N° 627

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2024-2025

Enregistré à la Présidence du Sénat le 14 mai 2025

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des affaires européennes (1)
sur le
bilan des positions européennes du Sénat (2023-2024),

Par M. Jean-François RAPIN,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Jean-François Rapin, président ; MM. Alain Cadec, Cyril Pellevat,
André Reichardt, Mme Gisèle Jourda, MM. Didier Marie, Claude Kern, Mme Catherine Morin-Desailly, M. Georges Patient, Mme Cathy Apourceau-Poly, M. Louis Vogel, Mme Mathilde Ollivier, M. Ahmed Laouedj, vice-présidents ; Mme Marta de Cidrac, M. Daniel Gremillet, Mmes Florence Blatrix Contat, Amel Gacquerre, secrétaires ; MM. Pascal Allizard, Jean-Michel Arnaud, François Bonneau, Mmes Valérie Boyer, Sophie Briante Guillemont, M. Pierre Cuypers, Mmes Karine Daniel, Brigitte Devésa, MM. Jacques Fernique, Christophe-André Frassa, Mmes Pascale Gruny, Nadège Havet, MM. Olivier Henno, Bernard Jomier, Mme Christine Lavarde, MM. Dominique de Legge, Ronan Le Gleut, Mme Audrey Linkenheld, MM. Vincent Louault,
Louis-Jean de Nicolaÿ, Teva Rohfritsch, Mmes Elsa Schalck, Silvana Silvani, M. Michaël Weber.

L'ESSENTIEL

Ce rapport présente le bilan du suivi des positions européennes du Sénat (résolutions européennes, avis motivés sur le respect du principe de subsidiarité et avis politiques), adoptées entre le 1er octobre 2023 et le 30 septembre 2024.

Le suivi annuel des résolutions européennes, adressées au Gouvernement sur le fondement de l'article 88-4 de la Constitution, est facilité par la transmission d'une fiche établie par le Secrétariat général des affaires européennes (SGAE), qui présente à la fois l'état des négociations du ou des texte(s) européen(s) concerné(s) par la résolution, et la façon dont les positions sénatoriales ont été prises en compte au cours des négociations à Bruxelles. Il peut donner lieu à l'audition, par la commission des affaires européennes, du membre du Gouvernement chargé des affaires européennes, ce temps d'échange et de contrôle constituant un moment important du contrôle parlementaire de l'action gouvernementale en matière européenne. Il s'intègre également dans le cadre de l'examen de l'application des lois (et résolutions) effectué par l'ensemble des commissions du Sénat.

Sur la période couverte par ce rapport, la commission des affaires européennes a été saisie de 943 textes européens au titre de l'article 88-4 (soit une baisse de 12,44 % en un an, liée à la fin de la mandature 2019-2024 de la Commission européenne) et en a sélectionné 328 (+ 15,9 % en un an) qu'elle a examinés de plus près, soit en procédure écrite, soit directement lors de ses réunions.

Ces textes ont fait l'objet de 18 communications, destinées à informer les membres de la commission et, plus largement, le Sénat sur leurs enjeux et leurs perspectives d'adoption.

Par ailleurs, 11 résolutions européennes ont été adoptées par le Sénat. Ces dernières ont porté sur des thèmes divers :

priorités politiques européennes du Sénat, institutions : programme de travail de la Commission européenne ; prévention et lutte contre la corruption dans l'Union européenne ;

finances, budget européen : coordination des politiques économiques et de surveillance budgétaire des États membres ;

politique étrangère et de sécurité communes (PESC) : mesure d'assistance européenne à l'Arménie ;

espace de liberté, de sécurité et de justice, numérique : renforcement de la solidarité et des capacités en matière de cybersécurité ; reconnaissance de la spécificité de l'engagement des sapeurs-pompiers volontaires et renforcement du mécanisme européen de protection civile ;

marché unique, dépendances stratégiques, santé : action de l'Union européenne contre les pénuries de médicaments ; lutte contre le retard de paiements dans les transactions commerciales ;

agriculture et environnement : mesures de simplification de la politique agricole commune (PAC) ; nouvelles techniques génomiques (NTG) ; résilience des sols.

Du fait du renouvellement des institutions européennes en 2024, un nombre important des textes européens ayant fait l'objet des résolutions européennes du Sénat sont toujours en cours de négociation et il est alors impossible de conclure définitivement sur la conformité des positions du Sénat aux compromis finaux.

Malgré ce rappel, il faut souligner que, dans la majorité des cas (54,5 %), les positions exprimées par le Sénat dans ces résolutions européennes ont été prises en compte en totalité ou en majorité. En effet, 6 résolutions européennes ont été prises en compte en totalité ou en majorité au cours des négociations à Bruxelles et /ou dans le texte définitif (règlement ou directive). Il s'agit des résolutions portant sur : le programme de travail de la Commission européenne pour 2024 ; la réforme du pacte de stabilité et de croissance ; le soutien à l'Arménie par le biais de la Facilité européenne pour la paix ; l'action de l'Union européenne contre les pénuries de médicaments ; les nouvelles techniques génomiques (NTG) ; la résilience des sols.

Cinq résolutions européennes adoptées par le Sénat ont été prises en compte partiellement ou très partiellement, en l'espèce, celles relatives au renforcement de la solidarité et des capacités en matière de cybersécurité, à la prévention et à la lutte contre la corruption, à l'avenir de la PAC, aux retards de paiement dans les transactions commerciales, et à la reconnaissance des spécificités de l'engagement sapeur-pompier volontaire et au renforcement du dispositif européen de protection civile.

Au cours de l'année parlementaire 2023-2024, la commission des affaires européennes a également adopté et transmis 9 avis politiques à la Commission européenne au titre du dialogue politique que celle-ci a directement noué avec les Parlements nationaux. Comme le rappelait la présidente de la Commission européenne, Mme Ursula von der Leyen, lors de sa visite au Sénat, le 7 janvier 2022, « le Sénat est l'une des assemblées parlementaires les plus actives de l'Union européenne dans son dialogue politique avec la Commission européenne. »

Ces avis politiques doivent en principe faire l'objet d'une réponse de la Commission dans un délai de trois mois. Au cours de la session 2023-2024, dans la majorité des cas, ce délai n'a malheureusement pas été respecté mais il s'est nettement amélioré par rapport à 2022-2023 (44,4 % contre 28,5 %).

Enfin, saisi de 58 textes au titre du contrôle de subsidiarité, qui vérifie le respect de la répartition des compétences entre l'Union européenne et les États membres, le Sénat a, au cours de la session 2023-2024, adopté et transmis à la Commission européenne 2 avis motivés, respectivement relatifs à une proposition de directive relative à la lutte contre les abus sexuels sur les enfants et au programme européen pour l'industrie de défense (EDIP).

I. LES COMMUNICATIONS GARANTISSENT L'INFORMATION DES SÉNATEURS SUR LES TEXTES EUROPÉENS

En sus de l'examen des 943 textes européens qui lui étaient soumis, la commission des affaires européennes a jugé utile que lui soient présentées 18 communications au cours de la session écoulée.

Rédigées et présentées par les rapporteurs de la commission à l'issue d'une phase de réflexion et d'auditions, ces communications garantissent une information exhaustive et actualisée de la commission et, par conséquent, du Sénat, sur des textes aux enjeux européens importants.

En premier lieu, ces communications peuvent d'abord éclairer la commission des affaires européennes du Sénat sur une « actualité mouvante » avec des conséquences politiques ou institutionnelles importantes. Au cours de la session 2023-2024, ce fut le cas de la communication du 25 janvier 2024 sur la situation agricole, à un moment où le monde agricole protestait contre les modalités de mise en oeuvre de la politique agricole commune (PAC).

En deuxième lieu, ces communications interviennent à un moment où la commission des affaires européennes ne souhaite pas formuler de position politique à leur sujet :

- soit parce qu'une telle position politique est prématurée au regard des informations disponibles et/ou de l'avancée des débats européens sur le projet de texte visé, et que des travaux préalables (auditions, table ronde, consultations...) sont nécessaires avant que la commission puisse se forger un avis définitif. La communication est alors conçue comme un point d'étape, qui peut ensuite conduire à l'adoption éventuelle d'une position politique formalisée (résolution européenne et /ou avis politique) ;

- soit parce que, malgré l'importance du dossier traité, il existe un consensus à son sujet, au sein du Sénat, ou entre le Sénat et le Gouvernement, pour ne pas poursuivre son examen (par exemple, en cas de saisine trop tardive du Sénat ou si les négociations en cours sur une réforme européenne répondent à ses attentes). Dans cette hypothèse, une expression politique du Sénat est jugée inutile car elle n'aurait « aucune valeur ajoutée » ;

- soit parce que la communication porte sur un sujet qui est source de dissensions certaines au sein même des groupes politiques du Sénat et nuit à l'établissement d'une position politique claire du Sénat.

Ce rôle fondamental d'information des membres de la commission sur une problématique complexe et de « défrichage » des scenarii politiques possibles a bien été illustré, lors de la session 2023-2024, par la communication sur la révision à mi-parcours du cadre financier pluriannuel (CFP) de l'Union européenne du 25 janvier 2024 et par celle relative au retrait de l'Union européenne du traité sur la Charte de l'énergie, en date du 8 février 2024.

Il peut aussi arriver qu'une communication ait pour objet d'élargir le champ de réflexion ouvert par une proposition de résolution.

Enfin, certaines communications « cycliques » établissent, souvent pour le semestre écoulé, un bilan d'activité des délégations du Sénat siégeant dans les assemblées parlementaires du Conseil de l'Europe (APCE) et de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (AP-OSCE). Ces communications ont acquis une importance supplémentaire depuis le déclenchement de la guerre d'agression russe contre l'Ukraine, en raison des conséquences de ce conflit en termes de respect des droits de l'Homme et de préservation des liens avec les pays tiers, membres de la « Grande Europe » (États membres de l'Espace économique européen1(*) ; pays développant une relation bilatérale spécifique avec l'Union européenne2(*) ; pays candidats à l'adhésion à l'Union européenne3(*)...).

Communications présentées devant la commission des affaires européennes du Sénat du 1er octobre 2023 au 30 septembre 2024

Date et objet de la communication

Rapporteurs de la commission des affaires européennes

Révision du pacte de stabilité et de croissance

(7 décembre 2023)

Mme Florence Blatrix Contat

Mme Christine Lavarde

Compte rendu de la LXXème réunion de la Conférence des organes spécialisés dans les affaires communautaires (COSAC)

(13 décembre 2023)

M. Jean-François Rapin

M. Claude Kern

M. Didier Marie

Bilan de la session d'automne de l'Assemblée parlementaire de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (AP-OSCE), du 18 au 20 novembre 2023, en Arménie

(14 décembre 2023)

M. Pascal Allizard

Réunion des présidents des commissions des affaires européennes et des affaires étrangères, organisée par le Parlement de la République de Moldavie à Chisinau du 3 au 5 novembre 2023 

(14 décembre 2023)

M. André Reichardt

Révision à mi-parcours du cadre financier pluriannuel (CFP) de l'Union européenne

(25 janvier 2024)

Mme Florence Blatrix Contat

Mme Christine Lavarde

Point d'actualité sur la situation agricole

(25 janvier 2024)

M. Jean-François Rapin

Retrait de l'Union européenne du traité sur la Charte de l'énergie

(8 février 2024)

Mme Amel Gacquerre

M. Daniel Gremillet

M. Michael Weber

Prochaine conférence ministérielle de l'Organisation mondiale du commerce (OMC)

(8 février 2024)

M. Alain Cadec

M. Didier Marie

Réunion du Conseil européen du 1er février 2024

(8 février 2024)

M. Jean-François Rapin

Première partie de session de l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe (APCE) du 22 au 26 janvier 2024 

(14 mars 2024)

M. Alain Milon

Réunion du Groupe de contrôle parlementaire conjoint d'Europol des 17 et 18 février 2024 à Gand (Belgique)

(14 mars 2024)

Mme Audrey Linkenheld

Réunion interparlementaire en format Weimar4(*) à Varsovie les 10 et 11 mars 2024

(11 avril 2024)

Mme Marta de Cidrac

Voisinage et élargissement - Déplacement d'une délégation de la commission des affaires européennes en Géorgie du 28 avril au 1er mai 2024 

(16 mai 2024)

Mme Gisèle Jourda

M. Jean-François Rapin

M. André Reichardt

Bilan de l'action de la délégation sénatoriale à l'Assemblée parlementaire de l'OSCE (AP-OSCE) et de sa mission à Chypre du 10 au 12 mars 2024, en amont de la 31e session annuelle de l'AP-OSCE à Bucarest

(26 juin 2024)

M. Pascal Allizard

Voisinage et élargissement - Déplacement d'une délégation du groupe interparlementaire d'amitié France-Balkans occidentaux en Bosnie-Herzégovine du 22 au 26 avril 2024

(3 juillet 2024)

Mme Marta de Cidrac

Inscription des plages du Débarquement au patrimoine mondial de l'Unesco 

(3 juillet 2024)

Mme Catherine

Morin-Desailly

I. II. LES RÉSOLUTIONS EUROPÉENNES DU SÉNAT SONT ENCORE MAJORITAIREMENT PRISES EN CONSIDÉRATION DANS LES DÉBATS EUROPÉENS

Les développements qui suivent, présentent, d'un point de vue statistique et procédural, les suites données aux résolutions européennes adoptées par le Sénat, entre le 1er octobre 2023 et le 30 septembre 2024.

A. RAPPEL SUR LA PROCÉDURE D'ADOPTION DES PROPOSITIONS DE RÉSOLUTION EUROPÉENNE

Par une résolution européenne, le Sénat prend position sur un texte à l'intention du Gouvernement, en lui indiquant des objectifs à poursuivre pour la négociation au sein du Conseil de l'Union européenne.

L'article 88-4 de la Constitution permet au Sénat, comme à l'Assemblée nationale, de voter des résolutions sur les textes européens avant qu'ils ne soient adoptés par les institutions européennes et deviennent des directives, des règlements ou des décisions de l'Union européenne.

À cet effet, le Gouvernement doit soumettre au Sénat tous les projets d'acte de l'Union européenne, dès leur transmission au Conseil. Mais le Sénat peut également, de sa propre initiative, et depuis la révision constitutionnelle de 2008, se saisir de « tout document émanant d'une institution de l'Union », par exemple un rapport, un livre vert ou un document préparatoire.

La commission des affaires européennes est chargée d'examiner systématiquement les projets d'acte de l'Union européenne soumis au Sénat par le Gouvernement afin de déterminer ceux d'entre eux qui ont un enjeu important et soulèvent d'éventuelles difficultés. Elle peut prendre l'initiative d'une résolution européenne, qui peut alors être soumise à l'approbation de la commission compétente au fond, ou de la séance plénière du Sénat.

Cette procédure vient d'être révisée. En effet, déposée au Sénat le 12 février 2025, la proposition de résolution n° 332 tendant à renforcer les moyens de contrôle des sénateurs, conforter les droits des groupes politiques, et portant diverses mesures de clarification et de simplification, déposée par le Président du Sénat, M. Gérard Larcher, par Mme Sylvie Vermeillet, présidente de la délégation du Bureau du Sénat en charge du travail parlementaire et des conditions d'exercice du mandat de sénateur, a été adoptée par le Sénat en séance publique, le 8 avril 2025, et transmise au Conseil Constitutionnel, qui a déclaré conformes à la Constitution les dispositions relatives aux propositions de résolutions européennes dans sa décision n° 2025-880 DC du 7 mai 2025.

Ce texte procède à une réforme de la procédure d'adoption des propositions de résolutions européennes (PPRE), aujourd'hui complexe et peu lisible.

À cette fin, il clarifie notamment les procédures applicables, en les distinguant en fonction de l'auteur de la PPRE (commission des affaires européennes5(*), commission permanente6(*), sénateur) et il met fin à l'obligation d'examen par la commission des affaires européennes de toute PPRE déposée par un sénateur dans un délai d'un mois, sauf demande d'un président de groupe politique ou de commission (voir le détail de cette modification p. 21).

LA RÉSERVE D'EXAMEN PARLEMENTAIRE

Afin de garantir la possibilité de prendre en compte les résolutions des assemblées, des circulaires du Premier ministre ont mis en place une « réserve d'examen parlementaire ».

Ce mécanisme assure au Sénat (comme à l'Assemblée nationale) un délai de huit semaines pour manifester sa volonté de se prononcer sur un projet d'acte législatif européen. Lorsqu'une telle volonté s'est clairement manifestée, le Gouvernement doit éviter de prendre une position définitive au Conseil et, si nécessaire, doit proposer un report du vote du Conseil pour que la résolution puisse être prise en compte.

B. QUELQUES STATISTIQUES SUR LES RÉSOLUTIONS EUROPÉENNES ADOPTÉES LORS DE LA SESSION PARLEMENTAIRE 2023-2024

Sur la période allant du 1er octobre 2023 au 30 septembre 2024, la commission des affaires européennes a traité 943 textes européens. Parmi les textes traités, 472 (50,05 %, soit 4 % de moins qu'en 2022-2023) relevaient d'une procédure de levée automatique de la réserve parlementaire7(*), selon laquelle le texte est présumé adopté dans les 72 heures de son dépôt, sauf décision de la commission de les examiner. Par ailleurs, 471 textes (soit 49,94 %) se situaient en dehors de cette procédure, dont 328 textes (soit 34,7 % du total des textes et 69,5 % des textes non concernés par la levée de réserve) ont été soit examinés en commission, soit traités en procédure écrite.

Ces différents chiffres sont récapitulés dans le tableau ci-après :

Textes traités sur la session 2023-2024 

943

     

Procédure 72 h

Nominations

160

PESC

285

Virements

17

TVA

5

Fonds européen d'ajustement à la mondialisation

5

 

 

472

 

 

 

Levée tacite hors PESC

143

Procédures écrites / textes examinés en commission

328

   

471

Au cours de cette période, le Sénat a examiné et adopté 11 résolutions européennes (contre 18 sur la même période l'année dernière8(*)).

Il faut souligner que les prises de position européennes du Sénat ont été totalement ou majoritairement suivies par l'Union européenne (54,5 %). Ce taux de reprise est inférieur à celui de la session précédente (61,1 %), ce qui s'explique par la présentation, par la Commission européenne, d'options ayant suscité une franche opposition du Sénat sans possibilité de compromis ou de textes « doublonnant » des dispositifs déjà adoptés et dont la valeur ajoutée n'était pas évidente (ex : format et missions de l'organe d'éthique de l'Union européenne ; risque de complexification de l'architecture européenne de cyber sécurité avec l'adoption de la proposition de règlement « cybersolidarité »).

Simultanément, il faut constater qu'à la différence de la session 2022-2023, au cours de laquelle la Commission européenne avait choisi, de manière inédite, d'ignorer l'intégralité des observations du Sénat sur deux dossiers majeurs (négociations en cours en vue de l'adhésion de l'Union européenne à la Convention européenne des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, en particulier concernant la PESC, et règlement facilitant la lutte contre les abus sexuels sur mineurs en ligne, évoqués ci-après), l'ensemble des résolutions européennes présentées par la Haute Assemblée au cours de la session 2023-2024 a été pris en compte, même très partiellement, dans les négociations européennes, ce qui est une évolution positive importante.

Sur le plus long terme, on ne peut cependant que constater la dégradation continue du taux de reprise des positions du Sénat dans les compromis européens. La baisse est « structurelle » et notable (61,1 % en 2023 ; 64,7 % en 2022 ; 66,5 % en 2021 ; 83 % en 2020 !). Elle peut s'expliquer par plusieurs facteurs cumulatifs et préoccupants :

la confirmation d'une certaine marginalisation des parlements nationaux des États membres dans les échanges institutionnels européens liés à l'adoption des textes européens ;

la multiplication des procédures d'urgence pour adopter les textes européens et dans lesquelles le dialogue avec les parlements nationaux des États membres apparaît coûteux et superflu à la Commission européenne ;

et, ce qui est plus grave, le choix délibéré de certaines assemblées parlementaires des États membres soit, de ne plus adopter de résolutions ou d'avis, faute de disposer des moyens et de l'expertise pour examiner le nombre toujours croissant de réformes européennes, soit, d'adopter, des textes qui n'apportent aucune valeur ajoutée et se contentent, a posteriori, de confirmer la pertinence des initiatives prises par la Commission européenne (voir partie III du rapport).

La commission des affaires européennes du Sénat « tire la sonnette d'alarme » depuis plusieurs années sur ce risque de démobilisation des parlements nationaux et a émis, à plusieurs reprises, des propositions pour les inciter à assumer leur rôle de contrôle des nouvelles directives et des nouveaux règlements, qui est essentiel au bon fonctionnement démocratique de l'Union européenne (le présent rapport reviendra sur ces propositions dans sa partie IV).

Liste des résolutions européennes adoptées par le Sénat entre
le 1er octobre 2023 et le 30 septembre 2024

Texte

Rapporteur(s) de la commission
des affaires européennes

Programme de travail de la Commission européenne pour 2024

(Résolution n° 48 du Sénat du 12 janvier 2024)

M. Jean-François Rapin

M. Didier Marie

Renforcement de la solidarité et des capacités européennes en matière de cybersécurité

(Résolution n° 52 du Sénat du 19 janvier 2024)

Mme Audrey Linkenheld

Mme Catherine Morin-Desailly

M. Cyril Pellevat

Coordination des politiques économiques et surveillance budgétaire

(Résolution n° 58 du Sénat du 26 janvier 2024)

Mme Florence Blatrix Contat

Mme Christine Lavarde

Prévention et lutte contre la corruption dans l'Union européenne

(Résolution n° 90 du Sénat du 18 mars 2024)

M. Jean-François Rapin

M. Claude Kern

M. Didier Marie

Nouvelles techniques génomiques (NTG)

(Résolution n° 118 du Sénat du 26 avril 2024)

M. Jean-Michel Arnaud

Mme Karine Daniel

M. Daniel Gremillet

Facilité européenne pour la paix au profit de l'Arménie

(Résolution n° 130 du Sénat du 21 mai 2024)

Mme Valérie Boyer

Action européenne contre les pénuries de médicaments

(Résolution n° 120 du Sénat du 10 mai 2024)

Mme Cathy Apourceau-Poly

Mme Pascale Gruny

M. Bernard Jomier

Lutte contre le retard de paiement dans les transactions commerciales

(Résolution n° 121 du Sénat du 14 mai 2024)

Mme Amel Gacquerre

M. Michael Weber

Modification de certains règlements de la PAC

(Résolution n° 129 du Sénat du 17 mai 2024)

M. Daniel Gremillet

Résilience des sols

(Résolution n° 146 du Sénat du 5 juillet 2024)

Mme Gisèle Jourda

M. Cyril Pellevat

Reconnaissance de la spécificité de l'engagement sapeur-pompier volontaire et renforcement du dispositif européen de protection civile

(Résolution n° 147 du Sénat du 26 juillet 2024)

Mme Gisèle Jourda

M. Cyril Pellevat

Sur les 11 textes adoptés :

- 8 sont issus d'une proposition de résolution de la commission des affaires européennes (programme de travail de la Commission européenne pour 2024 ; cybersolidarité ; révision du pacte de stabilité et de croissance ; lutte contre la corruption ; nouvelles techniques génomiques (NTG) ; action européenne contre les pénuries de médicaments ; lutte contre le retard de paiement dans les transactions commerciales ; résilience des sols) et 3 trouvent leur origine dans l'initiative d'un ou plusieurs sénateurs :

- financement par la Facilité européenne pour la paix d'une mesure d'assistance au profit de l'Arménie (MM. Bruno Retailleau et Jean-François Rapin) ;

- réexamen de la politique agricole commune (PAC) (MM. Jean-François Rapin, Patrick Chauvet, Pierre Cuypers, Laurent Duplomb, Daniel Gremillet, Mme Pascale Gruny, MM. Vincent Louault, Franck Menonville et Olivier Rietmann, Mmes Sophie Primas et Nadège Havet). En réalité, cette proposition résulte des réflexions du groupe de travail du Sénat sur la PAC, qui rassemble des sénateurs spécialistes des questions agricoles, membres des commissions des affaires européennes et des affaires économiques et représentant tous les groupes politiques ;

- reconnaissance de la spécificité de l'engagement des sapeurs-pompiers volontaires et renforcement du dispositif européen de protection civile (M. Cyril Pellevat).

Ces 3 propositions ont aussi donné lieu à un rapport d'information de la commission des affaires européennes.

Ce nombre de PPRE déposées par des sénateurs à titre individuel peut en l'espèce sembler faible mais il était habituellement plus élevé (6 sur la session 2022-2023) et est devenu plus important à l'heure actuelle (sur la session en cours 2024-2025, en effet, 8 des 15 propositions de résolutions européennes adoptées ou en cours d'adoption par le Sénat sont issues de cette procédure).

Or, selon la rédaction actuelle du Règlement du Sénat, la commission des affaires européennes, qui ne maîtrise ni le sujet ni le contenu de ces textes, est néanmoins obligée de les examiner dans un délai contraint (un mois) et de rédiger un rapport à leur sujet. Ce faisant, l'ordre du jour de la commission est en partie « détourné » vers ces initiatives, au détriment des priorités politiques dégagées par le bureau de la commission, certaines initiatives n'ayant en outre que peu de liens avec les affaires européennes et relevant davantage du cadre des résolutions prévues à l'article 34-1 du Règlement du Sénat.

Voilà pourquoi, en cohérence avec les conclusions du groupe de réflexion sur les méthodes de travail du Sénat, présidé par la vice-présidente du Sénat, Mme Sylvie Vermeillet, la résolution n° 102 tendant à renforcer les moyens de contrôle des sénateurs, conforter les droits des groupes politiques, et portant diverses mesures de clarification et de simplification, adoptée par le Sénat, le 8 avril 20259(*), modifie ces dispositions du Règlement. Les propositions de résolutions européennes déposées par les sénateurs à titre individuel ne seront désormais plus automatiquement examinées par la commission des affaires européennes et le délai d'un mois précédemment en vigueur pour leur cet examen ne s'appliquera plus, sauf si un président de groupe politique ou de commission demande son cet examen.

Il faut enfin relever, qu'au cours de la session 2023-2024, toutes les propositions de résolution européennes adoptées par le Sénat ont également fait l'objet d'un avis politique que la commission des affaires européennes a adressé à la Commission européenne dans le cadre du dialogue politique. Cette « double adoption » simultanée d'une proposition de résolution européenne et d'un avis politique, le plus souvent dans les mêmes termes, sur un même dossier, permet en effet une plus large diffusion des priorités européennes du Sénat, et amènent, et le Gouvernement, et la Commission européenne à devoir répondre systématiquement au Sénat sur la reprise de ses propositions dans les négociations européennes.

C. LES SUITES DONNÉES AUX RÉSOLUTIONS EUROPÉENNES DU SÉNAT

Ce rapport démontre que les résolutions européennes du Sénat ont des conséquences directes sur les négociations conduisant à l'élaboration de la législation européenne, qui, du fait de l'applicabilité directe des règlements et de la transposition des directives, a des incidences évidentes sur la législation française.

Les suites données aux résolutions européennes votées par le Sénat ne sont pas encore nécessairement toutes connues à ce jour, dès lors que l'état d'avancement des négociations varie d'un dossier à l'autre.

Surtout, les résolutions du Sénat peuvent connaître des suites d'autant plus favorables qu'elles sont mises en avant, voire soutenues par le Gouvernement au cours des négociations au Conseil.

Enfin, les suites données s'apprécient différemment selon le texte de la résolution elle-même qui peut porter sur un sujet plus ou moins circonscrit et sur un projet d'acte de nature législative ou non. Ainsi, certaines résolutions poursuivent un dessein plus général, par exemple lorsqu'il s'agit d'exprimer une position de principe du Sénat dans un débat public. Il est dès lors logique que l'information sur leur suivi revête une dimension moins opérationnelle.

En tout état de cause, de manière à formaliser ce suivi des positions exprimées par le Sénat sur chaque dossier, le Secrétariat général aux affaires européennes (SGAE) établit une « fiche de suivi », en principe pour chaque résolution adoptée par le Sénat, qu'il adresse à la commission des affaires européennes.

En pratique, pour les résolutions de la session 2023-2024, le SGAE a transmis dix fiches de suivi pour onze résolutions européennes adoptées.

Une résolution européenne était en effet relative à des enjeux diplomatiques dans des pays tiers, qui ne sont pas suivis par le SGAE mais directement par le Quai d'Orsay (résolution européenne relative au financement par la Facilité européenne pour la paix d'une mesure d'assistance au profit de l'Arménie).

Comme les années précédentes, le rapporteur souhaite remercier le SGAE pour la qualité des informations transmises.

D'une façon quelque peu schématique, en fonction des informations recueillies auprès du SGAE, il est possible de classer les résolutions européennes du Sénat en trois catégories, en fonction des suites qu'elles ont reçues : une prise en compte complète, ou presque complète, une mise en oeuvre partielle et une absence totale de suites.

1. Le sort variable des résolutions européennes adoptées en 2022-2023

Comme le soulignait le rapport d'information du Sénat sur le suivi des résolutions européennes qu'il a adoptées au cours de la session 2022-2023, deux résolutions européennes du Sénat (sur un total de 18), respectivement relatives au processus d'adhésion de l'Union européenne à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales (CESDH) et à la lutte contre les abus sexuels sur les enfants en ligne, n'avaient fait l'objet d'aucune suite favorable. Malheureusement, force est de constater, un an plus tard, que la situation semble politiquement et /ou juridiquement figée.

a) La résolution européenne du Sénat n° 67 sur le volet relatif à la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) des négociations d'adhésion à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (CESDH)

Déposée solennellement le 30 janvier 2023 par les présidents des trois commissions du Sénat concernées (M. François-Noël Buffet, pour la commission des lois, M. Christian Cambon, pour la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, et M. Jean-François Rapin pour la commission des affaires européennes), la proposition de résolution a ensuite a été examinée en commission des affaires européennes, le 2 février 2023 (rapporteur : M. Jean-François Rapin) et a été adoptée définitivement par le Sénat, le 7 mars 2023.

Cette résolution a vu le jour à l'occasion du suivi des négociations d'adhésion de l'Union européenne à la CESDH, adhésion prévue par l'article 6 du traité sur l'Union européenne (TUE)10(*). Ces dernières ont connu une première phase active en 2010-2011 qui avait conduit à un projet d'accord au Conseil, mais avaient finalement échoué du fait de l'opposition de la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) qui, dans son avis 2/13 du 18 décembre 2014, avait considéré que le projet était contraire au droit de l'Union européenne en ce qu'il permettait à la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) de se prononcer sur des actes de la PESC alors même qu'elle-même n'y était pas autorisée.

En effet, en applications des stipulations de l'article 24 du traité sur l'Union européenne (TUE)11(*) et de l'article 275 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE)12(*), la CJUE n'est pas compétente en ce qui concerne les dispositions relatives à la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) ni en ce qui concerne les actes adoptés sur leur fondement, à deux exceptions près, très encadrées13(*).

L'avis précité de la CJUE avait provisoirement stoppé le processus de négociation. Mais ce dernier a repris à compter du 7 octobre 2019. Concernant la PESC, les négociations ont d'abord eu pour objet l'instauration d'un mécanisme de réattribution permettant de confier le contrôle des actes PESC aux juridictions des États membres mais ce dernier s'est heurté à des difficultés techniques.

Alors, en dépit de la lettre et de l'esprit des traités européens, la Commission européenne, soutenue, de manière surprenante, par le service juridique du Conseil, a avancé l'idée qu'une déclaration intergouvernementale interprétative serait suffisante pour autoriser la CJUE à étendre sa compétence aux actes relevant de la PESC afin de statuer sur une éventuelle violation des droits fondamentaux avant que la CEDH ne se prononce.

La résolution européenne du Sénat a simplement rappelé que la déclaration interprétative envisagée était contraire aux traités « qui ont été ratifiés par les États membres conformément à leurs règles constitutionnelles respectives » et qu'elle s'apparentait « de fait à une révision des traités, soustraite au contrôle des parlements nationaux ». Elle appelait en conséquence « solennellement » les États membres à rejeter avec fermeté une telle déclaration et à poursuivre les négociations en vue d'une solution juridique appropriée.

Cette position forte du Sénat est conforme aux priorités de négociation françaises dans ce dossier. Mais la France est isolée au sein du Conseil. De surcroît, dans deux arrêts rendus sur trois litiges, le 10 septembre 202414(*), la CJUE a confirmé son souhait d'intervenir dans les litiges liés à la PESC.

