EXAMEN EN COMMISSION

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Réunie le mercredi 12 juillet 2023, sous la présidence de Mme Catherine Deroche, présidente, la commission examine le rapport d'information de Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale, et de Mme Annie Le Houerou, rapporteure, sur le rapport « Dotations de la sécurité sociale : sortir de la logique du financement à l'aveugle », dans le cadre de la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss).

Mme Catherine Deroche, présidente. - Nous allons entendre à présent la communication d'Élisabeth Doineau et d'Annie Le Houerou à l'issue des travaux de contrôle qu'elles ont conduits, au nom de la mission d'évaluation et de contrôle de la sécurité sociale (Mecss), sur les organismes et fonds financés par les régimes obligatoires de base de sécurité sociale.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale. - Le sujet est technique, mais nous allons parler des organismes dont certains regrettaient lors de l'audition de M. Toujas qu'ils ne soient pas assez connus. Nous allons vous fournir les fiches d'identités de quinze organismes, dans les détails. Vous pourrez ainsi consulter à tout moment ce répertoire, comparer les recettes et les dépenses de ces organismes, voir comment ils sont gérés. Cette mission d'information constitue donc une sorte de dictionnaire des organismes financés par la sécurité sociale.

L'effort financier total de la sécurité sociale en 2022 en faveur des organismes et fonds financés par les régimes obligatoires de base, que l'on propose d'appeler « Offrob », s'élève à 6,7 milliards d'euros. Quoique leur ordre de grandeur n'égale pas celui de l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (Ondam) hospitalier ou de l'Ondam de ville, les enjeux financiers du financement des Offrob sont loin d'être négligeables : en guise d'exemple, le montant qui leur est affecté est moitié plus élevé que les crédits de la mission « Culture » du budget de l'État.

Ces quinze organismes et fonds forment une catégorie hétéroclite d'agences, d'établissements et de fonds financés par la sécurité sociale et disposant d'une certaine autonomie pour mettre en oeuvre des volets spécifiques de la politique de santé. Citons notamment Santé publique France, la Haute Autorité de santé (HAS), l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), ou l'Établissement français du sang (EFS) : autant d'organismes qui jouent un rôle primordial au service de la santé de nos concitoyens, et dont j'aimerais d'emblée saluer l'action et l'engagement quotidien.

Compte tenu des enjeux financiers considérables associés au financement des Offrob et de leur place essentielle au coeur de notre système de santé, on pourrait croire que le Parlement joue un rôle prépondérant dans le processus de détermination des moyens qui leur sont accordés, en vertu du principe d'autorisation parlementaire des dépenses publiques consacré par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. Il n'en est rien. Soumis à une procédure dérogatoire liée à leur rattachement à la loi de financement de la sécurité sociale plutôt qu'à la loi de finances, l'établissement des dotations à accorder aux Offrob laisse fort peu de place au débat parlementaire.

L'épidémie de covid-19 a fourni, à cet égard, un exemple marquant de cette insuffisance : près de 5 milliards d'euros de subventions exceptionnelles ont été attribués à Santé publique France, sans même que le Gouvernement ne juge bon ou utile d'en avertir les commissions des affaires sociales des deux chambres. Sans remettre en cause l'opportunité de l'ouverture de ces crédits, l'absence d'information parlementaire a révélé des failles démocratiques considérables dans la procédure budgétaire applicable.

Il nous est donc paru opportun de mener des travaux à ce sujet dans le cadre de la Mecss afin de vous apporter, ainsi qu'à nos concitoyens, tous les éclaircissements nécessaires sur le cadre du financement des Offrob, et de proposer des pistes pour davantage associer le Parlement à la détermination des ressources de ces organismes.

J'en conviens, le sujet des modalités de financement des Offrob peut paraître technique. Pour autant, le cycle d'auditions que nous avons mené nous a conduites à accueillir plus de la moitié de ces organismes, et à solliciter une contribution écrite de l'ensemble des Offrob restants. Par conséquent, à l'occasion de cette mission d'information, nous avons pu explorer plus en détail, dans une sorte de travail archéologique, l'historique, les missions, les difficultés et les perspectives de chacun des établissements. L'un des objectifs du rapport est donc également d'offrir davantage d'informations pour parfaire notre connaissance de l'activité de ces opérateurs si nécessaires au bon fonctionnement de notre système de santé.

