B. LA RÉVISION DE LA LOI « BICHET » DOIT DÉSORMAIS ÊTRE COMPLÉTÉE PAR UNE RÉVISION DU RÉGIME DES AIDES À LA PRESSE

La loi du 18 octobre 2019 relative à la modernisation de la distribution de la presse 42 ( * ) est venue modifier en profondeur la loi du 2 avril 1947 relative au statut des entreprises de groupage et de distribution des journaux et publications périodiques (dite « loi Bichet ») 43 ( * ) . Elle révise en premier lieu la régulation du secteur.

Elle confie notamment la régulation de la distribution de la presse à l'Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (ARCEP) en lieu et place du Conseil supérieur des messageries de presse (CSMP), organisme de droit privé, et de l'Autorité de régulation de la distribution de la presse (ARDP), autorité administrative indépendante. L'ARDP a, en conséquence, été dissoute et l'essentiel des compétences de régulation du CSMP a été transféré à l'ARCEP. Au titre de ses nouvelles missions, l'ARCEP doit émettre un avis sur les tarifs de distribution et l'assortiment, élaborer un cahier des charges pour les distributeurs et favoriser le développement de la comptabilité analytique chez les diffuseurs.

L'ARCEP fixe également les règles de répartition , entre toutes les entreprises de presse adhérant aux sociétés coopératives de groupage de presse utilisant les services des sociétés agréées de distribution de presse, des coûts spécifiques et ne pouvant être évités induits par la distribution des quotidiens (mécanisme de péréquation).

Le mécanisme de péréquation

Le mécanisme de péréquation a été mis en place en 2012, sous la forme d'une contribution des sociétés coopératives de groupage. Celle-ci est répartie au prorata des montants annuels respectifs de ventes de ces coopératives. Un acompte provisionnel est ainsi versé mensuellement par chaque coopérative, avant régulation annuelle.

Les surcoûts spécifiques liés à la distribution de la presse étaient estimés à 16,4 millions d'euros en 2019, sur la base des montants constatés en 2018 (soit 1,19 % des ventes en montant fort - VMF - des titres distribués par l'ensemble des éditeurs, toutes coopératives confondues, en 2018). La péréquation est était initialement versée à Presstalis. La liquidation de cette société et la création de France Messagerie ont conduit l'ARCEP à demander le reversement des acomptes provisionnels à France Messagerie, sur la base des montants constatés en 2018.

L'ARCEP devrait procéder à l'automne 2021, via une décision, au calcul du montant définitif de la péréquation au titre de l'année 2020. Elle devrait déterminer une régularisation de l'écart entre les acomptes payés et le montant définitif dû par chaque éditeur au titre de la péréquation. Le montant dû mensuellement par chaque distributeur de presse reste, en attendant, fixé à 1,19% des ventes en montant fort (VMF) totale du mois précédent des titres qu'il distribue.

L'ARCEP a également lancé une consultation pour définir les modalités de calcul des péréquations à venir. Une première consultation publique, lancée le 17 décembre 2020, a permis d'exposer l'approche envisagée pour le futur mécanisme de péréquation. Une seconde consultation publique, qui devrait être lancée au deuxième trimestre 2021, présenterait les hypothèses et la méthode envisagée pour calculer le montant de la péréquation. À la suite de ces deux consultations publiques, l'ARCEP adoptera une décision arrêtant la méthode de calcul de la péréquation retenue. Le nouveau taux unique d'acompte en vigueur sera inscrit dans la décision attendue à l'automne 2021.

Source : commission des finances du Sénat

L'ARCEP a bénéficié pour accomplir ses nouvelles missions du recrutement de 8 ETPT (5 en 2020 et 3 en 2021) et d'un transfert de 225 000 euros (AE = CP) en provenance du programme 308 « Protection des droits et libertés », aux fins d'intégration de l'ARDP en son sein.

La révision de la loi Bichet a également abouti à la création de la commission du réseau de la diffusion de la presse (CRDP) , personne morale de droit privé composée de représentants des éditeurs de journaux et publications périodiques et de personnalités qualifiées en matière de distribution de la presse. La CRDP a pour mission d'autoriser, dans des conditions transparentes et non discriminatoires, l'implantation de tout nouveau point de vente de presse. Elle est également chargée de délivrer un certificat d'inscription aux agents de la vente de presse et d'assurer la gestion du fichier recensant les agents de la vente de presse. Elle peut enfin intervenir dans le cas d'un litige entre acteurs de la distribution de la presse qui implique un point de vente de presse. Cette structure prend le relais de la commission du réseau (CDR) du CSMP.

La loi Bichet révisée intègre également une réforme du statut des vendeurs-colporteurs de presse (VCP) , avec pour objectif principal de favoriser le développement du portage multi-titres. Cette réforme vise, d'une part, à permettre aux VCP d'effectuer la distribution sans vente de titres de presse autres que le titre principal, tout en conservant leur statut de travailleur indépendant et, d'autre part, à élargir le périmètre des publications d'information politique et générale (IPG) pouvant être, à titre principal, vendues par les VCP. Par parallélisme, la définition de l'activité des porteurs salariés de presse, prévue par le même article, a également été révisée.