Dans l'arrêt « Nevez 77 Solutions SRL », elle a ainsi estimé qu'elle était compétente pour interpréter une mesure de portée générale d'une décision PESC qui aurait dû être mise en oeuvre dans un règlement européen et qui sert de fondement à des mesures nationales de sanction imposées à une entreprise ayant fourni des services de courtage en rapport avec des équipements militaires, en contravention avec les sanctions européennes visant la Russie depuis le début de la guerre en Ukraine.

Dans l'arrêt « KS et KD », qui était relatif aux actions de la mission civile de l'Union européenne au Kosovo (Eulex- Kosovo), la Cour, contre la position du Tribunal de l'Union européenne, a aussi affirmé sa compétence, d'une part, pour apprécier la légalité des actes ou omissions relevant de la PESC, mais ne se rattachant pas à des choix politiques ou stratégiques, et, d'autre part, pour interpréter ces actes.

Le risque est désormais réel de voir la position de principe de la France « balayée » par une telle interprétation « très constructive » des traités par la CJUE, qui serait contraire à leur rédaction mais obtiendrait le soutien des institutions européennes et des autres États membres.

Si une telle évolution se confirmait, une première question serait de savoir si le Parlement français pourrait ratifier l'accord d'adhésion de l'Union européenne à la Convention en violation des traités européens. L'autre question, alors posée avec gravité, serait celle de la poursuite ou de l'arrêt de la participation de la France aux « opérations PESC », désormais mises en oeuvre avec un risque contentieux permanent.

b) La résolution européenne du Sénat n° 77 sur la proposition de règlement établissant des règles en vue de prévenir et de combattre les abus sexuels sur enfants

L'autre résolution européenne demeurant sans suite favorable est la résolution européenne n° 77 sur la proposition de règlement établissant des règles en vue de prévenir et de combattre les abus sexuels sur enfants15(*). Cette absence d'effet utile est particulièrement étonnante - et choquante - alors que la protection de l'enfance est un impératif proclamé par la Charte européenne des droits fondamentaux et que la proposition de règlement précitée avait été érigée en « priorité politique » par la Commission européenne lors de sa présentation.

En effet, présentée le 11 mai 2022 par la Commission européenne, cette proposition a d'abord établi un constat sans appel sur la prolifération de contenus en ligne relatifs à des abus sexuels sur des enfants, liée au développement d'Internet et accentuée par la période de confinement due à la pandémie de covid-1916(*). L'Union européenne occupe ainsi la place peu enviable de premier « hébergeur » de contenus à caractère pédopornographique dans le monde17(*).

Les principales dispositions de la proposition ont pris acte de l'échec des dispositifs en place autorisant les fournisseurs de services en ligne à mettre en place des démarches volontaires de détection et de blocage des contenus pédopornographiques18(*). Le texte initial imposait en conséquence une évaluation des risques et des mesures d'atténuation des risques aux fournisseurs de services d'hébergement et de services de communications interpersonnelles, ainsi que des obligations de signalement, de détection, de retrait ou de blocage des contenus pédopornographiques sur injonction d'autorités nationales compétentes.

La proposition prévoit aussi la création d'un centre de l'Union européenne dédié à la prévention et à la lutte contre les abus sexuels sur mineurs, qui recevrait les signalements, servirait d'intermédiaire entre les fournisseurs et les autorités compétentes des États membres.

Par la suite, la publication de plusieurs avis critiques (avis conjoint du Bureau européen de la protection des données et du Contrôleur européen de la protection des données19(*) ; avis du Service juridique du Conseil) ont souligné le caractère disproportionné de certaines dispositions.

La résolution européenne n° 77 du Sénat, adoptée en commission des affaires européennes le 15 février 2023 sur le rapport des sénateurs Ludovic Haye, Catherine Morin-Desailly et André Reichardt, et devenue définitive le 20 mars 2023, a rappelé que la lutte contre les abus sexuels sur les enfants devait être une priorité de tous les instants pour l'Union européenne et a approuvé le principe d'obligations de résultats imposées aux fournisseurs.

Elle a toutefois demandé la mise en place d'un dispositif d'injonctions de détection envisagé efficace sans impliquer ni une surveillance généralisée et permanente des communications (messages électroniques, conversations téléphoniques...) ni une remise en cause systématique du chiffrement, qui est nécessaire à la confidentialité des communications dans certains cas spécifiques. En conséquence, elle a soutenu les injonctions de détection et de retrait sur des contenus identifiés mais a rejeté la recherche indifférenciée de contenus pédopornographiques et de « pédopiégeage ». Elle a aussi constaté que les technologies mises en avant par la Commission européenne pour cette détection n'étaient - en l'état - pas fiables, entraînant un nombre trop élevé de « faux positifs »20(*).

Elle a refusé la création d'un nouveau centre de l'Union européenne (faible valeur ajoutée, missions en majorité déjà assurées par Europol et dépendance humaine et logistique à son égard, coût de fonctionnement21(*)), demandant plutôt la confirmation d'Europol comme pôle principal de la lutte contre les abus sexuels sur les enfants.

Elle a enfin incité les négociateurs européens à prévoir une obligation de déréférencement des contenus pédopornographiques (solution déjà en vigueur en France), à valoriser l'expérience française réussie de la plateforme PHAROS22(*) et à instaurer des mesures interdisant l'accès des mineurs aux contenus pornographiques ( activation par défaut des dispositifs de contrôle parental sur les téléphones des mineurs ; instauration de dispositifs de vérification de l'âge des utilisateurs pour l'accès à certains sites ; campagnes de « name and shame » à l'encontre des fournisseurs récalcitrants...).

Mais au niveau européen, le dossier s'est enlisé. De ce fait, la Commission européenne a été contrainte de présenter une proposition de prolongation provisoire du dispositif « temporaire » posé par le règlement (UE) 2021/123223(*). Cette dernière serait valable jusqu'en avril 2026.

Malgré de fortes divisions internes, le Parlement européen est parvenu difficilement à adopter une position prudente, le 14 novembre 202324(*).

Il n'en va pas de même au Conseil, où, malgré les efforts des présidences semestrielles successives pour proposer de nouveaux compromis, aucune majorité n'a pu se dégager à ce jour pour l'adoption de la réforme. Si le renforcement des obligations de prévention et la pérennisation d'un mécanisme de détection volontaire font consensus, quinze États membres, dont la France, travaillent pour trouver le compromis le plus ambitieux possible en faveur de la protection de l'enfance. La France s'oppose toutefois à l'insertion des services cryptés dans le champ d'application de la réforme, ainsi qu'à la création d'un nouveau centre européen dédié. Et dix autres États membres, dont l'Allemagne et les Pays-Bas, souhaitent un cadre normatif européen minimal au nom du respect de la vie privée.

Selon les négociateurs, l'Allemagne pourrait cependant adopter une attitude plus ouverte à un compromis maintenant que le gouvernement dirigé par M. Friedrich Merz est en place.

2. Concernant les résolutions adoptées en 2023-2024, le Sénat a été totalement ou très largement suivi dans plus de 54,5 % des cas

Comme indiqué précédemment, sur les onze résolutions européennes analysées dans le présent rapport, six, soit environ 54,5 %, ont été prises totalement ou très largement en compte au cours des négociations, voire dans le texte européen définitif. Ainsi, sur la majorité des initiatives ayant fait l'objet d'un examen attentif du Sénat, on peut constater la convergence de vues entre le Sénat et le collège des commissaires (cybersécurité, aide à l'Arménie, nouvelles techniques génomiques (NTG), surveillance des sols...).

a) La résolution européenne du Sénat n° 48 sur le programme de travail de la Commission européenne pour 2024

Cette résolution, présentée par le Président Jean-François Rapin et par M. Didier Marie, est un exercice annuel par lequel le Sénat fait connaître au Gouvernement sa vision des priorités européennes pour l'année à venir sur la base de ses observations relatives au programme de travail annuel de la Commission européenne. Elle a été doublée d'un avis politique directement transmis à la Commission européenne, qui lui a répondu le 4 juin 2024. Le détail de ces textes, qui s'adressent à titre principal à la Commission européenne, sont commentés infra dans le bilan des avis politiques adoptés par le Sénat. Le dialogue avec la Commission européenne apparaît de grande qualité. Le suivi des observations du Sénat émises sur le contenu du programme de travail semble quant à lui, globalement satisfaisant mais variable selon les secteurs.

b) La résolution européenne du Sénat n° 58 sur la réforme du pacte de stabilité et de croissance

La résolution européenne du Sénat n° 58 adoptée par la commission des affaires européennes sur le rapport des sénatrices Florence Blatrix Contat et Christine Lavarde le 21 décembre 2023, est devenue définitive le 26 janvier 2024.

Partageant le constat de la Commission européenne selon lequel les règles du pacte de stabilité et de croissance25(*) devaient être réformées, la résolution du Sénat a clairement identifié ses principaux défauts : « procyclicité ; complexité ; recours à des variables inobservables ; faible appropriation par les États membres ; incapacité à soutenir suffisamment l'investissement public ». En pratique, cette réforme, lancée en 2019 puis suspendue du fait de la pandémie de Covid-19, a par la suite été relancée par une nouvelle communication de la Commission européenne, qui a inspiré la présentation d'un paquet normatif, publié le 26 avril 202326(*), visant à améliorer l'efficacité des règles budgétaires afin qu'elles permettent de reconstituer les marges de manoeuvre budgétaires nécessaires pour faire face aux futures crises et assurer la soutenabilité des dettes publiques, tout en continuant à soutenir les investissements.

La résolution du Sénat a soutenu le principe de la réforme et rappelé l'urgence de son adoption (visant une mise en oeuvre effective pour 2025), a approuvé la logique des nouveaux plans budgétaires structurels et nationaux à moyen terme présentant les engagements des États membres en matière budgétaire et en matière de réformes et d'investissements, ainsi que l'allongement possible de la durée d'ajustement budgétaire (de 4 à 7 ans).

Elle a également appuyé l'analyse de la soutenabilité de la dette (ASD) prévue, tout en estimant qu'il était peu pertinent de l'appliquer sur un horizon de long terme (14 à 17 ans) et a salué l'abandon de la règle du 1/20ème pour la diminution du ratio de dette introduite par le « Six Pack ». Dans le même temps, elle a regretté l'introduction d'un critère quantitatif commun avec une clause de sauvegarde pour le déficit obligeant un État membre à le réduire d'au moins 0,5 point de PIB par an tant que son déficit demeure supérieur à 3 % du PIB, mais a soutenu l'introduction d'une clause de sauvegarde sur la dette.

Elle a enfin appelé à la vigilance pour assurer l'articulation entre les plans budgétaires et structurels nationaux et les échéances électorales, pour éviter de susciter un rejet de ces plans de la part des peuples européens, et à une meilleure association des parlements nationaux des États membres à la mise en oeuvre du cadre budgétaire réformé.

La Commission européenne27(*) s'est félicitée du soutien du Sénat, a réaffirmé la pertinence de l'analyse de la soutenabilité de la dette (ASD) tout en confirmant que cette méthodologie pouvait être « amenée à évoluer au gré de la réalité économique », et a défendu l'introduction de certains critères quantitatifs communs, afin d'éviter de « reporter l'ajustement après la durée » (d'un plan national). En outre, afin de permettre l'articulation entre les plans nationaux et les échéances électorales, la Commission européenne a précisé qu'un nouveau gouvernement arrivant au pouvoir aurait le droit de « proposer un nouveau plan ». En revanche, sur la transparence du processus d'élaboration des « trajectoires de référence », au profit des parlements nationaux, la situation est largement perfectible car, en l'espèce, le Gouvernement a refusé de transmettre ses documents d'analyse au Sénat.

La Commission européenne a finalement tenu à préciser que l'avis du Sénat avait été mis à la disposition de ses représentants lors des négociations en trilogue, qui a trouvé un accord, le 9 février 2024. Ce dernier, mis en oeuvre à compter du 30 avril 2024, satisfait largement les demandes du Sénat.

Le pacte révisé repose sur les règles suivantes :

- déficit public limité à 3 % du PIB et dette publique limitée à 60 % du PIB ;

- nécessité, pour les États membres en situation de dette excessive, de réduire leur dette publique d'1 % par an ;

- à compter de 2025, les États membres disposent d'un délai allant de 4 à 7 ans pour réduire leur déficit et leur dette ;

- adoption de trajectoires budgétaires différenciées pour chaque État membre (chacun d'entre eux devant adopter un plan budgétaire et structurel à moyen terme).

Le Sénat exprime donc sa satisfaction sur l'équilibre trouvé par la réforme entre soutenabilité budgétaire et préservation des investissements publics. Ceci alors que notre pays ne parvient pas à réduire sa dette, avec un taux d'endettement public de 113,7 % du PIB.

Cependant, en raison de la déstabilisation économique et financière résultant des annonces douanières et géopolitiques de la présidence des États-Unis depuis le retour de M. Donald Trump à la Maison-Blanche, la commission des affaires européennes du Sénat constate que la situation économique et financière des États membres est de nouveau très fragile et que ce cadre budgétaire européen révisé pourrait être rapidement obsolète.

c) La résolution européenne du Sénat n° 507 sur le financement par la Facilité européenne pour la paix d'une mesure d'assistance en faveur de l'Arménie

La résolution européenne n° 507, déposée le 3 avril 2024 par les sénateurs Bruno Retailleau et Jean-François Rapin, a été adoptée par la commission des affaires européennes, le 11 avril 2024, sur le rapport de la sénatrice Valérie Boyer et est devenue définitive le 21 mai 2024.

Le dépôt de cette proposition de résolution s'inscrit dans le contexte du conflit latent entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan, et fait suite aux opérations militaires azéries des 19 et 20 septembre 2023 dans le Haut-Karabagh, qui ont conduit à l'annexion de cette région par l'Azerbaïdjan.

Le Sénat, qui a toujours été attentif à la situation du Haut-Karabagh et qui s'est mobilisé dans plusieurs résolutions28(*) pour préserver l'intégrité territoriale de l'Arménie, a également affirmé que l'Arménie avait le droit de se défendre et de disposer des moyens, y compris militaires, d'assurer sa sécurité.

Dans une résolution du 17 janvier 2024, le Sénat, après avoir réaffirmé l'intégrité territoriale de l'Arménie et demandé le retrait des forces azerbaïdjanaises et de leurs alliés, du territoire souverain de l'Arménie, avait aussi soutenu le recours à la Facilité européenne pour la paix (FEP)29(*) en faveur de l'Arménie.

Dans la continuité de cette position forte, la résolution européenne n° 507 a : fermement condamné l'offensive militaire de l'Azerbaïdjan et de ses alliés menée les 19 et 20 septembre 2023 dans le Haut-Karabagh, qui ont conduit à l'exil forcé de la quasi-totalité des Arméniens qui y vivaient ; salué les efforts de l'Union européenne pour la paix dans le Caucase, notamment par l'action de sa mission civile en Arménie ; exprimé son inquiétude sur les « ambitions hégémoniques » de l'Azerbaïdjan et de la Turquie ; indiqué également ses plus vives craintes à l'égard des actions de déstabilisation que pourrait mener la Russie contre l'Arménie ; fait de nouveau valoir le droit de l'Arménie, de défendre son intégrité territoriale et à disposer des moyens d'assurer sa sécurité, y compris par la voie militaire ; jugé légitime que l'Arménie puisse bénéficier d'une mesure d'assistance au titre de la Facilité européenne pour la paix, en pleine cohérence avec le renforcement des liens entre l'Union européenne et l'Arménie.

La résolution européenne du Sénat a été suivie d'effet puisque le 22 juillet 2024, 10 millions d'euros ont été octroyés par le Conseil de l'Union européenne à l'Arménie, au titre de la Facilité européenne pour la paix, afin de renforcer les capacités logistiques des forces armées arméniennes et de contribuer à une meilleure protection des civils.

Depuis l'annexion du Haut-Karabagh par l'Azerbaïdjan, l'Arménie et l'Azerbaïdjan ont conduit des pourparlers en vue d'un accord de paix. Ainsi, le 14 mars dernier, les autorités arméniennes et azerbaïdjanaises ont annoncé avoir trouvé un accord sur un « traité de paix ». Cependant, l'Arménie demeure sous pression dans cette négociation puisque le président azerbaïdjanais, Ilham Aliev, subordonne désormais la signature de ce traité à deux nouvelles concessions arméniennes : d'une part, une révision de la Constitution arménienne afin d'y effacer toute mention du Haut-Karabagh, et, d'autre part, la dissolution du « groupe de Minsk », constitué au début des années 1990 au sein de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et co-présidé par les États-Unis, la France et la Russie, afin de trouver une solution diplomatique entre les deux pays. De son côté, l'Arménie souhaite manifester une plus grande autonomie à l'égard de la Russie, accusée par les autorités arméniennes d'avoir failli à sa mission de protection lors de l'attaque des 19-20 septembre 2023.

La période actuelle est par ailleurs marquée par la poursuite du soutien de la France à l'Arménie, dans un cadre bilatéral30(*). La France a renforcé sa relation dans le domaine de la défense, soutenant les forces armées arméniennes pour permettre à l'Arménie d'améliorer ses capacités défensives et, ainsi, d'assurer son intégrité territoriale. L'Arménie a notamment passé commande de dispositifs de défense antiaérienne auprès d'industriels français.

Par ailleurs, la décision du Conseil du 22 juillet 2024 s'inscrit dans un rapprochement structurel global de l'Union européenne avec l'Arménie, en particulier à travers l'accord de partenariat global et renforcé (CEPA), entré en vigueur dès mars 2021. C'est dans ce cadre que l'Union européenne a annoncé, le 5 avril 2024, une enveloppe de 270 millions d'euros sur la période 2024-2027, dans le cadre d'un programme intitulé « Résilience et croissance de l'Arménie 2024-2027 ». Un dialogue sur la libéralisation des visas a également été ouvert en juillet 2024.

En outre, la mission civile de l'Union européenne déployée en Arménie (EUMA) depuis janvier 2023, afin de contribuer à la stabilité dans les zones frontalières du pays, a vu son mandat prolongé jusqu'au 19 février 2027, en janvier dernier.

Enfin, concrétisant les mots prononcés devant le Parlement européen, en octobre 2023, par le Premier ministre arménien M. Nikol Pachinian (« l'Arménie est prête à se rapprocher de l'Union européenne aussi loin que l'Union européenne le juge possible »), le Parlement arménien a voté un projet de loi visant à ouvrir des négociations pour rejoindre l'Union européenne, le 26 mars 2025.

d) La résolution européenne du Sénat n° 120 sur l'action de l'Union européenne contre les pénuries de médicaments

La résolution européenne n° 120 sur l'action de l'Union européenne contre les pénuries de médicaments a été adoptée en commission des affaires européennes, le 4 avril 2024, sur le rapport des sénateurs Cathy Apourceau-Poly, Pascale Gruny et Bernard Jomier. Elle est devenue définitive, le 10 mai 2024.

Cette résolution est fondée sur deux communications, une proposition de directive et une proposition de règlement présentées par la Commission européenne et, en particulier, sa communication du 24 octobre 2023 intitulée « Lutter contre les pénuries de médicaments »31(*), qui tendent à tirer les leçons des dépendances stratégiques des États membres de l'Union européenne dans le domaine médical et pharmaceutique, pour mieux prévenir et atténuer les pénuries de médicaments critiques à court, moyen et long termes.

Ces initiatives de la Commission forment un « paquet pharmaceutique » qui répondait à une demande pressante des États membres formulées à plusieurs reprises au cours des derniers mois32(*).

Dans sa résolution européenne, le Sénat a tout d'abord confirmé l'intérêt et l'urgence d'une action européenne « dans le respect des traités » (la fourniture de médicaments relevant de la compétence des États membres), ainsi que les principaux dispositifs de la réforme : instauration d'une typologie des pénuries ; institution d'une liste européenne de médicaments critiques33(*), qui ne devrait pas être une addition de listes nationales et devrait être élaborée par une expertise indépendante, en tenant compte de la « criticité thérapeutique » mais aussi de la « criticité industrielle » ; renforcement des obligations de notification et d'information pour les titulaires d'autorisation de mise sur le marché (AMM). Sur ce point, la résolution a précisé que ces mesures devaient être accompagnées d'une procédure visant à faciliter le transfert d'une AMM vers un autre titulaire en cas de retrait d'un médicament du marché et a appelé à une meilleure coopération entre l'agence européenne des médicaments (AEM ou EMA en anglais), le centre européen de prévention et de contrôle des maladies et les autorités nationales compétentes.

La résolution du Sénat a également souligné l'intérêt d'imposer l'établissement de plans de prévention des pénuries, sous peine de sanctions dissuasives, car ces derniers constituent des outils utiles d'évaluation des risques et d'anticipation des tensions d'approvisionnement, et précisé que le champ d'application de ces plans devait être limité aux seuls médicaments critiques.

Elle a aussi estimé que chaque État membre devrait pouvoir fixer des obligations de stocks aux titulaires d'AMM et que la mise en oeuvre effective de cette obligation par les États membres devait être une condition préalable à leur participation au « mécanisme de solidarité volontaire » mis en place par le paquet pharmaceutique.

Soucieuse de l'association des patients à l'élaboration de la liste des médicaments critiques, la résolution du Sénat a aussi demandé que les patients puissent « bénéficier d'une notice dans leur langue au format électronique ou papier, selon leur souhait ».

Elle a par ailleurs demandé que les missions de l'autorité européenne de préparation et de réaction en cas d'urgence sanitaire (HERA) soient élargies, au-delà des seuls cas d'urgence sanitaires, pour participer à la gestion des pénuries critiques de médicaments et évaluer leur vulnérabilité industrielle, et que cette autorité puisse piloter la passation de marchés publics conjoints. Enfin, la résolution du Sénat a considéré que la relocalisation et le développement des capacités de production de médicaments critiques dans l'Union européenne étaient essentiels et a marqué son soutien aux travaux de l'alliance pour les médicaments critiques34(*).

La Commission européenne a remercié le Sénat pour son soutien à l'économie générale et aux principales dispositions de sa réforme35(*). Elle a, en complément, pris « bonne note » des recommandations du Sénat pour faire respecter les exigences de notification et d'information, précisé que la réflexion sur une éventuelle extension du mandat de l'HERA était en cours d'évaluation, rappelé qu'elle avait déjà passé avec succès plusieurs marchés conjoints avec les États membres et souligné que les États membres pouvaient déjà faire des stocks de sécurité pour des raisons de protection de la santé36(*).

Depuis, les négociations européennes sur le « paquet pharmaceutique » se poursuivent. Le Parlement européen a adopté sa position de négociation le 10 avril 202437(*) et au Conseil, l'adoption d'une orientation générale est visée pour le mois de juin. Cependant, les discussions demeurent vives sur la gouvernance de l'agence européenne des médicaments et sur les possibilités de production38(*) de médicaments critiques.

En complément, le 11 mars 2025, la Commission européenne a présenté une proposition de règlement valant « acte sur les médicaments critiques »39(*) qui vise à accroître la production de médicaments critiques dans les États membres, en particulier par l'élaboration de projets stratégiques et une réorientation des aides d'État, et une consolidation des chaînes d'approvisionnement via les marchés publics (prise en compte de la diversification des sources « d'intrants » et du suivi des chaînes précitées pour l'attribution des marchés, voire exigence de production européenne ; possibilité de « marchés publics collaboratifs » passés par la Commission pour plusieurs États membres...).

e) La résolution européenne du Sénat n° 118 sur la proposition de règlement concernant les végétaux obtenus au moyen de certaines nouvelles techniques génomiques (NTG)40(*)

La résolution européenne n° 118 a été adoptée en commission des affaires européennes, le 20 mars 2024, sur le rapport des sénateurs Jean-Michel Arnaud, Karine Daniel et Daniel Gremillet. Elle est devenue définitive le 26 avril 2024.

Le 5 juillet 2023, dans le cadre de sa stratégie de mise en oeuvre du » pacte vert » au secteur agricole (stratégie dite « de la ferme à la table »), la Commission européenne a présenté la proposition de règlement COM(2023) 411 final qui a pour objet de reconnaître deux catégories de végétaux issues de nouvelles techniques de modification des génomes des végétaux (ou nouvelles techniques génomiques (NTG)) : les NTG comparables aux végétaux apparaissant naturellement ou obtenus de manière conventionnelle (végétaux NTG de catégorie 1) et les végétaux NTG présentant des modifications plus complexes (végétaux NTG de catégorie 2), chaque catégorie devant être soumise à des exigences distinctes et adaptées à ses caractéristiques et à ses profils de risque.

Dans sa résolution européenne, le Sénat s'est d'abord félicité de l'initiative prise par la Commission européenne car elle tend à fixer une réglementation adaptée à ces nouvelles catégories de végétaux, qui seront probablement commercialisées dans les années à venir, afin d'encadrer leur circulation dans l'Union européenne et de garantir une maîtrise des risques pour la santé humaine et l'environnement. Il a aussi demandé que ce cadre normatif puisse être adapté à intervalles réguliers pour tenir compte des « avancées scientifiques » « et des retours d'expérience formulés par les parties prenantes. »

La résolution a également approuvé la volonté de la Commission de faciliter l'accès des agriculteurs aux variétés de végétaux issues des NTG et a appelé à intensifier le soutien public accordé à la recherche sur les variétés végétales. Sur ce point, la Commission européenne a précisé que plusieurs programmes de recherche européens traitaient de ce dossier41(*).

Constatant la double dimension scientifique et politique des critères d'équivalence entre végétaux issus des NTG et végétaux conventionnels, la résolution a demandé la prise en compte des recommandations de l'agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) (nécessité de prendre en considération la taille des génomes et exclusion de la cisgenèse non ciblée42(*)), la fixation d'une clause de revoyure pour évaluer la pertinence de ces critères, et la nécessité d'une publication scientifique pour justifier chaque actualisation. Sur ce point, la Commission européenne a répondu qu'elle avait fondé sa proposition sur les travaux du centre commun de recherche et de l'autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA).

De là, constatant que pour l'heure au moins, aucun risque n'avait été identifié au sujet des végétaux NTG de catégorie 1, le Sénat a estimé que ces derniers pouvaient être traités comme des végétaux conventionnels et déroger aux règles européennes relatives aux organismes génétiquement modifiés (OGM), qui impliquent en particulier une évaluation et une autorisation. En revanche, la résolution a souhaité prévoir la mise en oeuvre, pour les fermes expérimentales, d'un dispositif temporaire de biovigilance a posteriori, afin d'analyser l'impact de la dissémination de ces végétaux.

Pour les végétaux NTG de catégorie 2, la résolution s'est exprimée en faveur de leur autorisation préalable, d'une évaluation des risques et d'un suivi systématique post-autorisation comprenant la mise en place obligatoire d'un plan de surveillance des risques environnementaux.

Prenant acte des craintes des filières d'agriculture biologique et soucieuse du droit à l'information des consommateurs et de leur liberté de choix, la résolution a plaidé pour : un étiquetage obligatoire des semences permettant leur traçabilité et une évaluation de cet étiquetage après 5 ans ; la possibilité d'un étiquetage volontaire mettant en exergue le caractère « non NTG » des produits commercialisés de certaines filières ; la mise en place d'un registre public des végétaux NTG de catégorie 1. Elle a aussi demandé des « clauses miroirs » en termes de traçabilité et d'étiquetage entre produits européens et importations de pays tiers.

Dans sa résolution le Sénat a enfin souhaité que les plantes issues de NTG soient soumises au régime de protection communautaire des obtentions végétales, a plaidé pour l'interdiction de la brevetabilité des végétaux issus de NTG, de leurs semences dérivées et de leur matériel génétique et a appelé la Commission européenne à revoir les règles européennes de propriété intellectuelle, afin de remettre le certificat d'obtention végétale au coeur du système de propriété intellectuelle des plantes.

Sur ces différents points, la Commission européenne a souligné qu'elle était en phase avec le Sénat, rappelant simplement que des dispositifs d'étiquetage volontaire existaient déjà et constatant que la réforme ne concernait pas l'application aux NTG du cadre normatif européen relatif à la propriété intellectuelle.

Le débat sur la reconnaissance et l'introduction des NTG a néanmoins été ralenti par cette question de leur brevetabilité. Le Parlement européen a adopté sa position de négociation, le 24 avril 2024, en prônant l'interdiction de la brevetabilité des NTG, une exclusion de la catégorie 1 des variétés de plantes rendues tolérantes aux herbicides, un assouplissement des critères d'équivalence entre végétaux de catégorie 1 et végétaux conventionnels, et un étiquetage obligatoire des végétaux de catégorie 1.

Au Conseil, après de longs mois sans avancée, la présidence polonaise est parvenue à arracher un mandat de négociation, le 14 mars dernier. Ce mandat permet aux États membres d'interdire la culture des végétaux de catégorie 2 sur leur territoire et de prendre des mesures pour éviter la présence accidentelle de végétaux NTG dans l'agriculture biologique. Il prévoit la brevetabilité des végétaux NTG mais impose à la Commission européenne de réaliser une étude sur ses conséquences sur l'innovation, la compétitivité du secteur et la disponibilité des semences. Il rejette enfin la tolérance aux herbicides pour les végétaux de catégorie 1.

Les négociations en trilogue, délicates, ont débuté le 6 mai 2025.

f) La résolution européenne du Sénat n° 146 sur la proposition de directive relative à la surveillance et à la résilience des sols

La résolution européenne n° 146 (2023-2024), relative à la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à la surveillance et à la résilience des sols (COM(2023) 416 final) du 5 juillet 2023, a été adoptée par la commission des affaires européennes du Sénat, le 30 mai 2024, sur le rapport des sénateurs Gisèle Jourda et Cyril Pellevat. Elle est devenue définitive le 5 juillet 2024.

Le Sénat, dans sa résolution, s'est d'abord félicité du dépôt d'un texte européen sur ce sujet, qu'il suit attentivement depuis plusieurs années, avec les travaux d'une commission d'enquête en 202043(*) et l'adoption d'une première résolution européenne en 202144(*). Il a également soutenu l'objectif du texte, à savoir atteindre des sols sains dans l'ensemble de l'Union européenne à horizon 2050.

Pour rappel, selon l'observatoire européen des sols45(*), 61 % des sols de l'Union européenne seraient dans un état dégradé, en raison d'une perte de carbone organique du sol (53 %), d'une perte de biodiversité des sols (37 %) et d'un risque de dégradation des tourbières (30 %).

Dans ce contexte, la résolution européenne du Sénat a considéré avec compréhension l'approche progressive et proportionnée de la proposition de directive et souligné la nécessité d'harmoniser les initiatives nationales des États membres tout en attirant l'attention sur les « frottements » possibles entre le droit européen des sols avec le droit de l'urbanisme et le droit de propriété, qui ne relèvent pas des compétences partagées entre l'Union européenne et les États membres, et en soulignant la nécessité de tenir compte des spécificités nationales et locales, en particulier des régions ultrapériphériques (RUP).

La résolution a aussi demandé un chiffrage des besoins financiers liés à la mise en oeuvre de la proposition de directive, ainsi qu'un partage des données et des connaissances en matière d'état des sols entre États membres s'appuyant sur les dispositifs existants.

En accord avec le principe d'une évaluation de la santé des sols, elle a souhaité que cette dernière fasse l'objet d'une analyse plus précise et approfondie, se basant davantage sur les services qu'ils rendent aux écosystèmes. Elle a aussi confirmé la nécessité d'une conformité des opérations de collectes de données au Règlement général sur la protection des données (RGPD)46(*).

Elle a également exprimé des réserves sur le principe de certification volontaire des sols par les propriétaires forestiers et les gestionnaires de terres.

Concernant le principe d'atténuation de l'artificialisation des sols, la résolution a rappelé que la France avait adopté une législation relative à la consommation d'espaces naturels agricoles et forestiers qui fixe un objectif d'absence de toute artificialisation nette à terme47(*) et a souhaité que la directive ne remette pas ce cadre national en cause. Elle a enfin approuvé l'approche fondée sur le risque en matière de gestion des sols pollués ou potentiellement pollués et demandé que les mesures destinées à favoriser les pratiques de gestion durable et à prévenir les atteintes aux sols par les activités industrielles et minières ne soient pas financées sur les crédits de la PAC.

Par la suite, le Parlement européen a adopté sa position de négociation sur la proposition de directive (le 10 avril 2024) et le Conseil est parvenu à dégager une orientation générale sur la réforme, le 17 juin 2024.

Les négociations en trilogue ont eu lieu les 9-10 avril 2025 et ont été fructueuses. Selon le compromis trouvé, les États membres surveilleront et évalueront l'état des sols sur leur territoire sur la base de critères communs caractérisant l'aspect physique, chimique ou biologique pour chaque type de sol, et d'une méthodologie commune pour les points de prélèvement.