Mme Annie Le Houerou, rapporteure. - Avant de revenir sur la procédure budgétaire applicable et ses insuffisances, j'aimerais donner quelques éléments pour préciser l'historique et le contexte.

Trois branches sont aujourd'hui concernées par le financement des Offrob : la branche maladie, qui porte plus de 80 % des montants de subvention et finance ou cofinance treize des quinze Offrob ; la branche accidents du travail et maladies professionnelles (AT-MP), qui finance deux fonds liés à l'amiante ; et la branche autonomie, qui cofinance trois organismes pour des montants plus restreints.

Si la sécurité sociale a participé historiquement au financement de nombreux organismes sanitaires, par l'intermédiaire d'une dotation des régimes obligatoires de base, son rôle en la matière s'est considérablement renforcé depuis les années 2010. En 2017, le soutien aux Offrob atteignait 1,4 milliard d'euros, contre 6,7 milliards d'euros en 2022 : les sommes engagées ont donc été multipliées par cinq en six ans.

Pour expliquer cette dynamique exponentielle, le premier facteur réside dans l'attribution de dotations exceptionnelles à destination d'opérateurs mobilisés dans le cadre de la lutte contre l'épidémie de covid-19 et du Ségur de la santé. Santé publique France a par exemple bénéficié de plus de 10 milliards d'euros de subvention exceptionnelle depuis 2020, dont 3,8 milliards d'euros en 2022, principalement utilisés pour acheter des masques, du matériel de protection et des vaccins.

Toutefois, même en déduisant l'effet des subventions exceptionnelles, les subventions pérennes ont doublé de valeur entre 2017 et 2023, sous deux effets distincts.

D'une part, à taux d'effort constant des régimes obligatoires de base dans les recettes des organismes concernés, l'accroissement des missions et, corrélativement, du budget de certains Offrob explique pour partie la trajectoire haussière des dotations financées par la sécurité sociale. Évoquons quelques exemples marquants : le budget socle de Santé publique France a augmenté de 67 % en cinq ans, et celui de la Haute Autorité de santé de plus de 40 %.

D'autre part, les années 2010 ont été marquées par un mouvement de socialisation du financement des Offrob. Les cas de cofinancement d'organismes par l'État et la sécurité sociale, autrefois fréquents, se sont raréfiés face à la volonté de l'État de décroiser les subventions, c'est-à-dire de transférer l'ensemble des subventions publiques pérennes et non fléchées à un unique financeur, qu'il soit l'État ou la sécurité sociale.

Dans les faits, le décroisement des subventions a toujours consisté en un transfert de la charge de la subvention de l'État à la sécurité sociale, dans un contexte marqué par des prévisions de retour à l'équilibre des finances sociales. Seule exception à la règle, Santé publique France, dont la subvention de la sécurité sociale avait été transférée à l'État en 2017, est finalement intégralement financée par la branche maladie depuis 2020. Depuis 2015, sept Offrob ont fait l'objet d'une socialisation de leur financement : Santé publique France, l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, la Haute Autorité de santé, l'École des hautes études en santé publique (EHESP), le Centre national de gestion (CNG), chargé de diverses missions de gestion du personnel hospitalier, l'Agence de la biomédecine (ABM) et l'Agence technique de l'information sur l'hospitalisation (Atih).

Cette socialisation a été justifiée par la lourdeur d'une double procédure budgétaire, dépendant du projet de loi de finances (PLF) d'un côté, du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) de l'autre, pour les organismes concernés, confirmée par les auditions que nous avons menées. Toutefois, dans le cas de l'École des hautes études en santé publique, le transfert de la subvention du ministère de la santé à la sécurité sociale, qui ne faisait pas partie des financeurs historiques, a conduit à rajouter un financeur et à complexifier le circuit de financement, la dotation du ministère de l'enseignement supérieur ayant été maintenue.

Par ailleurs, la mission a interrogé la cohérence de la socialisation du financement de l'EHESP, établissement d'enseignement supérieur, du Centre national de gestion, dont une large partie des charges provient de l'organisation de concours médicaux et administratifs, ou de Santé publique France, dont les missions relatives à la veille épidémiologique semblent se rattacher aux responsabilités de l'État en matière de sécurité sanitaire. Ne devrait-il pas plutôt revenir à l'État de financer ces trois organismes, au vu de leurs missions ?