1. Quel avenir pour la distribution postale de la presse ?

Une évaluation sur le long terme permet de constater une diminution de la part des ventes de titres de presse en magasin au profit de la diffusion postale et du portage .

Nombre d'exemplaires (tout type de presse) vendus par canal

(en milliers)

2000

2010

2016

2017 (p)

2018 (p)

Réseau de vente

2 966 224

2 018 931

1 361 387

1 224 600

1 108 963

Diffusion postale

1 465 814

1 266 761

888 530

856 229

807 860

Diffusion par portage

2 591 483

2 684 619

1 384 463

1 342 040

1 283 794

Total

7 023 520

5 970 310

3 634 380

3 422 869

3 200 617

Source : Direction générale Médias et Industries culturelles, ministère de la culture, réponse au questionnaire budgétaire 2021

Répartition des ventes d'exemplaires (tout type de presse) par canal

(en %)

2000

2010

2016

2017 (p)

2018 (p)

Réseau de vente

42,2 %

33,8 %

37,5 %

35,8 %

34,6 %

Diffusion postale

20,9 %

21,2 %

24,4 %

25,0 %

25,2 %

Diffusion par portage

36,9 %

45,0 %

38,1 %

39,2 %

40,1 %

Total

100,0 %

100,0 %

100,0 %

100,0 %

100,0 %

Source : Direction générale Médias et Industries culturelles, ministère de la culture, réponse au questionnaire budgétaire 2021

La distribution postale reste dominante pour la presse technique et professionnelle. Les journaux gratuits sont presque exclusivement diffusés par la voie de portage. La presse nationale d'information générale et la presse magazine grand public sont majoritairement diffusées par la vente en kiosque, alors que la presse locale d'information l'est majoritairement par portage.

Répartition par famille de presse-2018

Source : Direction générale Médias et Industries culturelles, ministère de la culture, réponse au questionnaire budgétaire 2021

L'acheminement et la distribution de la presse constituent , en application de la loi du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de la poste et à France Télécom 44 ( * ) et de l'article L.2 du Code des postes et des communications électroniques, une mission de service public du groupe La Poste. La presse représente ainsi 22 % du poids de la sacoche des facteurs, 8 % du volume du courrier et 4 % du chiffre d'affaires courrier de La Poste.

En 2018, plus de 6 000 publications, soit la quasi-totalité des titres inscrits sur les registres de la Commission paritaire des publications et agences de presse (CPPAP), ont été distribuées par La Poste. 887 millions d'exemplaires de journaux et magazines ont été ainsi diffusés en 2019. Il s'agit là du principal canal de diffusion de la presse abonnée.

a) Un sous-financement chronique

Les journaux et écrits périodiques ont la possibilité de bénéficier de tarifs préférentiels auprès de La Poste dès lors qu'ils remplissent les conditions posées par le Code des postes et des communications électroniques 45 ( * ) et sont titulaires d'un certificat d'inscription délivré par la Commission paritaire des publications et agences de presse (CPPAP).

L'accès à ces tarifs réglementés passe par la signature d'un contrat.

4 niveaux de service sont proposés :

- Tarif J+1 - Presse urgente : distribuée 6 jours ouvrés sur 7 en J/J+1 ;

- Tarif J+2 - Presse urgente : distribuée 6 jours ouvrés sur 7 en J+2 ;

- Tarif J+4 - Presse : distribuée 6 jours ouvrés sur 7 dans un délai maximum de J+4 ;

- Tarif J+7 - Presse à tarif économique : distribuée 6 jours ouvrés sur 7 dans un délai maximum de J+7.

Chacune des quatre grilles tarifaires propose, du premier gramme au kilogramme, et pour cinq cas de figure différents, un ensemble de tarifs propre à satisfaire la réglementation en vigueur.

Trois autres tarifs viennent par ailleurs moduler ce coût :

- Tarif presse hors IPG ;

- Tarif presse IPG ;

- Tarif Autre imprimé périodique (AIP).

Ainsi un titre IPG paie 34 % du tarif de service universel correspondant. Cette participation s'établit à 12 % pour un quotidien à faibles ressources publicitaires alors qu'elle est de 69 % pour un magazine.

Du fait de la modicité des tarifs postaux réglementés de presse au regard des coûts affectés à l'activité et du niveau de la participation financière de l'État . La Poste a ainsi supporté, en 2018, un déficit brut de près de 287 millions d'euros avant compensation publique (dont 197 millions d'euros au titre de la presse IPG) 46 ( * ) .

Contribution de La Poste aux aides à la presse en 2018
avant compensation de l'État

(en millions d'euros)

Type de presse

Chiffre d'affaires constaté (tarif de service public)

Chiffre d'affaires potentiel (tarif de service universel)

Avantage tarifaire pour les éditeurs (Contribution de La Poste)

Quotidiens à faibles ressources publicitaires (IPG)

5

43

38

Presse d'information politique et générale

83

242

159

Autres titres CPPAP

204

294

90

Total

292

579

287

Source : La Poste

L'État verse chaque année à La Poste une compensation pour financer le transport postal. Inscrite au sein du programme 134 « Développement des entreprises et régulations » de la mission « Économie », elle s'élève en loi de finances pour 2021 à 87,8 millions d'euros (AE = CP). Il convient, à ce stade, de relever que de 2009 à 2020, l'État a réduit de plus de 62 % sa contribution. Cette baisse substantielle reste difficilement amortissable. En effet, pour compenser une baisse de 20 millions d'euros de la contribution de l'État, il conviendrait de majorer les prix applicables à la presse non IPG de 7,5 %.