Cet accord comprend d'autres points en ligne avec les positions du Sénat : d'abord, les actions précitées pourront s'appuyer sur les dispositifs nationaux existants. Ensuite, les gouvernements des États membres auront la liberté de fixer ou non des objectifs intermédiaires pour respecter l'objectif général de sols sains à échéance 2050. Enfin, la réforme ne sera pas à l'origine de nouvelles contraintes pour les agriculteurs, sylviculteurs et gestionnaires de terres. Les États membres seront en revanche obligés de les aider à améliorer la qualité et la résilience des sols et évaluer leurs besoins financiers pour mener cette amélioration.

En outre, dix ans après l'entrée en vigueur de la directive, les États membres devront publier, d'une part, une liste publique des sites potentiellement contaminés et à remédier à tout risque inacceptable pour la santé humaine et l'environnement et, dix-huit mois après cette entrée en vigueur, devront établir une liste indicative de substances émergentes susceptibles de présenter un tel risque (PFAS ou « polluants éternels » et pesticides).

Sur un aspect spécifique de la dégradation des sols, en l'espèce, leur artificialisation, il a été rappelé que la loi française avait anticipé la proposition de directive. Mais l'état du droit demeure « mouvant », faute de consensus. En effet, si l'objectif général de la loi « climat et résilience » de 2021 (objectif de zéro artificialisation nette ou ZAN en 2050) a été repris par la proposition de directive et si ses principaux décrets d'application ont été publiés, ce cadre légal a suscité l'inquiétude des élus locaux, tant en raison de son objectif intermédiaire48(*) que sur les contraintes imposées aux maires, en particulier l'obligation de compenser toute artificialisation par la restauration d'un espace équivalent.

Pour y répondre, à la demande du Sénat, le Parlement a adopté la loi n° 2023-63049(*) qui vise à concilier respect des objectifs de la loi « ZAN » et développement économique en accordant des délais supplémentaires pour intégrer les objectifs d'artificialisation dans les documents d'urbanisme, en déployant des outils à la disposition des maires et en renforçant la gouvernance de la réforme (mise en place d'une « conférence ZAN » au niveau régional), en prévoyant, sur les 125 000 hectares pouvant être artificialisés, un « forfait national » de 12 500 hectares pour des projets majeurs d'intérêt national (lignes de TGV, projets de réacteurs nucléaires...) et en instaurant une « garantie rurale » (ou droit à construire d'un hectare) au profit de toutes les communes.

Malgré cette évolution, le groupe de suivi du Sénat sur le suivi des politiques de réduction de l'artificialisation des sols constatait, en octobre dernier50(*), que la méthode mise en place par l'État, trop centralisatrice et animée par des injonctions contradictoires, ne fonctionnait pas et qu'il fallait de nouveau « desserrer l'étau » réglementaire et législatif sur les maires. Puis, lors du 106ème congrès des maires, face aux critiques des élus communaux, le Gouvernement annonçait vouloir corriger certains « irritants » tout en estimant qu'il fallait maîtriser la consommation foncière51(*).

Sans attendre, le 18 mars dernier, le Sénat a de nouveau assoupli la loi « ZAN », rebaptisée « TRACE »52(*) pour repousser, de 2031 à 2034, le respect de l'objectif intermédiaire précité, et pour maintenir les critères de décompte actuels de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers (ENAF) après 2031, alors qu'ils devaient être durcis.

Cependant, dans une logique opposée à celle du Sénat, la commission du développement durable de l'Assemblée nationale a publié, le 9 avril, les conclusions de sa « mission d'information sur l'articulation des politiques publiques ayant un impact sur l'artificialisation des sols », qui refusent les aménagements et exemptions proposés par les sénateurs. La mission propose en revanche des incitations financières à la sobriété foncière via la dotation globale de fonctionnement ou des dotations d'investissement liées et de nombreuses majorations de taxes (majoration de la taxe sur les résidences secondaires et sur les logements vacants ; fin de l'exonération de taxes foncières pour les constructions nouvelles...) pour faciliter la mise en oeuvre de la « loi ZAN ».

3. Cinq résolutions européennes du Sénat ont été partiellement ou très partiellement suivies
a) La résolution européenne du Sénat n° 52 sur la proposition de règlement dite « cybersolidarité »53(*)

La résolution européenne n° 52 a été adoptée en commission des affaires européennes, le 13 décembre 2023, sur le rapport des sénateurs Audrey Linkenheld, Catherine Morin-Desailly et Cyril Pellevat. Elle est devenue résolution du Sénat le 19 janvier 2024.

Cette proposition de règlement, présentée le 18 avril 2023, avait pour objectif initial de créer un « cyberbouclier européen » afin de renforcer les capacités de détection, d'analyse, de préparation, et de réponse aux cybermenaces, en instaurant des centres d'opérations de sécurité (COS ou SOC en anglais) nationaux et transfrontières, mais aussi un mécanisme d'urgence intégrant une réserve européenne de cybersécurité et un mécanisme d'analyse des incidents de cybersécurité.

Dans sa résolution, le Sénat a cependant fait part de son étonnement au sujet du calendrier qui intervenait seulement quatre mois après l'adoption définitive de la directive SRI54(*) ayant le même objet. Il a pour cette raison, déploré l'absence d'analyse d'impact qui aurait pu démontrer la nécessité d'une nouvelle réforme et sa conciliation avec la proposition de directive SRI2.

La résolution européenne du Sénat a également souhaité que la proposition de règlement puisse clairement exclure les domaines de la sécurité nationale et de la défense nationale de son champ d'application et que la dérogation au principe d'annualité budgétaire prévue par la proposition, soit limitée aux seules activités non planifiables. Elle a aussi regretté que les financements destinés au nouveau dispositif soient prélevés sur les budgets d'autres actions essentielles comme l'éducation digitale ou Erasmus +.

Appuyant le renforcement des capacités de cybersécurité au niveau européen, la résolution européenne du Sénat a néanmoins rejeté la pertinence de la notion de « cyberbouclier », pour lui préférer celle de « cybersentinelle » en rappelant que le risque zéro n'existait pas dans ce domaine. Elle a estimé que l'architecture européenne de cybersécurité résultant de la réforme préconisée était trop complexe. Elle a, en conséquence, demandé le retrait du dispositif des COS institués par la proposition au profit du renforcement des centres de réponse aux incidents de sécurité informatique (CSIRT) institués par la directive SRI2.

La résolution du Sénat s'est aussi interrogée sur la présence systématique de la Commission européenne dans les échanges d'informations sensibles et a rappelé la nécessité, pour les collectivités territoriales, les administrations et les entreprises, de se doter d'un plan de continuité des activités (PCA).

Concernant le mécanisme d'urgence, la résolution a pris acte du fonctionnement envisagé, fondé sur une alliance public/privé inspirée de l'organisation actuelle de la cybersécurité en France, tout en constatant que cette dernière résultait d'une insuffisance des moyens dévolus aux autorités nationales compétentes. Elle a aussi déploré la possibilité d'intégrer, au sein de la réserve européenne de cybersécurité, des prestataires étrangers, qui représentent un vrai risque d'ingérence étrangère, et a considéré, à tout le moins, que ces prestataires devraient avoir leur siège social dans l'Union européenne, dans l'Espace économique européen ou dans un pays associé membre de l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Et, en cas de cyberattaque dans les États membres et dans des pays tiers associés, la résolution a demandé une priorité d'intervention de la réserve dans les premiers.

Enfin, la résolution du Sénat a constaté le risque de « doublon » entre la mission d'analyse des incidents de cybersécurité confiée par la proposition à l'agence européenne pour la cybersécurité (ENISA) et celle déjà confiée par la directive SRI2 au réseau EU-CyCLONE. Elle a enfin regretté l'ampleur des dispositions de la réforme devant être précisées par des actes d'exécution55(*).

En réponse à ces observations du Sénat, la Commission européenne56(*) a justifié l'absence d'analyse d'impact par le fait que les principales dispositions de la proposition de règlement avaient déjà été évoquées dans le cadre du règlement établissant le programme pour une Europe numérique et que le texte n'aurait eu pas « d'incidences administratives ou environnementales notables », ce qui est peu convaincant.

Elle a également :

marqué son accord avec le Sénat sur le contour des dérogations au principe d'annualité budgétaire57(*) et n'a pu que confirmer le financement de la réforme par des « ponctions » sur les budgets existants de l'Europe numérique ;

affirmé que sa proposition n'avait « pas d'incidence sur les responsabilités des États membres en matière de sécurité nationale » ;

nié toute modification de la gouvernance européenne de cybersécurité par la proposition de règlement, les actions nouvelles devant « compléter » celles des organismes en place, et précisé que les COS devaient être constitués sur une base volontaire ;

- confirmé que des prestataires étrangers seraient sollicités mais sur la base de critères permettant de respecter « les niveaux les plus élevés possibles de sécurité et de confiance », sans plus de précision ;

souligné que le large renvoi prévu à des actes d'exécution était nécessaire pour garantir des conditions de mise en oeuvre uniformes de la réforme.

Après plusieurs mois de négociation, le règlement « cybersolidarité » a été adopté le 2 décembre 2024 et est entré en vigueur début 2025. Son équilibre général est resté le même mais la notion de « cyberbouclier » a été supprimée et celle de COS a été remplacée par celle de « système d'alerte cyber européen ». Par ailleurs, suite à la résolution du Sénat, une clause d'exclusion explicite en faveur de la sécurité nationale et de la défense nationale, a été intégrée, et la dérogation au principe d'annualité budgétaire a été limitée aux activités non planifiables (réserve et assistance mutuelle). Quant à la directive SRI2, elle est en cours de transposition en droit français, dans le cadre du projet de loi « résilience »58(*).

b) La résolution européenne du Sénat n° 90 relative à la prévention et à la lutte contre la corruption dans l'Union européenne

Cette résolution, issue d'un long travail d'auditions des rapporteurs de la commission des affaires européennes (les sénateurs Jean-François Rapin, Claude Kern et Didier Marie), a été définitivement adoptée le 18 mars 2024.

Elle analyse les efforts tardifs de la Commission européenne, qui a proposé ses textes « anti-corruption » en fin de mandat avec une réelle incertitude quant à leur adoption, alors que les institutions européennes étaient particulièrement observées sur ce sujet, à la suite du scandale du « Qatargate » ayant touché le Parlement européen, de plusieurs enquêtes de la Médiatrice de l'Union européenne sur le manque de transparence de la Commission, et des analyses d'Europol, l'agence européenne de coopération policière, sur l'ampleur de la corruption dans l'Union européenne59(*).

La résolution européenne du Sénat concerne trois textes, qui couvrent la prévention et la lutte contre la corruption européenne : une proposition de directive actualisant la définition des infractions liées à la corruption et renforçant leur sanction60(*), une communication de la Commission européenne proposant d'instaurer une organisme éthique commun aux institutions européennes pour établir des lignes directrices minimales communes et échanger de bonnes pratiques61(*), et une proposition de directive établissant des exigences harmonisées de transparence de l'activité des représentants d'intérêts agissant pour le compte de pays tiers62(*).

Dans sa résolution européenne, le Sénat a d'abord pris acte de la prise de conscience européenne sur la nécessité de lutter plus efficacement contre la corruption mais a déploré l'absence d'analyse d'impact. Il a pris acte de la justification de la Commission européenne, qui expliquait que sa proposition de directive contre la corruption « intègr[ait] essentiellement des obligations et des normes internationales, en laissant peu de place à des solutions alternatives », mais n'a pas considéré cet argument déterminant pour l'autoriser à déroger à une obligation générale de transparence sur les motifs, bases juridiques et objectifs des réformes qu'elle propose, en particulier lorsqu'elles ont un impact sur la vie démocratique.

De là, en dépit des deux observations sur la nécessité du respect du principe « non bis in idem »63(*) et sur la longueur des délais de prescription envisagés, la résolution européenne du Sénat a approuvé l'économie générale de la proposition de directive (actualisation de la définition des infractions, en particulier avec l'insertion du trafic d'influence, et quantum des peines ; nécessité de ressources pour les services d'enquête ; clause de revoyure...). Il a aussi appelé au renforcement de la coopération opérationnelle au niveau européen (appui à « l'alliance des ports européens »64(*), au rôle de soutien d'Europol contre la criminalité économique et financière ; approbation de la modernisation du cadre normatif européen contre le blanchiment et demande de soutien accru aux actions du Parquet européen pour poursuivre les atteintes aux intérêts financiers de l'Union européenne...). L'examen de la proposition de directive est toujours en cours dans le respect de ces principes.

Les négociations sur la proposition de directive sur la transparence de l'activités des représentants d'intérêts agissant pour le compte de pays tiers se poursuivent également mais ne sont pas aussi favorables aux positions du Sénat. Ce dernier a approuvé le principe du registre commun de transparence, mis en place en 2021 pour enregistrer les lobbyistes souhaitant prendre contact avec les institutions européennes, ainsi que le principe du renforcement du cadre normatif européen.

Mais il estimait et estime toujours que l'adoption d'un texte spécifique aux seuls représentants d'intérêts agissant pour le compte de pays tiers « manquera sa cible », faute de tenir compte de la réalité (en effet, les intéressés exercent aussi des activités de représentation d'intérêts européens, qui ne sont pas couverts par le texte), et instaurera une distorsion juridique. Le Sénat s'est aussi opposé à la base juridique choisie (l'article 114 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE), relatif au marché intérieur). Il a également exprimé ses fortes réserves sur la nature du texte, qui tend à uniformiser les procédures nationales au lieu de les harmoniser et de s'inspirer des législations nationales efficaces. Il a également refusé les restrictions d'information imposées aux autorités nationales de contrôle, qui paraissent contraires à l'objectif de transparence poursuivi, ainsi que la possibilité, pour la Commission, de compléter le dispositif par des actes délégués, et le pouvoir de coordination qui serait conféré à la Commission européenne, alors même que les institutions européennes ont été « omises » du champ d'application du texte. Enfin, le Sénat a rappelé que la France devait pouvoir invoquer des motifs de sécurité nationale ou de défense nationale pour reconnaître ou refuser un représentant d'intérêts.

La Commission européenne est restée sur ses positions65(*), estimant que la base juridique choisie était « appropriée », tout comme l'étendue de sa possibilité d'action par actes délégués, et considérant que « les divergences actuelles entre les États membres (créaient) des conditions de concurrence inégales », ce qui tend à prouver, de manière étonnante que l'objectif premier de la réforme était, en l'espèce, de mieux assurer cette concurrence et non de lutter plus efficacement contre le risque d'ingérences étrangères via cette activité de représentation d'intérêts.

Enfin, au sujet de la création d'un organisme d'éthique compétent auprès des institutions européennes, le Sénat n'a pas du tout été entendu par la Commission européenne. En effet, loin de « l'organisme d'éthique » de l'Union européenne, qui se contentera de constituer un forum entre certaines institutions européennes sur les sujets éthiques66(*), dont le secrétariat sera assuré par elles sous la direction de la Commission et qui sera dépendant des moyens de cette dernière, le « comité d'éthique » de l'Union européenne proposé par la résolution européenne du Sénat tend à instituer une véritable culture de la transparence européenne.

Dans le dispositif du Sénat, ce comité serait en effet accompagné par la mise en place d'un système de déclaration d'intérêts et de patrimoine obligatoire pour tous les représentants des institutions européennes et pour leurs cadres administratifs. Le comité, tel qu'envisagé, serait composé de membres indépendants, doté de pouvoirs d'enquête, et contrôlerait ces déclarations comme le fait, en France, la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP). Il assurerait aussi le suivi des mobilités des personnes précitées pour éviter le « pantouflage » ainsi que le secrétariat du registre commun de transparence, et serait chargé de rédiger, une fois par an, un rapport sur le suivi de l'État de droit dans les institutions européennes qui compléterait utilement celui de la Commission européenne sur la situation dans les États membres.

La réponse de la Commission européenne est demeurée très laconique, s'abstenant de commenter les pistes de réflexion du Sénat. Mais l'organisme d'éthique interinstitutionnel a été mis en place sans modification. Il s'agit donc, à l'évidence, d'une « occasion ratée » par l'Union européenne.

c) La résolution européenne du Sénat n° 121 sur la proposition de règlement67(*) concernant la lutte contre le retard de paiement dans les transactions commerciales

Cette résolution a été adoptée en commission des affaires européennes, le 9 avril 2024, sur le rapport des sénateurs Amel Gacquerre et Michaël Weber, et est devenue définitive le 14 mai 2024.

Le 12 septembre 2023, la Commission européenne a adopté une proposition de règlement concernant la lutte contre le retard de paiement dans les transactions commerciales, qui a pour objet de se substituer à la directive 2011/7/UE du 16 février 2011, car elle a constaté que ce texte n'avait pas permis d'améliorer substantiellement les comportements en matière de paiement, faute de mesures préventives et dissuasives suffisantes.

Dans sa résolution européennele Sénat s'est d'abord fait l'écho des parties prenantes au niveau national qui ont indiqué ne pas avoir été consultées par la Commission sur la réforme et des fédérations européennes consultées, qui, elles, ont déclaré ne pas avoir compris les intentions du collège des commissaires.

Rappelant que les textes en vigueur sur les retards de paiement étaient des directives, elle a relevé que seize États membres sur vingt-sept étaient opposés à leur remplacement par un règlement, et a fait part de son scepticisme sur ce choix, en constatant qu'il serait moins protecteur des prérogatives des parlements nationaux et qu'il ne donnerait pas de marge d'appréciation aux États membres. En conséquence, la résolution a demandé à la Commission européenne de présenter une directive plutôt qu'un règlement.

La résolution du Sénat a précisé partager l'objectif général de la réforme tendant à lutter plus efficacement contre les retards de paiement, afin d'améliorer la compétitivité des entreprises. Elle a cependant dénoncé la confusion opérée par le texte entre la notion de « délais de paiement » et celle de « retards de paiement », considérant que si la lutte contre ces retards est impérative, l'encadrement des « délais de paiement » doit en revanche être adapté aux réalités de la vie économique.

Dans cet esprit, la résolution européenne du Sénat a constaté que le délai de paiement maximal unique de 30 jours imposé par la proposition de règlement était une « fausse bonne idée » portant « une atteinte excessive à la liberté contractuelle » en ce qu'elle ne tenait aucunement compte des équilibres et contraintes économiques des différentes filières, ignorait les enjeux liés à la saisonnalité ou à la rotation longue de certains produits, et était susceptible d'engendrer des fonds de roulement supplémentaires et de compliquer la gestion de stocks. Ce faisant, une telle réforme pénaliserait les petites et moyennes entreprises. En outre, elle induirait probablement une augmentation du transport de marchandises, qui pourrait avoir des conséquences écologiques négatives.

La résolution a également appelé à la Commission européenne à procéder à des expertises complémentaires sur plusieurs dispositions envisagées : la suppression des dérogations dans certains cas pour les pouvoirs publics ; la détermination du point de départ du délai de paiement ; l'effectivité des pénalités de retard applicables de plein droit.

Si elle a validé le principe de la désignation d'autorités nationales compétentes, la résolution européenne a souhaité la modulation, par les États membres, du montant de l'indemnité pour les frais de recouvrement, souligné l'intérêt de l'affacturage, et exprimé des réserves sur l'introduction d'un mécanisme de contrôle du paiement des sous-traitants dans le cadre de marchés publics.

Elle a conclu à un rejet de cette réforme « en l'état ».

Sur le principe de la réforme, la Commission européenne est restée inflexible, estimant que les retards de paiement mais aussi les délais de paiement, contribuant « à l'augmentation du nombre de licenciements et de faillites. »68(*) Elle a réfuté tout manque de communication sur la réforme, rappelant qu'elle avait produit une analyse d'impact, procédé à une consultation publique, réuni un panel de PME et organisé des réunions individuelles et collectives sur ce dossier.

Elle a d'ailleurs justifié le choix d'un délai maximal de paiement de 30 jours en soulignant qu'il correspondait à la solution privilégiée lors de ses consultations et parce que « cette option (était) la plus avantageuse en termes de liquidités dans l'économie. » Elle a rappelé que, selon son analyse d'impact, un tel plafond pouvait contribuer à une « augmentation de 66 % des flux de trésorerie ». Cela pourrait représenter 12 milliards d'euros en faveur des PME françaises, qui sont « les plus pénalisées par les retards de paiement ». Elle a ajouté que sa réforme mettrait fin à une asymétrie de pouvoir entre les débiteurs et les créanciers, en observant qu'en 2023, « 64 % des entreprises françaises (avaient) déclaré devoir accepter un délai de paiement imposé par une grande entreprise. »

Prenant conscience de l'importance de la saisonnalité et de la lenteur des cycles de conversion des liquidités dans certains secteurs (ex : vêtements), la Commission s'est cependant dite prête à envisager des « options possibles pour des délais de paiement flexibles ». Elle a en outre justifié son choix d'un règlement par la nécessité d'établir des règles applicables de manière uniforme.

Par la suite, le 18 avril 2024, le Parlement européen a adopté sa position de négociation. Cette dernière module les délais de paiement en fonction des secteurs économiques et du type de transaction : 30 jours pour les transactions interentreprises et entre entreprises et administrations ; 60 jours pour les transactions précitées si ce délai est prévu dans les clauses contractuelles ; 120 jours dans les secteurs du commerce de détail avec une faible rotation ou une saisonnalité (vêtements, livres, jouets, bijoux, équipements sportifs...).

En revanche, au Conseil, les négociations sont arrêtées depuis de longues semaines car quinze États membres dont l'Allemagne s'opposent au texte. Les autorités françaises ne rejettent pas le principe de la réforme. Elles sont prêtes à accepter un encadrement européen a minima tout en conservant la flexibilité propre à chaque secteur.

d) La résolution européenne du Sénat n° 129 sur la modification et le réexamen de certains éléments de la politique agricole commune (PAC)69(*) :

Cette résolution, déposée par plusieurs représentants du groupe PAC du Sénat70(*), a été adoptée par la commission des affaires européennes du Sénat, le 11 avril 2024 sur le rapport de M. Daniel Gremillet, et est devenue résolution du Sénat, le 17 mai 2024, alors que les agriculteurs en colère manifestaient dans toute l'Europe contre l'évolution de la PAC.

Cette résolution rappelle d'abord que le Sénat avait « lancé l'alerte » à plusieurs reprises71(*), interpellant la Commission européenne sur la dégradation de la situation des agriculteurs du fait de plusieurs risques identifiés très tôt : la charge administrative supplémentaire induite par la nouvelle PAC pour les agriculteurs avec une conditionnalité environnementale renforcée et une renationalisation partielle de cette politique ; l'anachronisme d'une PAC conçue avant l'agression russe contre l'Ukraine et la menace représentée par ce conflit sur la sécurité alimentaire mondiale ; une mise en oeuvre du « Pacte vert », et de sa déclinaison pour la PAC, à savoir la stratégie « De la ferme à la fourchette », « faisant courir le risque d'une diminution de la production agricole européenne dans des proportions de 10 à 20 % à horizon 2030 »...

La résolution a donc dénoncé le refus persistant de publier une étude d'impact sur les conséquences économiques et sociales de la stratégie « De la ferme à la fourchette » et déploré qu'il ait fallu attendre le déclenchement d'une crise agricole pour que la Commission européenne accepte d'ouvrir un « dialogue stratégique sur l'avenir de l'agriculture européenne ». Tout en évitant de répondre aux observations du Sénat sur le temps perdu pour analyser la situation de l'agriculture, la Commission européenne, dans sa réponse72(*), a reconnu que « les protestations des agriculteurs » « mett(aient) en lumière les défis majeurs auxquels est confronté le secteur agricole » et a confirmé qu'elle prenait « cette situation très au sérieux ».

La résolution du Sénat a également affirmé plusieurs priorités.

Tout d'abord, elle a souhaité afficher le soutien du Sénat aux mesures de simplification de la PAC annoncées pour alléger les contraintes sur la production, en particulier, la suppression de l'obligation de consacrer une part minimale des terres arables à des éléments non productifs (jachères), et la demande d'un réaménagement des exigences afférentes à la protection des zones humides, des prairies permanentes... Elle a également souhaité l'abaissement des limites maximales de résidus (LMR) de produits phytosanitaires.

Sur ce point, la Commission européenne a rappelé que le règlement mettant en oeuvre ses mesures de simplification, présentées le 22 février 2024, avait été publié au Journal officiel de l'Union européenne, le 24 mai 202473(*). Au terme des négociations sur cette réforme, les flexibilités prévues ont été étendues, en particulier concernant la gestion du travail du sol et la protection des prairies permanentes, sans compter des « dérogations temporaires aux exigences de BCAE74(*) pour tenir compte des conditions climatiques de plus en plus imprévisibles. ». Elle n'a en revanche, pris aucun engagement sur les seuils de produits phytosanitaires.

La résolution du Sénat a aussi demandé le relèvement du seuil des aides « de minimis » afin de permettre aux États membres de répondre de manière plus réactive et plus efficace en cas de crise, et de la reconnaissance d'un « droit à l'erreur » des agriculteurs, ainsi que d'un dispositif de contrôle unique des exploitations. À ce sujet, la Commission a confirmé que les contrôles avaient été rationalisés grâce « à la suppression des contrôles liés à la conditionnalité pour les petits agriculteurs », mais sans instituer de « droit à l'erreur » et sans prévoir de « contrôle unique ».

Dans sa résolution, le Sénat a une nouvelle fois mis en garde la Commission européenne contre l'accroissement des distorsions de concurrence intracommunautaires du fait de la « renationalisation » de la PAC et a insisté sur la nécessité de lutter contre le contournement des législations nationales sur l'encadrement des négociations commerciales par la localisation de centrales d'achat sur le territoire d'autres États membres. Elle a aussi rappelé qu'il était impératif que les agriculteurs puissent bénéficier d'un « revenu équitable », ce qui doit impliquer de leur donner plus de pouvoir pour négocier un « juste prix » sur leur production.

Sur ce point clef, il est significatif de constater que la Commission a souhaité confirmer que son objectif premier « demeur[ait] de favoriser une transition en douceur vers une agriculture plus durable ». Elle a cependant défendu sa « politique robuste d'aide directe aux revenus » des agriculteurs et a souligné qu'elle avait présenté, le 26 mars 2024, plusieurs mesures envisageables75(*) pour améliorer la position des agriculteurs dans la chaîne d'approvisionnement.

De même, lorsque le texte du Sénat a insisté sur la nécessité de la mise en oeuvre systématique des principes de réciprocité et d'équité dans le volet agricole des accords de libre-échange, la Commission a refusé de s'engager dans une telle voie en justifiant une « évaluation au cas par cas » pour respecter les règles de l'Organisation mondiale du commerce (OMC)76(*).

Par ailleurs, en réponse à la demande du Sénat d'un mécanisme de sauvegarde effectif, incluant le blé et l'orge, pour prévenir le risque de déstabilisation du marché lié aux importations ukrainiennes, la Commission a rappelé qu'une « garantie renforcée » avait été mise en oeuvre.

Depuis, comme elle s'y était engagée, la Commission européenne a mené « un dialogue stratégique » pendant plusieurs mois pour dessiner l'avenir de la PAC dans le nouvel environnement géopolitique qui a mis à jour les fragilités européennes. Ses conclusions, rendues le 4 septembre 2024, insistent sur quatorze points, en particulier, sur « le renforcement de la position des agriculteurs dans la chaîne de valeur alimentaire », sur l'élaboration d'une PAC adaptée à 3 nouveaux défis (un soutien plus ciblé aux agriculteurs qui en ont le plus besoin ; la promotion des résultats positifs en matière environnementale (élevage et pratiques agricoles durables, réduction des émissions de gaz à effet de serre...), sociale et de bien-être animal ; la dynamisation des zones rurales), sur une gestion solide des risques et des crises et sur le développement de l'attractivité du secteur.

Sur cette base, le 19 février 2025, la Commission européenne a exposé sa « vision » pour l'agriculture et l'alimentation, marquée par la volonté d'assurer l'attractivité du secteur agricole, mais aussi sa compétitivité et sa résilience, de garantir l'harmonie de ce dernier « avec la nature », et de valoriser des conditions de vie et de travail équitables dans les zones rurales.

Sans attendre cette « vision » aux contours encore mal définis, en raison des bouleversements géopolitiques récents, mais aussi de la mise en avant de l'objectif de compétitivité par la Commission européenne « von der Leyen II », et de l'ouverture imminente des négociations du prochain cadre financier pluriannuel post 2027, le Sénat a été amené à adopter une nouvelle résolution européenne77(*) (dont les dispositions seront examinées de manière exhaustive, dans le rapport sur le suivi des résolutions européennes adoptées pendant la session 2024-2025).

Soulignons que cette résolution reprend les demandes de la résolution n° 129 et appelle la Commission européenne à considérer de nouveau la PAC comme une priorité politique commune. Elle affirme aussi que la compétitivité des exploitations agricoles conditionne leur possibilité de respecter les normes environnementales et pas l'inverse, demande la « sanctuarisation » d'un budget autonome pour la PAC dans le prochain cadre financier pluriannuel et réitère sa demande de « clauses-miroirs » concernant le respect des normes sanitaires et environnementales par les productions agricoles, dans les accords de libre-échange.

e) La résolution européenne du Sénat n° 147 visant à reconnaître la spécificité de l'engagement des sapeurs-pompiers volontaires et à renforcer le dispositif européen de protection civile

Cette résolution, déposée par le sénateur Cyril Pellevat le 21 mai 2024, a été adoptée par la commission des affaires européennes du Sénat, le 20 juin 2024, sur le rapport de M. Pellevat et de la sénatrice Gisèle Jourda. Elle est devenue résolution du Sénat le 26 juillet 2024.

Cette résolution avait un double objectif. En premier lieu, elle visait à sécuriser juridiquement la spécificité de l'engagement des sapeurs-pompiers volontaires, alors que l'arrêt « Matzak contre ville de Nivelles » rendu par la CJUE en 201878(*), les a assimilés à des « travailleurs » au sens de la directive « temps de travail »79(*), alors même que ce sont des citoyens qui décident librement et de manière altruiste, de donner de leur temps pour accomplir des missions de sécurité civile confiées aux services d'incendie et de secours, et qu'ils remplissent cet engagement en plus d'une activité professionnelle. Or, l'assimilation de ces sapeurs-pompiers volontaires à des « travailleurs » entraînerait une « augmentation considérable des dépenses » des services départementaux d'incendie et de secours (SDIS), « en raison des rémunérations et de la compensation des temps de repos par des rotations plus sévères entre sapeurs-pompiers » et, de facto, « une diminution des effectifs et du maillage territorial, c'est-à-dire une profonde dégradation de la réponse des secours »80(*).

En se basant sur les conclusions 2022/C 322/02 du Conseil du 26 août 2022, qui ont demandé aux États membres de « promouvoir davantage, en coordination avec les autorités nationales ou infranationales, l'engagement de la société civile dans la prévention du changement climatique et la réponse opérationnelle face à celui-ci en soutenant la contribution des citoyens à leur propre sécurité et résilience, et en favorisant toute initiative de volontariat en matière de réponse aux catastrophes ... », la résolution a donc demandé au Gouvernement d'appuyer le dépôt, par la Commission européenne, d'une directive sur le « volontariat », qui aurait pour objectif d'exclure ces personnels de la directive « temps de travail » et de pérenniser leur activité.

Ce faisant, la résolution a fait écho à plusieurs initiatives passées du Sénat81(*), qui a toujours marqué sa volonté de défendre le volontariat sapeur-pompier, dont l'existence conditionne le maillage territorial des secours dans notre pays (les sapeurs-pompiers volontaires représentent en effet 78,25 % du total des effectifs de sapeurs-pompiers).

Malheureusement, cette initiative de bon sens se heurte à un refus de principe de la Commission européenne, réitéré dans sa réponse au Sénat82(*). La Commission invoque, d'une part, une base juridique insuffisante pour modifier la jurisprudence de la CJUE, et, surtout, sa crainte de rouvrir une discussion sur l'application de la directive « temps de travail », au détriment des droits des travailleurs que cette dernière promeut.

Le Gouvernement partage manifestement cette crainte. Interrogé, le Secrétariat général aux affaires européennes a précisé qu'il avait mené des discussions informelles constructives avec la Commission européenne qui avaient abouti à l'identification des éléments du droit français permettant d'exclure les sapeurs-pompiers volontaires de la directive temps de travail moyennant plusieurs modifications de l'activité des volontaires (limitation des gardes postées entre 400 et 800 heures par an ; renonciation au dispositif des renforts saisonniers ; assouplissement des temps de formation...)83(*). Il n'en demeure pas moins que cette situation n'invalide pas la demande du Sénat, l'adoption d'un texte européen étant préférable à un tel accord informel, toujours susceptible d'être remis en cause par un revirement de la Commission européenne ou par un nouvel arrêt de la CJUE.