En tout état de cause, ces transferts de subvention ont rendu les Offrob plus dépendants de la dotation de la sécurité sociale pour leur fonctionnement et leur développement : celle-ci représente, en moyenne, 78 % des produits des Offrob ; et dans neuf des quinze Offrob, la subvention de la sécurité sociale dépasse 90 % des produits totaux.

Toutefois, la modification de l'équilibre des financeurs n'a pas été suivie d'adaptations de la gouvernance des établissements concernés, sur laquelle l'État a entendu garder prise. Bien que l'effort financier de la sécurité sociale en faveur des Offrob soit très dynamique et représente des montants financiers significatifs, sa représentation dans les instances des organismes qu'elle finance est donc faible, voire inexistante, dans le cas de l'École des hautes études en santé publique ou du Centre national de gestion.

Cela fait de la sécurité sociale un financeur aveugle, sans influence ni réel contrôle sur les orientations budgétaires des organismes qu'elle finance. Déplorant cette situation, les conseillers des caisses nationales préconisent une doctrine simple : « pas de dotation sans représentation ».

La mission a souhaité tirer le bilan du financement des Offrob par la sécurité sociale sur le fonctionnement des organismes concernés. Elle a observé que la procédure budgétaire applicable était opérationnelle, relativement légère, flexible et harmonisée pour les organismes concernés. La mission a également noté que, dans la grande majorité des cas, les Offrob faisaient état de très bonnes relations, partenariales et constructives, tant avec la Caisse nationale de l'assurance maladie (Cnam) qu'avec la direction de la sécurité sociale (DSS).

Toutefois, la mission a constaté des failles dans ce mode de financement, tant pour la bonne gestion des organismes et fonds concernés que pour la portée de l'autorisation parlementaire.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale. - La procédure budgétaire apparaît insuffisamment transparente : en ce sens, certains organismes auditionnés ont déploré le manque de justifications assorties aux arbitrages budgétaires rendus.

De plus, la détermination du montant de subvention accordée est marquée par une application stricte du principe d'annualité : les Offrob ne disposent d'aucune trajectoire pluriannuelle, même strictement indicative, dans le montant de dotation envisagé. Cela ajoute de l'insécurité au sujet des ressources des organismes, et peut être un obstacle à l'établissement de projets pluriannuels coûteux, notamment en matière d'investissement.

Enfin, certaines agences déplorent un financement et un plafond d'emplois insuffisants pour la conduite de leurs missions, au premier rang desquelles la Haute Autorité de santé, l'Établissement français du sang et le Centre national de gestion.

Cela s'explique pour partie par le mode de financement : les Offrob se partagent une enveloppe fermée, le sixième sous-objectif de l'Ondam. Ce sous-objectif hétéroclite, qui couvre également les dépenses médico-sociales en dehors du champ de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA) et la prise en charge des soins des Français de l'étranger, deux sujets qui n'ont rien à voir, est piloté indépendamment des besoins des organismes puisque sa trajectoire prévisionnelle suit celle de l'Ondam. Par conséquent, il existe une concurrence entre ces organismes pour l'attribution des crédits.

Par ailleurs, le financement de nouvelles missions n'est pas systématique : certaines agences se retrouvent donc dans des situations de sous-financement, et doivent assurer des missions élargies à moyens constants. Ce point est critique pour la Haute Autorité de santé, confrontée à des élargissements de compétences très fréquents et non compensés.

La situation est d'autant plus étonnante que les organismes qui estiment disposer de ressources financières et humaines insuffisantes côtoient certains Offrob qui semblent, au contraire, surfinancés par rapport à l'exécution de leurs budgets. L'Agence du numérique en santé et le Fonds pour la modernisation et l'investissement en santé ont ainsi dépassé, à eux deux, 500 millions d'euros de résultat net positif en 2021.

Le plafond d'emplois constitue également un point sensible dans la gestion des Offrob, avec de fortes demandes de rehaussement pour Santé publique France, l'ANSM ou la HAS, trois agences touchées par des schémas d'emplois négatifs dans les années 2010.