Le coût net de la mission de service public pour La Poste s'est ainsi élevé à 186 millions d'euros en 2019. Le déficit , qui reste à la charge de La Poste, constitue, de fait, une aide supplémentaire à la presse .

Ce déficit résulte plus précisément de la conjugaison de plusieurs facteurs :

- les tarifs de presse sont préférentiels et particulièrement abordables, très inférieurs aux tarifs courants du courrier à poids et urgence équivalents ;

- les prix payés par les éditeurs couvrent en moyenne 51 % des coûts ;

- la contribution publique versée à La Poste couvre 19 % des coûts.

Le déficit de l'activité a néanmoins été réduit sur les dix dernières années de plus de moitié sous l'effet de la hausse des tarifs, du maintien d'une partie de la contribution publique et, pour l'essentiel, de la réduction des coûts de La Poste.

Évolution du compte presse de La Poste

(en millions d'euros )

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

Évolution. 08/19

Chiffre d'affaires de la mission de service public (hors compensation)

473

401

395

402

404

397

396

397

376

340

300

274

-42%

Coûts attribuables à la mission de service public

1078

1 027

1 002

952

946

952

904

862

861

712

587

564

-48%

Déficit brut

-605

-626

-607

-550

-542

-555

-508

-465

-485

-372

-287

-290

-52%

Compensation du moratoire

0,0

24,5

24,5

27,4

29,2

30,6

1,5

2,5

0,0

0,0

0,0

0,0

Contribution de l'État à La Poste

232,2

229,5

242,0

241,0

232,0

217,0

150,0

130,0

119,0

121,0

111,5

103,8

-55%

Déficit net

-373

-372

-340

-282

-281

-307

-356

-332

-366

-251

-176

-186

-50%

Source : Direction générale Médias et Industries culturelles, ministère de la culture, réponse au questionnaire budgétaire 2021

Le montant de la compensation est aujourd'hui appelé à évoluer, le cadre tarifaire établi pour les années 2016 à 2020 étant arrivé à son terme. La trajectoire d'évolution des tarifs définie prévoyait que les tarifs de La Poste pour la période n'augmenteraient pas au-delà de l'inflation pour les quotidiens à faibles ressources publicitaires. Ils devaient augmenter hors inflation, de 1 % l'an pour la presse d'information politique et générale et de 3 % l'an pour les titres de presse bénéficiant d'un avis favorable de la commission paritaire des publications et des agences de presse (CPPAP) afin de bénéficier du régime économique de la presse (tarifs fiscaux et postaux privilégiés).

b) De nouvelles propositions en cours d'élaboration

Le Gouvernement a confié, à l'automne 2019, à Emmanuel Giannesini, conseiller maître à la Cour des comptes une mission visant à définir différents scénarios d'évolution des tarifs postaux et du soutien public au transport postal de la presse à partir du 1 er janvier 2021. Il s'agissait en premier lieu de réviser la grille tarifaire censée prendre fin en 2020.

Cette réévaluation devait tenir compte de trois éléments :

- un contexte d'attrition des volumes de presse postés (- 35 % entre 2013 et 2018). La baisse vise également les exemplaires bénéficiant des tarifs adaptés : entre 2018 et 2020, ces volumes ont diminué en moyenne de 10,9 % par an, le nombre d'exemplaires diffusés par voie postale passant ainsi de 780,6 millions d'exemplaires en 2018 à 618,9 en 2020. Les projections indiquent, par ailleurs, que les volumes de presse postés devraient être divisés par 2,5 d'ici six ans, pour descendre à 300 millions d'exemplaires en 2026 , ce qui induit un changement de modèle ;

- une baisse concomitante de la qualité du transport postal, relevé notamment par les éditeurs. Celle-ci tient à la réorganisation des tournées des facteurs (15 % des abonnés à la presse quotidienne livrés par La Poste sont susceptibles de recevoir leur journal l'après-midi) et à la multiplication des tournées « à découvert », c'est-à-dire non assurées (évaluées à 2 %) ;

- une inadaptation plus globale de la distribution postale des quotidiens qu'il s'agisse du coût de cette distribution, de son impact écologique voire de son sens à l'heure du numérique.

Plus largement, l es augmentations de tarifs pour la presse non-IPG mises en oeuvre au cours des derniers exercices n'ont, par ailleurs, pas eu de résultats probants : elles n'ont pas amélioré le bilan économique de la mission de service public et ont divisé les familles de presse avec le creusement d'un écart entre les trois tarifs postaux (CPPAP, IPG, Quotidiens à faibles ressources publicitaires [QFRP]) et un risque d'insoutenabilité de la charge postale pour beaucoup de titres non IPG.

