B. LA SÉCURITÉ SOCIALE NE JOUE QU'UN RÔLE MARGINAL DANS LA GOUVERNANCE DE LA PLUPART DES OFFROB, VOIRE NE SIÈGE MÊME PAS DANS LES INSTANCES

1. Malgré son importance dans les recettes des Offrob, la sécurité sociale est souvent peu, voire pas représentée dans leur gouvernance

La prépondérance des administrations de sécurité sociale dans le financement de certains Offrob ne se traduit pas dans leur gouvernance.

Sur les quinze Offrob, la sécurité sociale n'a la majorité dans aucune instance dirigeante, tandis que l'État est majoritaire à l'Oniam, à l'EFS et à l'Atih ; des organismes qu'il ne finance pourtant qu'à hauteur de 13 % en ce qui concerne l'Oniam, voire à moins de 1 % pour l'EFS et l'Atih.

La sécurité sociale dispose de moins de membres que l'État dans les instances dirigeantes de chacun des Offrob à l'exception du Fiva, dont le conseil d'administration, composé de 22 membres, comprend cinq représentants de l'État et huit représentants de la branche AT-MP.

Dans certains conseils d'administration, comme celui du CNG, on ne compte même aucun membre pour représenter la sécurité sociale, qui finance pourtant à travers la branche maladie 99 % du budget de cet établissement en ressources. De même, aucun membre du collège de la HAS n'est désigné par une administration de sécurité sociale.

2. Le mouvement de socialisation du financement des Offrob ne s'est pas accompagné d'une modification dans la gouvernance des organismes

Les transferts de subventions de l'État à la sécurité sociale pour sept Offrob, qui ont eu pour effet de renforcer la place de la sécurité sociale au sein des financeurs des établissements concernés, ne se sont en aucun cas traduits par une révision de la composition des instances.

Dans certains cas, comme celui de l'EHESP, la situation est particulièrement surprenante. Les établissements de santé, anciens financeurs de l'école via leurs contributions, ont maintenu leur place prépondérante au sein du conseil d'administration, tandis que la sécurité sociale, qui ne figurait pas au sein des financeurs historiques mais fournit désormais 65 % des produits de l'école, n'est même pas représentée au conseil d'administration.

S'il est indubitable que la fin de la contribution des établissements de santé au budget de l'EHESP ne saurait avoir pour effet de donner un rôle subalterne à la composante hospitalière compte tenu de l'intérêt pour les professionnels hospitaliers de peser sur les orientations de l'école qui forme ses cadres, il semble tout aussi incongru que le financeur majoritaire ne soit même pas présent lors des délibérations sur le budget.

Dès lors, à structure de financement constante, « l'évolution de son mode de financement pose la question de l'intégration de la Cnam au sein de son conseil d'administration », selon la contribution de l'EHESP à la mission.

Toutefois, il reste que l'évolution la plus logique au vu des missions de l'EHESP serait celle d'un transfert intégral du financement de la sécurité sociale à l'État, que l'école appelle de ses voeux.

La même question se pose au CNG, au sein duquel la Cnam, à l'origine de 99 % des ressources de l'organisme, « n'intervient pas sur les questions budgétaires et financières » puisqu'elle ne participe à la gouvernance du CNG qu'au travers de sa tutelle, la DSS.

Pour autant, le CNG note que s'il « peut apparaître logique que le principal voire unique financeur d'un organisme public en soit l'un des principaux décideurs », la déconnexion entre l'activité de la Cnam et les missions du CNG fait que « l'absence de la Cnam de la gouvernance du CNG ne soulève pas de difficulté particulière en termes de gestion courante ».

3. Les GIP entre l'État et l'Uncam : une fiction juridique ne dénotant pas d'une réelle communauté de moyens

Le groupement d'intérêt public (GIP) est une personne morale de droit public autonome constituée entre plusieurs personnes morales de droit public, ou entre une personne de droit public et une ou plusieurs personnes morales de droit privé. Cette forme juridique, popularisée par la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et d'amélioration de la qualité du droit dite « Warsmann », qui lui donne une assise législative en son article 98, vise à la mise en commun de moyens afin d'exercer des activités d'intérêt général.

Contrairement à un établissement public, le GIP se caractérise par une certaine latitude en fonctionnement et une autonomie de gestion qui fait, en principe, obstacle à un encadrement législatif ou réglementaire trop contraignant.

L'ANDPC, l'Anap et l'ANS ont toutes trois été constituées sous la forme d'un GIP entre l'État et une ou plusieurs caisses de la sécurité sociale.

Toutefois, ce format apparaît, selon l'audition de l'ANDPC, être une « fiction juridique ».

Si l'assemblée générale de l'ANDPC est composée paritairement de représentants de l'État et de l'Union nationale des caisses d'assurance maladie (Uncam), l'agence est, dans les faits, contrôlée uniquement par l'État, qui a par ailleurs encadré son fonctionnement dans le code de la santé publique.

Cela fait dire à l'agence que « ce statut n'a in fine aucun sens au regard des missions de l'Agence. L'ANDPC a porté auprès de l'État l'idée qu'elle soit transformée en EPA d'autant qu'elle est d'ores et déjà encadrée dans son fonctionnement par des textes codifiés dans le code de la santé publique alors que le principe de fonctionnement d'un GIP est au contraire une fluidité d'organisation. Cela aurait pour conséquence de requestionner la composition de son conseil d'administration, surtout si elle gère le financement du DPC de l'ensemble des professionnels de santé.

Par ailleurs ce GIP est une fiction juridique et ne correspond à aucune mise en commun de moyens entre l'État et l'assurance maladie. La Cnam est actuellement le seul financeur de l'Agence même si les textes prévoient que l'État puisse également contribuer. »

Un phénomène similaire est observable pour l'Anap, dans la gestion de laquelle « la sécurité sociale intervient fort peu », comme le mentionne la contribution de l'agence à la mission.

4. L'État exerce un contrôle de fait sur la majorité des Offrob

Les auditions conduites par la mission ont démontré l'importance de l'État dans la gouvernance des Offrob. Comme c'est le cas pour les opérateurs de l'État, les représentants des diverses directions d'administration centrale
- notamment la direction générale de l'offre de soins et la direction générale de la santé côté tutelle métier et la direction de la sécurité sociale accompagnée de la direction du budget côté tutelle financière - occupent une place prépondérante dans la gestion de la majorité des Offrob, à l'exception, notamment, de la HAS, du fait de son statut d'autorité publique indépendante.

Cela est cohérent avec le statut juridique d'établissement public administratif sous tutelle du ministre chargé de la santé, qu'ont la plupart des organismes financés par la sécurité sociale, à l'image de l'Oniam ou de l'ANSM.

Si les représentants de l'État sont parfois absolument majoritaires dans les instances, comme c'est par exemple le cas à l'Anap avec neuf sièges sur quinze au conseil d'administration, il est également fréquent d'observer une répartition paritaire des voix entre l'État et l'ensemble des autres parties prenantes, comme à l'Oniam ou à l'ANSM, par exemple.

Le recul de la place de l'État dans le financement des Offrob ne s'est donc pas, à ce stade, traduit par un recul en conséquence du rôle de l'État dans la gestion des organismes concernés.