La conformité du financement des Offrob au principe d'autorisation parlementaire des dépenses publiques pose des questions manifestes. Même rénové par la loi organique sur les lois de financement de la sécurité sociale du 14 mars 2022, qui a notamment renforcé l'information parlementaire et instauré, à l'initiative de notre commission, une obligation de notification des commissions compétentes en cas de dépassement de plus de 10 % du montant de dotation prévu en loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) à un organisme, le cadre juridique ne répond pas à tous les enjeux.

D'abord, les crédits attribués aux Offrob sont, comme l'ensemble des crédits votés en LFSS, de nature évaluative et non limitative, comme c'est le cas pour les subventions de l'État à ses opérateurs. Le caractère évaluatif des crédits votés en LFSS répond, en principe, à la nature particulière des dépenses financées. Il s'agit en effet essentiellement de dépenses assurantielles correspondant à des droits ouverts, non pilotables et non adaptables en gestion.

Toutefois, les subventions versées aux Offrob sont au contraire des dépenses arbitrables, voire pilotables, de la même nature que les subventions versées par l'État à ses opérateurs. Rien ne justifie donc qu'ils fassent l'objet d'une normativité restreinte.

De plus, parmi les quinze Offrob recensés, seuls quatre sont bénéficiaires d'une subvention dont le montant fait l'objet d'un vote explicite du Parlement. Ces quatre Offrob correspondent, en prenant en compte les montants 2022 hors majorations exceptionnelles, aux trois principales dotations, celles au fonds pour la modernisation et l'investissement en santé et aux deux fonds amiante, et, sans que la direction de la sécurité sociale ne soit en mesure de l'expliquer, à celle située en sixième position, qui est celle à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (Oniam), l'établissement qui indemnise les accidents médicaux.

Les onze autres dotations, qui comprennent notamment celles à l'Agence nationale du développement professionnel continu et à Santé publique France, dont le montant est pourtant supérieur à celui de la dotation à l'Oniam, font l'objet d'un vote implicite de leur dotation, au moyen du vote de l'Ondam et notamment de son sixième sous-objectif. Toutefois, ce sixième sous-objectif ne régit les dotations que de douze des quinze Offrob, à une échelle agrégée, et, comme je l'évoquais tout à l'heure, il prend également en charge des dépenses sans lien avec les Offrob, comme les soins des Français de l'étranger. Le sixième sous-objectif de l'Ondam ne donne donc pas au Parlement une vision fiable du montant des dotations des régimes obligatoires de base aux Offrob.

Pour les onze organismes dont le montant de la dotation n'est pas individualisé dans la LFSS, un simple arrêté ministériel peut déterminer la dotation accordée, voire le cas échéant la modifier en cours d'année, à rebours du principe d'autorisation parlementaire des dépenses publiques.

Comme les montants inscrits en LFSS ne sont pas limitatifs, on pourrait a priori se dire que le fait que pour onze Offrob le montant de la dotation soit déterminé par arrêté n'a pas d'importance. L'enjeu concerne en fait l'information du Parlement : pour que l'obligation de notification des commissions compétentes en cas de dépassement de plus de 10 % du montant de dotation prévu en LFSS puisse s'appliquer, encore faut-il que le montant ait été inscrit en LFSS. Il est en outre impossible de débattre, lors de la discussion du PLFSS, des montants des dotations aux différents Offrob, si ceux-ci ne figurent pas dans le PLFSS.

Plus généralement, l'information proposée aux parlementaires est insatisfaisante. L'annexe au PLFSS dédiée comprend des erreurs et des oublis regrettables, et ne mentionne par exemple nullement l'existence d'une subvention exceptionnelle de 405 millions d'euros à Santé publique France pour 2023, équivalant pourtant à 13 % du montant de l'effort total de la sécurité sociale en faveur des Offrob. Par ailleurs, malgré la rénovation du cadre organique applicable, il subsiste un déficit d'information dans l'annexe au PLFSS portant sur les Offrob par rapport au jaune budgétaire « Opérateurs de l'État ».