Présentées en avril 2020, les premières conclusions de la mission Giannesini n'ont pu être arbitrées, compte tenu de la crise sanitaire, qu'à la rentrée 2020 par le Gouvernement qui a décalé l'entrée en vigueur d'une nouvelle grille tarifaire en 2022. Emmanuel Giannesini a été chargé, dans le même temps, de préparer un projet de protocole tripartite négocié entre les services compétents de l'État, La Poste et les représentants des éditeurs de presse. Ce protocole a été conclu en décembre 2020 et reste dans l'attente d'un arbitrage avant son entrée en vigueur.

Le protocole insiste, en premier lieu, sur une réduction au maximum des volumes de presse postés en J+1 au profit du portage, qui peut répondre à la logique dite du « dernier kilomètre ». La distribution de la presse urgente constitue la principale source du déficit du compte presse de la Poste : la distribution en J+1 est en effet responsable de 72 % du déficit du compte presse. Or elle ne semble plus adaptée, contrairement au portage (qui distribue 80 % des abonnements à la presse IPG soit 810 millions d'exemplaires en 2018). L'activité de portage de presse serait reconnue comme participant d'une mission d'intérêt général entrant dans le champ de la régulation de l'ARCEP. Cette complémentarité renforcée entre portage et postage va dans le sens des partenariats déjà développés par La Poste (Neopresse puis Proximy). La mission souhaite, en outre, la constitution auprès de l'ARCEP d'un Observatoire de la qualité de la distribution de la presse abonnée couvrant à la fois le postage et le portage, réunissant les représentants de la presse et de La Poste.

La Poste, acteur du portage

L'engagement du Groupe La Poste en faveur du portage s'est concrétisé dès septembre 2007 avec la création de sa filiale Neopress et le lancement d'offres de portage matinal multi-titres et multi-segments.

Neopress a ainsi distribué jusqu'à 98 000 exemplaires de presse chaque jour. L'activité confiée par les éditeurs de presse n'ayant toutefois pas été au niveau des attentes, La Poste a été contrainte de repositionner son activité en Ile de France.

Neopress a fusionné en 2014 avec la Société de distribution et de vente du Parisien (SDVP) au sein d'une nouvelle entité, Proximy, détenue à 75 % par le groupe Les Échos, dont elles est une filiale, et à 25 % par La Poste. Proximy est aujourd'hui le premier acteur du portage en France. Elle emploie près de 2 000 salariés répartis sur 22 plateformes et assure la distribution pour 174 000 abonnés et 4 400 points de vente.

Source : commission des finances du Sénat, d'après les données transmises par La Poste

L'aide au transport postale serait, de fait, concentrée sur la distribution des exemplaires en zones peu denses, qui reste la cause première du déficit du compte presse de la Poste. Elle reconnaît bien sûr qu'il s'agit là du noyau dur de la mission de service public de l'opérateur, mais propose de chercher à réduire la distribution postale à ce coeur de mission, assumant une forme de démutualisation.

La Poste devrait, par ailleurs, bénéficier d'une compensation au titre de sa mission de service public sur une base réelle et non plus forfaitaire.

La mission prévoit enfin de ne conserver qu'une seule grille tarifaire (tarif CPPAP) maintenue au niveau atteint en 2020 et actualisée de la valeur de l'inflation sur toute la période 2021-2026. Le Groupe La Poste demandait une majoration de 3 % + inflation.

La mission table dans le même temps sur la suppression de l'aide au portage en tant que telle désormais intégrée au sein d'une aide au stock « différenciée à l'exemplaire » , réservée aux titres IPG. Cette aide serait scindée en deux parties, avec une aide à l'exemplaire « posté » et une autre à l'exemplaire « porté ». La première serait calibrée pour neutraliser le surcoût engendré par le passage au tarif CPPAP sur les années 2021-2023, puis dégressive sur la période 2024-2026. L'aide différenciée serait conditionnée, s'agissant de la partie portage, à l'ouverture des réseaux détenus par les éditeurs.

La mise en oeuvre de ces propositions pourrait intervenir à l'occasion du projet de loi de finances pour 2022.

c) Une réforme qui va dans le bon sens mais qui doit être encore précisée

Le rapporteur spécial rappelle que l'inscription des aides au transport postal de la presse au sein du programme 134 de la mission « Économie » ne permet pas de disposer d'une vision globale des aides au secteur. La Cour des comptes avait également souligné, en février 2018, la nécessité de produire un document budgétaire unique visant à évaluer l'ensemble des transferts réalisés au bénéfice de ce secteur. Dans une réponse au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial, le Gouvernement indique que ce rattachement pourrait intervenir à compter du projet de loi de finances pour 2022.

Sur le fond de la réforme proposée, le rapporteur spécial relève qu'elle va dans le bon sens, dès lors qu'elle réduit la mission assignée à La Poste et simplifie une grille des tarifs complexe. Il y a cependant lieu de s'interroger sur la poursuite d'un soutien à fonds perdus au transport postal , alors même que la digitalisation de la presse, la rapidité de la diffusion de l'information comme le coût écologique de la distribution rendent ce mode de distribution en large partie obsolète. La grille tarifaire proposée couvrirait la période 2022-2026. Le rapporteur spécial souhaite qu'il s'agisse de la dernière et que les financements publics soient totalement orientés à cette date vers la modernisation du secteur.

