C. LA MISSION D'OBSERVATION PRÉÉLECTORALE EN POLOGNE

Lors de sa visite en Pologne (26-27 septembre 2023), la délégation pré-électorale de l'APCE a constaté que la campagne électorale se déroulait dans un climat tendu et marqué par des antagonismes à l'approche des élections législatives du 15 octobre. La délégation a écouté les inquiétudes largement répandues quant à un possible recul démocratique, qui risquait de saper la confiance du public dans l'équité du processus électoral.

La délégation multipartite de cinq membres, conduite par Mme Mireille Clapot, s'est rendue à Varsovie, où elle a rencontré de hauts fonctionnaires, des représentants des autorités judiciaires, des autorités électorales et des partis politiques, des organisations de la société civile et des observateurs des médias indépendants, ainsi que des représentants du corps diplomatique.

La délégation a fait part de ses préoccupations concernant le référendum qui doit se tenir le même jour que les élections législatives ; divers interlocuteurs ont suggéré qu'il viserait à permettre de contourner les règles de financement applicables à la campagne électorale. La délégation a également déclaré craindre que la formulation des questions du référendum ne préjuge des réponses, et a estimé que l'obligation, pour les électeurs et électrices, de refuser activement de prendre le bulletin de vote du référendum risquait de compromettre le secret du scrutin pour celles et ceux qui voulaient participer aux élections mais pas au référendum.

En outre, la délégation a exprimé des préoccupations car la légitimité de certaines juridictions est mise en cause au niveau national et international. Par exemple, la Cour européenne des droits de l'homme a décidé de ne plus considérer comme un tribunal « établi par la loi » la chambre du contrôle extraordinaire et des affaires publiques de la Cour suprême polonaise. Ces facteurs pourraient créer de l'incertitude si les résultats des élections étaient contestés.

Les membres de la mission pré-électorale ont été informés de plusieurs modifications apportées au Code électoral au cours d'une période de silence législatif, notamment le passage à un registre électoral central, qui n'aura pas été expérimenté à grande échelle avant les élections. En outre, ils se sont déclarés déçus que le Parlement n'ait pas ajusté le nombre de sièges dans les circonscriptions pour tenir compte de l'évolution démographique, comme l'exige la loi et comme l'a proposé la Commission électorale nationale. Toutefois, la délégation a salué le niveau élevé de confiance dans la capacité du personnel électoral local à remplir ses missions.

La délégation a constaté avec satisfaction que la liberté des candidats de faire campagne n'est pas entravée en Pologne, mais elle s'est fait l'écho des préoccupations de certains interlocuteurs concernant le déséquilibre de la couverture médiatique assurée par les organes de presse publics.

La délégation a aussi pris note des préoccupations exprimées au sujet de la distinction floue entre les activités de l'État et celles des partis politiques et au sujet du manque de transparence du financement de la campagne.

La question du processus de vote applicable aux citoyens polonais résidant à l'étranger a également été soulevée par certains interlocuteurs de la délégation ; ceux-ci ont évoqué en particulier des modifications législatives qui pourraient avoir pour effet d'invalider les suffrages des circonscriptions situées à l'étranger si les bulletins ne parviennent pas à la Commission électorale nationale dans les 24 heures suivant la clôture du scrutin.

La délégation reconnaît qu'il peut être difficile de résoudre certains de ces problèmes avant le jour des élections, mais elle demande instamment que des mesures soient prises pour traiter les points qui peuvent encore être corrigés.

L'APCE - qui représente les parlementaires de 46 pays européens - a décidé d'observer les élections en Pologne avec une délégation complète, comptant 30 membres et accompagnée de juristes de la Commission de Venise, pour la première fois depuis qu'elle a décidé d'ouvrir une procédure en janvier 2020 pour contrôler le respect, par la Pologne, de ses obligations statutaires vis-à-vis du Conseil de l'Europe.

La mission d'observation électorale qui s'est rendue sur place entre le 13 et le 16 octobre 2023 a constaté que les élections législatives polonaises du 15 octobre 2023 s'étaient caractérisées par un taux record de participation, un large choix d'options politiques et des candidats qui avaient pu faire campagne librement mais que la campagne avait toutefois été ternie par d'importants chevauchements entre les messages du parti au pouvoir et les campagnes d'information du gouvernement.

Le PiS est arrivé en tête du scrutin avec plus de 35 % des votes, mais sans majorité, tandis que la Plate-forme civique, le parti la Troisième Voie et la Gauche obtiennent ensemble plus de 53 %, permettant à l'opposition pro-européenne de remporter la victoire.

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