III. VERS UN SOUTIEN SANTÉ À LA HAUTEUR DU DÉFI DE LA HAUTE INTENSITÉ : LA REMONTÉE EN PUISSANCE EST ENGAGÉE MAIS NE SE FERA PAS EN UN JOUR

A. UNE PRISE DE CONSCIENCE DE LA NÉCESSITÉ DE RENFORCER LES MOYENS FINANCIERS DU SSA

La remontée en puissance des forces visée par l' « Ambition 2030 » qui sous-tend les LPM 2019-2025 et 2024-2030 ne saurait faire l'économie d'un renforcement concomitant du soutien santé. Il y va de la cohérence de notre outil de défense.

Suite aux économies imposées au cours de la programmation 2014 2019, la LPM 2019-20258(*), qui se voulait « de réparation », a stabilisé les crédits hors T2 du SSA. Décidée dans un contexte géopolitique dégradé, l'Actualisation stratégique 2021 avait ensuite prévu un renforcement de 216 millions d'euros de ces crédits sur la période de programmation.

La LPM 2024-2030 a ensuite traduit une prise de conscience plus générale de la nécessité, dans une logique de cohérence, d'opérer un rééquilibrage de l'effort budgétaire au profit des services de soutien. Leurs ressources s'élèveraient en effet à 18 milliards d'euros sur l'ensemble de la période, contre 14 milliards d'euros sous la précédente programmation.

S'agissant du SSA, la programmation prévoit quant à elle une enveloppe de crédits hors titre 2 (HT2) totale de 3,8 milliards d'euros, soit environ 1 milliard de plus que celle prévue pour la période 2019-2025.

Il en résulte une trajectoire de nette augmentation de ces crédits (+ 12 % par an en moyenne), pour les porter à plus de 700 millions d'euros en 2030.

Il est cependant à noter que la principale marche (+ 144 millions d'euros) est prévue pour la dernière année de la programmation, et est donc renvoyée au milieu du prochain quinquennat, rendant sa réalisation pour le moins hypothétique. Cette observation, comme l'avait relevé le rapporteur spécial en sa qualité de rapporteur pour avis lors de l'examen du projet de LPM 2024-2030, vaut d'ailleurs pour l'ensemble de la trajectoire programmée9(*).

Évolution des crédits de paiement hors T2 programmés
au profit du SSA entre 2014 et 2030

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire du rapporteur spécial

Le rapport annexé à cette loi consacre d'ailleurs une section importante (2.3) aux services de soutien et en particulier au SSA. À l'initiative du rapporteur spécial en sa qualité de rapporteur pour avis, son texte a été enrichi par plusieurs amendements de la commission des finances visant à mettre l'accent sur l'importance de la préparation à la haute intensité, le nécessaire renforcement de la politique des ressources humaines, et les travaux à engager pour le remplacement de l'hôpital Laveran par un hôpital neuf à Marseille (voir infra).

Les apports de la commission des finances à la section du rapport annexé à la
LPM 2024-2030 relative aux SSA

« La présente LPM renforcera les ressources et les moyens alloués aux soutiens des forces, qui irriguent tous les domaines d'activité des armées. La consolidation des services de soutien commun, notamment le service du commissariat des armées (SCA) et les bases de défense, permettra de disposer de stocks prépositionnés et au juste niveau ainsi que de moyens modernes (équipements, infrastructures, outils numériques). Si elles présentent un intérêt économique et financier avéré, des externalisations pourront être conduites, sous réserve de rester compatibles avec les impératifs opérationnels inhérents à notre souveraineté.

Toutes les capacités de la chaîne du service de santé des armées (SSA) projetée en opération (postes médicaux, structures médico-chirurgicales dont les hôpitaux de campagne, évacuations médicales, etc.) seront renouvelées pour garantir le soutien des engagements militaires, y compris dans une perspective de haute intensité.

À cette fin, une attention particulière sera portée au volume des moyens nécessaires à la gestion efficace d'un afflux important de blessés en cas d'engagement majeur.

Au cours de la période de programmation, les moyens aériens (notamment hélicoptères) et terrestres (notamment blindés Griffon et Serval en version sanitaire) de la chaîne d'évacuation médicale seront ainsi réévalués et, le cas échéant, consolidés. Le déploiement des antennes chirurgicales de nouvelle génération (antennes de réanimation et de chirurgie de sauvetage - ARCS) sera accéléré et l'objectif de porter à un minimum de 65 le nombre d'équipes chirurgicales projetables sera atteint le plus tôt possible.

En outre, une réflexion sera lancée concernant les compétences de soins des infirmiers des armées, qui pourraient être élargies, notamment afin de contribuer au renforcement de la médecine de l'avant.

Le ravitaillement médical sera modernisé, notamment en augmentant considérablement ses capacités de stockage et de production, pour améliorer sa réactivité et sa résilience. Le ravitaillement médical assurera également la disponibilité des médicaments pris sur une base régulière pour les militaires ou civils de la défense touchés par un conflit. Le ministère des armées engage un travail pour répertorier les savoir-faire détenus par son SSA afin de les préserver et les faire perdurer.

Le parcours de soins des militaires sera renforcé grâce au maillage territorial de la médecine des forces et à une meilleure coordination avec la composante hospitalière militaire.
Les hôpitaux militaires consolideront le contrat opérationnel du SSA et la prise en charge des blessés physiques et psychiques de guerre, améliorant le service rendu aux armées et, par extension, aux territoires de santé :

- Percy, Bégin, Sainte-Anne et Laveran s'appuieront sur leurs pôles d'excellence pour renforcer leur positionnement dans l'offre de soins nationale, notamment face aux situations sanitaires exceptionnelles ;

- Clermont-Tonnerre et Legouest consolideront leurs missions spécifiques (soutien à la dissuasion, expertise pour les unités militaires du Grand Est) ;

- Desgenettes et Robert-Piqué se spécialiseront dans la réhabilitation physique et psychique sur le long terme des militaires blessés, en lien avec l'Institution nationale des invalides et les maisons Athos.

Les effectifs du SSA seront renforcés. Pour améliorer l'attractivité de ses métiers et la fidélisation des personnels dans un contexte de fortes tensions sur ses ressources humaines, cet effort de recrutement s'appuiera sur une politique salariale volontariste et le souci de redonner du sens à l'engagement au sein du SSA, en valorisant son identité militaire.

Les personnels du SSA, dont ceux de l'Institut de recherche biomédicale des armées, font l'objet d'une revalorisation de points d'indice supplémentaires, au même niveau que la transposition du « Ségur de la santé » au SSA.

Au cours de la période de programmation, des travaux seront lancés en vue du remplacement de l'hôpital d'instruction des armées Laveran par un hôpital neuf.

Les prérequis médicaux sont communiqués par le service de santé des armées aux candidats à l'incorporation, avant que débutent les épreuves de sélection. »

Note : en gras, les mentions issues d'amendements de la commission des finances du Sénat conservées dans le texte final.

Source : rapport annexé à la loi n° 2023-703 du 1er août 2023 relative à la programmation militaire pour les années 2024 à 2030 et portant diverses dispositions intéressant la défense


* 8 Loi n° 2018-607 du 13 juillet 2018 relative à la programmation militaire pour les années 2019 à 2025 et portant diverses dispositions intéressant la défense.

* 9 Avis n° 730 (2022-2023) de M. Dominique de LEGGE, déposé le 13 juin 2023, sur le projet de loi relatif à la programmation militaire pour les années 2024 à 2030 et portant diverses dispositions intéressant la défense.

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