La volonté de valoriser le portage apparaît logique même s'il convient de garder en mémoire l'échec des dernières réformes de l'aide au portage. Les éditeurs de quotidiens à faible ressource publicitaires (QFRP) et des quotidiens à faibles ressources de petites annonces (QFRPA) bénéficient, quant à eux, de tarifs postaux si avantageux qu'ils n'ont aucun intérêt à recourir au portage. Le changement de grille tarifaire postale peut cependant inciter à ce changement de modèle. Par ailleurs, les réseaux de la presse quotidienne régionale (PQR) restent très réticents à s'ouvrir au portage multi-titres par peur de la concurrence. La prise en compte de l'ouverture des réseaux dans l'attribution de la partie portage de l'aide unique devrait permettre de tempérer cette réserve. Il appartient également aux acteurs de ce secteur de prendre conscience du potentiel dont dispose ce type de réseau à l'heure du développement massif de la livraison de petits colis à domicile. Les réseaux de portage ne sauraient en effet servir uniquement de biais pour la livraison de journaux. L'extension des réseaux de portage à d'autres livraisons permettrait de les valoriser. Elle faciliterait de la sorte un désengagement progressif de l'État dans le soutien au portage.

En ce qui concerne la mise en place d'un nouvel observatoire rattaché à l'ARCEP, le rapporteur spécial insiste pour que celui-ci repose sur une base légale. Une telle structure ne peut en effet reposer sur la seule volonté des acteurs de transmettre chiffres et informations. Confier cet observatoire à l'ARCEP implique de donner des moyens d'imposer concomitants au régulateur et notamment un pouvoir de sanction . Cette nouvelle mission ne pourrait par ailleurs pas être opérée à moyens constants pour l'ARCEP. Plus largement, le rapporteur spécial s'interroge sur ce nouvel accroissement à marche forcée des compétences de l'ARCEP , structure qui, a priori , ne bénéficie que d'une culture récente du fonctionnement particulier du secteur de la presse. Sa montée en puissance progressive a déjà été contrariée par la crise sanitaire et la liquidation de Presstalis, impliquant une adaptation plus rapide que prévue.

Reste une interrogation sur le coût de la réforme . Prévue pour être mise en oeuvre entre 2022 et 2026, elle ne permettrait pas, dans un premier temps, de réaliser des économies. La revalorisation de la compensation accordée à La Poste se traduirait en effet par un surcoût de 40 millions d'euros. La réforme devrait cependant permettre une réduction du montant des aides versées à l'horizon 2026.

Recommandation n° 3 : La réforme de l'aide à la distribution (révision de la grille tarifaire du transport postal, soutien au portage et régulation de cette activité) proposée par la mission Giannesini doit, en dépit de son coût lors des premiers exercices et d'une interrogation sur la réelle ouverture des réseaux de portage, être appuyée si elle permet un désengagement progressif de l'État dans le soutien au transport postal et au postage au profit d'un appui à la modernisation du secteur.

Recommandation n° 4 : L'inscription du soutien au transport postal de la presse au sein du programme 134 de la mission « Économie » ne permet pas de disposer d'une vision globale des aides au secteur. Il apparaît indispensable de produire un document budgétaire unique visant à évaluer l'ensemble des transferts réalisés au bénéfice du secteur de la presse écrite.

2. La nécessité de mettre en oeuvre une aide unique destinée à accompagner les stratégies industrielles des titres

Proposée par la mission Giannesini, la mise en place d'une aide au stock « différenciée à l'exemplaire », réservée aux titres IPG répond pour partie aux préconisations de la Cour des comptes formulées en 2013 et 2018, appelant à une simplification des dispositifs des aides à la distribution en vue de la mise en place d'une aide unique globalisée à l'exemplaire, elle aussi circonscrite à la presse IPG.

La distribution ne peut cependant constituer le seul biais en vue d'une réforme des aides à la presse. L'ajustement des tarifs postaux ne saurait en effet occulter une réflexion plus poussée sur la corrélation entre la nature actuelle des aides et leur modalités d'attribution d'un côté et les défis posés en termes industriels par la mutation de l'accès à l'information et les conséquences de celle-ci sur la vie de titres de presse de l'autre.

Cette prise en compte induit un aggiornamento du régime des aides à la presse. La grille d'analyse sous-jacente à la maquette budgétaire tend en effet à souligner une inadéquation entre les enjeux actuels et les réponses, pour parties dépassées qui y sont apportées au plan financier. L'aide à la presse doit aujourd'hui être conçue comme une aide à l'investissement et non plus comme un soutien à des titres fragiles, n'ayant pas pu ou su procéder à une révision de leurs modèles ou comme un appui à des messageries qui ne peuvent rien face à la diminution inexorable du lectorat « papier ». Il s'agit de passer d'une logique de rafistolage à celle d'un accompagnement rationnel.

Le plan de relance constitue à cet égard une première piste de réflexion en vue de mieux tenir compte des questions industrielles, même si sa traduction concrète peine à incarner une inversion de tendance ( cf infra ). .