Le second objectif de la résolution européenne était de souligner les succès du Mécanisme européen de protection civile, qui est déclenché sur demande d'un État membre ou d'un pays associé, et permet de déployer des moyens supplémentaires, contre les catastrophes naturelles, industrielles84(*)... Les demandes sont centralisées par le centre de coordination de réaction et d'urgence (ERCC), installé à Bruxelles et dépendant de la Commission européenne. Pendant une opération de secours, l'État membre concerné a la direction des opérations de secours et l'ERCC coordonne le soutien logistique.

Alors que la Commission européenne avait confié une réflexion sur la préparation aux crises à l'ancien Président de la République de Finlande Sauli Niinistö et qu'elle a affirmé à plusieurs reprises, le souhait de voir l'ERCC transformé en centre opérationnel de coordination des réponses à toutes les crises (incendies ; attaques terroristes ; menaces hybrides...) contre un « risque de fragmentation élevée » de ces réponses85(*) la résolution européenne du Sénat a rejeté cette option de « défense totale » car elle comprend trois risques majeurs : faire passer « au second plan » les missions de protection civile ; substituer, en dépit des traités, une compétence de la Commission européenne à celle des États membres ; rendre caduque le rôle de coordination politique du « dispositif intégré pour une réaction au niveau politique dans les situations de crise » (IPCR) du Conseil. Sous cette forte réserve, la résolution du Sénat a estimé que le Mécanisme européen avait fait ses preuves et qu'il était utile de réfléchir à son renforcement.

Sur ces points, la Commission européenne, sur la base du rapport Niinistö86(*), a confirmé qu'elle voulait imposer une approche « tous risques » du Mécanisme européen de protection civile et le rôle central de l'ERCC pour coordonner les opérations de secours européennes, dans la stratégie européenne de préparation aux crises, présentée par elle le 26 mars dernier.

En réponse à la résolution du Sénat, elle a aussi confirmé les possibilités de déploiement du Mécanisme dans les régions ultrapériphériques (RUP), ainsi que l'opportunité de conforter les réflexes communs entre acteurs de la protection civile par l'élaboration de protocoles d'intervention partagés, par la création d'un programme d'échange (à cet égard, la résolution envisage la mise en place d'un « ERASMUS + » qui serait dédié aux acteurs des secours), et par l'accroissement des exercices communs.

En pratique, la Commission européenne pourrait faire des propositions en ce sens en 2026.

La résolution a enfin souligné l'importance, pour la France et l'Union européenne, de respecter leurs engagements en matière de renforcement de la flotte aérienne de bombardiers d'eau et de s'appuyer sur des financements européens adaptés et des appels d'offres groupés. Sur ce point, la Commission européenne a précisé qu'elle avait dégagé 900 millions d'euros pour le financement intégral de moyens aériens de lutte contre les feux de forêts et qu'elle avait signé neuf conventions de subvention permettant « l'acquisition, par les neuf États membres signataires, de 12 avions amphibies de lutte contre les incendies (dont 2 pour la France) et de trois hélicoptères de moyenne capacité ».

III. UN DIALOGUE POLITIQUE RÉEL ET RÉGULIER AVEC LA COMMISSION EUROPÉENNE

A. LES AVIS POLITIQUES TRANSMIS À LA COMMISSION EUROPÉENNE

À l'issue de la victoire du « Non » aux référendums sur le traité instituant une Constitution pour l'Europe, en France et aux Pays-Bas, en 2005, le président de la Commission européenne d'alors, M. José Manuel Barroso, avait pris une initiative en faveur d'un dialogue direct avec les Parlements nationaux, centré sur l'application des principes de subsidiarité et de proportionnalité.

Toutefois, depuis l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne, le 1er décembre 2009, qui prévoit un dispositif spécifique de contrôle de la conformité des textes européens au principe de subsidiarité, le dialogue avec la Commission européenne s'est recentré sur les questions concernant les orientations stratégiques et le contenu des documents adressés aux Parlements nationaux et a pris, pour cette raison, l'appellation de « dialogue politique ».

Ce dialogue politique est complémentaire des résolutions de l'article 88-4 de la Constitution qui s'adressent au Gouvernement en vue de ses négociations au Conseil sur les projets de règlements et de directives. Il permet en effet de faire connaître directement la position du Sénat aux institutions européennes, d'abord à la Commission européenne, à laquelle les avis politiques sont prioritairement adressés, mais aussi au Parlement européen, également destinataire de ces avis.

Dans ce cadre informel - qui demeure par conséquent suspendu à la bonne volonté de la Commission européenne -, la commission des affaires européennes adopte des avis politiques, en principe dans un délai de deux mois, en réaction aux documents qui lui sont adressés par la Commission européenne.

Celle-ci a pris l'engagement d'y répondre dans un délai de trois mois.

Ces réponses sont directement adressées au Président du Sénat et au président de la commission des affaires européennes. Elles sont généralement signées par le vice-président ou commissaire chargé des relations interinstitutionnelles et de la prospective87(*), et cosignées, dans la grande majorité des cas, par le commissaire européen en charge du secteur sur lequel porte l'avis politique.

Selon les derniers chiffres disponibles sur ce dialogue politique, en 202388(*), les Parlements nationaux des États membres de l'Union européenne ont adressé 402 avis à la Commission européenne. Parmi ces avis, 380 étaient des avis politiques et 22 étaient des avis motivés au titre du contrôle de subsidiarité.

Ce rapport met à jour trois faits marquants :

a) en premier lieu, le rapport souligne la confirmation de la hausse du nombre d'avis transmis par les parlements nationaux à la Commission européenne, après plusieurs années de diminution. En effet, le nombre d'avis transmis était de 355 en 2022 et de 360 en 2021. Néanmoins, ce nombre demeure en deçà de ceux constatés lors des mandats des Commissions Barroso II et Juncker. Ainsi, le nombre d'avis transmis à la Commission européenne était de 620 en 2016 (dont 555 avis politiques et de 65 avis motivés) et de 569 en 2018 (dont 532 avis politiques et 37 avis motivés). Mais il faut se féliciter de ce modeste regain, chaque avis transmis constituant une réelle opportunité d'échange avec la Commission européenne sur les priorités européennes ;

b) en second lieu, il faut constater que neuf chambres des parlements nationaux (sur un total de trente-neuf) n'ont envoyé aucun avis à la Commission européenne en 202389(*). Ce nombre a augmenté de deux par rapport à 2022.

Plusieurs motifs conjugués peuvent être avancés pour expliquer cette tendance :

la conciliation plus difficile des calendriers parlementaires nationaux avec l'accroissement du champ de compétences de l'Union européenne à de nouveaux domaines et le nombre grandissant de textes européens présentés. Dans certains parlements, cette difficile conciliation met aussi à jour l'insuffisante expertise disponible pour examiner ces textes ;

la volonté politique paradoxale, mais assumée par certains parlements nationaux, de renoncer à toute prise de position politique, soit, pour ne pas « gêner » la Commission européenne, afin de conserver son soutien dans les politiques ou financements qu'ils considèrent comme prioritaires, soit, pour éviter d'évoquer publiquement la dimension européenne d'une politique et continuer à présenter à l'opinion publique des solutions exclusivement nationales ;

la spécialisation de fait de certains élus dans les affaires européennes au sein des parlements nationaux, qui nécessite un véritable coût d'entrée, se fait au détriment de la sensibilisation de l'ensemble des parlementaires aux enjeux européens actuels.

c) en troisième lieu, la Commission européenne a relevé que de nouveaux types de contributions des parlements nationaux avaient été reçus en 202390(*) :

- deux assemblées ont ainsi réagi à la discussion de propositions de règlement, soit au moyen d'un avis présenté au cours des négociations en trilogue (le Sénat français91(*), concernant la proposition de règlement sur l'intelligence artificielle92(*)), soit de différents avis consécutifs émis à des stades successifs de la négociation européenne (le Bundesrat allemand a ainsi transmis 4 avis sur la proposition de règlement relative à la liberté des médias93(*)) ;

- 14 parlements nationaux ont adressé une déclaration commune aux institutions de l'Union européenne en vue d'un trilogue, leur demandant de veiller à ce que le risque d'instrumentalisation des migrations soit abordé de manière appropriée lors des négociations en trilogue sur la révision du code frontières Schengen 94(*) ;

- enfin, il faut noter que l'Eduskunta de Finlande a présenté un avis sur plusieurs projets d'actes délégués et d'exécution relatifs aux matériaux en contact avec l'eau potable.

Dans ce contexte, les dix chambres les plus actives ont émis 79,5 % des avis transmis (320). Le Sénat, avec ses 17 avis politique adoptés sur l'année 2023, est l'une de ces assemblées parlementaires contribuant à l'intensité et à la qualité du dialogue politique européen (il occupe la 10ème place du classement en nombre d'avis politiques transmis à la Commission européenne)95(*).

Ses avis, pour l'essentiel, concernaient les mêmes sujets que les résolutions européennes adoptées par la commission et adressées au Gouvernement :

Liste des avis politiques adoptés par le Sénat entre le 1er octobre 2023 et le 30 septembre 2024

Texte

Rapporteur(s) de la commission
des affaires européennes

Programme de travail de la Commission européenne pour 2024

(4 décembre 2023)

M. Jean-François Rapin

M. Didier Marie

Cybersolidarité

(13 décembre 2023)

Mme Audrey Linkenheld

Mme Catherine Morin-Desailly

M. Cyril Pellevat

Révision du pacte de stabilité et de croissance

(22 décembre 2023)

Mme Florence Blatrix Contat

Mme Christine Lavarde

Lutte contre la corruption dans l'Union européenne

(14 février 2024)

M. Claude Kern

M. Didier Marie

M. Jean-François Rapin

Nouvelles techniques génomiques (NTG)

(25 mars 2024)

M. Jean-Michel Arnaud

Mme Karine Daniel

M. Daniel Gremillet

Action européenne contre les pénuries de médicaments

(5 avril 2024)

Mme Cathy Apourceau-Poly

Mme Pascale Gruny

M. Bernard Jomier

Lutte contre le retard de paiement dans les transactions commerciales

(9 avril 2024)

Mme Amel Gacquerre

M. Michael Weber

Révision de la politique agricole commune (PAC)

(23 avril 2024)

M. Daniel Gremillet

Reconnaissance de l'engagement des sapeurs-pompiers volontaires et renforcement du dispositif européen de protection civile

(20 juin 2024)

Mme Gisèle Jourda

M. Cyril Pellevat

Les 9 avis politiques adoptés par la commission des affaires européennes entre le 1er octobre 2023 et le 30 septembre 2024, ont tous reçu une réponse de la Commission européenne. Le rapporteur se félicite de cette situation qui, comme l'année dernière, illustre le dialogue nourri et régulier instauré avec le collège des commissaires européens.

Le respect du délai de trois mois que la Commission elle-même érige en règle pour répondre aux avis politiques, demeure faible sur la période couverte par le présent rapport, même s'il s'améliore. En effet, parmi les réponses reçues, 4 ont été envoyées dans le délai de trois mois. Le taux de réponse dans le délai de trois mois s'est ainsi établi au niveau de 44,4 % (contre 28,5 % en 2022-2023, 26,66 % en 2021-2022, 62,5 % 2020-2021 et 80 % en 2019-2020). Signalons toutefois que 3 de ces réponses ont été transmises dans un délai supérieur à 5 mois.

Concernant la qualité des réponses apportées par la Commission européenne dans le cadre du dialogue politique, votre rapporteur constate qu'elles sont globalement satisfaisantes sur leur contenu et souligne qu'elles apportent même parfois des compléments utiles (à l'exemple des rappels des modalités adoptées pour la phase de consultation publique ou les références aux jurisprudences pertinentes de la CJUE).

Elle souhaite donc que les efforts entrepris par la Commission européenne soient confortés afin d'obtenir durablement une information encore plus sincère et toujours exhaustive sur ses intentions ou ses difficultés éventuelles.

Sur les 9 avis politiques adoptés pendant la période examinée, tous ont fait l'objet de résolutions européennes ayant le même objet et ont donc déjà été indirectement commentés dans le présent rapport. La présente rubrique veille donc à ne pas répéter ces commentaires et à se concentrer sur l'avis politique adopté sur le programme de travail de la Commission européenne pour 2024, document d'orientation essentiel pour l'action de la Commission européenne, et au sujet duquel les réponses de cette dernière aux observations du Sénat sont particulièrement importantes.

L'avis politique sur le programme de travail de la Commission européenne pour 2024 a été adopté par la commission des affaires européennes sur le rapport du Président Jean-François Rapin et du sénateur Didier Marie, le 7 décembre 2023. Comme déjà indiqué, une résolution européenne (n° 48 du 12 janvier 2024) a été adressée au Gouvernement avec une rédaction quasiment similaire.

L'avis politique a d'abord relevé que ce programme de travail s'inscrivait dans un contexte géostratégique marqué par le retour des conflits sur le sol européen (avec la guerre en Ukraine depuis le 24 février 2022), l'émergence de menaces graves sur les démocraties européennes et de marges de manoeuvre budgétaires réduites.

Il a également réitéré ses conseils de méthode à la Commission européenne, en vue d'améliorer ces dernières à l'occasion de son prochain mandat :

actualisation nécessaire de la présentation des priorités de la Commission européenne pour l'année à venir en renonçant au cadre des six ambitions présentées par sa présidente en 201996(*) devenu inadapté, au risque de la rendre illisible97(*) ;

- engagement sur l'application d'un principe de « sobriété réglementaire » alors qu'en décembre 2023, 154 textes demeuraient en discussion et que citoyens, entreprises et juristes s'interrogeaient sur la complexité croissante du droit de l'Union européenne et les charges administratives afférentes dans plusieurs secteurs (agriculture ; environnement ; transport ; urbanisme ; responsabilité des entreprises...) ;

- demande d'amélioration du contenu du programme de travail par la création de nouvelles annexes consacrées, d'une part, aux décisions et accords préparés par la Commission européenne pour l'année à venir en matière de relations internationales et de politique commerciale et, d'autre part, aux actes délégués et aux actes d'exécution devant être adoptés au cours de l'année à venir ;

reprise d'un certain nombre de demandes récurrentes pour améliorer la transparence du processus d'élaboration des normes européennes : présentation d'une analyse d'impact pour accompagner chaque nouvelle initiative normative de la Commission européenne ; meilleure association des parlements nationaux au processus de décision européen sur la base des conclusions du groupe de travail de la Conférence des organes spécialisés dans les affaires communautaires (COSAC) de juin 202298(*) ; appel à un strict respect du multilinguisme dans les réunions et les actes des institutions de l'Union européenne afin qu'il soit de nouveau « la règle » et non plus « l'exception », et dénonciation de procédures de recrutement récentes menées par la Commission européenne et écartant les candidats maîtrisant la seule langue française ;

valorisation du siège du Parlement européen de Strasbourg, qui « symbolise la réconciliation franco-allemande et incarne l'Europe du droit ». Il s'est, à cette occasion, félicité, du choix du Parlement européen de conforter son implantation strasbourgeoise avec l'inauguration, le 20 novembre 2023, de son nouveau bâtiment « Simone Veil ».

En réponse à ces demandes99(*), la Commission européenne a d'abord souligné « sa satisfaction réciproque quant à la qualité du dialogue politique établi avec le Sénat ». Elle a remercié ce dernier pour ses « bonnes suggestions », faisant alors référence aux conclusions précitées du groupe de travail de la COSAC, a confirmé qu'elle était « prête à s'engager au renforcement » de ce dialogue et a souligné que ce dernier avait encore « un grand potentiel ».

Elle a rappelé son souci de respecter strictement les principes de subsidiarité et de proportionnalité, « pierres angulaires des traités de l'Union européenne ». Elle a de nouveau refusé l'enrichissement du programme de travail envisagé par le Sénat, rappelant que les accords commerciaux étaient déjà rendus publics sur son site internet100(*) et qu'il était difficile d'anticiper la liste des actes délégués et actes d'exécution lors de la présentation du programme101(*). Il peut lui être rétorqué que la publicité des accords demeure aujourd'hui confidentielle et que la majeure partie des actes délégués et actes d'exécution est connue longtemps à l'avance, l'élaboration des projets de directive et de règlement obéissant à un cycle de plusieurs mois. Concernant le nombre d'initiatives demeurant en discussion, cette dernière a rappelé qu'elle avait « mené à bien plus de 90 % des initiatives annoncées par la présidente von der Leyen dans ses orientations politiques ».

Concernant le respect du multilinguisme, la Commission européenne a répondu qu'elle était convaincue que les langues parlées dans les différents États membres constitu(ai)ent un « élément essentiel du patrimoine culturel européen » et rappelé qu'elle utilisait toutes les langues officielles et de travail dans ses programmes et au cours de ses travaux ». Elle a ainsi souligné que « tous les documents juridiquement contraignants et de portée générale (étaient) publiés dans les 24 langues officielles » avant de concéder que, pour les autres documents, ainsi que les sites web de la Commission, le respect de cette diversité linguistique devait être « concilié avec les contraintes administratives et budgétaires ». Sur le sujet spécifique des procédures de recrutement, elle a affirmé que, conjointement avec l'Office européen de sélection du personnel (EPSO), elle s'employait « à mener l'ensemble des concours dans les 24 langues. » Elle a également confirmé que « l'obligation d'utiliser deux langues restera[it] obligatoire. »

Sur le fond des dossiers, l'avis politique de la commission des affaires européennes du Sénat a repris les observations et recommandations émises dans ses avis thématiques et dans les résolutions européennes du Sénat relatifs à la lutte contre les violences faites aux femmes102(*), à la réforme du marché de l'électricité103(*), au paquet « ajustement à l'objectif 55 »104(*), à la résilience des sols105(*), à la politique de la pêche106(*), à l'instrument du marché unique pour les situations d'urgence107(*), au cadre européen d'approvisionnement en matières premières critiques et à l'écosystème européen de la fabrication de produits de technologie « zéro net »108(*), à la régulation européenne de l'intelligence artificielle109(*), aux conditions de travail des travailleurs des plateformes110(*), au devoir de vigilance des entreprises111(*), à la connectivité sécurisée par satellite112(*), à l'avenir de Frontex, l'agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes113(*), à la lutte contre les abus sexuels sur mineurs en ligne114(*), et au « nouveau Bauhaus européen »115(*).

Il ne s'agit pas de développer de nouveau l'ensemble de ces propositions dans le cadre du présent rapport mais de mentionner les principaux éléments de réponse de la Commission.

Concernant la démocratie européenne, la Commission européenne a :

partagé l'analyse du Sénat sur la nécessité de renforcer la lutte contre la corruption en Europe, annonçant également vouloir « intensifier son action » dans ce domaine ;

en revanche totalement ignoré les critiques du Sénat sur le manque d'ambition et le manque d'indépendance de l'organe éthique de l'Union européenne et la « contre-proposition » développée par la Haute assemblée (le détail de cette dernière a été présenté supra en II, 3, c).

Concernant le pacte vert, la politique agricole commune (PAC) et la pêche, la Commission européenne :

- a bien noté la demande du Sénat de mise en oeuvre du marché européen de l'électricité et s'est félicitée de l'accord en trilogue intervenu sur ce dossier (fin 2023). Elle a aussi indiqué que cette réforme « préserv(ait) la compétence des États membres dans la définition de leur bouquet énergétique » et « facilit(ait) le déploiement de contrats à long terme plus stables, tels que les accords d'achat d'électricité ». Elle a précisé que les États membres « ser(aient) tenus de garantir la disponibilité de garanties fondées sur le marché pour les accords d'achat d'électricité » pour « renforcer la compétitivité de l'industrie de l'Union européenne en réduisant son exposition à la volatilité des prix liés aux combustibles fossiles » ;

- a rappelé que, dans une communication du 6 février 2024116(*), elle avait recommandé un objectif climatique intermédiaire pour 2040, « qui réaffirme la détermination d'atteindre la neutralité climatique d'ici à 2050 » et est crucial « pour notre action mondiale ». Elle a aussi approuvé l'exigence du Sénat de mettre en oeuvre une transition écologique « juste pour tous » ;

- a indiqué, pour répondre aux interrogations du Sénat, qu'elle s'était engagée « à consacrer au moins 30 % de son cadre financier pluriannuel (ainsi qu'au moins 30 % de NextGenerationEU) aux dépenses liées au climat. Elle a ajouté que le nouveau Fonds social pour le climat « renforcera(it) la dimension sociale du budget » ;

- a assuré, face aux interrogations du Sénat sur la pertinence de l'objectif contraignant de 42,5 % d'énergies renouvelables d'ici à 2030 et à sa demande d'études d'impact indépendantes pour évaluer le respect de la biodiversité par les installations d'énergies renouvelables , d'une part, que la « directive révisée sur les énergies renouvelables117(*) (était) un pilier essentiel des efforts de décarbonation de l'Union européenne » et, d'autre part, que « le règlement d'urgence visant à accélérer le déploiement des énergies renouvelables »118(*) avait déjà « entraîné une accélération significative des procédures d'octroi de permis, tout en maintenant un niveau élevé de biodiversité » ;

n'a pas souhaité répondre directement au Sénat lorsque ce dernier a évoqué ses « silences répétés » au sujet de ses demandes successives de publication de l'analyse d'impact de la stratégie « De la ferme à la fourchette » et le risque de remplacement de la production agricole des États membres par des « importations de substitution avec des standards sanitaires, sociaux et environnementaux inférieurs » (la position du Sénat sur ce dossier a été développée supra en II, 3, c) ;

a confirmé sa vision de la pêche, par référence à sa réponse à l'avis politique du Sénat du 25 mai 2023 relatif à la protection de la filière pêche française et aux mesures préconisées dans le cadre du « Plan d'action de l'Union européenne : Protéger et restaurer les écosystèmes marins pour une pêche durable et résiliente », à savoir organiser la transition vers une « pêche plus durable » par la mise en oeuvre d'engins et de pratiques de pêche plus sélectives, par des innovations technologiques et par la suppression progressive et concertée des arts traînants de fond dans les zones marines protégées d'ici à 2030. Dans ce contexte, la commission des affaires européennes du Sénat demeure vigilante sur l'évolution de la politique commune de la pêche (PCP) et a adopté, sur le rapport du sénateur Alain Cadec, le 7 avril 2025, un avis politique valant contribution à la consultation publique en cours ouverte par la Commission européenne119(*) ;

Concernant la politique commerciale, l'Europe du marché intérieur et la transition numérique, la Commission européenne a d'abord confirmé que son programme en matière d'accords commerciaux poursuivait « trois objectifs - ouverture, durabilité et fermeté -, a rappelé qu'elle avait récemment « conclu des accords ambitieux et d'une grande portée avec le Chili, la Nouvelle-Zélande et le Kenya », et a insisté sur l'importance de sa nouvelle approche prévoyant le recours à des sanctions commerciales « en cas de violation des dispositions fondamentales ».

La commission des affaires européennes du Sénat ne peut que partager l'avis de la Commission européenne selon lequel ces accords « revêtiraient une grande importance géopolitique », « en particulier en période de tensions commerciales croissantes », mais déplore la conclusion récente, par cette même Commission, de l'accord de libre-échange Union européenne/Mercosur, en dépit de l'opposition de la France. Elle demande aussi, une nouvelle fois, une meilleure association des parlements nationaux des États membres aux négociations de tels accords. Elle constate également que la nouvelle « guerre commerciale » intentée par les États-Unis via des hausses de tarifs douaniers massives sur les produits européens importés120(*) a bouleversé la donne et nécessite une réponse européenne concertée pouvant impliquer une possible utilisation de l'instrument anti-coercition dont l'Union européenne s'est dotée en 2023121(*) ;

La Commission européenne a aussi souligné l'importance des accords obtenus sur les règlements pour une « industrie zéro net »122(*) et instituant un instrument du marché unique pour les situations d'urgence123(*), afin de renforcer la compétitivité et la résilience de l'industrie européenne par la création d'emplois « verts » de qualité et de permettre à l'Union européenne d'anticiper les crises économiques futures, ainsi que du règlement établissant un cadre visant à garantir un approvisionnement sûr et durable en matières premières critiques124(*), destiné à limiter nos dépendances stratégiques. Il convient de souligner que dans les mois qui ont suivi, les rapports rédigés par MM. Enrico Letta125(*) et Mario Draghi126(*) ont « sonné l'alarme » sur le décrochage économique européenne et appelé à un « choc d'investissements », à un renforcement du marché intérieur (dans les communications, l'énergie ou la finance), à la poursuite de la décarbonation des économies européennes et à une action drastique de simplification réglementaire pour relancer la compétitivité de l'Union européenne.

Présentés respectivement le 29 janvier et le 26 février 2025, la « boussole pour la compétitivité de l'Union européenne »127(*), qui se traduit par des « paquets Omnibus » visant à simplifier le droit européen applicable aux acteurs économiques, et le pacte pour une industrie propre128(*), visent à mettre en oeuvre ces objectifs ;

Elle a par ailleurs salué le soutien du Sénat, malgré l'opposition du gouvernement français, à l'adoption de la directive relative à l'amélioration des conditions de travail des travailleurs des plateformes129(*) ;

Ayant confirmé le constat du Sénat sur le fait que les défis auxquels l'Union européenne avait dû faire face, avaient exercé « une forte pression sur le budget de l'Union européenne », elle a aussi précisé que la révision du cadre financier pluriannuel à mi-parcours, intervenue début 2024, avait permis de soutenir l'Ukraine, de répondre aux enjeux migratoires, de mettre en place une plateforme de technologies stratégiques pour l'Europe et d'instaurer « un mécanisme efficace » pour faire face à l'augmentation des coûts d'emprunt au titre du plan de relance NextGenerationEU.

Mais elle a alerté le Sénat sur le fait que le budget administratif de l'Union européenne demeurait « soumis à de fortes pressions en raison de la hausse des prix de l'énergie, de la forte inflation et des tâches supplémentaires confiées à l'Union européenne », estimant que cela avait « poussé les ressources de l'administration européenne à ses limites ». Elle a enfin confirmé qu'un « accord politique au sein du Conseil (devait) être conclu sans plus tarder » sur l'adoption de nouvelles ressources propres130(*) pour ce budget, « afin de ne pas relâcher la dynamique politique ».

Sur ce dernier point, force est de constater que les divisions demeurent au sein du Conseil sur la nature des nouvelles ressources propres, empêchant, pour l'heure, un compromis ;

Par ailleurs, la Commission européenne a souligné qu'en avril 2024, Parlement européen et Conseil étaient parvenus à « un accord sur la réforme la plus ambitieuse et la plus complète du cadre de gouvernance économique de l'Union européenne depuis les suites de la crise économique et financière ». Elle a observé que l'Union européenne avait besoin « d'un système de compensation compétitif et moderne », a salué l'adoption d'un paquet de textes visant à « alléger les exigences auxquelles les entreprises sont confrontées tant au moment de la cotation qu'après leur admission à la cote » en février 2024, ainsi que le renforcement du cadre européen de gestion des crises bancaires et de garantie des dépôts, en mai 2024. Elle a simultanément convenu que des « progrès (devaient) encore être accomplis en ce qui concerne les autres volets du paquet (la révision des règles relatives au redressement et à la résolution des banques ainsi que des règles relatives au système de garantie des dépôts). »

Cependant, à l'heure actuelle, les besoins de financements des priorités européennes et de remboursement des emprunts ne font que croître, et, à la suite du rapport de M. Christian Noyer131(*), ainsi que des rapports précités de MM. Enrico Letta et Mario Draghi, la priorité va désormais à la mise en place d'une Union de l'épargne et des investissements, centrée sur le développement de produits européens d'épargne de long terme et la relance de la titrisation132(*), dans le respect des garde-fous mis en place à la suite de la crise financière de 2008 ;

Interpellée par l'avis politique de la commission des affaires européennes du Sénat, la Commission européenne a confirmé la prise en compte des spécificités des régions ultrapériphériques (RUP) 133(*) et des pays et territoires d'outre-mer (PTOM) 134(*) dans la mise en oeuvre et le financement de l'ensemble des politiques européennes, lorsque les « incidences (des politiques européennes) sont jugées pertinentes », et a souligné l'importance de son dialogue avec les États membres et collectivités concernés, afin de fournir « des données qui indiqueraient les avantages d'une approche adaptée pour les régions ultrapériphériques », citant un « bon exemple » de l'autorisation du renouvellement d'une partie de la flotte de pêche des RUP avec des aides d'État dans ces régions.

Pour mémoire, à l'initiative de la délégation du Sénat aux outre-mer, le 19 février dernier, la commission des affaires européennes du Sénat a adopté une proposition de résolution européenne, devenue résolution du Sénat135(*), et un avis politique demandant à la Commission européenne de présenter rapidement un paquet normatif destiné à adapter les règles européennes aux spécificités des RUP.

Concernant la défense et les relations internationales, la Commission européenne a tout d'abord remercié le Sénat pour son appui à l'Ukraine et confirmé qu'elle travaillait elle-même à apporter à cette dernière « un soutien politique, financier, économique, humanitaire, militaire, juridique et diplomatique ».

Alors que le Sénat insiste sur une évaluation des pays candidats à l'adhésion au cas par cas et sur la base des « critères de Copenhague »136(*) (qui soumettent les pays candidats à la triple exigence d'institutions stables respectant la démocratie, l'État de droit et les droits de l'Homme, d'une économie de marché viable et d'une reprise de l'acquis communautaire, et est subordonnée à la capacité d'absorption de l'Union européenne), la Commission européenne a affirmé qu'elle suivait les progrès accomplis par les pays candidats dans la réalisation des priorités d'intégration à l'Union européenne, que des cadres de négociation avaient été mis en place pour l'Ukraine et la Moldavie et que des négociations d'adhésion avaient été ouvertes avec la Bosnie-Herzégovine. Elle a aussi souligné qu'elle soutenait « pleinement la perspective européenne des Balkans occidentaux » et rappelé la présentation, le 8 novembre 2023, de son nouveau plan de croissance pour la région. Elle a également confirmé que « l'élargissement (serait) fondé sur le mérite » et que, simultanément, l'Union européenne devait « s'approfondir ». Elle a cité, à cet égard, l'importance de sa communication du 20 mars 2024 sur les réformes et les réexamens des politiques préalables à l'élargissement137(*).

Dans le domaine de la défense (au sujet duquel la position du Sénat est détaillée infra, en IV, 3), la Commission européenne a rappelé qu'elle avait présenté, le 5 mars 2024, la toute première stratégie industrielle européenne en matière de défense (EDIS) ainsi qu'une proposition de règlement relatif à l'établissement du programme pour l'industrie européenne de la défense (EDIP)138(*), afin d'exposer les défis auxquels doit faire face la base industrielle et technologique de défense européenne (BITDE) et définir pour elle « une orientation pour la prochaine décennie », confirmant que les États membres devaient « investir plus, mieux, ensemble et dans les équipements européens ».

La Commission européenne a par ailleurs signalé la nécessité de conserver la souplesse du partenariat oriental et sa capacité d'adaptation « à l'évolution de la réalité géopolitique ». Elle a rappelé que, dans le cadre budgétaire actuel, 17 milliards d'euros étaient consacrés au plan économique et d'investissement du partenariat oriental et que le dialogue politique sur la sécurité, l'État de droit, les transports et la connectivité, était soutenu.

Partageant le souci du Sénat de développer le dialogue euro-méditerranéen, alors que « les conséquences des attentats terroristes perpétrés par le Hamas en Israël, le 7 octobre 2023, conjuguées à l'augmentation des flux migratoires et à l'incidence du changement climatique n'ont fait que renforcer l'importance stratégique de la région », la Commission européenne a rappelé la relance de ce dialogue en 2021 avec un plan économique et d'investissement et une nouvelle stratégie, élaborée et mise en place avec les États membres, visant l'établissement de partenariats globaux avec l'Afrique du Nord, fondés sur des objectifs mutuellement bénéfiques et des résultats clairs qui englobent le développement socio-économique, les possibilités de commerce et d'investissement, l'État de droit, ainsi que l'énergie et les migrations. » (accord signé en juillet 2023 avec la Tunisie). Il faut noter que la Commission « von der Leyen II » souhaite conforter cette ambition avec la désignation en son sein, d'un commissaire européen dédié à la Méditerranée (Mme Dubravka uica) et la présentation à venir d'un pacte pour la Méditerranée.