Cela a donné lieu à des manquements graves au principe d'information parlementaire, avec l'attribution par arrêté et sans information du Parlement des 4,8 milliards d'euros de dotation exceptionnelle à Santé publique France en 2020 que j'évoquais tout à l'heure.

À rebours du droit budgétaire, une partie de ces dotations non votées par le Parlement ont même permis d'abonder le budget de l'État pour plus de 700 millions d'euros en 2020, et même de 1,8 milliard d'euros sur l'ensemble de la crise, au moyen des fonds de concours.

Il s'agit là d'une entorse manifeste au principe d'autorisation parlementaire : afin d'outrepasser les crédits budgétaires votés par le Parlement pour certains programmes, le Gouvernement a jugé bon, sans informer le Parlement, de mobiliser des crédits de la sécurité sociale non votés.

Mme Annie Le Houerou, rapporteure. - Tout cela concourt à limiter le rôle du Parlement dans la détermination des dotations versées par la sécurité sociale aux Offrob.

Par conséquent, la mission a conclu à la nécessité de réformer la procédure budgétaire applicable selon deux axes : rendre plus démocratique la prise de décision, et rendre plus efficace la gestion des Offrob.

Une priorité est de renforcer la portée de l'autorité parlementaire. Le cadre actuel ne permet aujourd'hui pas véritablement aux parlementaires de remettre en question le niveau des dotations accordées, quand elles sont manifestement inadaptées. Cela est particulièrement dommageable compte tenu du rôle essentiel joué par les Offrob pour notre système de santé. C'est pourquoi nous proposons de faire figurer explicitement en LFSS le montant prévisionnel total des dotations aux Offrob, et de le décliner organisme par organisme. Il importe notamment que nous, parlementaires, puissions, quand cela est nécessaire, offrir à ces agences une tribune dans le débat en LFSS, et défendre les moyens qui leur sont accordés.

Par ailleurs, les parlementaires doivent recevoir une information suffisante pour analyser l'adéquation entre la dotation proposée et les besoins de chacun des organismes. Au-delà de la pleine application des dispositions organiques, nous demandons une harmonisation du niveau d'information parlementaire sur les Offrob avec celui qui prévaut pour les opérateurs de l'État.

La deuxième priorité est d'adapter la gouvernance et la gestion des Offrob pour davantage d'efficacité.

Nous proposons, conformément au souhait des conseillers de la Cnam, d'associer les caisses nationales de sécurité sociale dans la gouvernance de chacun des Offrob qu'elles financent de manière pérenne. C'est une mesure cohérente, nécessaire pour faire cesser la situation de financeur aveugle dans laquelle se trouve la sécurité sociale.

Sans revenir sur le principe d'annualité, nous proposons que la DSS communique aux Offrob une trajectoire indicative sur trois ans du montant de dotation qui pourrait leur être affecté, afin que les organismes puissent disposer d'une visibilité accrue pour leurs projets de développement, au service du système de santé. Cela répondrait à une attente forte des Offrob, d'autant plus prégnante que la part de la dotation de la sécurité sociale dans leurs recettes est importante.

Enfin, nous proposons au Gouvernement de tirer le bilan des transferts de dotation de l'État à la sécurité sociale d'ici à 2027, année retenue parce qu'elle est celle de la prochaine élection présidentielle, notamment pour les organismes dont les missions semblent davantage justifier un financement par l'État que par la sécurité sociale, comme Santé publique France, l'École des hautes études en santé publique ou le Centre national de gestion.

Mme Véronique Guillotin. - Je vous remercie de ce rapport, à la fois simple et pertinent. Les solutions proposées semblent tellement évidentes qu'on se demande pourquoi elles ne sont pas déjà appliquées : connaître les sommes, les recenser, savoir si les besoins sont ou non adaptés, d'où vient le financement, pourquoi ces organismes sont financés...

Mme Émilienne Poumirol. - Ce rapport nous éclaire sur un sujet dont nous parlons souvent, mais pour lequel la transparence manque. Je suis inquiète concernant le transfert de missions de l'État vers la sécurité sociale. Si l'on voulait tuer la sécurité sociale, on ne s'y prendrait pas autrement.