Dans ces conditions, le rapporteur spécial plaide pour la refonte de l'ensemble des aides (distribution, pluralisme, modernisation) versées actuellement à plusieurs acteurs de la filière en une aide unique au titre, évolutive en fonction de son degré de digitalisation, de sa participation à la connaissance et au savoir ( cf infra ) et de son accès aux ressources publicitaires. Celui-ci doit en particulier prendre en compte le degré d'indépendance des titres.

En effet, au-delà de l'aide à la distribution et à la modernisation, la question des aides au pluralisme doit être posée. Le dispositif profite de fait à quatre quotidiens ( La Croix , L'Humanité , Libération et, dans une moindre mesure L'Opinion ) sans qu'une réflexion ne soit lancée sur la structure même de ces groupes de presse. L'angle de la faiblesse des ressources publicitaires ne peut servir de seul biais à l'attribution d'une subvention . Une analyse des groupes sur lesquels certains de ces titres peuvent s'appuyer par ailleurs ( La Croix appartient à Bayard Presse, Libération est intégré à des degrés divers au sein du groupe Altice) doit également servir de critère en vue de l'attribution d'une dotation publique. Le même raisonnement s'applique aux publications autres que quotidiennes concernées par ces aides. De fait, il pourrait être opportun, dans un contexte de concentration des médias, de procéder à une réorientation des aides au pluralisme, désormais conçues comme un soutien à l'indépendance , visant presse écrite et médias tout en ligne. La notion d'indépendance serait dès lors un critère de majoration de l'aide unique au titre.

Cette nécessaire transparence implique également la publication d'un document détaillant, par titre et par groupe, le montant de l'aide accordée.

Une réforme nécessaire destinée à simplifier
le régime des aides à la presse

Source : commission des finances du Sénat

À côté de cette aide unique au titre, subsisterait un programme d'aide à la modernisation des distributeurs de presse , afin de les aider à maintenir leur activité et s'adapter, une fois encore à l'évolution du lectorat.

Une telle réforme doit intervenir d'ici à 2026 , année régulièrement mise en avant par les acteurs de la filière comme une date charnière (renouvellement de la grille tarifaire de La Poste, fin du plan de soutien aux imprimeries - cf infra -, abandon du papier par certains groupes de presse)

Le rapporteur spécial ne minore pas la difficulté de parvenir à un consensus entre les acteurs de la filière sur les modalités d'octroi de cette nouvelle aide. Les échanges récents menés dans le cadre de la consultation mise en place par l'ARCEP ont, en effet, une nouvelle fois mis en lumière la fragilité du dialogue entre les parties prenantes. Les auditions menées par le rapporteur spécial ont permis en effet de mettre en avant un certain nombre de crispations et de positions parfois inconciliables.

Recommandation n° 5 : Procéder d'ici à 2026 à une révision profonde du régime des aides à la presse écrite en vue de la mise en place d'une aide unique au titre, évolutive en fonction de son niveau de son accessibilité en ligne, de sa participation à la connaissance et au savoir et de son degré d'indépendance. Son versement donnerait lieu à la publication d'un document détaillant, par titre et par groupe, le montant de l'aide accordée.

3. Les aides à l'exportation ont-elles encore un sens ?

Cette refonte du régime des aides induit en outre une réflexion sur les dispositifs mis en oeuvre afin de soutenir l'exportation de la presse française.

Au-delà de l'aide à la distribution des titres IPG à l'étranger et au dispositif prévu au sein du FSDP en faveur du rayonnement de la presse française, les pouvoirs publics financent également UNI-Presse, association dédiée à la promotion des abonnements à l'étranger de la presse française, via l'organisation d'expositions, de salons ou de colloques. UNI-Presse collecte des abonnements lors des manifestations auxquelles elle participe auprès d'une clientèle de particuliers, permettant ainsi la présence de la presse française sur des marchés parfois peu rentables où les éditeurs adhérents n'exporteraient. Elle dispose de 30 représentants répartis au sein de 50 pays.

UNI-Presse compte une centaine d'éditeurs adhérents, représentant 650 titres. Les éditeurs membres acquittent une cotisation annuelle, contribuent au financement des expositions et mettent des exemplaires gratuits à la disposition d'UNI-Presse.

UNI-Presse a bénéficié jusqu'en 2011 d'une subvention de 450 000 euros dans le cadre du fonds d'aide à la promotion et à la distribution de la presse française à l'étranger. En 2012, l'association a été soutenue dans le cadre de la troisième section du FSDP : quatre projets ont été soutenus pour un total de 219 829 euros de subvention. En 2013, le montant de la subvention publique à l'association a été ramené à 200 000 euros. Au plan formel et compte tenu de la mission d'intérêt général qu'accomplit UNI-Presse, il a été désormais convenu de procéder par voie de convention simple avec l'État, hors procédure du FSDP. Cette convention se justifie par les missions d'intérêt général accomplies par UNI-Presse au bénéfice du pluralisme de l'information et du rayonnement de la presse française à l'étranger. La subvention a été majorée en 2019 pour atteindre 230 000 euros , afin de tenir compte d'une cotisation exceptionnelle apportée par les éditeurs à l'association en 2018. En 2020 , afin de tenir compte des circonstances exceptionnelles liées à la pandémie de COVID-19, la subvention a été portée à 300 000 euros .

