et de recherche

Comme de nombreux secteurs, la recherche est durement éprouvée par la crise liée à l'épidémie de Covid-19. Un grand nombre de projets et de travaux de recherche sont ralentis voire arrêtés. La fermeture des établissements d'enseignement et de recherche, ainsi que le confinement, ont contraint de nombreux doctorants, chercheurs, techniciens, ingénieurs à interrompre leurs travaux expérimentaux en laboratoire - pour les sciences de la nature et les sciences formelles - ou à suspendre leurs recherches documentaires, leurs enquêtes et études de terrain - pour les sciences humaines et sociales.

Afin de tenir compte de ce contexte exceptionnel et de limiter ses effets négatifs sur les activités de recherche, le Mesri a annoncé la possibilité, pour les établissements publics d'enseignement supérieur et de recherche, de prolonger les contrats doctoraux et postdoctoraux affectés par la crise . Cette mesure figure dans le projet de loi portant diverses dispositions urgentes qui sera examiné courant mai au Parlement.

Le groupe de travail salue cette mesure de soutien aux chercheurs à contrat à durée déterminée, mais s'interroge sur deux points :

• les critères d'octroi de la prolongation des contrats : à ce stade, aucune information n'a été délivrée sur les conditions dans lesquelles les doctorants et post-doctorants pourront solliciter une prolongation. Le groupe de travail appelle à élaborer des critères précis , aussi bien dans le champ des sciences de la nature et les sciences formelles, que dans celui des sciences humaines et sociales ;

• les conditions de financement des prolongations de contrats accordées : la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche a assuré que les prolongations seront « soutenues financièrement par l'État » , mais sans donner davantage de précision. Il est dès lors à craindre qu'à terme, les établissements publics d'enseignement supérieur et de recherche soient contraints de les financer à budget constant.

C'est pourquoi le groupe de travail demande à ce que cette mesure soit rapidement budgétée par une augmentation, à due proportion, de la subvention pour charges de service public des établissements autorisés à la mettre en oeuvre .

3. Encourager et adapter l'accueil des étudiants internationaux

La crise sanitaire mondiale aura inévitablement des répercussions sur l'accueil des étudiants étrangers dans les établissements d'enseignement supérieur français. Les responsables des grandes écoles de commerce et d'ingénieurs ont ainsi alerté le groupe de travail sur une très probable baisse des effectifs de ces étudiants à la rentrée prochaine .

À ce jour, les prévisions sont toutefois difficiles à affiner, d'une part, parce que la procédure d'inscription via la plateforme « Études en France » n'est pas close (elle le sera fin juin), d'autre part, parce que les mesures de restriction des mobilités prises par les pays évoluent régulièrement.

Quelle que soit l'ampleur du phénomène, celui-ci aura des conséquences financières pour les écoles qui accuseront une perte de recettes risquant de fragiliser leur modèle économique. À cela s'ajoute la fragilisation de certaines filières , notamment doctorales, qui fonctionnent aujourd'hui avec 50 % d'étudiants étrangers. C'est aussi le rayonnement et l'attractivité de l'enseignement supérieur à l'international qui est en jeu.

Conscient du problème à venir, le Mesri travaille avec le ministère de l'Europe et des affaires étrangères à l'élaboration d'une offre de formation à distance pour les étudiants internationaux, en s'appuyant sur les campus des établissements d'enseignement français à l'étranger.

Si la formation à distance est une voie à développer, le groupe de travail estime qu'elle ne pourra toutefois pas remplacer l'attractivité d'une formation en présentiel sur le territoire français .

C'est pourquoi il propose de :

- renforcer, au niveau des postes diplomatiques, la campagne de communication déjà lancée par Campus France pour encourager les étudiants internationaux à s'inscrire dans des cursus français ;

- envisager , au regard de l'état sanitaire en France et dans les pays d'origine des étudiants, des mobilités plus courtes, voire plus ciblées sur certaines zones géographiques ;

- simplifier les procédures d'obtention de visa pour les étudiants sélectionnés par les écoles :

- clarifier la question d'une éventuelle mise à l'isolement de ces étudiants à leur arrivée en France.

4. Mieux considérer les études de santé

Alors que la rentrée universitaire 2020-2021 doit marquer la première année de mise en oeuvre de la réforme des études de médecine, le secteur se trouve, depuis plusieurs mois, en première ligne dans la gestion de la crise du Covid-19.

Dans ce contexte, le groupe de travail considère que le report d'un an de l'entrée en vigueur de la réforme du deuxième cycle , décidé par les ministres de la santé et de l'enseignement supérieur, est un choix raisonnable .

Il fait en outre observer que la mobilisation exceptionnelle des personnels de santé montre , s'il en était besoin, l'urgence qu'il y a à revaloriser le statut et le niveau de rémunération des étudiants infirmiers et des étudiants en médecine ainsi que, plus globalement, de l'ensemble des professionnels de santé .

S'agissant des étudiants en médecine , le groupe de travail appelle à :

- l'assouplissement des critères de sélection pour les étudiants en Paces compte tenu des perturbations subies pendant l'année universitaire 2019-2020 ;

- la prise en compte, pour la validation des stages, du sens des responsabilités et du courage dont ont fait preuve les étudiants engagés volontaires au sein des hôpitaux pendant la crise, ainsi que l'attribution d'une prime exceptionnelle comme s'y est engagé le Gouvernement .

S'agissant des étudiants infirmiers et des étudiants techniciens de laboratoire , le groupe de travail demande à ce que leur mobilisation durant cette période soit également reconnue et qu'ils puissent eux aussi bénéficier d'une prime exceptionnelle .

5. Réfléchir à un plan de rénovation des bâtiments universitaires comme facteur de relance économique

Enfin, le groupe de travail estime que la rénovation énergétique des bâtiments universitaires, dossier trop longtemps négligé, devrait figurer parmi les principales mesures de relance de l'économie .

Une telle orientation serait, de plus, cohérente avec le futur plan de relance européen qui devrait faire de la rénovation énergétique l'une de ses priorités.

LES PRÉCONISATIONS DU GROUPE DE TRAVAIL

LE PLAN DE DÉCONFINEMENT
DES ÉTABLISSEMENTS D'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

Ce plan, valable de la période allant du 11 mai jusqu'à fin juillet, contient les recommandations suivantes :

- Le travail à distance doit être poursuivi autant que possible ;

- Les enseignements en présentiel à destination des étudiants ne pourront reprendre avant la rentrée universitaire 2020 ;

- Des modalités d'enseignement en présentiel peuvent être aménagées dans le seul cadre de la formation professionnelle et dans le respect des consignes sanitaires ;

- L'organisation des examens et des concours peuvent faire l'objet d'adaptations dans le cadre précédemment fixé par le ministère ;

- L'exercice d'activités administratives ou de recherche en présentiel est possible dans le respect des consignes sanitaires ;

- Les activités de services aux étudiants ou aux agents (par exemple, certains services assurés par les bibliothèques universitaires) peuvent rouvrir partiellement.

Il liste également l'ensemble des consignes sanitaires à appliquer dans les locaux accueillant personnels et usagers : respect des gestes barrières, opérations de nettoyage et de désinfection, fourniture de produits d'hygiène, ventilation des locaux, attitude à adopter en cas de suspicion d'infection, etc.

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