Enfin, sur l'Espace de liberté, de sécurité et de justice, la Commission européenne a rappelé que le Conseil et le Parlement européen étaient parvenus à trouver un accord sur le pacte européen sur la migration et l'asile, dont les « cinq actes » « concern(aient) toutes les étapes de la gestion de l'asile et de la migration, qu'il s'agisse du filtrage des migrants en situation irrégulière lorsqu'ils arrivent dans l'Union européenne, du relevé des données biométriques, des procédures d'introduction et de traitement des demandes d'asile, de la coopération et de la solidarité entre les États membres et de la manière de gérer les situations de crise ». Elle a insisté sur les principaux effets attendus de la réforme : « efficacité du régime d'asile européen » et renforcement de « la solidarité entre les États membres » en permettant d'alléger la charge pesant sur ceux d'entre eux dans lesquels la plupart des migrants arrivent. La question majeure est désormais celle des modalités de mise en oeuvre du pacte, en principe prévue pour juin 2026.

B. LES RENCONTRES AVEC LES PARTENAIRES EUROPÉENS, UNE AUTRE FORME DE DIALOGUE POLITIQUE

Les relations entre le Sénat et ses partenaires européens, parlements des autres États membres et institutions européennes, prennent également la forme de nombreux contacts bilatéraux et de visites incluant les auditions de commissaires européens. À cet égard, si le développement de la visioconférence a permis d'élargir les modalités d'échanges, le Sénat attache une grande importance aux rencontres « sur site » avec les interlocuteurs de la Commission européenne.

Ces dernières ont pris les formes suivantes :

auditions au Sénat de membres de la Commission européenne, d'organismes européens ou d'acteurs clefs des politiques européennes : entre le 1er octobre 2023 et le 30 septembre 2024, quatre commissaires européens et plusieurs responsables d'organes européens ont été auditionnés par la commission des affaires européennes (parfois conjointement avec une commission permanente du Sénat, parfois avec son homologue de l'Assemblée nationale)139(*) ;

déplacements thématiques de délégations de la commission des affaires européennes dans d'autres États membres ou des pays candidats à l'adhésion à l'Union européenne : déplacement à la frontière franco-italienne (Menton-Vintimille) et à Rome du président de la commission sur la politique migratoire, les 23-24 octobre 2023 ; déplacement d'une délégation de la commission en Moldavie (3-5 novembre 2023) ; déplacement d'une délégation de la commission en Géorgie (28 avril - 1er mai 2024) ;

déplacements du président et des rapporteurs de la commission des affaires européennes, ainsi que des rapporteurs des commissions compétentes au fond, auprès des cabinets des commissaires et des fonctionnaires de la Commission européenne, du Conseil et du Parlement européen, à Strasbourg ou à Bruxelles. 18 déplacements de rapporteurs du Sénat140(*) ont été organisés sur la période examinée, dont 9 au titre de la commission des affaires européennes À titre d'exemple, peuvent être mentionnés les déplacements des commissions d'enquête sur le prix de l'électricité (21 mars 2024) et sur les influences étrangères (11 avril 2024), de l'office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST ; 24 avril 2024), ou des rapporteurs de la commission des affaires européennes sur la dérive normative de l'Union européenne (27 mai 2024) ;

participation conjointe des sénateurs aux diverses conférences interparlementaires européennes organisées sur un rythme semestriel. On peut citer à titre principal :

- la Conférence de l'article 13 du TSCG au Sénat espagnol (26-27 octobre 2023) ;

- la Conférence interparlementaire sur l'éducation et la citoyenneté européenne (27-28 novembre 2023 ; Parlement européen - Bruxelles) ;

- la réunion du groupe de contrôle parlementaire conjoint d'Europol (18-19 février 2024 ; Gand - Belgique) ;

- les réunions plénières de la COSAC141(*) (au Parlement espagnol, du 26 au 28 novembre 2023, puis au Parlement belge, du 24 au 26 mars 2024) ;

- une réunion interparlementaire sur l'espace à Budapest (26-27 mars 2024) ;

- une réunion des membres des commissions des affaires européennes des parlements allemand, français et polonais, en « format Weimar » à Stuttgart et à Strasbourg (19-20 septembre 2024).

Ces déplacements et réunions ont permis aux sénateurs de sensibiliser leurs homologues sur les priorités européennes de la France et du Sénat, tout en s'informant des positions politiques des autres parlementaires des États membres. Elles ont été aussi autant d'occasions d'échanges bilatéraux, formels et informels, en marge des sessions plénières de ces conférences, afin de nouer des relations de confiance.

I. IV. LE CONTRÔLE DE SUBSIDIARITÉ, UN GARDIEN FRAGILISÉ DE LA COMPÉTENCE DES ÉTATS MEMBRES

Il est utile de rappeler le contexte dans lequel le respect du principe de subsidiarité doit être apprécié. En effet, lorsque la Commission européenne était présidée par M. Jean-Claude Juncker, elle avait affiché une volonté claire de réduire le nombre de ses propositions législatives pour recentrer son activité autour de quelques grandes priorités politiques. Cette volonté s'accompagnait de l'objectif de mieux respecter le principe de subsidiarité.

Cependant, avec la Commission présidée par Mme Ursula von der Leyen, le nombre d'initiatives législatives a été de nouveau croissant. Cette tendance a été confortée par la nécessité de répondre en urgence aux crises par une harmonisation européenne renforcée.

Néanmoins, s'il satisfait le Conseil et le Parlement européen, ce pouvoir normatif « extensif » (par exemple dans le domaine de l'industrie de défense) - est parfois difficilement compatible avec la lettre des traités et se met le plus souvent en place au détriment des pouvoirs de contrôle des parlements nationaux.

A. RAPPEL SUR LE CONTRÔLE DE SUBSIDIARITÉ : LES AVIS MOTIVÉS

Depuis l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne, le 1er décembre 2009, les Parlements nationaux disposent de compétences propres en matière de contrôle de la subsidiarité142(*). Pour les assemblées du Parlement français, ces compétences sont également visées à l'article 88-6 de la Constitution : « L'Assemblée nationale ou le Sénat peuvent émettre un avis motivé sur la conformité d'un projet d'acte législatif européen au principe de subsidiarité. »

Dans ce cadre, pour chaque texte concerné, le Sénat doit vérifier que l'Union européenne, en adoptant ce projet d'acte législatif, reste bien dans son rôle, qu'elle intervient à bon escient et évite l'excès de réglementation.

En pratique, le Sénat peut adopter un avis motivé prenant la forme d'une résolution s'il estime qu'une proposition législative ne respecte pas le principe de subsidiarité, avis dans lequel il indique les raisons pour lesquelles la proposition ne lui paraît pas conforme. À cette fin, comme les autres assemblées parlementaires des États membres, le Sénat est directement destinataire de certains textes (58 textes en 2023-2024 contre 123 textes en 2022-2023 et 110 en 2021-2022).

Dans ce cadre, il va en pratique vérifier :

- si l'Union européenne est bien compétente pour proposer l'initiative concernée ;

- si la base juridique choisie est pertinente ;

- si l'initiative proposée est nécessaire et si elle apporte une « valeur ajoutée » par rapport au droit en vigueur ;

- enfin, si elle n'excède pas ce qui est nécessaire pour mettre en oeuvre les objectifs poursuivis. En effet, dans son contrôle de la conformité des textes au principe de subsidiarité, le Sénat effectue également un contrôle de proportionnalité des mesures envisagées.

Le délai pour adopter un avis motivé est fixé par les traités à huit semaines à compter de la date à laquelle le Sénat a été saisi du texte143(*).

UN GROUPE DE VEILLE SUR LA SUBSIDIARITÉ

Un groupe pilote a été constitué au sein de la commission des affaires européennes afin d'effectuer un examen systématique des projets d'actes législatifs au regard du principe de subsidiarité. Le Règlement du Sénat permet, en effet, à la commission des affaires européennes d'adopter un projet d'avis motivé de sa propre initiative.

Ce groupe pilote est présidé par le président de la commission des affaires européennes et comporte un représentant de chaque groupe politique.

Il a été renouvelé à l'occasion des élections sénatoriales du 24 septembre 2023.

Le Règlement du Sénat prévoit que tout sénateur peut déposer une proposition de résolution portant avis motivé. Celle-ci doit d'abord être adoptée par la commission des affaires européennes. Elle est ensuite soumise à l'approbation de la commission compétente au fond, si cette dernière souhaite intervenir. Si, en revanche, elle ne statue pas dans les délais, le texte élaboré par la commission des affaires européennes est considéré comme adopté. En outre, à tout moment de la procédure, le président d'un groupe peut demander un examen en séance publique. Une fois adopté, l'avis motivé est aussitôt transmis aux institutions européennes (Commission européenne, Conseil et Parlement européen). Le Gouvernement en est également informé.

Conformément au protocole n° 2 annexé aux traités sur l'Union européenne et sur le fonctionnement de l'Union européenne, si un tiers des Parlements nationaux émet un avis motivé sur une même proposition législative, celle-ci doit être réexaminée par l'institution européenne concernée qui peut décider de la maintenir, de la modifier ou de la retirer. C'est ce que l'on appelle le « carton jaune ». Ce seuil est abaissé à un quart des Parlements nationaux pour les projets d'acte législatif intervenant dans le domaine de la coopération judiciaire et policière en matière pénale.

TROIS PRÉCÉDENTS EN MATIÈRE DE « CARTON JAUNE »

Depuis l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne, les Parlements nationaux ont adressé trois « cartons jaunes » à la Commission européenne. Le Sénat a contribué aux deux premiers avis :

le premier concernait le paquet « Monti II », un ensemble de textes relatifs au droit de grève. Des assemblées parlementaires de douze États membres144(*), représentant 19 voix, ont estimé que ces textes étaient contraires au principe de subsidiarité. La Commission européenne a retiré ce paquet le 26 septembre 2012 ;

- le deuxième « carton jaune » visait la proposition de règlement créant un Parquet européen. Des assemblées de dix États membres145(*), représentant 18 voix, se sont exprimées dans le même sens. La Commission a souhaité maintenir son texte. Mais le Conseil et le Parlement européen, prenant acte des avis motivés, ont fait ensuite évoluer le projet conformément aux voeux du Sénat ;

- le troisième « carton jaune » portait sur la proposition de directive visant à réviser la directive de 1996 relative au détachement des travailleurs. Des assemblées de onze États membres146(*), représentant 22 voix, ont considéré que ce texte, en particulier la question de la fixation des salaires, était contraire au principe de subsidiarité. Le 20 juillet 2016, la Commission a cependant maintenu son texte, rappelant que la directive qu'elle proposait de réviser datait de plus de vingt ans.

En outre, dans le cadre de la procédure législative ordinaire (codécision entre le Parlement européen et le Conseil), si la moitié des Parlements nationaux émet un avis motivé sur une même proposition législative, la Commission doit réexaminer sa proposition et décider soit de la maintenir, soit de la modifier, soit de la retirer. Si, malgré le nombre important d'avis négatifs, elle choisit de la maintenir, elle doit justifier cette décision en publiant elle-même un avis motivé indiquant les raisons pour lesquelles elle estime que cette proposition est conforme au principe de subsidiarité. De leur côté, le Parlement européen et le Conseil devront vérifier, avant d'achever la première lecture, la conformité du texte au principe de subsidiarité. Si le Parlement européen, à la majorité des suffrages exprimés, ou une majorité de 55 % des membres du Conseil estime qu'il n'est pas conforme, la proposition législative est rejetée et son examen n'est pas poursuivi. C'est ce que l'on appelle le « carton orange ».

Le contrôle de subsidiarité par le Sénat peut également en principe s'effectuer a posteriori. C'est ce que l'on appelle le « carton rouge ». Le Sénat peut ainsi, en application de l'article 88-6 de la Constitution, former un recours devant la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) contre un acte législatif européen déjà adopté, dans les deux mois suivant cette adoption, afin de faire constater qu'il ne respecte pas le principe de subsidiarité. La procédure d'adoption est alors la même que pour les avis motivés. Toutefois, la Cour de justice peut également être saisie, sans qu'une décision de l'Assemblée nationale ou du Sénat soit nécessaire, dès lors qu'au moins soixante députés ou sénateurs en font la demande147(*).

À cet égard, il convient de souligner que, le 5 mai dernier, les députés membres du groupe politique du Rassemblement national (RN) ont souhaité mettre en oeuvre cette procédure pour la première fois. Ils ont en effet transmis un projet de recours dénonçant la non-conformité du Pacte sur la migration et l'asile au principe de subsidiarité, à la présidente de l'Assemblée nationale, en lui demandant de saisir officiellement le Gouvernement, afin que ce dernier défende ce recours devant la CJUE.

B. LE CONTRÔLE DE SUBSIDIARITÉ : UNE DES RARES PRÉROGATIVES EUROPÉENNES DES PARLEMENTS NATIONAUX INSCRITE DANS LES TRAITÉS EUROPÉENS MAIS DONT L'AVENIR EST AUJOURD'HUI MENACÉ

1. En 2023, le Sénat s'est affirmé comme la troisième assemblée parlementaire de l'Union européenne pour le contrôle du respect du principe de subsidiarité

Rappelant qu'elle tient toujours compte des principes de subsidiarité et de proportionnalité dans les analyses d'impact de ses propositions stratégiques, la Commission européenne, dans son rapport sur les principes de subsidiarité et de proportionnalité et sur ses relations avec les parlements nationaux pour l'année 2023148(*), indique que le comité d'examen de la réglementation, organisme indépendant qui conseille le collège des commissaires, a examiné 50 analyses d'impact en 2022 (contre 70 en 2022 et 83 en 2021). Elle précise également qu'elle a été destinataire de 22 avis motivés en 2023.

Le Parlement européen veille également au respect du principe de subsidiarité. En 2023, il a ainsi été destinataire de 294 documents divers issus des parlements nationaux des États membres (contre 249 en 2022), dont les 22 avis motivés précités. En pratique, sa commission des affaires juridiques désigne un rapporteur pour la subsidiarité pour un mandat de six mois, sur la base d'une rotation entre les groupes politiques149(*). Ce rapporteur suit les avis motivés reçus et a la possibilité de se saisir de questions qu'ils soulèvent pour en débattre en commission et pour adresser d'éventuelles recommandations à la commission compétente sur le texte concerné. La commission des affaires juridiques formule aussi des observations sur les rapports annuels de la Commission relatifs aux principes de subsidiarité et de proportionnalité.

Dans plusieurs initiatives récentes, le Parlement européen a souhaité rappeler que la participation active des parlements nationaux aux affaires européennes et le contrôle renforcé des gouvernements nationaux par les parlements nationaux étaient essentiels pour garantir la responsabilité démocratique et la légitimité du système institutionnel de l'Union européenne150(*).

De son côté, le Conseil informe aussi les États membres des avis motivés des Parlements nationaux sur les propositions de règlement et de directive.

Dans son rapport annuel 2023 précité, la Commission européenne a pris acte de la baisse de l'utilisation de la procédure de contrôle de subsidiarité par les parlements nationaux des États membres, qui s'inscrit « dans une tendance à la baisse à long terme... ».

Autre spécificité sur l'année 2023 : le Parlement italien est responsable, à lui seul, de l'émission de 9 des 22 avis motivés adoptés par les parlements nationaux des États membres (6 issus de la Camera dei Deputati et 3 issus du Senato della Repubblica). Suivent le Riksdag suédois (5 avis motivés), puis le Sénat français (3 avis en 2023).

Seuls 9 chambres ou parlements parmi les 39 parlements ou chambres des États membres de l'Union européenne ont adopté et envoyé au moins un avis motivé au titre du contrôle de subsidiarité en 2023151(*).

Ces avis ont porté sur 14 initiatives différentes de la Commission européenne :

- la proposition de règlement relative aux emballages et aux déchets d'emballages a fait l'objet de 3 avis motivés (dont 1 du Sénat français) ;

- six propositions de textes ont fait l'objet chacune de 2 avis motivés (propositions de règlement sur les NTG, sur la lutte contre le retard de paiement dans les transactions commerciales, sur la filiation (2 avis motivés dont 1 adopté par le Sénat), sur les normes de performance en matière d'émission de CO2, pour les nouveaux véhicules lourds et sur la surveillance des sols ; proposition de directive contre la corruption (2 avis motivés) ;

- sept propositions de textes ont fait l'objet chacune d'un avis motivé (propositions de règlement établissant des règles de procédure complétant le Règlement général sur la protection des données personnelles (RGPD), établissant un régime d'imposition en fonction du siège central pour les micro, petites et moyennes entreprises, sur les normes Euro 7 d'émission des véhicules à moteur, sur la réduction du coût de déploiement de réseaux gigabit de communications électroniques, sur la protection de l'Union européenne contre la manipulation du marché de gros de l'énergie (dont un avis du Sénat français) et sur les produits de technologie « zéro net » ; proposition de directive relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal).

En 2022, plusieurs initiatives avaient donné lieu à quatre avis motivés (acte européen sur la liberté des médias ; propositions de révision des textes relatifs aux marchés du gaz et de l'hydrogène) et la réforme du droit électoral européen en avait suscité cinq.

2. Un rôle de contrôle du respect du principe de subsidiarité essentiel au bon fonctionnement démocratique de l'Union européenne...

En effectuant rigoureusement ce contrôle des initiatives normatives européennes les plus importantes au titre du contrôle de subsidiarité, le Sénat, comme ses homologues des autres parlements, joue un rôle essentiel de gardien des traités et, plus particulièrement, de la répartition des compétences entre États membres et Union européenne prévue par ces derniers. Par là même, il s'assure du bon fonctionnement de la démocratie en Europe, alors même que le volontarisme de l'Union européenne alimente le risque d'une « dérive normative ». Ce constat sans appel a été établi par la commission des affaires européennes du Sénat dans un rapport d'information publié le 4 décembre 2024152(*).

Ce rapport a d'abord observé l'intensité inédite de l'activité normative de la Commission européenne « von der Leyen I » depuis 2019, tant au regard de ses aînées que des autres grands ensembles politiques mondiaux : la Commission européenne, entre 2019 et 2024, a ainsi adopté 13 000 nouvelles normes pendant que le Congrès américain adoptait 3 500 textes législatifs et 2 000 résolutions sur la même période. L'adoption des règlements et directives a connu une augmentation sensible de 23 %, avec des textes ayant un fort impact sur les États membres, les collectivités territoriales et les entreprises, tels que « ceux instaurant un devoir de vigilance des entreprises en matière environnementale, interdisant la commercialisation en Europe des produits issus de la déforestation ou encore le règlement sur la gestion des déchets et des emballages »153(*).

À cet emballement normatif est venu s'ajouter une série d'évolutions qui, cumulées, ont pour effet de diminuer la transparence du processus d'adoption des textes européens et les moyens de contrôle des parlements nationaux des États membres sur ces derniers.

Première évolution : le volontarisme politique de la Commission européenne la conduit désormais à intervenir dans des domaines inédits, avec, le plus souvent, le soutien des États membres, mais parfois contre la lettre et l'esprit des traités européens.

Ainsi, depuis 2019, à traité constant, l'Union européenne a gagné - souvent pour des motifs d'intérêt général, mais pas toujours, de nouvelles prérogatives. Ce fut le cas pour tirer les conséquences des crises liées à la pandémie de covid-19 et à la guerre en Ukraine.

À titre d'exemple, en juillet 2020, l'Union européenne a mis en oeuvre un plan de relance européen inédit (Next generation EU)154(*) afin de stimuler la reprise de la croissance économique et fournir un soutien massif aux secteurs fragilisés ou innovants, garanti par un emprunt exceptionnel de l'Union européenne. Or, cette capacité d'emprunt n'était pas inscrite dans les traités. A contrario, l'article 310 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) met en avant la nécessité pour le budget européen d'être « équilibré » et l'interdiction, pour l'Union européenne, d'adopter des « actes susceptibles d'avoir des incidences notables sur le budget sans donner l'assurance que les dépenses découlant de ces actes peuvent être financés dans la limite des ressources propres de l'Union et dans le respect du Cadre financier pluriannuel ». Ce dispositif, qui s'est finalement imposé en raison de l'urgence et de l'intérêt des États membres, a donc donné lieu un débat juridique justifié.

La Commission européenne, à compter de 2019, a également développé une politique inédite de « l'État de droit » sur la base d'une interprétation « constructive » de l'article 2 du traité de l'Union européenne (TUE), qui recense les valeurs de l'Union européenne. Elle a ainsi institué, à compter de 2020, un suivi annuel de l'État de droit dans les États membres, qui conduit la Commission européenne à évaluer politiquement et « éthiquement » leur organisation judiciaire, leurs actions de lutte contre la corruption, leurs règles applicables aux médias et leurs procédures législatives, ainsi qu'à conditionner explicitement l'octroi de fonds européens aux États membres à leur respect préalable de l'État de droit155(*).

Par ailleurs, dans le cadre du soutien de l'Union européenne à l'Ukraine, la Commission européenne a pris plusieurs initiatives pour faciliter la coopération des industries de défense européennes et conforter leur production afin d'accélérer la production de munitions. Le nouveau programme pour l'industrie de la défense (EDIP), présenté le 5 mars dernier avec une stratégie dédiée (EDIS), pour instaurer une nouvelle capacité européenne de programmation et de passation conjointe de marchés, étendre la logique d'intervention des règlements EDIRPA et ASAP et lancer des projets européens d'intérêt commun dans le secteur de la défense, est fondé sur plusieurs articles du TFUE. À cet égard, le cumul d'articles visé en l'espèce souligne la difficulté de trouver une base juridique pertinente et de respecter la compétence des États membres dans le domaine de la défense. Elle est ainsi fondée à la fois sur l'article 114 précité du TFUE (développement du marché intérieur), sur son article 173 (relatif à l'industrie, au titre de la compétitivité de la base industrielle et technologique de défense européenne - BITDE), sur son article 212 (relatif à la coopération économique, financière et technique avec des pays tiers, pour le renforcement de la BITD ukrainienne) et sur son article 322 (relatif aux règles financières de l'Union européenne) du TFUE.

Voilà pourquoi, tout comme le Conseil d'État156(*), la commission des affaires européennes du Sénat prône l'insertion d'une « clause bouclier » préservant la compétence des États membres en matière d'ordre public et de sécurité nationale dans toute nouvelle initiative normative européenne (proposition n° 2 du rapport précité sur la « dérive normative » de l'Union européenne).

Deuxième évolution préoccupante : contrairement à ses engagements, la Commission européenne omet désormais très souvent de présenter une analyse d'impact pour accompagner ses nouvelles initiatives et démontrer que ces dernières respectent le principe de subsidiarité. La Commission invoque le plus souvent « l'urgence » de la présentation d'une réforme ou un niveau suffisant de consultations, ou encore, renvoie à des études plus anciennes, dont les constats demeureraient valables, pour justifier cette absence d'analyse d'impact.

Or, la Commission a de plus en plus souvent tendance à « ignorer » cette étape démocratique majeure dans son processus d'adoption des normes, au sujet de ses réformes les plus importantes. Parmi les textes récents d'importance dépourvus d'une telle analyse d'impact, on peut citer la proposition de règlement établissant des mesures pour renforcer la solidarité et les capacités dans l'Union européenne à détecter les menaces et les incidents liés à la cybersécurité, à s'y préparer et à y répondre (dite « cybersolidarité »)157(*) la proposition de directive de lutte contre la corruption158(*) ou encore la proposition de règlement précitée établissant un système commun de retour des migrants irréguliers159(*).

Voilà pourquoi le Sénat demande régulièrement la mise en place d'une règle simple de bonne gouvernance et de transparence : la publication systématique, par la Commission européenne, d'une analyse d'impact pour accompagner chacune de ses nouvelles initiatives normatives. Il recommande également de prévoir une évaluation ex post des règlements et des directives adoptés. Dans un souci d'allègement du « fardeau réglementaire » pesant sur les entreprises européennes, il souhaite enfin la mise en place d'un « test de compétitivité » et d'un « test PME renforcé » pour chaque nouveau projet de norme.

En troisième lieu, la Commission européenne exprime désormais sans complexe sa préférence pour les règlements, textes d'application directe et d'effet immédiat, plutôt que pour les directives, qui nécessitent des mesures de transposition en droit national. En 2019, la Commission a ainsi présenté 90 règlements pour 33 directives. Et, en 2024, 70 règlements pour 38 directives. Selon le rapport précité sur la « dérive normative » de l'Union européenne, « le nombre de règlements a donc été en moyenne de deux à trois fois supérieur à celui des directives depuis dix ans. »

Ce faisant, la Commission européenne souhaite remplir deux objectifs : d'une part, faciliter une action européenne plus homogène et plus rapide au bénéfice du bon fonctionnement du marché intérieur et, d'autre part, accroître l'influence et la puissance de l'Union européenne.

Simultanément, « par essence », les directives sont « plus respectueuses de la diversité nationale puisqu'elles permettent de mieux prendre en compte les réalités du terrain et d'articuler objectifs européens et traditions juridiques nationales. Le choix d'un règlement peut soulever des difficultés juridiques et politiques supplémentaires lorsqu'il pose des lignes directrices strictes dans des domaines sensibles (protection des données personnelles, coopération policière, coopération judiciaire pénale, immigration...), sans prendre en considération les spécificités nationales.

Il en est allé ainsi avec la présentation, déjà évoquée, de la proposition de règlement dite « cybersolidarité », en avril 2023, qui complexifie et doublonne partiellement avec l'architecture de cybersécurité européenne posée par la directive (SRI2), alors même que cette dernière n'est pas encore entrée en vigueur et qu'elle préserve mieux les impératifs de sécurité nationale. Il en a été de même avec la proposition de règlement concernant la lutte contre le retard de paiement dans les transactions commerciales ou encore la proposition de règlement sur les emballages et déchets d'emballages160(*), qui a conduit à remettre en cause les choix effectués de longue date par le législateur national et les collectivités territoriales pour le recyclage, alors que ces derniers avaient nécessité des investissements élevés et donnaient des résultats satisfaisants161(*).

Il faut également citer la refonte attendue du système commun de retour des migrants irréguliers installés dans l'Union européenne vers des pays tiers sûrs, qui a été présentée, le 11 mars dernier par la Commission européenne sous la forme d'un règlement, qui remplacerait l'actuelle directive 2008/115/CE162(*). De nouveau, il s'agit d'uniformiser les procédures pour gagner en efficacité, mais l'un des enjeux des négociations au Conseil sera de s'assurer qu'une telle piste est compatible avec les spécificités des dispositifs nationaux (exemple de la procédure de l'assignation à résidence, qui peut être appliquée aux étrangers en situation irrégulière faisant l'objet d'une décision de retour en France mais qui n'existe pas dans d'autres États membres).

C'est pourquoi, on peut observer que lorsqu'un règlement européen est adopté, le législateur national, pourtant censé le mettre en oeuvre sans mesure de transposition en droit national, est, dans les faits, très souvent amené à prendre des « mesures d'adaptation » de ces textes en droit national, faute pour le règlement initial d'avoir pu prévoir l'ensemble des situations nationales dans les 27 États membres. Cependant, sa marge de manoeuvre est alors très limitée, toute disposition contrevenant à la Commission européenne pouvant être censurée par la justice si elle est considérée comme « entravant » le bon fonctionnement du marché intérieur.

En quatrième et dernier lieu, si, en principe, ce sont les États membres qui ont la charge de la mise en oeuvre du droit européen au niveau national, les articles 290 (actes délégués)163(*) et 291 (actes d'exécution)164(*) du TFUE confèrent régulièrement de grands pouvoirs d'exécution et/ou de délégation à la seule Commission européenne pour mettre en oeuvre voire pour compléter et modifier le dispositif des règlements et directives165(*). En principe, les actes délégués ne peuvent être pris en application des dispositions essentielles de ces textes mais, en pratique, la tentation est grande pour la Commission de s'octroyer la délégation la plus large possible. Ainsi, dans son avis motivé relatif à la proposition de règlement relative au « certificat européen de filiation »166(*), le Sénat a estimé que la délégation de compétences octroyée à la Commission européenne ne pouvait concerner le contenu de ce certificat, ce dernier étant à l'évidence, la disposition essentielle de la réforme. Autre exemple : dans la proposition de règlement créant un « réservoir européen de talents »167(*), la liste des secteurs et métiers en tension serait fixée par la seule Commission européenne par un acte délégué.

C'est pourquoi, dans plusieurs résolutions européennes et dans son rapport précité sur la « dérive normative » de l'Union européenne, la commission des affaires européennes du Sénat a répété qu'il fallait « limiter le recours abusif » par la Commission européenne à ces actes (proposition n° 4 du rapport précité sur la « dérive normative » de l'Union européenne).

Le contrôle de subsidiarité est donc essentiel pour préserver une marge d'appréciation nationale et le rôle des parlements nationaux dans le vote des lois et le contrôle du pouvoir exécutif.

3. ...mais de moins en moins utilisé par les parlements nationaux

Comme le rappelait le rapport d'information de la mission d'information du Sénat sur la judiciarisation de la vie publique168(*), plusieurs obstacles, souvent cumulatifs, se présentent aux Parlements nationaux lorsqu'ils souhaitent contrôler les initiatives législatives européennes au titre du contrôle de subsidiarité :

- « en raison du fait majoritaire dans nombre de démocraties européennes, les chambres peuvent être conduites à renoncer à leurs prérogatives en matière de subsidiarité afin de ne pas gêner les positions diplomatiques défendues par le pouvoir exécutif dans les négociations européennes » ;

- « la mise en oeuvre du contrôle de subsidiarité est cantonnée dans un délai de huit semaines incompressibles et ce délai est court, voire trop court, pour adopter un avis motivé puis pour convaincre les autres Parlements nationaux de la pertinence de la position adoptée... » ;

- » le seuil à atteindre pour former un « carton jaune » (un tiers des voix attribuées aux Parlements nationaux) est également dissuasif » ;

- enfin, « le contrôle de subsidiarité n'est pas un contrôle au fond des projets d'actes législatifs examinés. (...) Pour des raisons de délai et de cohérence, le Sénat, en premier lieu sa commission des affaires européennes, peut être conduit à privilégier l'adoption de (...) résolutions et avis politiques en y insérant des éléments de subsidiarité. »

Le Sénat, conscient de la possible « mort lente » du contrôle de subsidiarité, et du risque démocratique que comporte une telle évolution, plaide donc depuis plusieurs années pour sa réhabilitation afin de garantir une réelle évaluation de la nécessité et de la proportionnalité des initiatives législatives européennes et de... respecter les traités !

Il souhaite plus généralement un développement du rôle européen des Parlements nationaux.

Ainsi, les conclusions du groupe de travail de la COSAC sur le rôle des Parlements nationaux dans l'Union européenne, adoptées, comme déjà précisé, par consensus par les parlementaires qui en étaient membres - hormis les eurodéputés - le 14 juin 2022, ainsi que la mission d'information sénatoriale précitée, ont parallèlement proposé un aménagement des modalités pratiques du contrôle de subsidiarité (proposition d'allongement du délai d'examen, de huit à dix semaines) et un assouplissement des conditions de déclenchement du « carton jaune » (qui serait effectif dès lors que les avis motivés adoptés sur un texte rassemblent un quart des voix attribuées aux Parlements nationaux, comme c'est déjà le cas dans le domaine de la coopération judiciaire et policière en matière pénale).

Considérant que l'expression politique européenne du Sénat devait être non seulement « défensive » avec le contrôle de subsidiarité mais également « offensive », les conclusions du groupe de travail et la mission d'information précitée ont demandé la création d'un « carton vert » (droit d'initiative indirect permettant aux parlements nationaux d'émettre des propositions législatives européennes).

En complément, le groupe de travail de la COSAC a souhaité également « inscrire dans le marbre » le droit de questionnement écrit auprès des institutions européennes qui existe déjà de manière officieuse à l'heure actuelle mais qui, en raison de cette nature officieuse, engage peu lesdites institutions.

À l'initiative du Sénat français, ces préconisations ont été formellement reprises dans la contribution de la COSAC, lors de sa LXXIIème réunion plénière, à Budapest (27-29 octobre 2024).

Quant au Parlement européen, désormais lui aussi convaincu de la nécessité de renforcer les prérogatives européennes des parlements nationaux, il a soutenu le principe du mécanisme du « carton vert » et a demandé l'allongement à 12 semaines, du délai d'examen des textes européens par les parlements nationaux au titre du contrôle de subsidiarité169(*).

Enfin, il faut souligner que la mission d'information précitée préconisait la mise en oeuvre, dès que possible, d'un recours pour non-conformité d'un projet de texte européen au principe de subsidiarité devant la CJUE afin de faire vivre cette procédure et d'enclencher « un dialogue opérationnel » avec la Cour au sujet du contrôle de subsidiarité.