En 2019, UNI-Presse a permis de souscrire 22 558 nouveaux abonnements . Elle a mis en place à cet effet un « plan Éveil », permettant de baisser le prix de ventes des abonnements dans certains pays. L'aide fournie par l'État s'élève dans ces conditions à 10,20 euros par abonnement .

Au final, en ajoutant les aides à la diffusion et celles versées par le FSDP, les crédits dédiés au soutien à l'export de la presse atteignent en année normale environ 1,6 million d'euros. Si le montant n'est pas élevé en soi (1,5 % environ de la totalité des aides à la presse versées dans le cadre du programme 180), il convient néanmoins de s'interroger sur l'efficacité de cette dépense compte tenu, là encore, de l'évolution du lectorat et de l'accès à l'information. Une aide plus ciblée sur la transition numérique pourrait tout aussi bien faciliter une meilleure audience de la presse française au sein d'autres pays.

Recommandation n°6 : Supprimer les aides à l'exportation qui peuvent apparaître obsolètes eu égard au soutien accordé par ailleurs à la transition numérique des titres.

4. La question de la qualification IPG

La mise en oeuvre d'une aide unique à l'exemplaire pose enfin la question du type de titre ciblé.

Les aides à la presse sont aujourd'hui principalement concentrées sur la presse d'information politique et générale (IPG). La qualification de presse d'IPG ouvre droit au bénéfice des aides indirectes (postales et fiscales) et des aides au pluralisme, au portage et à la modernisation. 99 % des aides seraient ainsi, selon le ministère de la culture, fléchées vers la presse IPG, au risque de faire passer ce critère comme une « fortification » protégeant certains titres.

Les quotidiens sportifs généralistes et les SPEL professionnels, scientifiques et culturels sont, hors IPG, les seuls titres éligibles aux aides au portage et à la modernisation (FSDP, FSEIP). Les aides au transport postal sont, de leur côté, plus favorables à la presse IPG.

Montants des aides à la presse IPG depuis 2014
(hors aide au transport postal)

(en euros)

2014

2015

2016

2017

2018

2019

130 247 449

104 583 991

95 231 318

94 675 284

87 957 950

81 164 841

Source : Direction générale Médias et Industries culturelles, ministère de la culture, réponse au questionnaire budgétaire 2021

La qualification IPG est accordée par la commission paritaire des publications et agences de presse (CPAPP). Cette instance est composée de 22 membres 47 ( * ) : 11 représentants de l'administration de l'État et 11 professionnels.

Depuis l'adoption de la loi du 18 octobre 2019 relative à la modernisation de la distribution de la presse 48 ( * ) , la notion de presse d'information politique et générale fait l'objet d'une définition de rang législatif , reprenant à l'identique les termes de cette même définition issue de divers textes réglementaires. Présentent ainsi le caractère de presse d'information politique et générale les journaux et publications périodiques qui :

- apportent de façon permanente sur l'actualité politique et générale, locale, nationale ou internationale des informations et des commentaires tendant à éclairer le jugement des citoyens ;

- consacrent la majorité de leur surface rédactionnelle à cet objet ;

- présentent un intérêt dépassant d'une façon manifeste les préoccupations d'une catégorie de lecteurs.

La qualification IPG est codifiée à l'article D.19-2 du code des postes et communications électroniques. Elle ouvre le droit aux différents régimes d'aides (tarifs préférentiels de La Poste, aides à la diffusion, au pluralisme et à la modernisation). Les suppléments des publications IPG (télévision, féminins, hors-séries) peuvent également bénéficier de cette qualification (article D.27-2 du code des postes et communications électroniques) 49 ( * ) et accéder au tarif préférentiel de transport postal.

L'article 17 de l'annexe II du code général des impôts précise cette définition en vue de l'application du régime fiscal visant les provisions, défini à l'article 39 bis A du même code. L'entreprise doit :

- éditer une publication de périodicité au maximum mensuelle ou un service de presse en ligne ;

- apporter de façon permanente sur l'actualité politique et générale, locale, nationale ou internationale des informations et commentaires tendant à éclairer le jugement des citoyens ;

- consacrer au moins le tiers de sa surface rédactionnelle à cet objet.

Les critères retenus apparaissent moins restrictifs : la surface dédiée au contenu d'information politique et générale peut être réduite au tiers. La rédaction laisse également la possibilité de s'adresser à un lectorat particulier.

Au 31 juillet 2020, sur un total de 6 175 titres disposant d'un numéro de publication de la CPAPP, 519 publications bénéficient de la qualification d'information politique et générale.

Progression du nombre de titres IPG
entre 2010 et 2019

Années

Nombre de titres IPG créés

Nombre de titres IPG disparus

Solde

2010

14

4

+ 10

2011

2

17

- 15

2012

2

2

0

2013

8

15

- 7

2014

10

15

- 5

2015

44

5

+ 39

2016

46

8

+ 38

2017

29

9

+ 20

2018

22

19

+ 3

2019

21

8

+ 14

Total

198

102

+ 96

Source : Direction générale Médias et Industries culturelles, ministère de la culture, réponse au questionnaire budgétaire 2021

Outre les mensuels Marie-Claire et Vanity Fair , les titres jeunesse Okapi et Phosphore , mais aussi Sélection Reader's Digest ont été reconnus, en février dernier, comme des médias d'information politique et générale (IPG) par la Commission paritaire des publications et agences de presse (CPPAP), ouvrant ainsi un accès aux aides au transport postal ou à la modernisation, mais aussi aux mesures fiscales. L'hebdomadaire Elle bénéficie du statut IPG depuis janvier 2020.