M. Alain Milon. - Tous les gouvernements l'ont fait !

Mme Émilienne Poumirol. - Le constat saute aux yeux, car ce système de glissement s'est pérennisé et devient de plus en plus important. Il est facile de mettre la sécurité sociale en déficit si on lui demande de financer des missions qui ne lui reviennent pas, comme le financement de l'École des hautes études en santé publique.

Je remercie les rapporteures d'avoir insisté sur l'absence de transparence de l'information du Parlement, et sur la nécessité d'un plan pluriannuel pour permettre une visibilité. L'année dernière, en visitant l'Établissement français du sang à Toulouse, j'avais entendu le cri d'alarme de ses agents, qui manquent cruellement de financements et de visibilité, qui éprouvent des difficultés à recruter du personnel et à remplir leur mission, en particulier celle qui concerne les médicaments issus du plasma, en raison du manque de moyens. Comme le dit Véronique Guillotin, les solutions apportées paraissent simples et évidentes, mais le rapport, accablant, remet en question notre rôle de parlementaires.

M. René-Paul Savary. - Il faut effectivement analyser ces éléments, qui traduisent l'opacité volontaire dans laquelle on tente de maintenir le Parlement. Plutôt que de nous simplifier la tâche, d'année en année, on multiplie les tuyaux de financements, on les change ; les gouvernements passent, mais les administratifs restent, et on se retrouve avec des documents toujours formatés de la même manière, et qui ne correspondent pas à ce que nous espérons. Les choses ne semblent pas beaucoup évoluer en la matière...

J'abonde dans le sens des rapporteurs concernant la pluriannualité. Je suis d'avis qu'il faudrait bien un jour ou l'autre fixer un Ondam pluriannuel. On en revient au manque de vision, qui n'est pas favorisée par un Ondam annuel.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale. - Je vous remercie de ces remarques. Au fil des auditions, nous nous sommes rendu compte qu'il y avait de nombreuses choses à dire. D'un point de vue historique, cette socialisation a montré des défaillances. Le conseil d'administration de l'EHESP ne comprend aucun membre représentant la sécurité sociale, qui pourtant finance l'école. Il est pour le moins incongru que son principal financeur ne soit pas représenté lors des délibérations budgétaires !

Nous n'avons peut-être pas assez insisté sur le fait que la plupart de ces établissements aux formes juridiquement disparates bénéficient des financements de la Cnam. Peu sont financés par la branche AT-MP, ou par la branche autonomie. La DSS débat chaque année des montants avec les organismes, mais certains d'entre eux sont au bout de leurs moyens financiers, tandis qu'on leur confie des missions supplémentaires sans qu'ils disposent de davantage de ressources. Ce rapport et ses recommandations simples pourront servir de socle pour le prochain PLFSS.

Mme Annie Le Houerou, rapporteure. - Le rapport nous a permis de mieux connaître ces établissements. Dans le cadre du PLF, le financement de ces établissements permettrait de tenir un argumentaire intéressant et développé sur leur situation, mais dans le cadre du budget de la sécurité sociale l'argumentaire est bien opaque. Il faut améliorer la transparence vis-à-vis de parlementaires : en votant l'Ondam, nous devons savoir précisément où va l'argent, d'autant que les budgets de certains de ces organismes sont parfois très importants. Sans les interpellations des professionnels de ces établissements, nous n'aurions pas été au courant de leur situation financière lors de l'examen du dernier PLFSS. C'est pour le moins dommage, car notre rôle est de porter un avis sur ces financements.

Concernant la pluriannualité, le sujet a été évoqué lors des auditions, car les décisions d'affectation budgétaires à ces établissements semblent un peu aléatoires. Le ministère du budget a souvent la main sur ces évolutions. Pour autant, ces établissements ont besoin de perspectives : il faut une adéquation entre les missions confiées et les budgets attribués. Pour nombre d'entre eux, cela représenterait un progrès important sur l'année à venir, car les informations budgétaires sont données très tardivement.

Mme Élisabeth Doineau, rapporteure générale. - Le rapport comportera des tableaux où figureront les montants des financements de l'État et de la sécurité sociale pour l'ensemble de ces organismes ; ces informations sont extrêmement précieuses.

Les recommandations des rapporteures sont adoptées.

À l'unanimité des membres présents, la commission des affaires sociales adopte le présent rapport d'information et ses annexes, et en autorise la publication.