C. LES AVIS MOTIVÉS ADOPTÉS PAR LE SÉNAT

Depuis l'entrée en vigueur du traité de Lisbonne jusqu'au 30 septembre 2024, le Sénat a adopté 44 avis motivés au titre du contrôle de subsidiarité, soit :

1 en 2011, sur les exigences prudentielles applicables aux établissements de crédit et aux entreprises d'investissement ;

10 en 2012, sur l'accès aux ressources génétiques, la gestion collective des droits d'auteur et licences multiterritoriales de droits portant sur des oeuvres musicales en vue de leur utilisation en ligne, le contrôle technique périodique des véhicules à moteur, le paquet « Monti II » (qui a atteint le seuil du « carton jaune »), l'information du public sur les médicaments et sur les médicaments à usage humain soumis à prescription médicale, la reconnaissance des qualifications professionnelles, le règlement général sur la protection des données, la définition des grands axes stratégiques du transport transeuropéen, et le suivi et l'évaluation des projets de plans budgétaires dans les États membres de la zone euro ;

4 en 2013, sur la déclaration de TVA normalisée, les commissions d'interchange pour les opérations de paiement liées à une carte, la création du parquet européen (qui a atteint le seuil du « carton jaune ») et le 4paquet ferroviaire ;

2 en 2014, sur des mesures structurelles améliorant la résilience des établissements de crédit de l'Union européenne et le règlement sur les nouveaux aliments ;

aucun en 2015 ;

4 en 2016, sur l'organe des régulateurs européens des communications électroniques, le mécanisme d'échange d'informations en ce qui concerne les accords intergouvernementaux et les instruments non contraignants conclus entre des États membres et des pays tiers dans le domaine de l'énergie, les contrats de fourniture de contenu numérique, les contrats de vente et les contrats de vente en ligne et de toute autre vente à distance de biens, et le paquet « déchets » ;

7 en 2017, sur la certification des technologies de l'information et des communications en matière de cybersécurité, le cadre applicable à la libre circulation des données à caractère non personnel, le marché intérieur de l'électricité, l'agence de l'Union européenne pour la coopération des régulateurs de l'énergie, la coordination des systèmes de sécurité sociale, la procédure de notification des régimes d'autorisation et des exigences en matière de services, le contrôle de proportionnalité avant l'adoption d'une nouvelle réglementation de professions ;

2 en 2018, sur les règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel et l'évaluation des technologies de la santé ;

aucun en 2019 ;

1 en 2020170(*), sur le cadre requis pour parvenir à la neutralité climatique et modifiant la loi européenne sur le climat (règlement (UE) 2018/1999) ;

4 en 2021, dont 3 sur les propositions de règlement relatives aux menaces transfrontières graves pour la santé, sur l'institution d'un centre européen de prévention et de contrôle des maladies et sur un rôle renforcé de l'agence européenne des médicaments, et 1 sur la neutralité climatique d'ici à 2035 dans le secteur de l'utilisation des terres, de la foresterie et de l'agriculture ;

- 4 en 2022, respectivement relatifs à la proposition de règlement sur le développement du réseau transeuropéen de transport, à la proposition de directive relative aux poursuites stratégiques altérant le débat public, à la révision des directives relatives aux énergies renouvelables, à la performance énergétique et à l'efficacité énergétique, ainsi qu'au cadre commun pour les services de médias dans le marché intérieur ;

3 en 2023, respectivement relatifs à la protection de l'Union européenne contre la manipulation du marché de gros de l'énergie, aux emballages et aux déchets d'emballages et à la filiation ;

- 2 en 2024, respectivement relatifs à la proposition de directive sur la lutte contre les abus sexuels sur mineurs et au programme européen pour l'industrie de défense. Ces deux avis motivés sont également à prendre en compte au titre de la session parlementaire examinée (1er octobre 2023-30 septembre 2024).

Tableau des avis motivés adoptés au titre
de la session parlementaire 2023-2024

Texte

Proposition
de résolution portant avis motivé de la commission des affaires européennes

Résolution

Réponse
de la Commission européenne

Proposition de directive relative à la lutte contre les abus sexuels et l'exploitation sexuelle des enfants, ainsi que contre les matériels relatifs à des abus sexuels sur enfants, et remplaçant la décision-cadre 2004/68/JAI (refonte)

COM (2024) 60 final

N° 625 ; déposée le 22 mai 2024 sur le rapport de M. André Reichardt 

N° 136, adoptée le 27 mai 2024

Transmise le 11 octobre 2024

Proposition de règlement relatif à l'établissement du programme pour l'industrie européenne de la défense et d'un cadre de mesures visant à assurer la disponibilité et la fourniture en temps utile des produits de défense

COM(2024) 150 final

N° 648 ; déposée le 30 mai 2024 sur le rapport de M. François Bonneau, de Mme Gisèle Jourda et de M. Dominique de Legge

N° 145, adoptée le 5 juin 2024

Transmise le 6 septembre 2024

1. La résolution européenne du Sénat n° 136 sur la proposition de directive relative à la lutte contre les abus sexuels et l'exploitation sexuelle des enfants

La résolution n° 136 portait avis motivé sur la conformité au principe de subsidiarité de la proposition de directive COM(2024) 60 final relative à la lutte contre les abus sexuels et l'exploitation sexuelle des enfants, ainsi que contre les matériels relatifs à des abus sexuels sur enfants, et remplaçant la décision-cadre 2004/68/JAI du Conseil (refonte).

La proposition de directive s'inscrit dans le cadre d'une stratégie globale de l'Union européenne pour une lutte plus efficace contre les abus sexuels commis contre des enfants, adoptée le 24 juillet 2020, qui comprend également la proposition de règlement COM(2022) 209 final, déjà évoquée Elle vise à actualiser la directive de 2011, d'une part, en raison des constats mitigés sur l'efficacité de ce texte, et, d'autre part, pour s'adapter aux comportements des auteurs d'abus (exploitation sexuelle des enfants en ligne...).

À titre principal, la proposition de directive tend à enrichir la liste des infractions pénales visées171(*), à renforcer les peines encourues pour ces infractions par cohérence avec celles retenues dans la directive relative à la lutte contre la violence à l'égard des femmes et la violence domestique172(*). Elle tend aussi à renforcer la responsabilité pénale des personnes morales173(*), à harmoniser les délais de prescription174(*) et à assurer l'effectivité des interdictions consécutives à une condamnation. Elle conforte également les mesures de prévention, les obligations de signalement des infractions et l'assistance et la protection des victimes175(*).

Dans sa résolution, adoptée en commission des affaires européennes, le 22 mai 2024, sur le rapport de M. André Reichardt, et devenu définitif le 27 mai 2024, le Sénat, après avoir salué les efforts de la France et de l'Union européenne pour améliorer la lutte contre les abus sexuels sur les enfants et les conditions de protection des mineurs victimes d'abus176(*), a d'abord :

estimé que la réforme participait d'une « européanisation » accélérée du droit pénal au détriment du rôle des parlements nationaux des États membres et a appelé la Commission européenne à associer ces derniers « à l'élaboration de toute proposition de réforme législative ayant un volet pénal, en prévoyant un processus de consultation spécifique, systématique et institutionnalisé » ;

- constaté que les articles 82 et 83 du TFUE précités étaient des bases juridiques pertinentes pour fonder juridiquement la présente proposition ;

déploré que, bien loin d'un texte d'harmonisation minimale, la proposition de directive ait un champ d'application exhaustif et, de ce fait, trop restrictif quant à la marge d'appréciation des États membres : étaient en particulier visés le remplacement de l'infraction actuelle de « pédopornographie » par celle, beaucoup plus large, « d'infractions liées au matériel relatif à des abus sexuels sur enfants » et les dispositions de l'article 28 relatif à la prévention des abus sexuels, qui énuméraient l'ensemble des structures institutionnelles et sociales (clubs sportifs, communautés religieuses...) dans lesquelles les États membres doivent prendre les mesures de prévention appropriées au lieu de poser ce principe de prévention et de laisser les États membres désigner les structures pertinentes.

La résolution du Sénat a également constaté que la conformité de plusieurs dispositions de la proposition aux principes de subsidiarité et de proportionnalité posait question. Ainsi, la résolution :

a remarqué que les dispositions de l'article 5 de la proposition autorisaient des « organisations » - ONG, fondations... - à effectuer des actions de recherche, d'analyse et de détection de contenus en ligne relatifs à des abus sexuels sur des enfants. Ce faisant, ces organisations privées pourraient être en concurrence avec les autorités régaliennes, sans interdire qu'elles poursuivent également un but lucratif, ce qui ne semble ni efficace ni conforme aux traités ;

- a observé qu'en substituant une obligation de signalement à la possibilité actuelle de signalement des soupçons d'abus sexuels prévue pour les professionnels de santé travaillant au contact des mineurs, l'article 17 de la proposition supprimait, dans les situations visées, le secret médical qui s'impose pourtant à eux, ne laissant aucune marge aux États membres et rompant l'équilibre du droit français, qui prévoit par ailleurs que tout praticien appelé auprès d'un mineur « victime de sévices ou de privations », « alerte les autorités judiciaires ou administratives, sauf circonstances particulières qu'il apprécie en conscience. »177(*) 

a considéré que plusieurs dispositions de la proposition étaient compatibles avec le principe de subsidiarité, sous réserve de demeurer des « règles minimales », afin de préserver les dispositions du droit pénal français en vigueur178(*), plus favorables aux mineurs ;

a souligné, comme dans sa résolution européenne n° 77 (2022-2023) du 20 mars 2023, « l'inutilité et le coût trop important », pour les États membres, de la création d'un centre de l'Union européenne pour la prévention des abus sexuels sur les enfants, en raison de ses missions mal définies ou faisant « doublon » avec des structures existantes et des nouveaux financements nécessaires à son fonctionnement ;

- a constaté que la demande de collecte de statistiques de la Commission européenne à l'égard des États membres, mentionnée à l'article 31 de la proposition, était « excessive » et comportait une notion juridiquement inacceptable (celle de « délinquants potentiels »).

Dans sa réponse à l'avis motivé du Sénat179(*), la Commission européenne :

a voulu apaiser les craintes du Sénat sur le risque d'extension du droit pénal européen par le remplacement de l'infraction de « pédopornographie » par celui de « matériel relatif à des abus sexuels sur enfants », en confirmant que ce changement de terminologie « ne modifi(ait) pas la nature des dispositions pertinentes ni le champ d'application de la directive ». De même, elle a affirmé que les dispositions de l'article 5 permettant à des « organisations » de contribuer à la recherche, à la détection et à l'analyse des abus sexuels sur enfants en ligne ne remettaient pas en cause la compétence des États membres dans l'accomplissement de ces missions. Mais elle s'est abstenue d'indiquer ce que recouvrait la notion « d'organisations » et a renvoyé cette fois à la responsabilité des États membres pour veiller à ce qu'aucune de ces structures bénéficiaires d'une autorisation n'en « détourne l'usage au profit d'activités illégales » ;

a confirmé que les dispositions des articles 3 et 10 de la proposition étaient bien « d'harmonisation minimale », permettant aux États membres de sanctionner plus lourdement les infractions visées ou de définir plus largement ces dernières. Elle a en outre précisé que les dispositions de l'article 16 sur la prescription n'affectaient pas la possibilité, pour le législateur national, « de prolonger les délais de prescription en cas de récidive » ;

a « pris acte » de l'approche française relative au secret médical et de la marge d'appréciation qui devait être laissée aux États membres tout en réaffirmant « la nécessité d'une obligation de signalement pour compenser les difficultés énormes que les victimes [...] doivent généralement surmonter... » ;

a contesté la lecture du Sénat sur les dispositions de l'article 28 selon laquelle la liberté des États membres pour déterminer les lieux où des dispositifs de prévention des abus sexuel sur enfants doivent être prévus serait nulle, tout en concédant qu'il était « essentiel de déterminer clairement les normes minimales de prévention au niveau de l'Union européenne pour assurer un suivi efficace de la directive proposée » ;

a fait preuve de plus de prudence que dans le passé sur la nécessité de créer un centre de l'Union européenne ayant statut d'agence pour constituer un pôle de connaissances et d'échange de bonnes pratiques sur la lutte contre les abus sexuels sur mineurs, et d'aide aux États membres dans la mise en oeuvre de la directive. Elle a rappelé que sa création éventuelle était liée au sort - incertain - de la proposition de règlement établissant des règles en vue de prévenir et de combattre les abus sexuels sur enfants, déjà évoquée ;

a, en revanche, réfuté les critiques du Sénat contre la collecte de données statistiques prévue à l'article 31 de la proposition, estimant que cette dernière était « nécessaire et proportionnée. »

Par la suite, les discussions sur la proposition de directive ont bien avancé au Conseil, qui a été en mesure d'adopter à son sujet une orientation générale, le 12 décembre 2024. Cette dernière a validé l'actualisation et l'élargissement des infractions pénales liées aux abus sexuels sur les enfants, ainsi que le renforcement de la sanction pénale de ces infractions.

Le compromis trouvé laisse aux États membres le soin de fixer la majorité sexuelle et, dans une disposition longuement discutée, punit le fait de se livrer à des activités sexuelles avec des enfants ayant atteint cette majorité s'il n'a pas donné son consentement.

Il confirme l'aménagement des délais de prescription afin de permettre, autant que possible, aux victimes de porter plainte devant la justice et de demander une indemnisation à l'auteur des faits.

Le Parlement européen, lui, doit encore adopter sa position de négociation.

2. La résolution européenne du Sénat n° 145 sur la proposition de règlement relatif à l'établissement du programme pour l'industrie européenne de la défense (EDIP)

La résolution n° 145 portait avis motivé sur la conformité au principe de subsidiarité de la proposition de règlement relatif à l'établissement du programme pour l'industrie européenne de la défense et d'un cadre de mesures visant à assurer l'interopérabilité et la fourniture en temps utile des produits de défense (COM(2024) 150 final).

Déjà évoquée, la proposition de règlement EDIP est la déclinaison opérationnelle de la stratégie pour l'industrie européenne de défense (EDIS)180(*), présentée le 5 mars 2024 et s'inscrit dans le prolongement de la déclaration de Versailles du 11 mars 2022, de la communication conjointe sur l'analyse des déficits d'investissement dans le domaine de la défense du 18 mai 2022181(*) et des deux textes d'urgence adoptés en 2023 pour faire face à la guerre en Ukraine : le règlement relatif au soutien à la production de munitions (ASAP)182(*) et l'instrument visant à renforcer l'industrie européenne de la défense au moyen d'acquisitions conjointes (EDIRPA)183(*).

En pratique, la proposition de règlement « établit un ensemble de mesures et définit un budget visant, d'une part, à soutenir la préparation de l'Union (européenne) et de ses États membres dans le domaine de la défense par un renforcement de la compétitivité, de la réactivité et de la capacité de la base industrielle et technologique de défense européenne (BITDE) et à garantir la disponibilité et la fourniture en temps utile de produits de défense et, d'autre part, à contribuer au redressement, à la reconstruction et à la modernisation de la base industrielle et technologique de défense (BITD) ukrainienne. »

Dans sa résolution, adoptée le 30 mai 2024 sur le rapport des sénateurs François Bonneau, Gisèle Jourda et Dominique de Legge, et devenue définitive le 5 juin 2024, le Sénat a d'abord déploré l'absence d'étude d'impact « sur un texte aussi significatif pour les enjeux de souveraineté nationale ».

En deuxième lieu, tout en partageant l'avis de la Commission sur la nécessité de « développer une défense mieux ajustée aux dimensions de l'Europe », le Sénat a critiqué le choix de cette dernière de présenter « un texte d'ensemble dans une logique exclusivement communautaire » en ayant « recours à quatre bases juridiques distinctes, sans même viser la base juridique de la politique de sécurité et de défense commune (PSDC) », alors même qu'il ressort de la lecture combinée des articles 4184(*), 5185(*), 42186(*) et 45187(*) du traité sur l'Union européenne que la politique de défense reste une compétence nationale, la politique de sécurité et de défense commune s'exerçant dans un cadre intergouvernemental ».

De là, la résolution a considéré que le recours aux articles 173188(*) et 322189(*) du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) ne semblaient pas poser de difficulté au regard du respect des principes de subsidiarité et de proportionnalité mais a souligné en revanche que le recours à l'article 114 du TFUE, relatif au développement du marché intérieur, était « contestable ». Elle a en outre rappelé que l'article 346 du TFUE stipulait qu'aucun État membre n'était tenu de fournir des renseignements dont il estimerait la divulgation contraire aux intérêts essentiels de sa sécurité et, d'autre part, que tout État membre pouvait prendre les mesures qu'il estime « nécessaires à la protection des intérêts essentiels de sa sécurité et qui se rapportent à la production ou au commerce d'armes, de munitions et de matériel de guerre ».

En troisième lieu, la résolution du Sénat a dénoncé la volonté de la Commission de prévoir dans la proposition de règlement, des dispositions autorisant la Commission européenne, en collaboration avec le conseil de préparation industrielle qu'elle propose de créer, à cartographier les chaînes d'approvisionnement européennes dans le secteur de la défense et à assurer un suivi régulier des capacités de fabrication de l'Union européenne nécessaires à l'approvisionnement en produits nécessaires en cas de crise, considérant que ces mesures « particulièrement intrusives », relevaient de la souveraineté nationale des États membres.

En quatrième lieu, la résolution du Sénat a démontré que l'instauration d'un conseil de préparation industrielle dans le domaine de la défense, qui serait placé sous l'autorité conjointe du Conseil et de la Commission, paraissait en outre empiéter sur les prérogatives de l'Agence européenne de défense (AED), chargée, à titre principal, au titre de l'article 45 du TUE, de contribuer à identifier les objectifs de capacités militaires des États membres et à évaluer le respect de leurs engagements dans ce domaine, de promouvoir une harmonisation des besoins opérationnels, de proposer des projets multilatéraux, d'assurer la coordination des programmes européens, de soutenir la recherche en matière de technologie de défense et de mettre en oeuvre toute mesure utile pour renforcer la base industrielle et technologique du secteur de la défense. Elle a relevé que les missions de l'AED semblaient suffisantes pour couvrir ces enjeux et que la création d'un conseil de préparation industrielle dans le domaine de la défense « donnerait de fait à la Commission un rôle que les traités ne lui attribuent pas. »

En cinquième lieu, la résolution du Sénat a observé que les dispositions relatives aux régimes « d'état de crise d'approvisionnement » et d'« état de crise d'approvisionnement liée à la sécurité » (articles 50 et 51 de la proposition), lorsqu'une telle crise est « survenue » ou « réputée être survenue », qui seraient activées par le Conseil, à la majorité qualifiée, permettraient à la Commission européenne de prendre des mesures préventives telles que la collecte d'informations ou la mise en place de commandes prioritaires de produits. Tout en relevant que la mise en oeuvre d'un tel régime serait soumise à l'accord de l'État membre de l'entreprise concernée, le Sénat a constaté que ces derniers, s'ils étaient adoptés, s'imposeraient aux règles nationales relatives à la sécurité des approvisionnements des forces armées, du fait de la primauté du droit de l'Union européenne, et « priveraient en partie l'État de l'exercice de ses compétences dans un domaine absolu de souveraineté, relevant de la sécurité nationale qui est de la seule responsabilité des États membres. »

Il en irait de même pour la disposition de l'article 51 de la proposition, qui imposerait aux États membres de s'abstenir d'imposer des restrictions qui ne seraient pas transparentes, motivées et proportionnées, au transfert de produits de défense en cas d'activation du régime d'état de crise d'approvisionnement liée à la sécurité, et qui empêcherait l'exercice normal, par la délivrance préalable d'une licence, du contrôle par cet État d'éventuelles réexportations.

Enfin et en sixième lieu, la résolution du Sénat a constaté que la proposition de règlement comprenait des mesures destinées à contribuer au redressement, à la reconstruction et à la modernisation de la BITD ukrainienne et à son intégration progressive dans la BITDE, sur la base des dispositions de l'article 212 du TFUE190(*), et que cette base juridique était inadaptée, « l'objectif poursuivi étant bien plus large ». Elle a aussi observé que la procédure proposée par la Commission européenne paraissait aller « au-delà de ce que permettent le processus d'adhésion et les modalités d'approbation par les États membres fixées par l'article 49 du TUE191(*) ».

En réponse à l'avis motivé du Sénat192(*), la Commission européenne a rejeté toute critique sur les éventuelles atteintes de son dispositif aux principes de subsidiarité et de proportionnalité. Elle a en particulier :

- expliqué qu'elle avait « pleinement respecté ses règles internes » dans la procédure d'élaboration et de présentation de sa réforme et justifié l'absence d'étude d'impact par la nécessité de répondre en urgence à la « détérioration brutale du contexte sécuritaire ». Elle a précisé que sa proposition devait initialement être présentée en 2022 mais que cette présentation avait été finalement décalée, du fait de la priorité donnée au texte EDIRPA. La Commission a aussi rappelé qu'elle avait mené une procédure de consultation d'une durée de quatre mois ;

- réfuté l'inadaptation des bases juridiques choisies pour fonder sa proposition de règlement en soulignant, d'une part, « qu'aucun des objectifs ou composantes de la proposition (...) ne concern(ait) la politique de sécurité et de défense commune » (cette affirmation est tout à fait contestable, les règles de fonctionnement des entreprises de l'industrie de la défense n'étant pas seulement celles du marché intérieur, mais résultant également et surtout des besoins et contraintes des forces armées des États membres), et, d'autre part, qu'elle ne pouvait pas adopter une proposition de règlement fondée sur une base juridique relevant de la PSDC, par conformité avec l'article 24 du TUE193(*) ;

- « pris bonne note des réserves émises par le Sénat au sujet du recours à la base juridique de l'article 114 du TFUE » tout en rappelant que sa proposition était « strictement conforme au principe d'attribution ». Elle a aussi précisé que le conseil de préparation industrielle en matière de défense envisagé se limiterait à la conseiller et à l'assister dans la mise en oeuvre de la proposition et qu'il permettrait une « coordination plus étroite » entre les outils et processus de développement des capacités, politiques et programmes destinés à soutenir la compétitivité de la BITDE et la préparation industrielle dans le domaine de la défense. Elle assume donc son choix d'appliquer l'article 114 du TFUE au secteur de la défense (en effet, sa proposition va au-delà de l'industrie de défense) et d'imposer sa présence dans un dialogue stratégique et confidentiel avec les industriels aujourd'hui mené par le seul Conseil appuyé par l'Agence européenne de défense ;

affirmé que l'extension de son rôle et ses missions de cartographie et de suivi des chaînes d'approvisionnement, intrusives pour la souveraineté nationale, étaient motivées par l'évolution de ces chaînes, qui s'étendent de plus en plus souvent sur l'ensemble du marché intérieur de l'Union européenne et au-delà. Elle a en outre précisé que les dispositions de la proposition relatives aux commandes prioritaires et aux demandes prioritaires étaient « sans préjudice du recours à des mécanismes ou initiatives nationaux ayant un effet équivalent » et que les transferts intra-européens de produits de défense étaient déjà régis par le droit européen ;

estimé enfin que le recours à la base juridique de l'article 212 du TFUE était parfaitement pertinent pour fonder les mesures de soutien à l'Ukraine relevant « entièrement de la coopération économique » avec ce pays et non de son processus d'adhésion à l'Union européenne.

Par la suite, comme déjà indiqué, le Sénat a complété cet avis motivé par l'adoption d'une résolution européenne sur le programme EDIP194(*) dans lequel il a repris ses observations précitées sur la non-conformité de l'initiative aux principes de subsidiarité et de proportionnalité et souligné que cette proposition devait compléter et non remplacer les efforts budgétaires des États membres en faveur de leur défense nationale.

Il a également demandé que les fonds du programme soient réservés au soutien des produits de défense dont l'autorité de conception est installée dans l'Union européenne ou les pays associés et estimé indispensable que les composants des produits soutenus par ce programme soient très majoritairement issus d'États membres de l'Union européenne ou de ces pays associés (en pratique, au moins à 65 % en valeur et, en tendant si possible vers les 80 %)195(*).

Il a également regretté que la proposition ne puisse prendre en compte la révision à mi-parcours du Fonds européen de défense (FED), s'est interrogé sur le principe de subventions aux entreprises plutôt qu'aux États membres, et a fait part de son étonnement sur la possibilité, pour la Commission européenne, de participer aux projets de défense d'intérêt commun. Sur ce point, il a demandé que les projets soient sélectionnés sur la base des priorités des États membres et a mis en garde contre le risque de saupoudrage budgétaire.

Il a aussi jugé pertinent le dispositif du Fonds pour l'accélération de la transformation des chaînes d'approvisionnement dans le secteur de la défense (FAST), a salué la possibilité offerte de créer des structures pour programmes d'armement européens (SEAP) mais a demandé à la Commission européenne de préciser ses intentions relatives à la mise en place d'un « véritable marché unique des produits de défense ».

Il a contesté une nouvelle fois l'opportunité et la validité juridique des dispositifs intrusifs permettant à la Commission européenne de s'immiscer dans les chaînes d'approvisionnement des produits de défense ainsi que la création d'un conseil de préparation industrielle en matière de défense, et a appelé à redynamiser l'Agence européenne de défense. Il a enfin constaté la modestie des moyens financiers disponibles pour renforcer la BITDE et a demandé à la BEI d'accroître son soutien aux entreprises du secteur.

La Commission « von der Leyen II » a, quant à elle, confirmé son souhait d'intervenir dans les dossiers de défense, avec la désignation d'un commissaire européen à la défense et à l'espace196(*) et la présentation, le 19 mars dernier, d'une part, d'un plan d'action dédié - hors programme de travail annuel - susceptible de mobiliser jusqu'à 800 milliards d'euros en faveur de l'industrie de défense197(*), et, d'autre part, d'un « livre blanc sur l'avenir de la défense européenne ». Ses objectifs affichés sont :

- de fournir un soutien militaire « sans faille » à l'Ukraine ;

- de combler les lacunes des États membres en matière de capacités de défense des forces armées ;

- de renforcer l'industrie européenne de défense ;

- de préparer l'Union européenne aux scénarios militaires les plus extrêmes ;

- de renforcer la sécurité au moyen de partenariats.

Cependant, malgré ce volontarisme affiché de la Commission, le « dernier mot » sur le champ exact de cette coopération, sur les moyens financiers mis à disposition et sur le niveau de partage des compétences, technologies et informations relatifs à la BITDE, reviendra aux États membres, en raison de l'impact de ces choix sur leur souveraineté nationale. Les négociations en cours sur EDIP sont d'ailleurs très tendues, certains États membres (Italie) envisageant même de ne pas participer au programme européen.

EXAMEN EN COMMISSION

La commission des affaires européennes s'est réunie le 14 mai 2025 pour l'examen du présent rapport. À l'issue de la présentation faite par M. Jean-François Rapin, président, le débat suivant s'est engagé :

M. Jean-François Rapin, président, rapporteur. - Mes chers collègues, je vais effectuer un rapide bilan de notre travail au cours de la session parlementaire 2023-2024. Une présentation exhaustive de ce bilan est établie dans le rapport écrit qui vous a été transmis.

Lors de la session 2023-2024, l'activité de notre commission a été importante : nous avons tenu 48 réunions de commission pour un nombre total d'heures de réunions comparable à celui de la session 2022-2023 (73 h 30 contre 74 h 10 en 2022-2023).

Ce travail a d'abord été un travail d'échange et d'influence auprès des institutions de l'Union européenne et de nos partenaires des autres États membres. Il s'agit d'une tâche essentielle pour influencer les négociateurs des textes européens afin qu'ils prennent en compte les positions européennes du Sénat.

Dans ce cadre, nous avons eu la chance d'entendre plusieurs commissaires européens et personnalités européennes de haut niveau. Je pense à l'audition du 9 novembre 2023 au cours de laquelle le commissaire Oliver Varhelyi, qui était alors en charge de l'élargissement, avait fait un point détaillé de la situation de chaque pays candidat à l'adhésion, ou encore à celle de M. Charles Fries, secrétaire général adjoint du Service européen pour l'action extérieure, le 28 février 2024, qui avait dessiné les grands enjeux de la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) et de l'Europe de la défense.

Par ailleurs, 18 déplacements de rapporteurs des commissions du Sénat, dont 9 pour notre commission, à Bruxelles ou à Strasbourg, ont permis à nos collègues d'échanger avec les services de la Commission européenne, les rapporteurs du Parlement européen et la représentation permanente française auprès de l'Union européenne.

Nous avons également poursuivi ce travail d'influence par la représentation du Sénat dans les réunions parlementaires qui rythment l'agenda des présidences de l'Union européenne : je veux citer, par exemple, les réunions de la Conférence des organes spécialisés dans les affaires communautaires (COSAC) de Madrid de Bruxelles ou encore la réunion avec nos homologues allemands et polonais en format Weimar à Stuttgart et Strasbourg (19-20 septembre 2024).

Notre commission a également entendu 18 communications, qui ont permis de nous éclairer sur l'activité de nos délégations à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe (APCE) et à l'Assemblée parlementaire de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (AP-OSCE), mais aussi sur l'actualité européenne.

À titre d'exemple, je veux rappeler la communication d'André Reichardt sur la situation en Moldavie (14 décembre 2023), celle de nos collègues Florence Blatrix Contat et Christine Lavarde sur la révision à mi-parcours du pacte de stabilité et de croissance (25 janvier 2024), ou encore, celle de nos collègues Amel Gacquerre, Daniel Gremillet et Michaël Weber sur le retrait de l'Union européenne du traité sur la charte de l'énergie (8 février 2024).

Notre commission a aussi effectué l'examen systématique de l'ensemble des textes européens qui lui ont été soumis. Au cours de la session 2023-2024, nous avons été saisis de 943 textes européens au titre de l'article 88-4 de la Constitution. La commission des affaires européennes en a examiné de plus près 328, soit en procédure écrite, soit directement lors de ses réunions, ce qui correspond à une augmentation de 15,9 % en un an.

Sur la base des textes européens reçus par notre commission, 11 résolutions européennes ont été adressées par le Sénat au Gouvernement, au titre de l'article 88-4 de la Constitution. Dans un peu plus de 54 % des cas, soit 6 résolutions, ces positions exprimées par le Sénat ont été prises en compte en totalité ou en majorité par les négociateurs européens.

Les 6 résolutions qui ont été le mieux suivies d'effet étaient relatives au programme de travail de la Commission européenne pour 2024, à l'action européenne contre les pénuries de médicaments, à la révision à mi-mandat du pacte de stabilité et de croissance, à la mobilisation de la Facilité européenne pour la paix pour l'Arménie, aux nouvelles techniques génomiques (NTG) et à la résilience des sols.

Ainsi, sur la révision du pacte de stabilité et de croissance, la réforme européenne intervenue, qui est en vigueur depuis le 30 avril dernier, a confirmé dans les grandes lignes l'équilibre défendu par nos collègues Florence Blatrix Contat et Christine Lavarde, qui vise à conjuguer soutenabilité budgétaire et préservation de la capacité d'investissement.

Concernant l'Arménie, comme nous le demandions avec le président Retailleau et comme l'avait défendu notre collègue Valérie Boyer dans son rapport, la Facilité européenne pour la paix a été sollicitée, à hauteur de 10 millions d'euros, le 22 juillet 2024, pour renforcer les capacités logistiques des forces armées arméniennes et contribuer à une meilleure protection des civils.

Contre la pénurie de médicaments, je salue le travail de nos collègues Cathy Apourceau-Poly, Pascale Gruny et Bernard Jomier. Malgré des nuances, je relève que la position du Sénat est globalement en phase avec le « paquet pharmaceutique », tant sur l'urgence d'une action européenne que sur l'instauration d'une liste européenne de médicaments critiques, ou encore sur la possibilité de passer des marchés conjoints et de constituer des stocks. En pratique, le Conseil doit adopter un mandat de négociation sur ce paquet le 21 mai. De plus, l'acte européen sur les médicaments critiques, présenté par la Commission le 11 mars dernier, doit compléter ses dispositions par des mesures de soutien à l'accroissement de la production de médicaments critiques dans l'Union européenne.

J'en viens maintenant aux 5 résolutions européennes qui n'ont que partiellement été suivies d'effets. Il s'agit des résolutions européennes relatives à la lutte contre la corruption, à la PAC, à la cybersécurité, à la lutte contre les retards de paiement et au Mécanisme européen de protection civile.

Dans la plupart des cas, cette faible reprise était attendue en raison de nos divergences d'appréciation avec la Commission européenne. Je pense en particulier à notre résolution européenne sur la lutte contre la corruption dans l'Union européenne, co-rédigée avec Claude Kern et Didier Marie, qui a pris acte de l'absence de volonté des institutions européennes d'adopter des règles éthiques ambitieuses et qui a présenté un véritable « contre-projet ».