Ce statut bénéficie également au site de presse en ligne FranceSoir , alors même que de nombreux observateurs estiment que le média ne constitue plus qu'un relais aux thèses conspirationnistes, sans travail journalistique propre.

Au regard du lien ténu entre ces publications et la notion d'information politique et générale, il y a lieu de s'interroger sur la validité de ce critère et, in fine , sur le ciblage retenu dans le cadre de l'attribution des aides à la presse. Le rapporteur spécial insiste sur les conséquences financières de cet élargissement, à première vue, de la catégorie IPG : le coût, pour La Poste, du transport du magazine Elle est ainsi estimé à 3 millions d'euros par an, celui de Télérama à 8 millions d'euros annuels.

C'est dans ce contexte, qu'à la demande de la ministre de la culture, Mme Laurence Franceschini, présidente de la CPPAP, a remis, le 20 avril 2021, un rapport sur le renforcement de l'exigence du traitement journalistique pour accéder aux aides à la presse. Ce document préconise un élargissement des critères d'éligibilité à la qualification IPG, celle-ci devant désormais prendre en compte :

- la notion d'originalité des contenus ;

- le traitement journalistique ;

- la présence de journalistes professionnels au sein des rédactions : pourrait ainsi être définies une part minimale de la masse salariale consacrée aux journalistes, une part minimale des effectifs dédiés à la rédaction ou une part minimale de la masse salariale des journalistes et des autres frais éditoriaux par rapport aux coûts globaux de l'entreprise éditrice.

Une concertation avec les organisations professionnelles représentatives des éditeurs de presse et les organisations syndicales représentatives des journalistes doit désormais être organisée afin de déterminer les modalités concrètes de mise en oeuvre de ces recommandations.

S'il partage les précisions apportées par le rapport Franceschini sur la nécessité de renforcer l'appréciation des contenus et d'évaluer la présence des journalistes au sein de l'entreprise 50 ( * ) , le rapporteur spécial souhaite aller plus loin que ces propositions.

Une unification de la définition du contenu IPG apparaît en tout premier lieu souhaitable, tant il existe un écart important entre celle retenue pour l'application de l'article 39 bis A du CGI et celle du code des postes et communications électroniques.

Le rapporteur spécial s'interroge, en outre, sur un élargissement de la catégorie IPG aux publications dites de la connaissance et du savoir en vue de faire bénéficier de l'aide à l'exemplaire unique qu'il appelle de ses voeux. D'après le rapport d'activités 2018 de la CPPAP, 259 publications s'inscrivaient dans la catégorie « science, culture et connaissance ».

Si cette solution peut apparaître séduisante, reste à déterminer quels critères retenir pour déterminer quel titre relève de ce type de presse, ce qui peut susciter le même type de débat qu'aujourd'hui s'agissant de la presse dite IPG. L'article 39 bis B du code général des impôts propose d'ores et déjà des critères permettant de mieux encadrer cette catégorie en ciblant la presse permettant de développer l'information professionnelle ou de favoriser l'accès au savoir et à la formation et la diffusion de la pensée, du débat d'idées, de la culture générale et de la recherche scientifique.

Il ne s'agit pas pour autant de majorer les crédits dédiés aux aides à la presse afin de tenir compte de cet élargissement. La réforme proposée par Emmanuel Giannesini pour l'aide à la distribution table sur des économies à l'horizon 2026. Le rapporteur spécial propose par ailleurs de mieux cibler les aides existantes en tenant compte notamment du degré d'indépendance des titres. Des marges de manoeuvres existent donc aux fins de soutien à ce secteur de la presse.

Recommandation n° 7 : Élargir la catégorie IPG aux publications de la connaissance et du savoir. Cet élargissement s'effectuerait à coût constant pour l'État, dans le cadre de la vaste révision du régime des aides prévue par ailleurs.


* 42 Loi n° 2019-1063 du 18 octobre 2019.

* 43 Loi n° 47-585 du 2 avril 1947.

* 44 Loi n° 90-568 du 2 juillet 1990.

* 45 Articles D.18 à D.28.

* 46 Ce montant équivaut à la différence entre le chiffre d'affaires qui résulterait de l'application des tarifs du service universel et celui qu'elle réalise en appliquant les tarifs de service public.

* 47 16 membres lorsqu'elle statue sur les agences de presse.

* 48 Loi n° 2019-1063 du 18 octobre 2019.

* 49 Décret n° 2016-2013 du 30 décembre 2016 relatif au transport postal des suppléments et hors-série.

* 50 Ce critère pourrait ne pas s'avérer suffisant pour une meilleure approche : sollicitée par le ministère de la culture, la CPPAP a, en effet, confirmé, le 24 mars 2021, le statut IPG de FranceSoir en s'appuyant sur la présence au sein de l'équipe du site de deux journalistes et quatre pigistes.

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