C. LA NÉCESSITÉ D'UN RENFORCEMENT STRUCTUREL DES MOYENS FINANCIERS ET HUMAINS DES MDPH

1. La nécessité d'objectiver les besoins des MDPH en vue de définir une trajectoire d'augmentation de leurs moyens

Face à cet accroissement massif de leur activité, un consensus existe entre les acteurs sur la nécessité de renforcer les moyens des MDPH . Une démarche en ce sens a été engagée dans le cadre de la Feuille de route « MDPH 2022 » .

La feuille de route « MDPH 2022 »

Dans la continuité de la conférence nationale du handicap du 11 février 2020 et de la mission d'appui à la simplification de l'accès aux droits des personnes handicapées, le Secrétariat d'État aux personnes handicapées a souhaité consolider l'ensemble des projets touchant aux MDPH dans une feuille de route « MDPH 2022 » partagée .

Celle-ci est le fruit d'un travail de co-construction avec l'ensemble des acteurs nationaux responsables de la politique publique des MDPH, soit le Secrétariat d'État aux personnes handicapées, la direction générale de la cohésion sociale (DGCS) et la CNSA d'une part, ainsi que la mobilisation ponctuelle des administrations partenaires d'autre part : direction générale de l'enseignement scolaire (DGESCO) , direction générale à l'emploi et à la formation professionnelle (DGEFP), direction de la sécurité sociale (DSS), et caisse nationale d'allocations familiales (CNAF).

La feuille de route comporte 38 projets structurés autour de 5 axes :

1° Adapter les droits et les parcours aux besoins des personnes ;

2° Clarifier l'engagement des acteurs de l'écosystème pour un accompagnement personnalisé, de proximité ;

3° Maîtriser les délais et la qualité de service des MDPH ;

4° Renforcer les moyens d'action des MDPH pour garantir l'équité de traitement ;

5° Assurer un pilotage effectif de la feuille de route au niveau local et national.

Source : réponse au questionnaire budgétaire

Des efforts doivent à ce titre être salués avec notamment la décision de « socler » de façon pérenne une majoration de 15 millions d'euros du montant global de la dotation CNSA à compter de 2021 .

Pour les rapporteurs spéciaux, il convient cependant d'aller plus loin en menant un véritable travail de qualification et de quantification des moyens dont doit disposer une MDPH pour assurer ses missions convenablement . Un tel travail doit notamment faire le point sur les effectifs et la composition des équipes pluridisciplinaires évaluant les demandes , souvent trop réduites pour remplir l'objectif assigné d'analyse globale de la situation des demandeurs.

Dans son rapport précité relatif à l'AAH, la Cour des comptes a relevé que, dans les faits, ces « équipes pluridisciplinaires » étaient dans la majorité des cas limitées à une personne ou à un binôme, souvent constitué au demeurant d'un seul profil évaluateur et complété par un profil administratif, les formations plus larges étaient réservées aux cas les plus complexes. Une part importante des MDPH fait également face à un déficit de compétences pour la constitution des équipes pluridisciplinaires : plus de 40 % des MDPH ne bénéficient pas du concours de psychologues, alors même que les déficiences du psychisme constituent, après les déficiences motrices, les troubles les plus représentés parmi les usagers des MDPH (toutes prestations confondues)

Ainsi, si le renforcement annoncé des moyens est bienvenu, seul un référentiel détaillé des objectifs, des tâches et des charges des MDPH permettrait de déterminer une projection financière objective et soutenable.

Recommandation n° 3 : mener un travail de qualification et de quantification des compétences dont doit disposer une MDPH pour assurer ses missions convenablement, en portant un diagnostic précis sur les effectifs et la composition des équipes pluridisciplinaires dans les MDPH.

2. Un soutien accru doit être apporté aux MDPH les plus en difficulté

Les rapporteurs spéciaux ont en outre pu constater d'importantes inégalités de moyens entre les MDPH eu égard à leurs charges.

Selon la CNSA, pour un montant comparable d'avis et décisions, on constate d'importantes disparités des contributions de toute nature entre structures. Les apports globaux sont compris entre 30,34 euros et 173,1 euros par avis et décision rendus, pour une moyenne à 109,22 euros et une médiane à 75,32 euros.

Des disparités importantes de moyens humains peuvent être constatées. Les écarts vont de 1 ETP travaillé (ETPT) pour 5 128 habitants pour les MDPH à 1 ETPT pour 23 146 habitants selon les départements (hors outre-mer 10 ( * ) ), pour une moyenne de 1 ETPT pour 11 116 habitants en 2019. Si l'on rapporte ces données au nombre de décisions et avis rendus, on constate que 14 MDPH se trouvent dans une situation particulièrement tendue , avec en moyenne entre 1 000 et 1 808,9 décisions et avis par ETP travaillé par an.

Nombre de décisions et avis rendus par ETP travaillé en 2019

(échantillon : 95 MDPH)

Source : CNSA, enquête annuelle 2019

Face à ce constat, la mise en place d'une « task force » de la CNSA en appui aux MDPH les plus en difficulté dans le cadre de la feuille de route « MDPH 2022 » peut également être saluée. Celle-ci est dotée d'un budget d'intervention de 20 millions d'euros sur deux ans (2021-2022).

Ses interventions sont de 4 ordres :

- des réponses aux questions complexes ;

- un appui à la conception et au pilotage de projets ;

- un appui à la mise en oeuvre des projets sur le terrain ;

- un appui à la mobilisation de ressources supplémentaires.

Pour les rapporteurs spéciaux, son action doit être précisément évaluée en vue de mettre en lumière les façons les plus adéquates de soutenir les MDPH les plus en difficulté et de déterminer les moyens pérennes qu'il conviendrait d'allouer à ce type d'interventions.

Recommandation n° 4 : évaluer rigoureusement l'action de la « task force » mise en place par la CNSA en faveur des MDPH les plus en difficulté d'ici 2022, afin d'examiner l'opportunité d'une pérennisation voire d'un renforcement de l'enveloppe ponctuelle qui lui a été attribuée.


* 10 Les données ne sont pas communiquées pour certains départements d'outre-mer. Le ratio y est néanmoins nettement supérieur dans certains, cas par exemple à Saint-Pierre et Miquelon (1 ETPT pour 1225 habitants).

Page mise à jour le

Partager cette page