Autre exemple, la résolution portée par nos collègues Audrey Linkenheld, Catherine Morin-Desailly et Cyril Pellevat, a fait évoluer le texte dit « cybersolidarité » dans le bon sens. Elle a contribué aussi à supprimer la notion inexacte de « cyberbouclier » et à obtenir la prise en compte des impératifs de sécurité nationale qui avaient été mis au second plan.

Concernant la PAC, il faut constater, à la suite de l'adoption de nos nombreuses résolutions, que l'évolution est plus lente mais également positive de la part de la Commission européenne pour replacer la PAC parmi les priorités stratégiques européennes et pour défendre, de manière désormais assumée, la souveraineté alimentaire de l'Union européenne. La vision pour l'agriculture et l'alimentation présentée par la Commission européenne le 19 février dernier affirme ainsi que « la sécurité, la sûreté et la souveraineté alimentaires européennes ne sont pas négociables ». Nos positions répétées portent donc leurs fruits et je remercie nos collègues actifs sur ce sujet, en particulier Karine Daniel et Daniel Gremillet.

Nous avons aussi nourri le dialogue politique informel direct institué avec la Commission européenne par nos avis politiques. J'insiste sur l'importance de nos avis politiques qui sont adoptés rapidement et parviennent sans délai aux négociateurs européens. En 2023, les parlements nationaux des États membres de l'Union européenne ont adressé 402 avis à la Commission européenne (contre 355 en 2022), dont 380 avis politiques et 22 avis motivés au titre du contrôle de subsidiarité.

Pour sa part, au cours de la session parlementaire 2023-2024, le Sénat a adopté 9 avis politiques. En nombre d'avis transmis, selon la Commission européenne, le Sénat est la 10ème assemblée parlementaire de l'Union européenne (sur 39) la plus active à cet égard. Je ne reviendrai pas sur le détail de ces avis car ils avaient le même objet et le même contenu que les résolutions européennes que nous avons adoptées.

Je veux rappeler en revanche que la Commission européenne a répondu systématiquement à nos avis politiques. Elle a cependant du mal à respecter son engagement de principe consistant à nous répondre dans un délai de trois mois. En pratique, son délai de réponse reste insuffisant, 44 % de ses réponses seulement ayant été envoyées au Sénat dans les délais.

Dans son dernier rapport annuel sur les relations avec les parlements nationaux, la Commission européenne a aussi relevé plusieurs innovations dans les contributions de ces derniers.

Elle indique ainsi que le Sénat a été la première chambre à transmettre un avis politique au niveau des trilogues. Il s'agissait de l'avis sur la proposition de cadre normatif européen sur l'intelligence artificielle, qui avait été adopté sur le rapport de nos collègues André Gattolin, Catherine Morin Desailly, Cyril Pellevat et Elsa Schalck. Une autre chambre, en l'espèce le Bundesrat allemand, a choisi d'envoyer plusieurs avis successifs sur le projet d'acte sur la liberté des médias, afin de réagir aux négociations en cours.

Il faut également souligner que l'Eduskunta de Finlande a adopté des avis politiques sur des actes délégués et des actes d'exécution. C'est une innovation intéressante car, en principe, nos assemblées parlementaires ne sont pas sollicitées pour examiner ces normes secondaires mais très importantes.

Enfin, en 2023-2024, notre commission des affaires européennes a été saisie par la Commission européenne de 58 textes au titre du contrôle de subsidiarité que les traités confient aux parlements nationaux. Comme vous le savez, ce contrôle nous est confié à la fois par l'article 88-6 de notre Constitution et par l'article 5 du traité sur l'Union européenne (TUE).

Sur cette base, notre commission a adopté 2 avis motivés. Le premier concernait la proposition de directive sur la lutte contre les abus sexuels sur les enfants, qui a fait l'objet d'un examen attentif de notre collègue André Reichardt, et le second, la proposition de règlement relatif à l'établissement du programme pour l'industrie européenne de la défense, ce thème de l'industrie européenne de la défense ayant fait l'objet d'un suivi continu de la part de nos collègues Dominique de Legge, Gisèle Jourda et François Bonneau.

Je rappelle que si les parlements nationaux adoptent des avis motivés réunissant un tiers des voix qui leur sont attribuées, ou un quart des voix dans le cas des textes sur l'Espace de liberté, de sécurité et de justice, un « carton jaune » peut être adressé à la Commission européenne, ce qui doit l'amener à réexaminer son texte, voire à le retirer.

Malheureusement, un certain nombre de parlements ne s'impliquent pas dans la procédure. Les causes sont connues : on peut citer le nombre important de projets de textes européens à examiner, le manque d'expertise dans certains parlements, le choix politique de ne pas « fâcher » la Commission européenne ou encore, la brièveté de la procédure, puisque les avis motivés doivent être adoptés dans un délai de huit semaines.

Pourtant, mes chers collègues, l'action européenne du Sénat et, plus généralement, des parlements nationaux de l'Union européenne, est plus que jamais nécessaire à l'équilibre démocratique de l'Union européenne. D'une part, en raison des défis géopolitiques et économiques auxquels est confrontée l'Union européenne. D'autre part, parce que le fonctionnement institutionnel et démocratique de l'Union européenne doit être amélioré pour la rapprocher de nos concitoyens. Le rapport sur la « dérive normative » de l'Union européenne, que nous avons rédigé avec Didier Marie et Catherine Morin-Desailly, a dressé à un constat préoccupant sur ce fonctionnement mais a aussi conforté le Sénat en tant que force de proposition.

En effet, nos demandes de plus grande transparence et de meilleure association des parlements nationaux rencontrent de plus en plus d'écho. Nos demandes d'une analyse d'impact pour chaque réforme importante, d'instauration d'un « carton vert », c'est-à-dire d'un droit d'initiative des parlements nationaux pour proposer des textes européens, et d'un l'assouplissement des délais et des seuils du contrôle de subsidiarité, sont désormais reprises par la COSAC et soutenues par le Parlement européen.

Certes, malgré nos amendements lors de la dernière réunion de la Conférence des Présidents des parlements de l'Union européenne, qui s'est tenue lundi dernier à Budapest, cette dernière n'est pas encore tout à fait alignée sur les positions que je viens d'évoquer. Je veux néanmoins souligner que, sur notre proposition, elle a intégré dans ses conclusions la nécessité de prendre en considération les spécificités des régions ultrapériphériques (RUP) dans l'ensemble des politiques européennes.

Plus généralement, il y a vraiment un changement d'état d'esprit dans nos rencontres interparlementaires. Ainsi, à la Conférence de Budapest, l'importance du rôle des parlements nationaux dans l'Union européenne a été affirmée par l'ensemble des participants, dont la Présidente du Parlement européen, Mme Roberta Metsola.

En effet, comme l'a rappelé précédemment André Reichardt, l'Union européenne a aujourd'hui l'obligation de mieux écouter la voix de nos concitoyens. Et cette voix, nous la portons humblement.

Mes chers collègues, je vous remercie donc pour votre travail et pour votre engagement. Comme vous le voyez, ils portent leurs fruits. À nous de continuer à nous mobiliser pour faire entendre la voix de nos concitoyens et des élus locaux auprès de l'Union européenne.

M. Didier Marie. - Je veux remercier le président Jean-François Rapin pour ce rapport annuel, qui effectue un bilan attentif de nos travaux. En écoutant la présentation du rapport, j'ai bien noté que le Bundesrat allemand avait décidé de transmettre plusieurs avis politiques successifs sur un projet de texte européen, ce qui est, pour nous, une piste de réflexion intéressante. Certains dossiers à venir, tels que les négociations du prochain cadre financier pluriannuel (CFP) ou l'élargissement, pourraient justifier de suivre cet exemple.

Je voudrais aussi demander au rapporteur s'il peut nous indiquer si la Commission européenne répond systématiquement aux résolutions européennes du Sénat et aux avis politiques de notre commission, et de quelle manière.

M. Jean-François Rapin, président, rapporteur. - Sur le prochain cadre financier pluriannuel de l'Union européenne, je rappelle que nos collègues Florence Blatrix Contat et Christine Lavarde sont à l'oeuvre et mènent un travail d'auditions.

Les réponses de la Commission européenne à nos travaux ne concernent que les avis politiques transmis par notre commission, ces réponses devant en principe intervenir dans un délai de trois mois. Ces réponses prennent la forme d'un courrier signé par le représentant compétent du collège des commissaires. Elles sont publiées sur le site du Sénat, aux côtés de nos avis politiques.

En revanche, la Commission européenne ne répond pas aux résolutions européennes du Sénat, ces dernières étant destinées au Gouvernement. C'est alors le ministre en charge des affaires européennes ou le Secrétaire général aux affaires européennes qui y répondent lors d'une audition. En outre, le Secrétariat général aux affaires européennes (SGAE) rédige des fiches de suivi.

Mme Pascale Gruny. - Je veux remercier à mon tour le Président Rapin car ce bilan est précieux. Il permet en effet d'évaluer la portée et les résultats de nos travaux européens. Je voudrais en revanche constater avec regret que nous faisons face à l'absence, désormais généralisée, de traduction en français des projets de textes de la Commission européenne lorsque celle-ci les présente. Ce n'est pas acceptable.

M. Jean-François Rapin, président, rapporteur. - Le multilinguisme et la place de la langue française dans les institutions de l'Union européenne sont un sujet de préoccupation majeur, qui a fait l'objet d'observations dans notre rapport sur la « dérive normative » de l'Union européenne et dans notre avis politique sur le programme de travail de la Commission européenne pour 2025. J'ai aussi évoqué cette difficulté lors de mes interventions au cours de la réunion, déjà évoquée, de la Conférence des Présidents des parlements de l'Union européenne.

Mme Pascale Gruny. - Je veux aussi exprimer mon incompréhension après avoir appris que l'Union européenne finançait un projet de « Coran européen », alors même que cette même Union européenne avait refusé de faire référence à ses racines chrétiennes lors des débats sur le traité constitutionnel. Il y a aussi beaucoup d'argent européen en jeu, puisque le projet est financé à hauteur de 9 millions d'euros par l'Union européenne. Serait-il possible d'envisager de préparer une réaction de notre commission ?

Mme Valérie Boyer. - Ce projet de « Coran européen » remonte à 2019. Le projet idéologique sous-jacent est de diffuser la thèse selon laquelle il n'y aurait pas d'Europe sans l'islam. Il s'agit tout simplement de révisionnisme historique. Et ce projet s'intègre dans une stratégie d'entrisme plus large des Frères musulmans auprès des institutions de l'Union européenne. Il participe aussi de la promotion du voile islamique. Il y a quelques années déjà, l'Union européenne avait publié des affiches avec une jeune fille voilée proclamant que la liberté était « dans le hijab ». C'est assez scandaleux car le voile n'est pas un signe religieux. C'est un signe d'infériorisation et de discrimination des femmes.

M. Jean-François Rapin, président, rapporteur. - Mes chères collègues, je ne suis pas opposé à un travail de notre commission sur ce sujet, mais il faut réfléchir sur le bon format à adopter. Je vous rappelle que, lorsque les affiches évoquées par Valérie Boyer avaient été diffusées, j'avais écrit une lettre à la Présidente de la Commission européenne, en accord avec le Président du Sénat, pour lui faire part de l'étonnement du Sénat français et pour lui demander des explications. J'avais ensuite reçu une réponse écrite laconique de la Commission européenne, qui expliquait que la diffusion de ces affiches résultait d'une « erreur administrative », ce qui n'était pas crédible, et j'avais reçu une personne de la représentation de la Commission européenne à Paris, qui avait eu bien du mal à se justifier.

Mme Gisèle Jourda. - Je souhaite à mon tour remercier le rapporteur en prenant acte que les travaux européens sur la résilience des sols prévoient un objectif de sols sains à horizon 2050 et un objectif intermédiaire à horizon 2030. Je veux à cet égard rappeler que ces travaux résultent en partie des réflexions que nous avons menées conjointement avec notre collègue Cyril Pellevat.

Je constate par ailleurs que les enjeux géostratégiques sur l'espace sont importants pour l'Union européenne et que nous devrions nous pencher dessus sans attendre.

M. Jean-François Rapin, président, rapporteur. - Je veux rappeler que l'espace a fait l'objet d'un rapport récent de la délégation à la prospective et que le Sénat a adopté, le 21 janvier dernier, une résolution européenne sur la gestion du trafic spatial, à notre initiative.

S'il n'y a plus d'observations sur le rapport, puis-je considérer que vous en acceptez la publication ?

La commission autorise à l'unanimité la publication du rapport.

ANNEXE
RÉSOLUTIONS EUROPÉENNES ADOPTÉES PAR LE SÉNAT ENTRE LE 1ER OCTOBRE 2023 ET LE 30 SEPTEMBRE 2024

 

Auteur(s)

Texte européen concerné

Examen par la commission des affaires européennes

Examen
par la commission permanente compétente

Résolution du Sénat

1) PPRE198(*) sur le programme de travail de la Commission européenne pour 2024, déposée le 7 décembre 2023

MM. Jean-François Rapin et Didier Marie, au nom de la commission des affaires européennes

Programme de travail 2024 de la Commission européenne : Obtenir des résultats aujourd'hui et préparer demain, 17 octobre 2023, COM(2023) 638 final

Examen en
date du 7 décembre 2023

Pas d'examen

Résolution européenne n° 48 du Sénat, en date du 12 janvier 2024

2) PPRE sur la proposition de règlement établissant des mesures destinées à renforcer la solidarité et les capacités dans l'Union afin de détecter les menaces et incidents de cybersécurité, de s'y préparer et d'y réagir, déposée le 13 décembre 2023

Mmes Audrey Linkenheld et Catherine Morin-Desailly, et M. Cyril Pellevat, au nom de la commission des affaires européennes

Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil du 18 avril 2023 établissant des mesures destinées à renforcer la solidarité et les capacités dans l'Union afin de détecter les menaces et incidents de cybersécurité, de s'y préparer et d'y réagir, COM(2023) 209 final

Examen du 13 décembre 2023

Pas d'examen

Résolution européenne n° 52 du Sénat, en date du 19 janvier 2024

3) PPRE sur la réforme du pacte de stabilité et de croissance, déposée le 21 décembre 2023

Mmes Florence Blatrix-Contat et Christine Lavarde, au nom de la commission des affaires européennes

*Proposition de directive du Conseil modifiant la directive 2011/85/UE du Conseil sur les exigences applicables aux cadres budgétaires des États membres du 26 avril 2023, COM(2023) 242 final ;

*Proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) nº 1467/97 visant à accélérer et à clarifier la mise en oeuvre de la procédure concernant les déficits excessifs du 26 avril 2023, COM(2023) 241 final ;

*Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à la coordination efficace des politiques économiques et à la surveillance budgétaire multilatérale et abrogeant le règlement (CE) nº 1466/97 du Conseil du 26 avril 2023, COM(2023) 240 final

Examen du 21 décembre 2023

Pas d'examen

Résolution européenne n° 58 du Sénat, en date du 26 janvier 2024

4) PPRE relative à la prévention et à la lutte contre la corruption dans l'Union européenne, déposée le 14 février 2024

M. Claude Kern

M. Didier Marie et M. Jean-François Rapin, président, au nom de la commission des affaires européennes

* Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil du 3 mai 2023 relative à la lutte contre la corruption, remplaçant la décision-cadre 2003/568/JAI du Conseil et la convention relative à la lutte contre la corruption impliquant des fonctionnaires des Communautés européennes ou des fonctionnaires des États membres de l'Union européenne, et modifiant la directive (UE) 2017/1371 du Parlement européen et du Conseil, COM(2023) 234 final ;

*Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2023 modifiant les règlements (UE) nº 1024/2012 et (UE) 2018/1724 en ce qui concerne certaines exigences fixées par la directive (UE) XXXX/XXXX, COM(2023) 636 final ;

* Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2023 établissant des exigences harmonisées dans le marché intérieur en matière de transparence de la représentation d'intérêts exercée pour le compte de pays tiers et modifiant la directive (UE) 2019/1937, COM(2023) 637 final

Examen du 14 février 2024

Pas d'examen

Résolution européenne n° 90 du Sénat, en date du 18 mars 2024

5) PPRE concernant les végétaux obtenus au moyen de certaines techniques génomiques et les denrées alimentaires et aliments pour animaux qui en sont dérivés, déposée le 20 mars 2023

M. Jean-Michel Arnaud,

Mme Karine Daniel et M. Daniel Gremillet, au nom de la commission des affaires européennes

Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil du 5 juillet 2023 concernant les végétaux obtenus au moyen de certaines nouvelles techniques génomiques et les denrées alimentaires et aliments pour animaux qui en sont dérivés, et modifiant le règlement (UE) 2017/625, COM(2023) 411 final

Examen du 20 mars 2024

Pas d'examen

Résolution européenne n° 118 du Sénat, en date du 26 avril 2024

6) PPRE visant à permettre le financement par la facilité européenne pour la paix, d'une mesure d'assistance au profit de l'Arménie, déposée le 3 avril 2024

M. Jean-François Rapin et M. Bruno Retailleau

Résolution du Parlement européen sur les « Liens plus étroits entre l'UE et l'Arménie et nécessité d'un accord de paix entre l'Azerbaïdjan et l'Arménie », en date du 13 mars 2024, P9_TA(2024)0158

Examen et adoption du rapport de Mme Valérie Boyer, rapporteur, du 11 avril 2024.

Adoption de la PPRE n° 535.

Examen par la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, le 7 mai 2024.

Rapport de M. Ronan Le Gleut, rapporteur.

PPRE n° 583.

Résolution européenne n° 130 du Sénat, en date du 21 mai 2024

7) PPRE sur l'action de l'Union européenne contre
les pénuries de médicaments, déposée le 4 avril 2024

Mme Cathy Apourceau-Poly, Mme Pascale Gruny et M. Bernard Jomier, au nom de la commission des affaires européennes

Communication de la Commission européenne au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions, sur la réponse aux pénuries de médicaments, en date du 24 octobre 2023 (non traduite en français), COM(2023) 672 final

Examen du 2 avril 2024

Pas d'examen

Résolution européenne n° 120 du Sénat, en date du 10 mai 2024

8) PPRE sur la proposition de règlement concernant la lutte contre les retards de paiement dans les transactions commerciales, déposée le 9 avril 2024

Mme Amel Gacquerre et M. Michaël Weber, au nom de la commission des affaires européennes

Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil du 12 septembre 2023 concernant la lutte contre le retard de paiement dans les transactions commerciales, COM(2023) 533 final

Examen du 9 avril 2024

Pas d'examen

Résolution européenne n° 121 du Sénat, en date du 14 mai 2024

9) PPRE sur la proposition de règlement modifiant les règlements (UE) 2021/2115 et (UE) 2021/2116 (réexamen de la politique agricole commune - PAC), déposée le 9 avril 2024

MM. Jean-François Rapin, Patrick Chauvet, Pierre Cuypers, Laurent Duplomb, Daniel Gremillet, Mme Pascale Gruny, MM. Vincent Louault, Franck Menonville, Olivier Rietmann, Mmes Sophie Primas et Nadège Havet

Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil du 15 mars 2023 modifiant les règlements (UE) 2021/2115 et (UE) 2021/2116 en ce qui concerne les normes relatives aux bonnes conditions agricoles et environnementales, les programmes pour le climat, l'environnement et le bien-être animal, la modification des plans stratégiques relevant de la PAC, le réexamen des plans stratégiques relevant de la PAC et les exemptions des contrôles et des sanctions, COM(2024) 139 final

Examen et adoption du rapport de M. Daniel Gremillet, rapporteur, du 11 avril 2024.

Adoption de la PPRE n° 533.

Pas d'examen

Résolution européenne n° 129 du Sénat, en date du 17 mai 2024

10) PPRE visant à reconnaître la spécificité de l'engagement des sapeurs-pompiers volontaires et à renforcer le dispositif européen de protection civile, déposée le 21 mai 2024

M. Cyril Pellevat

Règlement (UE) 2021/836 du Parlement européen et du Conseil du 20 mai 2021 modifiant la décision n° 1313/2013/UE relative au mécanisme de protection civile de l'Union [européenne]

Examen et adoption du rapport de Mme Gisèle Jourda et de M. Cyril Pellevat, rapporteurs, le 20 juin 2024.

Adoption de la PPRE n° 701.

Pas d'examen

Résolution européenne n° 147 du Sénat, en date du 26 juillet 2024

11) PPRE sur la surveillance et la résilience des sols, déposée le 30 mai 2024

Mme Gisèle Jourda et

M. Cyril Pellevat, au nom de la commission des affaires européennes

Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative à la surveillance et à la résilience des sols (directive sur la surveillance des sols), COM(2023) 416 final

Examen du 30 mai 2024

Pas d'examen

Résolution européenne n° 146 du Sénat, en date du 5 juillet 2024

PPRE : proposition de résolution européenne


* 1 Islande ; Liechtenstein ; Norvège.

* 2 Royaume-Uni ; Suisse.

* 3 Candidatures déposées ou officielles : Albanie ; Bosnie-Herzégovine ; Géorgie ; Kosovo ; Macédoine du Nord ; Moldavie ; Monténégro ; Serbie ; Turquie ; Ukraine.

* 4 Réunion des commissions des affaires européennes des parlements allemand, français et polonais.

* 5 La résolution adoptée par le Sénat affirme explicitement que la commission des affaires européennes peut déposer une proposition de résolution européenne sur tout texte européen mentionné à l'article 88-4 de la Constitution, à l'exception de ceux pour lesquels une commission permanente s'est préalablement saisie dans les conditions mentionnées à l'article 73 quinquies A nouveau du Règlement du Sénat. Cette proposition de résolution européenne est ensuite envoyée à la commission permanente compétente pour examen. Si cette dernière n'est pas intervenue dans le délai d'un mois, le texte de la commission des affaires européennes devient résolution du Sénat. Si une proposition de résolution européenne est bien adoptée par la commission permanente, elle peut être inscrite à l'ordre du jour de la séance publique du Sénat à la demande du Président du Sénat, du Gouvernement, d'un président de groupe, du président d'une commission permanente ou du président de la commission des affaires européennes

* 6 Dans le cadre de la réforme, il est précisé clairement qu'une commission permanente peut déclarer vouloir se saisir d'un projet ou d'une proposition d'acte européen soumis au Sénat en application de l'article 88-4 de la Constitution, dans les quinze jours suivant la diffusion de cet acte par la commission des affaires européennes. Elle dispose alors d'un mois pour déposer une proposition de résolution européenne sur ce texte (article 73 quinquies A nouveau du Règlement du Sénat).

* 7 Plusieurs catégories de textes spécifiques comme les nominations, les virements ou les textes relatifs à la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) font l'objet d'une procédure d'accord tacite négociée entre les deux assemblées et le Secrétariat général aux affaires européennes (SGAE), rattaché au Premier ministre. Une fois passé un délai de 72 h après leur dépôt, la réserve d'examen des textes relevant de ces catégories est considérée comme levée.

* 8 Le détail de la procédure d'adoption de ces résolutions européennes est rappelé en annexe du présent rapport.

* 9 Cette proposition de résolution, déposée par le Président du Sénat et Mme Sylvie Vermeillet, avait été enregistrée à la Présidence du Sénat, le 12 février 2025.

* 10 Le paragraphe 2 de cet article déclare ainsi que « L'Union (européenne) adhère à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales. Cette adhésion ne modifie pas les compétences de l'Union telles qu'elles sont définies dans les traités. »

* 11 L'article 24 du TUE affirme que la compétence de l'Union européenne en matière de politique étrangère et de sécurité commune couvre tous les domaines de la politique étrangère ainsi que l'ensemble des questions relatives à la sécurité de l'Union, y compris la définition progressive d'une politique de défense commune qui peut conduire à une défense commune (...). La Cour de justice de l'Union européenne n'est pas compétente en ce qui concerne ces dispositions, à l'exception de sa compétence pour contrôler le respect de l'article 40 du présent traité (selon lequel la mise en oeuvre de la PESC ne doit affecter ni les droits fondamentaux de l'Union européenne et ni ses grands principes : principes d'attribution, de subsidiarité, de proportionnalité...) et pour contrôler la légalité de certaines décisions visées à l'article 275, second alinéa, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne. »

* 12 « La Cour de justice de l'Union européenne n'est pas compétente en ce qui concerne les dispositions relatives à la politique étrangère et de sécurité commune, ni en ce qui concerne les actes adoptés sur leur base. »

* 13 Voir note de bas de page n° 1.

* 14 CJUE (Grande chambre), 10 septembre 2024, Nevez 77 solutions SRL contre Agentia Nationala de Administrare Fiscala - Directia Generala Antifrauda Fiscala, C-351/22 et CJUE (Grande chambre), 10 septembre 2024, KS et KD contre Commission européenne, affaires jointes C-29/22P et C-44/22P.

* 15 Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant des règles en vue de prévenir et de combattre les abus sexuels sur enfants - COM(2022) 209 final.

* 16 Les abus sexuels sur les enfants ont alors bondi de 64% selon la fondation Internet watch.

* 17 Selon la Commission européenne, le nombre de ces abus sexuels en ligne commis dans l'Union européenne sont ainsi passés de 23 000 en 2010 à 725 000 en 2019.

* 18 Ces démarches ont été autorisées par le règlement (UE) 2021/1232 du Parlement européen et du Conseil du 14 juillet 2021 relatif à une dérogation temporaire à certaines dispositions 2002/58/CE en ce qui concerne l'utilisation des technologies par les fournisseurs de communications interpersonnelles non fondés sur la numérotation pour le traitement de données à caractère personnel et d'autres données aux fins de la lutte contre les abus sexuels commis contre des enfants en ligne.

* 19 Avis conjoint 4/2022 du 28 juillet 2022, qui souligne que la proposition soulève de « graves préoccupations quant à la proportionnalité de l'ingérence envisagée et des limitations à la protection des droits fondamentaux, au respect de la vie privée et à la protection des données à caractère personnel. »

* 20 Selon la Commission européenne, les techniques de détection utilisant l'intelligence artificielle sont fiables à 80 % (ce qui induit un pourcentage d'erreurs élevé à 20%). Pour les experts français, ce taux de fiabilité varie plutôt entre 50 et 70 %.

* 21 La position intermédiaire du centre entre fournisseurs et autorités compétentes aurait pour conséquence de ralentir les suites des signalements transmis. Le centre serait dans les faits installé aux côtés des locaux d'Europol (à La Haye) et devrait bénéficier de ses ressources humaines et matérielles. Son organigramme complexe n'augurerait pas d'une grande efficacité opérationnelle. Et il devrait bénéficier d'un budget annuel de plus de 28 millions d'euros à échéance 2030.

* 22 Créée en 2009, la plateforme PHAROS (pour Plateforme d'Harmonisation, d'Analyse, de Recoupement et d'Orientation des Signalements) reçoit des signalements concernant les contenus illégaux sur Internet, qui peuvent émaner de tout citoyen. Elle sert de relais pour demander, après évaluation du bien-fondé de cette demande, le retrait de ces contenus aux hébergeurs de services en ligne concernés. Par défaut, PHAROS dispose d'une injonction de retrait à l'égard des contenus pédopornographiques et terroristes. Le retrait ou, à défaut, le blocage d'accès, intervient alors dans les 24 heures (article 6-1 de la loi n°2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie numérique modifié par l'article n° 2024-449 du 21 mai 2024 visant à sécuriser et à réguler l'espace numérique (SREN)). L'équipe de PHAROS est constituée de gendarmes et de policiers. Si le contenu ou comportement signalé par une internaute est illicite, le signalement est orienté vers un service d'enquête de la police nationale, de la gendarmerie nationale, des douanes ou de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. Une enquête pénale peut être ouverte, sous l'autorité d'un Procureur de la République.

* 23 Proposition de Règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant le règlement (UE) 2021/1232 dérogeant temporairement à certaines dispositions de la directive 2002/58/CE afin de lutter contre les abus sexuels sur les enfants (COM (2023) 777 final).

* 24 Selon cette position, les injonctions de détection devraient être plus limitées, ciblant des individus et des groupes liés à des abus sexuels commis, le centre européen devrait être plus visiblement dédié à la protection de l'enfance et la proposition reprendrait les mécanismes d'interdiction d'accès des mineurs aux sites pornographiques défendus par le Sénat (contrôle parental par défaut ; vérification de l'âge des utilisateurs...).

* 25 Avant sa révision, le pacte comportait les règles suivantes : plafond de 3 % du PIB pour le déficit pour les administrations publiques et de 60 % du PIB pour la dette publique. Au fil du temps néanmoins, cette réglementation avait été complexifiée, avec l'adoption des règlements dits « Six pack » de 2011, du Traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance (TSCG) de 2012 et les règlements dits « Two pack » de 2013, qui avaient introduit la règle dite du 1/20e (tout État dont la dette publique dépasse 60 % de son PIB était soumis à la procédure de déficit excessif, si l'écart entre son niveau de dette et le seuil de 60 % n'était pas réduit de 1/20e chaque année (en moyenne sur trois ans)) ainsi qu'un objectif budgétaire de moyen terme (OMT) dans le cadre du volet préventif (selon lequel, les États membres devaient poursuivre un OMT proche de l'équilibre ou excédentaire : en pratique, leur solde structurel à moyen terme ne devait pas dépasser 0,5 % du PIB, sauf si leur dette publique était inférieure à 60 % du PIB).

* 26 Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à la coordination efficace des politiques économiques et à la surveillance budgétaire multilatérale et abrogeant le règlement (CE) n° 1466/97 du Conseil (COM(2023) 240 final) ; proposition de règlement du Conseil modifiant le règlement (CE) n° 1467/97 visant à accélérer et à clarifier la mise en oeuvre de la procédure concernant les déficits excessifs (COM(2023) 241 final) ; proposition de directive du Conseil modifiant la directive 2011/85/UE du Conseil sur les exigences applicables aux cadres budgétaires des États membres (COM(2023)242 final).

* 27 Lettre de réponse du 28 février 2024 (C(2024) 1419 final).

* 28 Résolutions du Sénat n° 26 (2020-2021) du 25 novembre 2020, portant sur la nécessité de reconnaître la République du Haut-Karabagh, n° 19 (2022-2023) du 15 novembre 2022 visant à appliquer des sanctions à l'encontre de l'Azerbaïdjan et exiger son retrait immédiat du territoire arménien, à faire respecter l'accord de cessez-le-feu du 9 novembre 2020 et favoriser toute initiative visant à établir une paix durable entre les deux pays, et n° 50 (2023-2024) du 17 janvier 2024 visant à condamner l'offensive militaire de l'Azerbaïdjan au Haut-Karabagh et à prévenir toute autre tentative d'agression et de violation de l'intégrité territoriale de la République d'Arménie, appelant à des sanctions envers l'Azerbaïdjan et demandant la garantie du droit au retour des populations arméniennes au Haut-Karabagh.

* 29 Cette dernière, instituée en mars 2021, est un instrument financier européen qui peut mobiliser jusqu'à 17 milliards d'euros pour financer des opérations relevant de la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) dans le cadre financier pluriannuel actuel. Il autorise en particulier la fourniture d'équipements de défense et de sécurité à des pays tiers.

* 30 Cette position constante vaut aujourd'hui à notre pays d'être la cible de campagnes de manipulations de l'information organisées par les autorités azerbaïdjanaises, telle que celle qui a été menée sur les réseaux sociaux lors des troubles en Nouvelle-Calédonie et qui a été parfaitement documentée par le service français de lutte contre les ingérences numériques étrangères (Viginum), dans sa fiche technique, intitulée « Sur X et sur Facebook, plusieurs manoeuvres informationnelles d'origine azerbaïdjanaise ciblent la France dans le contexte des émeutes en Nouvelle-Calédonie », publiée le 17 mai 2024.

* 31 Communication publiée le 24 octobre 2023, COM(2023) 672 final. Les autres textes visés, présentés le 26 avril 2023, sont la communication « Réforme de la législation pharmaceutique et mesures de lutte contre la résistance aux antimicrobiens »(COM(2023) 190 final), la proposition de directive instituant un code de l'Union relatif aux médicaments à usage humain et abrogeant la directive 2001/83/CE et la directive 2009/35/C (COM(2023) 192 final) et la proposition de règlement établissant des procédures de l'Union pour l'autorisation et la surveillance des médicaments à usage humain et établissant des règles régissant l'Agence européenne des médicaments, modifiant le règlement (CE) nº 1394/2007 et le règlement (UE) nº 536/2014 et abrogeant le règlement (CE) nº 726/2004, le règlement (CE) nº 141/2000 et le règlement (CE) nº 1901/2006.

* 32 En particulier, les chefs d'État et de gouvernement des États membres avaient appelé l'Union européenne à agir pour garantir une disponibilité et une production adéquate de médicaments et de composants critiques lors du Conseil européen de juin 2023 et dans la déclaration de Grenade d'octobre 2023.

