DEUXIÈME PARTIE :
DES MODALITÉS DE GESTION ET D'ATTRIBUTION DES DOTATIONS LAISSANT PEU DE PLACE
AUX ÉLUS LOCAUX

I. D'UN SYSTÈME DE DOTATIONS LIBRES D'EMPLOI À UN SYSTÈME DÉCONCENTRÉ

A. LES ANCIENNES DOTATIONS D'ÉQUIPEMENT LIBRES D'EMPLOI

Les actuelles dotations d'investissement de l'État ont en commun de fonctionner selon un système de subventions de projets sélectionnés, dans la majorité des cas sans consultation des élus, par les préfets de région ou de département. Il n'en a cependant pas toujours été ainsi : historiquement, le soutien financier de l'État à l'investissement public local passait également par l'attribution de dotations « libres d'emploi », telles que les dotations globales d'équipement (DGE) des communes ou des départements, système qui n'était pas exempt de limites.

1. La dotation globale d'équipement des communes

Prévue par la loi du 2 mars 1982 relative aux droits et aux libertés des communes, des départements et des régions 17 ( * ) , la DGE des communes a été mise en place par la loi du 7 janvier 1983 18 ( * ) . Son montant, ouvert en loi de finances initiale pour 2010, dernière année d'existence du dispositif, s'élevait à 484,39 millions d'euros. Jusqu'en 2009, son évolution était indexée sur l'évolution de la formation brute de capital fixe (FBCF) des administrations publiques.

Ce dispositif, qui visait à financer certaines dépenses d'investissement de communes et EPCI dont l'éligibilité repose sur des critères de population et/ou de richesse fiscale, a été remplacé, à compter de 2011, par la DETR 19 ( * ) . Cette dernière est le fruit d'une fusion de la DGE avec la dotation de développement rural (DDR) qui, déjà, reposait exclusivement sur une logique de subvention de projets sélectionnés par le préfet.

À l'inverse des « subventions spécifiques » prévalant avant les lois de décentralisation comme de l'actuelle DETR, la DGE avait initialement pour caractéristique d'être libre d'emploi pour les collectivités bénéficiaires, en abondant directement leur section d'investissement .

Ce système a cependant rapidement montré certaines limites, puisqu'il entraînait par construction une forte dispersion des moyens , et donc in fine le versement de montants très faibles aux communes et EPCI éligibles. En outre, sa répartition entre collectivités était relativement injuste calculée au prorata de leurs dépenses réelles d'investissement, avec l'effet pervers de défavoriser les plus petites communes, pour lesquelles les opérations de grande ampleur sont plus rares.

Ainsi, dès 1996 20 ( * ) , la DGE a évolué afin d'obéir de nouveau à une logique de subvention sur projets sélectionnés par le préfet de département . Une commission consultative d'élus a cependant été constituée, préfigurant la « commission DETR ». Celle-ci fixait les catégories d'opérations prioritaires et les taux minima et maxima de subvention applicables à chacune d'elles. Elle était, en outre, informée de la liste des opérations à subventionner ainsi que du montant de l'aide de l'État qui leur était attribué.

2. La dotation globale d'équipement des départements

Historiquement, les départements bénéficiaient également d'une dotation générale d'équipement dont le montant s'élevait, en 2018, année d'extinction du dispositif, à 212 millions d'euros. Son montant était pour l'essentiel réparti au prorata des dépenses d'aménagement foncier effectuées et des subventions versées pour la réalisation de travaux d'équipement rural.

La DGE versée était inscrite à la section d'investissement du budget du département et relevait d'une logique de liberté d'emploi encadrée puisque le département pouvait l'utiliser, soit pour réaliser des travaux d'équipement rural ou d'aménagement foncier, soit pour subventionner les différents maîtres d'ouvrage qui réalisaient des opérations de même nature.

Ce dispositif, qui présentait les mêmes limites que la DGE des communes bien que la dispersion des crédits soit moindre compte tenu du nombre nettement plus restreint des départements, a été remplacé par la DSID à compter de 2019 21 ( * ) .

Dans ses trois premières années d'existence, la DSID a toutefois conservé, au moins partiellement, une logique de liberté d'emploi . Le dispositif était en effet divisé en deux fractions : la première (77 % de l'enveloppe) était désormais versée sous la forme de subventions sur projets sélectionnés par le préfet de région, tandis que la seconde (23 %) demeurait libre d'emploi pour les départements éligibles, les départements au potentiel fiscal le plus élevé en étant exclus.

La loi de finances initiale pour 2022 22 ( * ) a finalement supprimé cette fraction libre d'emploi . Il avait en effet été constaté que celle-ci ne représentait en 2021 qu'une enveloppe limitée à 48,7 millions d'euros et répartie dans 87 départements, ce qui aboutissait à des montants par département très faibles 23 ( * ) .

Ainsi, depuis le 1 er janvier 2022, il ne subsiste plus aucun cas de liberté d'emploi par les collectivités territoriales des dotations d'investissement versées par l'État.


* 17 Article 103 de la loi n° n° 82-213 du 2 mars 1982 relative aux droits et libertés des communes, des départements et des régions.

* 18 Articles 102 et suivants de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l'État.

* 19 Article 179 de la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011.

* 20 Article 33 de la loi n° 95-1346 du 30 décembre 1995 de finances pour 1996.

* 21 Article 259 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019.

* 22 Loi n° 2021-1900 du 30 décembre 2021 de finances pour 2022.

* 23 Projet annuel de performances de la mission « Relations avec les collectivités territoriales » annexé au projet de loi de finances pour 2022.

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