D. UNE DERNIÈRE CHANCE POUR LA COMPENSATION EN NATURE DE L'ÉCO-CONTRIBUTION

La fin de la compensation en nature versée à CITEO, pourtant prévue depuis deux ans, est apparue comme « la goutte d'eau qui fait déborder le vase » à des éditeurs contraints de subir la hausse des coûts de production tout en investissant massivement dans le numérique alors même que la pandémie pèse encore lourdement sur leurs comptes. Ainsi, ce qui serait probablement apparu comme une contrariété est devenu un point de fixation.

Ce sujet appelle plusieurs remarques.

Tout d'abord, la France a fait le choix courageux et écologiquement responsable d'inclure la presse dans le champ d'application de la directive 2018/851 du 30 mai 2018. Les collectivités locales ont donc investi en conséquence pour traiter les volumes produits. Le débat est donc celui de la nécessité de faire évoluer les modes de production pour tenir compte du défi climatique. Cette prise en compte est cohérente avec les positions adoptées par la France et l'Union Européenne ces dernières années, mais emporte des conséquences concrètes et potentiellement dommageables à certains secteurs . Les débats autour de la proposition de loi de Patrick Chaize visant à réduire l'empreinte environnementale du numérique en France, qui proposait, au nom de la contrainte environnementale, une exemption de taxation pour la copie privée des appareils reconditionnés, relèvent du même constat.

Dès lors, on peut considérer que la presse, comme les autres secteurs, doit s'adapter d'ores et déjà et donc se soumettre au droit commun en matière de traitement de ses déchets, d'autant plus que l'échéance est connue depuis deux ans. Cela n'exclut cependant pas d'estimer que la fin de cette exemption s'inscrit dans un calendrier particulièrement défavorable et pourrait justifier d'une neutralisation financière qui pourrait prendre deux formes :

ü la prolongation de l'exemption . Elle nécessiterait cependant une interprétation favorable en ce sens des autorités communautaires et une modification de la loi avant la fin de l'année. Le calendrier est ainsi particulièrement contraint, mais pas insurmontable . Il convient cependant de noter que, dans ce cas, les collectivités locales continueraient à assurer une charge qui ne leur serait pas compensée via les contributions financières des éditeurs ;

ü une compensation versée par l'État aux éditeurs. Un mécanisme semblable a d'ailleurs été annoncé par l'ancien secrétaire d'État en charge du numérique Cédric O pour les « reconditionneurs » désormais soumis à la taxe sur la copie privée. Dans ce cas, la charge passerait des éditeurs à l'État.

La mission d'information propose dans un premier temps de s'assurer auprès de la Commission européenne de la bonne interprétation à donner à la notion de « contribution financière » contenue dans la directive. S'il apparaissait que la compensation en nature était possible de manière durable, il appartiendrait dès lors au Parlement de trancher sur une éventuelle réécriture de l'article L. 541-10-19 du code de l'environnement.

Recommandation n° 6 : Interroger la Commission européenne sur le sens précis de la « contribution financière » au sens de la directive 2018/851 du 30 mai 2018, pour infirmer ou approuver la possibilité d'une exemption de l'éco-contribution en nature. Dans ce dernier cas, faire débattre par le Parlement d'une modification de l'article L. 541-10-19 du code de l'environnement .

Si la réponse de la Commission européenne s'avérait négative, et donc que la contribution doive bien se comprendre comme exclusivement financière, la mission d'information propose que l'État la compense pour cette seule première année , compte tenu du contexte extrêmement difficile pour le secteur.

Recommandation n° 7 : Pour la seule année 2023, compenser pour les éditeurs l'éco-contribution versée à CITEO .

Dans le même ordre d'idée, les éditeurs auront à terme la faculté de diminuer, voire d'annuler la contribution financière, selon le principe de modulation prévu à l'article L. 541-10-3 du code de l'environnement, en fonction des efforts de la filière en faveur de l'environnement et dans le cadre d'un dialogue avec CITEO. Une telle piste parait devoir être privilégiée pour le futur, mais elle implique un engagement fort de l'ensemble des acteurs.

Recommandation n° 8 : Dans l'hypothèse où le principe d'une contribution financière serait maintenu, inviter les éditeurs à user des facultés de modulation de l'éco-contribution prévue à l'article L. 541-10-3 du code de l'environnement pour alléger les montants versés .

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