* 33 En pratique, la première liste a été publiée en décembre 2023. Elle comprend 16 médicaments critiques.

* 34 Lancée le 17 janvier 2024, cette alliance, qui regroupe plus de 200 membres (États membres, entreprises, société civile...), émet des recommandations sur les actions possibles de renforcement de la capacité de production de médicaments dans l'Union européenne et de diversification des chaînes d'approvisionnement.

* 35 Lettre du 12 septembre 2024, C(2024) 6493 final.

* 36 En vertu de la directive 2001/83/CE du Parlement européen et du Conseil du 6 novembre 2001 instituant un code communautaire relatif aux médicaments à usage humain.

* 37 Les députés européens ont proposé de renforcer la protection des données, de prévoir une exclusivité commerciale pour les « médicaments orphelins » et d'encourager la recherche sur de nouveaux antimicrobiens.

* 38 Les débats porteront en particulier sur la possibilité de fabriquer un médicament critique de manière « décentralisée » dans l'Union européenne (= à plusieurs endroits) afin de faciliter la distribution et l'accès aux patients.

* 39 COM(2025) 102 final.

* 40 Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil du 5 juillet 2023 concernant les végétaux obtenus au moyen de certaines nouvelles techniques génomiques (NTG) et les denrées alimentaires et aliments pour animaux qui en sont dérivés, et modifiant le règlement (UE) 2017/625, COM(2023) 411 final.

* 41 Lettre du 13 juin 2024 (C(2024) 4245 final). Le programme GeneBEcon se concentre sur l'application des NTG spécifiques, étudie les dimensions sociales, économiques et réglementaires des NTG ; le programme SHIELD4GRAPE vise à accroître la durabilité et la résilience de la viticulture en Europe, dans un contexte de menaces dues au changement climatique ; et le programme B-Trust entend promouvoir l'adoption de la biotechnologie dans les secteurs de l'agroalimentaire en Europe.

* 42 Approche consistant à modifier le matériel génétique d'un organisme avec une séquence provenant d'un donneur de la même espèce ou d'une espèce étroitement apparentée (définition de l'autorité européenne de sécurité des aliments - EFSA).

* 43 Rapport n° 700 (2019-2020) du 8 septembre 2020 de Mme Gisèle Jourda intitulé « Pollutions industrielles et minières des sols : assumer ses responsabilités, réparer les erreurs du passé et penser durablement l'avenir », au nom de la commission d'enquête sénatoriale sur les problèmes sanitaires et écologiques liés aux pollutions des sols qui ont accueilli des activités industrielles ou minières, et sur les politiques publiques et industrielles de réhabilitation des sols.

* 44 Résolution européenne n°147 (2020-2021) du 23 juillet 2021, adoptée sur le rapport des sénateurs Gisèle Jourda et Cyril Pellevat.

* 45 Cet observatoire est une structure de la Commission européenne chargée de fournir aux utilisateurs des sols, des informations sur l'état des sols et des pratiques, d'encourager la recherche et l'innovation et de sensibiliser la société à la valeur des sols.

* 46 Règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l'égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE (règlement général sur la protection des données).

* 47 Il s'agit de la loi n° 2021-1104 du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite « climat et résilience ».

* 48 Objectif de réduction par deux de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers d'ici 2030 par rapport à la consommation mesurée entre 2011 et 2020.

* 49 Loi n°2023-630 du 20 juillet 2023 visant à faciliter la mise en oeuvre des objectifs de lutte contre l'artificialisation des sols et à renforcer l'accompagnement des élus locaux.

* 50 Ce groupe est animé par les sénateurs Jean-Baptiste Blanc et Guislain Cambier.

* 51 Selon le Gouvernement, en vingt ans, la consommation foncière a augmenté quatre fois plus vite que l'évolution démographique.

* 52 Trajectoire de réduction de l'artificialisation concertée avec les élus locaux.

* 53 Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil établissant des mesures destinées à renforcer la solidarité et les capacités dans l'Union (européenne) afin de détecter les menaces et incidents de cybersécurité, de s'y préparer et d'y réagir (COM(2023) 209 final).

* 54 Directive (UE) 2022/2555 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 concernant les mesures destinées à assurer un niveau élevé commun de cybersécurité dans l'ensemble de l'Union, modifiant le règlement (UE) n°910/2014 et la directive (UE) 2018/1972, et abrogeant la directive (UE) 2016/1148 (directive SRI 2).

* 55 Ces actes doivent déterminer les types et le nombre de « services de réaction aux incidents » nécessaires pour activer la réserve de cybersécurité de l'Union européenne et les modalités d'attribution des services d'aide fournis par cette réserve.

* 56 Lettre du 5 mai 2024 (C(2024) 3165 final.

* 57 Fonctionnement du mécanisme d'urgence et actions de préparation aux menaces.

* 58 Projet de loi n° 33 relatif à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité, enregistré à la Présidence du Sénat, le 15 octobre 2024. Examiné par une commission spéciale, il a été adopté par le Sénat, le 12 mars 2025 en première lecture, et transmis à l'Assemblée nationale où il doit être examiné en juin prochain.

* 59 Selon Europol en effet, le produit de l'activité de la criminalité organisée dans l'Union européenne est estimé à 110 milliards d'euros. 70 % de ces réseaux criminels usent du blanchiment et 60 % d'entre eux, de la corruption.

* 60 Proposition COM(2023) 234 final.

* 61 Communication COM(2023) 311 final.

* 62 Proposition de directive COM(2023) 637 final.

* 63 Selon ce principe, une personne ne peut être poursuivie deux fois pour le même fait.

* 64 Cette alliance, fondée sur un partenariat entre les services de police et de douane, les acteurs privés des « métiers du port » et des agences européennes Europol et Eurojust, vise à éradiquer la corruption liée au narcotrafic dans les enceintes des grands ports européens (Rotterdam, Anvers, Hambourg, Le Havre...).

* 65 Lettre du 6 août 2024 (C(2024) 5766 final).

* 66 Neuf institutions européennes doivent y participer : Commission européenne ; Parlement européen ; Conseil de l'Union européenne (sur la base du volontariat en raison de la primauté des règles éthiques nationales pour les délégations des États membres), la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE), la Banque centrale européenne (BCE), la Cour des comptes de l'Union européenne, le Comité économique et social européen et le Comité des régions.

* 67 Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil du 12 septembre 2023 concernant la lutte contre le retard de paiement dans les transactions commerciales (COM(2023) 533 final).

* 68 Lettre en date du 21 juin 2024 (C-2024) 4369 final).

* 69 Le titre exact de la résolution est « résolution européenne sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil modifiant les règlements (UE) 2021/2115 et (UE) 2021/2116 en ce qui concerne les normes relatives aux bonnes conditions agricoles et environnementales, les programmes pour le climat, l'environnement et le bien-être animal, la modification des plans stratégiques relevant de la PAC et les exemptions des contrôles et des sanctions (COM(2024) 139 final). »

* 70 MM. Jean-François Rapin, Patrick Chauvet, Pierre Cuypers, Laurent Duplomb, Daniel Gremillet, Mme Pascale Gruny, MM. Vincent Louault, Franck Menonville, Olivier Rietmann, Mmes Sophie Primas et Nadège Havet.

* 71 Résolutions européennes du Sénat n°130 (2016-2017), n°116 (2017-2018), n°96 (2018-2019) et n° 104 (2019-2020).

* 72 Lettre de réponse du 3 septembre 2024 (C(2024) 6326 final).

* 73 Règlement (UE) 2024/1468.

* 74 Bonnes conditions agricoles et environnementales.

* 75 Parmi ces mesures figurent un nouveau règlement visant à améliorer la mise en oeuvre de la directive sur les pratiques commerciales déloyales pour les opérations transfrontières, une modification ciblée du règlement O.C.M. (pour organisation commune des marchés) et une révision des règles « de minimis » pour les aides d'État dans le secteur agricole.

* 76 L'objet de ces règles doit en conséquence résulter de « préoccupations environnementales d'ordre international » ou de « préoccupations morales » et être conçues et appliquées « de manière non discriminatoire et non dans une intention protectionniste. »

* 77 Résolution européenne n°38 (2024-2025) du 21 janvier 2025 sur l'avenir de la politique agricole commune.

* 78 CJUE, 3 février 2018, Ville de Nivelles contre Rudy Matzak, C-518/15.

* 79 Directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail.

* 80 « Mission volontariat, tous volontaires », rapport de Mme Catherine Troendlé et de MM. Fabien Matras, Olivier Richefou, Éric Faure et Pierre Brajeux à l'attention de M. Gérard Collomb, ministre d'État, ministre de l'intérieur, 16 mai 2018.

* 81 Voir en particulier l'avis politique de la commission des affaires européennes du Sénat du 15 novembre 2018, adopté sur le rapport des sénateurs Jacques Bigot et André Reichardt.

* 82 Lettre du 6 septembre 2024 (C(2024) 6436 final).

* 83 Les pistes de conciliation entre le droit français et la directive « temps de travail » ont été formulées dans le rapport de l'inspection générale de l'administration « Le financement des services d'incendie et de secours : réalisation - défis - perspectives », n°22015-R, octobre 2022.

* 84 Ce Mécanisme repose d'abord sur une réserve européenne de protection civile, constituée de personnels et d'équipements recensés à l'avance (pompiers ; secouristes en montage ; laboratoires de décontamination...), que les États membres peuvent mettre à disposition d'une opération de secours, en Europe ou dans un pays associé. Il comprend aussi, depuis 2019, des capacités européennes de protection civile complémentaires financées par l'Union européenne (flotte d'hélicoptères et d'avions bombardiers d'eau ; hôpitaux de campagne, matériels contre les risques nucléaire, radiologique, biologique et chimique (NRBC) en cours d'acquisition...).

* 85 Lettre de réponse en date du 6 septembre 2024 (C(2024) 6436 final).

* 86 Rapport « Plus en sécurité ensemble : renforcer la préparation et la résilience civiles et militaires de l'Europe » (« Safety together : Strengthening Europe's Civilian and Militarian Preparedness and Readiness »), en date du 30 octobre 2024.

* 87 Au sein de l'actuelle Commission européenne, il s'agit du commissaire Maros Sefcovic, en charge du commerce et de la sécurité économique, des relations interinstitutionnelles et de la transparence.

* 88 Rapport annuel 2023 de la Commission européenne sur l'application des principes de subsidiarité, de proportionnalité et sur les relations avec les parlements nationaux, en date du 12 novembre 2024 (COM(2024) 493 final).

* 89 Bundestag allemand ; Chambre des représentants de Belgique ; Narodno Sabranie de Bulgarie ; Riigikogu d'Estonie ; Vouli ton Ellinon grecque ; Saeima de Lettonie ; Kamra tad-Deputati de Malte ; Drzavni svet et Drzavni zbor de Slovénie.

* 90 Voir le rapport précité COM(2024) 493 final, p 21.

* 91 Avis politique du 30 mars 2023.

* 92 Règlement (UE) 2024/1689 du 13 juin 2024.

* 93 Règlement (UE) 2024/1083 du 11 avril 2024.

* 94 Règlement (UE) 2016/399 du 9 mars 2016 consolidé le 10 juillet 2024.

* 95 En 2023, les chambres les plus actives dans le dialogue politique ont été le Sénat tchèque (41 avis), l'Assembleia da Republica du Portugal (41 avis), la Poslanecka snemovna (assemblée) tchèque (36 avis), la Camera dei Deputati italienne (36 avis), le Bundesrat allemand (35 avis), la Camera Deputatilor roumaine (35 avis), le Sénat de Roumanie (29 avis), le Senato della Repubblica d'Italie (26 avis), les Cortes Generales (Parlement espagnol) (24 avis) et le Sénat français (17 avis).

* 96 Ces ambitions étaient les suivantes : « Un Pacte vert pour l'Europe » ; « Une économie adaptée à l'ère du numérique » ; « Une économie au service des personnes » ; « Une Europe plus forte sur la scène internationale » ; « Promouvoir notre mode de vie européen » et « Un nouvel élan pour la démocratie européenne ».

* 97 L'orientation politique « Promouvoir notre mode de vie européen » regroupait ainsi des initiatives relatives à la sécurité, à la santé et à l'immigration, alors que les initiatives relatives aux transports étaient artificiellement scindées entre les orientations « Un pacte vert pour l'Europe » et « Une Europe adaptée à l'ère du numérique ».

* 98 Ces conclusions ont en particulier demandé l'instauration d'un droit d'initiative normatif européen des parlements nationaux (carton vert), l'amélioration des modalités d'application du principe de subsidiarité par l'extension du délai d'examen des textes (de huit à dix semaines) et par l'abaissement du seuil de déclenchement du « carton jaune » (à un quart des voix attribuées aux parlements nationaux contre un tiers aujourd'hui sauf en ce qui concerne les textes de l'Espace de liberté, de sécurité et de justice), et l'institutionnalisation d'un droit de questionnement écrit à l'égard des institutions européennes.

* 99 La Commission européenne a répondu à l'avis politique du Sénat par une lettre du vice-président de la Commission, M. Maros Sefcovic, adressée au Président du Sénat et au président de la commission des affaires européennes, en date du 4 juin 2024.

* 100https://policy.trade.ec.europa.eu/eu-trade-relationships-country-and-region/negotiations-and-agreements_en

* 101https://commission.europa.eu/law/law-making-process/planning-and-proposing-law/better-regulation_en#have-your-say--share-your-views-and-ideas

* 102 Résolution européenne n°46 (2021-2022) du 26 novembre 2021.

* 103 Avis politique du 1er juin 2023.

* 104 Résolution européenne n°141 (2022-2023) du 19 juin 2023.

* 105 Résolution européenne n°147 (2020-2021) du 23 juillet 2021.

* 106 Avis politique du 24 mai 2023.

* 107 Avis politique du 29 mars 2023.

* 108 Avis politiques du 13 juillet 2023.

* 109 Avis politique du 30 mars 2023.

* 110 Avis politique du 5 octobre 2022.

* 111 Avis politique du 28 juin 2022.

* 112 Résolution européenne n°149 (2021-2022) du 9 août 2022.

* 113 Avis politique du 14 décembre 2022.

* 114 Avis politique du 15 février 2023.

* 115 Avis politique du 1er mars 2022.

* 116 COM(2024) 63 final.

* 117 Directive (UE) 2018/2001 du Parlement européen et du Conseil du 11 décembre 2018 relative à la promotion de l'utilisation de l'énergie produite à partir de sources renouvelables, révisée en 2023.

* 118 Règlement (UE) 2022/2577 établissant un cadre en vue d'accélérer le déploiement des énergies renouvelables, révisé par le règlement (UE) 2024/223 du Conseil du 22 décembre 2023.

* 119 Cet avis politique, dont la portée sera examinée dans le rapport d'information sur le suivi des travaux européens du Sénat pour la session parlementaire 2024-2025, a confirmé le soutien de la commission des affaires européennes du Sénat aux objectifs économiques, environnementaux et sociaux de la PCP, constaté son bilan positif pour la gestion des ressources halieutiques, tout en déplorant l'insuffisante prise en compte des enjeux de souveraineté alimentaire. Elle a souligné les nombreux défis auxquels est confrontée aujourd'hui la PCP (changement climatique ; microplastiques ; concurrence pour l'accès à l'espace maritime) et appelé, à titre principal, à valoriser les filières de pêche locales, à réduire la dépendance du secteur aux combustibles fossiles, à supprimer l'obligation de débarquement, à préserver le Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (FEAMPA) et à mieux prendre en compte les conflits d'usage dans l'espace maritime, en particulier en cas d'installation de parcs éoliens en mer.

* 120 Par des « executive orders » du Président des États-Unis des 2 et 9 avril 2025, les importations européennes ont été soumises à un droit de douane additionnel dit « réciproque », de 20 %. À titre transitoire, jusqu'au 9 juillet 2025, ce droit est de 10 %. Le 26 mars 2025, les importations d'automobiles et de pièces détachées d'automobiles européennes ont fait l'objet de droits additionnels de 25 %. Enfin, le 10 février 2025, des droits additionnels, variant de 10 à 25 %, ont été appliqués à l'acier et à l'aluminium européens.

* 121 Cet instrument prévoit la possibilité de faire usage de droits de douane, de quotas, de mesures d'exclusion des marchés publics, ou encore des mesures affectant les importations de services.

* 122 Règlement (UE) 2024/1735 du Parlement européen et du Conseil du 13 juin 2024 relatif à l'établissement d'un cadre de mesures en vue de renforcer l'écosystème européen de la fabrication de produits de technologie « zéro net » et modifiant le règlement (UE) 2018/1724.

* 123 Règlement (UE) 2024/2747 du Parlement européen et du Conseil du 9 octobre 2024 établissant un cadre de mesures relatives à une situation d'urgence dans le marché intérieur et à la résilience du marché intérieur et modifiant le règlement (CE) n° 2679/98 du Conseil (règlement sur les situations d'urgence dans le marché intérieur et la résilience du marché intérieur).

* 124 Règlement (UE) 2024/1252 du Parlement européen et du Conseil du 11 avril 2024 établissant un cadre visant à garantir un approvisionnement sûr et durable en matières premières critiques et modifiant les règlements (UE) no 168/2013, (UE) 2018/858, (UE) 2018/1724 et (UE) 2019/1020.

* 125 Rapport « Bien plus qu'un marché » (« Much more than a market - Speed, Security, Solidarity - Empowering the Single Market to deliver a sustainable future and prosperity for all EU citizens »), en date du 17 avril 2024.

* 126 Rapport sur une stratégie de compétitivité pour l'Union européenne (« A competitiveness strategy for Europe »), en date du 9 septembre 2024.

* 127 COM(2025) 30 final.

* 128 COM(2025) 85 final.

* 129 Directive (UE) 2024/2831 du Parlement européen et du Conseil du 23 octobre 2024 relative à l'amélioration des conditions de travail dans le cadre du travail via une plateforme.

* 130 La Commission européenne a proposé, le 22 décembre 2021, l'instauration de trois nouvelles ressources propres pour ce budget, à partir des recettes tirées du système d'échange de quotas d'émission de l'Union européenne (SEQE-UE), des ressources générées par le projet de mécanisme d'ajustement carbone aux frontières de l'Union européenne, ainsi que d'une fraction des bénéfices résiduels des multinationales, puis, le 20 juin 2023, la perception d'une ressource statistique temporaire fondée sur l'excédent brut d'exploitation des entreprises.

* 131 Rapport « Développer les marchés de capitaux pour financer l'avenir : propositions pour une Union de l'épargne et de l'investissement » de M. Christian Noyer, ancien gouverneur de la Banque de France, avril 2024.

* 132 Opération financière consistant à transformer des actifs peu liquides - c'est-à-dire qu'on ne peut pas vendre aisément, par exemple des crédits bancaires - en titres financiers.

* 133 Les RUP sont : la Guadeloupe, la Guyane, la Réunion, la Martinique, Mayotte et Saint-Martin (France) ; les Açores et Madère (Portugal) ; les îles Canaries (Espagne).

* 134 Les PTOM sont : pour la France, la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française, Saint-Pierre-et-Miquelon, les Terres australes et antarctiques françaises, Wallis-et-Futuna, et, Saint-Barthélemy ; pour le Danemark, le Groenland ; pour les Pays-Bas : Aruba et les Antilles néerlandaises (Bonaire, Curaçao, Saba, Saint-Eustache et Sint-Maarten, la partie néerlandaise de l'île de Saint-Martin).

* 135 Résolution européenne n°90 (2024-2025) du 24 mars 2025.

* 136 Ces critères d'adhésion à l'Union européenne ont été définis lors du Conseil européen de Copenhague de 1993 et précisés lors du Conseil européen de Madrid de 1995.

* 137 COM(2024) 146 final.

* 138 Proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil du 5 mars 2024 relatif à l'établissement du programme pour l'industrie européenne de la défense et d'un cadre de mesures visant à assurer la disponibilité et la fourniture en temps utile des produits de défense (COM(2024) 150 final).

* 139 Audition de M. Oliver Várhelyi, commissaire européen en charge de l'élargissement et de la politique de voisinage, le 9 novembre 2023 ; audition de M. François-Roger Cazala, membre de la Cour des comptes de l'Union européenne, le 16 novembre 2023 ; audition de M. Thierry Breton, commissaire européen au marché intérieur, le 18 janvier 2024 ; audition de M. Ambroise Fayolle, vice-président de la Banque européenne d'investissement (BEI), le 25 janvier 2024 ; audition de M. Nicolas Schmit, commissaire européen à l'emploi et aux droits sociaux, le 7 février 2024 ; audition de M. Charles Fries, secrétaire général adjoint du Service européen pour l'action extérieure (SEAE), le 28 février 2024 ; audition de M. Wopke Hoekstra, commissaire européen chargé de l'action pour le climat, le 7 mai 2024.

* 140 40 sénateurs ont participé à ces différents déplacements européens.

* 141 Conférence des organes spécialisés dans les affaires communautaires.

* 142 Aux termes du quatrième alinéa de l'article 5 du traité sur l'Union européenne, « les parlements nationaux veillent au respect du principe de subsidiarité » conformément à la procédure prévue dans le protocole II annexé aux traités.

* 143 Par une lettre du 11 octobre 2019 adressée à M. le Président du Sénat, M. Frans Timmermans, alors premier vice-président de la Commission Juncker, a notifié l'intention de la Commission d'exclure la période comprise entre le 20 décembre d'une année donnée et le 10 janvier de l'année suivante du délai de 8 semaines accordé pour l'examen de la conformité de projets d'actes législatifs avec le principe de subsidiarité.

* 144 Belgique, Danemark, Finlande, France (Sénat), Lettonie, Luxembourg, Malte, Pays-Bas, Pologne, Royaume-Uni, Suède et République tchèque.

* 145 Chypre, France (Sénat), Hongrie, Irlande, Malte, Pays-Bas, Royaume-Uni, Slovénie, Suède et République tchèque.

* 146 Bulgarie, Croatie, Danemark, Estonie, Hongrie, Lettonie, Lituanie, Pologne, Roumanie, Slovaquie et République tchèque.

* 147 Cette procédure a été utilisée pour la première fois à l'Assemblée nationale contre le pacte sur la migration et l'asile.

* 148 Rapport COM(2024) 493 final du 12 novembre 2024.

* 149 En 2023, ces rapporteurs ont été successivement M. Gilles Lebreton (ID/FR) et Mme Karen Melchior (Renew/DK).

* 150 Voir en particulier la résolution du Parlement européen du 17 janvier 2024 sur la mise en oeuvre des dispositions du traité relatives aux parlements nationaux.

* 151 Outre les chambres citées, il s'agit des assemblées suivantes : Poslanecka snemovna tchèque ; Orzaggyulés de Hongrie ; Vouli ton Antprosopon de Chypre ; Eerste Kamer et Tweede Kamer des Pays-Bas.

* 152 Rapport d'information n° 190 (2024-2025) de MM. Jean-François Rapin et Didier Marie, et de Mme Catherine Morin-Desailly, au nom de la commission des affaires européennes, sur la dérive normative de l'Union européenne.

* 153 Rapport d'information du Sénat sur la « dérive normative » de l'Union européenne, p 5.

* 154 Ce plan, d'un montant de 750 milliards d'euros, est venu compléter le Cadre financier pluriannuel 2021-2027 (1 074,3 milliards d'euros dans sa version initiale).

* 155 Règlement (UE, Euratom) 2020/2092 du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2020 relatif à un régime général de conditionnalité pour la protection du budget de l'Union [européenne].

* 156 « La Souveraineté », étude annuelle du Conseil d'État, 11 septembre 2024.

* 157 COM(2023) 209 final.

* 158 COM(2023) 234 final.

* 159 Proposition de règlement COM(2025) 101 final du Parlement européen et du Conseil du 11 mars 2025 établissant un système commun pour le retour des ressortissants de pays tiers installés irrégulièrement dans l'Union et abrogeant la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil, la directive du Conseil 2001/40/CE et la décision du Conseil 2004/191/CE.

* 160 COM(2022) 677 final.

* 161 Rapport précité sur la « dérive normative » de l'Union européenne, p 21.

* 162 Directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier.

* 163 « Un acte législatif peut déléguer à la Commission le pouvoir d'adopter des actes non législatifs de portée générale qui complètent ou modifient certains éléments non essentiels de l'acte législatif. »

* 164 « Les États membres prennent toutes les mesures de droit interne nécessaires pour la mise en oeuvre des actes juridiquement contraignants de l'Union. Lorsque des conditions uniformes d'exécution des actes juridiquement contraignants de l'Union sont nécessaires, ces actes confèrent des compétences d'exécution à la Commission... ».

* 165 En 2010, la Commission européenne avait adopté 4 actes délégués et 1 677 actes d'exécution. En 2023, elle en a adopté respectivement 171 et 1 916.

* 166 COM (2022) 695 final.

* 167 COM(2023) 716 final.

* 168 Rapport d'information n°592 (2020-2021) de Mme Cécile Cukierman (présidente) et de M. Philippe Bonnecarrère (rapporteur), au nom de la mission d'information du Sénat sur le thème « La judiciarisation de la vie publique : une chance pour l'État de droit ? Une mise en question de la démocratie représentative ? Quelles conséquences sur la manière de produire des normes et leur hiérarchie ? »

* 169 Résolution du Parlement européen du 22 novembre 2023 sur les projets du Parlement européen tendant à la révision des traités.

* 170 En 2019, comme ce fut le cas en 2015, le Sénat n'a adopté aucun avis motivé, en raison à la fois du contexte général de diminution du nombre d'avis motivés émis par les Parlements nationaux et de la moindre activité législative de la Commission liée au renouvellement des institutions, entre les mois de mai et décembre.

* 171 La proposition précise le contenu de l'infraction d'abus sexuels et de celle de sollicitation d'enfants à des fins sexuelles. Elle instaure aussi les nouvelles infractions de sollicitation d'abus sexuels et d'exploitation en ligne à des fins d'abus sexuels ou d'exploitation sexuelles d'enfants.

* 172 COM(2022) 105 final.

* 173 Ces dernières risquent une exclusion des financements publics et une amende d'un montant égal à au moins 1 % ou 5 % de leur chiffre d'affaires mondial total au cours de l'année précédente.

* 174 La proposition de refonte tend à harmoniser ces délais au niveau européen, en prévoyant leur déclenchement à partir de la date à laquelle la victime atteint la majorité et en les fixant à 20 ou 30 ans selon les cas.

* 175 La proposition affirme ou confirme le droit des victimes à recevoir des soins médicaux adaptés à leur âge, mais aussi un soutien « émotionnel », psychologique, psychosocial et éducatif, ainsi qu'un conseil juridique.

* 176 Dans l'Union européenne, 1,5 million de cas ont ainsi été signalés en 2022, contre un million en 2020.

* 177 Article R.4127-44 du code de la santé publique.

* 178 On peut citer : l'article 3 de la proposition, qui définissait l'infraction d'abus sexuel à partir d'un « acte de pénétration », lui-même conditionné à un « comportement intentionnel, alors qu'en France, un tel acte est constitutif d'un viol, sans qu'il soit besoin de rechercher les intentions de son auteur ; l'article 10, qui reconnaît une possibilité de consentement d'un mineur de quinze ans à un acte sexuel « entre pairs » du même âge, alors que le droit français est plus souple, posant une critère de différence d'âge de moins de cinq ans entre le majeur et le mineur ; l'article 16, relatif aux délais de prescription, ne reprend pas la « prescription flottante » du droit pénal français en cas de nouvelle infraction, alors que celle-ci rallonge d'autant les délais au bénéfice des victimes (article 8, alinéa 4, du code de procédure pénale).

* 179 Lettre du 6 septembre 2024 (C(2024) 6323 final).

* 180 Communication conjointe de la Commission européenne et du Haut-représentant pour la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions, « Une nouvelle stratégie pour l'industrie européenne de la défense pour préparer l'Union à toute éventualité en la dotant d'une industrie européenne de la défense réactive et résiliente », 5 mars 2024, JOIN(2024) 10 final.

* 181 Communication conjointe de la Commission européenne et du Haut-représentant pour la politique étrangère et de sécurité commune (PESC) au Parlement européen, au Conseil, au Comité économique et social européen et au Comité des régions sur l'analyse des déficits d'investissement dans le domaine de la défense et sur la voie à suivre, 18 mai 2022, JOIN(2022) 24 final.

* 182 Règlement (UE) 2023/1525 du Parlement européen et du Conseil du 20 juillet 2023 relatif au soutien de la production de munitions (ASAP).

* 183 Règlement (UE) 2023/2418 du Parlement européen et du Conseil du 18 octobre 2023 relatif à la mise en place d'un instrument visant à renforcer l'industrie européenne de la défense au moyen d'acquisitions conjointes (EDIRPA).

* 184 L'article 4, paragraphe 2, du TUE affirme que « la sécurité nationale reste de la seule responsabilité des États membres ».

* 185 L'article 5 du TUE rappelle qu'en vertu du principe d'attribution des compétences, « l'Union (européenne) n'agit que dans les limites des compétences que les États membres lui ont attribuées dans les traités pour atteindre les objectifs que ces traités établissent. Toute compétence non attribuée à l'Union dans les traités appartient aux États membres. » Cet article affirme aussi la nécessité, pour l'Union européenne, de respecter les principes de subsidiarité et de proportionnalité dans son action.

* 186 L'article 42 du TUE rappelle que la politique de sécurité et de défense commune (PSDC) fait partie intégrante de la PESC. Cette politique « n'affecte pas le caractère spécifique de la politique de sécurité et de défense de certains États membres ».

* 187 L'article 45 du TUE définit les missions de l'Agence européenne de défense.

* 188 L'article 173 du TFUE est relatif à la politique industrielle de l'Union européenne. Cette dernière doit en particulier accélérer l'adaptation de l'industrie aux changements structurels, encourager un environnement favorable au développement des entreprises européennes, en particulier des PME, et à leur coopération, et favoriser une meilleure exploitation du potentiel industriel des politiques d'innovation, de recherche et de développement technologique.

* 189 L'article 322 du TUE permet au Conseil et au Parlement européen, après consultation de la Cour des comptes de l'Union européenne, d'adopter, par voie de règlements, les règles financières européennes et les règles de contrôle de la responsabilité des acteurs financiers.

* 190 L'article 212 du TFUE est relatif aux modalités de coopération économique, financière et technique avec les pays tiers.

* 191 L'article 49 du TUE décrit les conditions dans lesquelles un pays tiers peut demander son adhésion à l'Union européenne (respect des principes et valeurs de l'Union européenne ; information du Parlement européen et des parlements nationaux des États membres ; demande écrite adressée au Conseil, qui se prononce à l'unanimité après avoir consulté la Commission européenne et après approbation du Parlement européen, qui se prononce à la majorité des membres qui le composent...).

* 192 Lettre du 11 octobre 2024 (C(2024) 7179 final).

* 193 Ce dernier dispose que « la politique étrangère et de sécurité commune est soumise à des règles et procédures spécifiques » et que » l'adoption d'actes législatifs est exclue » au titre du chapitre sur la PSDC.

* 194 Résolution européenne du Sénat n°33 en date du 30 décembre 2024, sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil relatif à l'établissement du programme pour l'industrie européenne de la défense et d'un cadre de mesures visant à assurer la disponibilité et la fourniture en temps utile des produits de défense - COM(2024) 150 final.

* 195 Dans sa position adoptée le 24 avril dernier, le Parlement européen vise un montant de 70 %. Les députés européens souhaitent en outre réserver les financements du programme EDIP aux projets européens de défense d'intérêt commun associant au moins six États membres ou au moins quatre États membres exposés à un risque élevé de menace militaire conventionnelle.

* 196 Il s'agit du commissaire lituanien, M. Andrius Kubilius, également en charge de l'espace.

* 197 Ce plan d'action autoriserait les États membres à mobiliser plus de financements publics en faveur de la défense au niveau national par l'activation de la clause dérogatoire nationale du pacte de stabilité et de croissance, permettrait également d'accorder 150 milliards d'euros de prêts aux États membres pour des investissements dans le secteur de la défense et réorienterait certains fonds de la politique de cohésion vers des dépenses en matière de défense. Une proposition de règlement du Conseil établissant l'instrument « Agir pour la sécurité de l'Europe par le renforcement de l'industrie européenne de la défense » (« instrument SAFE ») (COM (2025) 122 final) a été présentée le 19 mars 2025 pour mettre en oeuvre l'assistance financière européenne précitée de 150 milliards d'euros.

* 198 PPRE : proposition de résolution européenne adoptée conformément aux dispositions de l'article 88-4 de la Constitution.

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